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Décisions

CA Rouen, 14 septembre 2017, n° 16-06385

ROUEN

Arrêt

PARTIES

Défendeur :

Mécanique Treportaise (SARL), GAN Assurances (SA), KJ Services Limited

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Farina

Conseillers :

Mmes Bertoux, Mantion

T. com. Dieppe, du 02 déc. 2016

2 décembre 2016

Exposé Du Litige

M T. est armateur du chalutier " Mes Gamins " appartenant aux époux T.

Ce navire était équipé d'un moteur de propulsion de marque Caterpillar Type Dita - modèle 3408.

A la suite d'une avarie survenue en novembre 2010 M T. a commandé à la société Mécanique Tréportaise la fourniture et l'installation d'un moteur d'occasion.

La société Mécanique Tréportaise a commandé ce moteur à M C.

Pour répondre à cette commande M C. a acheté un moteur à la société anglaise KJ Services.

La société Mécanique Tréportaise a achevé les travaux de remplacement le 21 octobre 2011 ; M T. a ensuite repris l'exploitation de son chalutier.

Une avarie du bateau est survenue le 3 mai 2012.

Une expertise judiciaire était ordonnée en référé le 17 août 2012.

Dans son rapport déposé le 10 octobre 2014 l'expert judiciaire retient essentiellement que les dysfonctionnements observés résultent d'une inadaptation du moteur : alors que le chalutier concerné était équipé d'un moteur adapté à des activités de pêche, le moteur de remplacement qui a été installé est prévu pour des bateaux de plaisance.

Le 20 septembre 2012 M et Mme T. ont assigné la société Mécanique Tréportaise devant le tribunal de commerce de Dieppe en invoquant à titre principal un manquement à l'obligation de délivrance, subsidiairement l'existence de vices cachés, et en tout état de cause une exécution défectueuse des prestations confiées.

La société Mécanique Tréportaise a appelé en cause M C.

M C. a appelé en cause la société KJ Services.

Par jugement du 2 décembre 2016, assorti du bénéfice de l'exécution provisoire, le Tribunal de Commerce de Dieppe a :

- condamné la société Mécanique Tréportaise et son assureur, la société Gan Assurances :

- à payer à M et Mme T. :

- la somme de 91 951,96 euros avec intérêts au taux légal à compter du 20 septembre 2012, date de l'assignation, et capitalisation des intérêts,

- une indemnité de 8 000 euro au titre des frais irrépétibles

- aux dépens qui comprennent notamment les frais d'expertise et les frais du constat d'huissier en date du 11 juillet 2012,

- débouté les parties de leurs autres demandes et en particulier de la demande de M et Mme T. en indemnisation de préjudice immatériel et de préjudice moral.

M et Mme T. ont interjeté appel de ce jugement.

Par conclusions du 18 janvier 2017, ils demandent à la cour de :

- les déclarer recevables et bien fondés en leur appel,

- en conséquence,

- confirmé la décision entreprise, en ce qu'elle a :

- condamné solidairement la société Mécanique Tréportaise et la société Gan Assurances à leur payer la somme de 91 951,96 euros avec intérêts au taux légal à compter du 20 septembre 2012, date de l'assignation,

- ordonné la capitalisation des intérêts,

- ordonné l'exécution provisoire,

- condamner solidairement la société Mécanique Tréportaise et la société GAN Assurances, à payer aux époux T. la somme de 8 000,00 pour frais hors dépens de première instance,

- l'infirmer pour le surplus et y ajouter :

- statuant à nouveau :

- à titre principal :

- dire que la SARL Mécanique Tréportaise a manqué à son obligation de délivrance conforme,

- donner acte à M et Mme T. de ce qu'ils se réservent le droit d'opter pour la résolution du contrat avec demande de condamnation en restitution du prix de vente et d'installation du moteur litigieux (soit 59 783 euro HT sauf à parfaire) et la réparation, en tout état de cause, de l'ensemble de leurs préjudices matériels (coût de réfection des désordres) et immatériels,

- à titre subsidiaire,

- constater la présence d'un vice caché rendant le moteur vendu et installé par la société Mécanique Tréportaise impropre à l'usage auquel on le destine,

- condamner la société Mécanique Tréportaise à garantir M et Mme T. de ce vice caché et de ses conséquences.

- donner acte à M et Mme T. de ce qu'ils se réservent le droit d'opter soit pour l'action rédhibitoire, soit estimatoire, et de solliciter ainsi la résolution du contrat avec demande de restitution du prix de vente et d'installation du moteur litigieux (soit 59 783 euro HT sauf à parfaire) et la réparation, en tout état de cause, de l'ensemble des préjudices matériels ;

- en tout état de cause,

- constater que la responsabilité contractuelle de la société Mécanique Tréportaise qui a manqué à son obligation de résultat, est engagée au titre de l'article 1147 du Code civil,

- en conséquence,

- dire que la société Mécanique Tréportaise est entièrement responsable et la condamner à réparer l'ensemble des préjudices en résultant.

- en tout état de cause

- condamner la société Mécanique Tréportaise à restituer, le cas échéant, à M et Mme T. le prix du moteur litigieux et son installation (59 783 euro HT sauf à parfaire) (en cas de résolution du contrat).

- condamner, en tout état de cause, la société Mécanique Tréportaise, solidairement avec la société Gan, et M C. à payer à M et Mme T. la somme de 91 951,96 euro à titre de dommages et intérêts correspondant à la réparation de l'ensemble des préjudices matériels correspondant, le cas échéant, au coût de dépose du moteur actuel et de remplacement de ce dernier (et ses accessoires) et/ou au coût de réfection de l'ensemble des désordres telle que retenue par l'expert.

- condamner, en outre, la société Mécanique Tréportaise solidairement avec la société GAN, et M C. à payer à M et Mme T. la somme de 18 000 euro (sauf mémoire) à titre de dommages et intérêts correspondant au coût des travaux de remise en état du navire, rendu nécessaire du fait de l'immobilisation fautive du navire.

- condamner la société Mécanique Tréportaise solidairement avec la société Gan, et M C. à payer à M et Mme T. 698 768,00 euro (suivant décompte arrêté au 31 décembre 2016) à titre de provision à valoir sur la réparation de ses préjudices immatériels (pertes d'exploitation) subis du fait de l'immobilisation du navire (sauf mémoire et à parfaire), depuis le 3 mai 2012 au 31 décembre 2016, outre 12 478 euro HT par mois supplémentaires et ce jusqu'à l'indemnisation effective de l'armateur lui permettant de faire installer un nouveau moteur et/ou jusqu'à la pose d'un moteur en état de marche.

- condamner la société Mécanique Tréportaise solidairement avec la société Gan Assurances, M C. à payer à M et Mme T. 7 500 euros chacun au titre de leur préjudice moral.

- en tout état de cause,

- condamner la société Gan Assurances, solidairement avec la société Mécanique Tréportaise à indemniser les conséquences du sinistre litigieux et à payer à M et Mme T. l'ensemble des sommes précitées qui leur seront allouées au titre des préjudices matériels, immatériels (pertes d'exploitation) et moral et ce, sur le fondement de la garantie contractuelle au titre de la police d'assurance conclue avec la société Mécanique Tréportaise et à titre subsidiaire, sur la responsabilité quasi délictuelle sur le fondement des dispositions de l'article 1147 du Code civil et à titre plus subsidiaire, sur le fondement de la responsabilité délictuelle prévue par l'article 1382 du Code civil.

- débouter la société Mécanique Tréportaise, la société Gan Assurances et M C. de leur argumentation dirigée à l'égard de M Noël T.,

- assortir l'ensemble des condamnations prononcées à l'égard des défendeurs d'un intérêt au taux légal à compter du 20 septembre 2012, date de l'assignation.

- ordonner la capitalisation des intérêts, en application de l'article 1154 du Code civil,

- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir,

- condamner la société Mécanique Tréportaise solidairement avec la société Gan Assurance, M C. à payer à M T. Noël la somme de 10 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- condamner la société Mécanique Tréportaise solidairement avec la société

Gan Assurances et M C. aux dépens qui comprendront notamment les frais d'expertise, ainsi que les frais de constat d'huissier en date du 11 juillet 2012.

Par conclusions du 1er mars 2017 la société Gan Assurances demande à la cour de :

- au visa des articles 1134 et suivants du Code civil,

- déclarer la société Gan Assurances recevable et bien fondée en son appel incident,

- et par conséquent statuant à nouveau :

- à titre principal :

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné la société Gan Assurances à garantir la société Mécanique Tréportaise des condamnations prononcées,

- dire que la société Gan Assurances est hors de cause,

- débouter la société Mécanique Tréportaise de sa demande en garantie à l'égard de la société Gan Assurances,

- à titre subsidiaire si la cour venait à considérer que la garantie de la société Gan Assurances est due :

- condamner M C. à garantir la société Gan Assurances de toute condamnation susceptible d'être prononcée dans le cadre de la présente instance,

- dire que le préjudice matériel de M et Mme T. s'élève à la somme de 50 550 euros,

- débouter M et Mme T. de leurs demandes formées en cause d'appel,

- en tout état de cause,

- condamner in solidum la société Mécanique Tréportaise et M C. aux dépens et au paiement d'une indemnité de procédure de 3000 euros.

Par conclusions du 17 février 2017 la société Mécanique Tréportaise demande à la cour de :

- au visa des articles 1134, 1147, et 1647 du Code civil, 11, 66, 142, 138 et 139, 325 et suivants, 331, 699 et 700 et suivants du code de procédure civile,

- L. 511 - 1, L. 112 - 2, R. 112 - 3, A. 112 du Code des assurances,

- L. 513 - 4 à L. 513 - 6 du Code des transports,

- à titre principal,

- déclarer les appelants recevables mais mal fondés en leur appel principal,

- les débouter de leurs demandes formées en cause d'appel,

- déclarer la société Gan Assurances recevable et partiellement fondée en son appel incident,

- dire n'y avoir lieu à la mise hors de cause de la société Gan Assurances,

- déclarer la société Mécanique Tréportaise recevable et bien fondée en son appel incident,

- en conséquence confirmer le jugement déféré en ce qu'il a :

- admis le principe de sa responsabilité,

- condamné la société Gan Assurances à la garantir des condamnations prononcées ;

- statuer ce que de droit sur l'obligation à garantie et le défaut d'adaptation du moteur,

- fixer le préjudice matériel de l'armement T. à la somme de 50 550 euros,

- déclarer la société Mécanique Tréportaise recevable et bien fondée en son appel incident à l'encontre de M C.,

- y faisant droit,

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de son recours contre M C.

- dire que par sa faute M C. a concouru au préjudice des appelants

- dire en conséquence que M C. et la société Gan Assurances devront garantie entière de toute condamnation susceptible d'être prononcée à l'encontre de la société Mécanique Tréportaise au profit de M et Mme T.,

- rejeter toute prétention plus ample ou contraire,

- subsidiairement,

- ramener les prétentions des demandeurs à de plus justes proportions, notamment en ce qui concerne les préjudices immatériels,

- en tout état de cause,

- condamner toute partie succombant, éventuellement in solidum, aux dépens de première instance et d'appel en ce compris les frais d'expertise, et au paiement d'une indemnité de procédure de 5000 euros.

Par conclusions du 6 mars 2017 M C. demande à la cour de :

- au visa des articles 1604 et 1641 et suivants du Code civil,

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions non contraires aux intérêts de M C.,

- dire mal fondée la demande formée à l'encontre de M C.,

- débouter les parties de leurs demandes,

- faire droit à l'appel en garantie de M C. à l'encontre de la société Mécanique Tréportaise et de son assureur la société Gan Assurances,

- à titre subsidiaire, limiter le montant des condamnations à celles déjà prononcées par le tribunal et dire que la responsabilité de M C. ne saurait être supérieure à 10 % du montant des condamnations, le surplus devant incomber à la seule société Mécanique Tréportaise et à son assureur,

- condamner tous succombants aux dépens et au paiement d'une indemnité de procédure de 5000 euros.

A l'audience du 09 mars 2017 la cour, statuant sur l'incident par lequel M C. se plaignant de ne pas avoir disposé d'un délai suffisant pour mettre en cause la société KJ services et l'assureur de celle-ci, a retenu que l'assignation avait été régulièrement délivrée et a considéré que, pour une bonne administration de la justice, il fallait permettre à M C. de procéder aux mises en cause envisagées ; elle a renvoyé l'affaire à cette fin et rejeté la demande en paiement de dommages et intérêts formée dans le cadre de cet incident par M et Mme T..

Par acte du 25 avril 2017 M C. a fait assigner la société KJ Services et demande à la cour de :

- joindre l'instance engagée par cette assignation avec la procédure principale

- le déclarer recevable et bien fondé à assigner en intervention la société KG Services,

- déclarer opposables à la société KG Services les procédures pendantes devant la cour d'appel de Rouen sur l'action de M et Mme T. et l'appel en garantie de la Société Mécanique Tréportaise,

- condamner la société KJ Services à le garantir et à le relever indemne de toutes condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre,

- statuer ce que de droit en ce qui concerne les dépens.

Par courrier du 5 mai 2017, le conseil de M.C. a adressé à la cour l'assignation signifiée à la société KJ Services, le suivi DHL de l'assignation, ainsi que l'accusé de réception qui lui est revenu des juridictions britaniques, et lui a indiqué que ses contradicteurs le lisaient actuellement en copie.

La société KJ Services n'a pas constitué avocat.

L'affaire a été plaidée à l'audience du 8 juin 2017.

SUR CE

I) SUR LA RESPONSABILITÉ CONTRACTUELLE DE LA SOCIÉTÉ MÉCANIQUE TRÉPORTAISE ENVERS M ET MME T.

Attendu que M et Mme T. soutiennent à titre principal qu'en qualité de vendeur, la société Mécanique Tréportaise a manqué à son obligation de délivrance ;

Qu'à l'appui de leurs prétentions ils font valoir essentiellement que :

- la société Mécanique Tréportaise devait les informer et les conseiller quant à l'acquisition d'un matériel adapté à leurs besoins,

- le rapport d'expertise judiciaire établit que le moteur installé :

- de type DITTA et non DITA (comme le moteur remplacé) est équipé de deux turbo-soufflantes alors que le précédent n'avait qu'une turbine,

- présente un déficit de puissance de 100 chevaux environ,

- et que, prévu pour un bateau de plaisance et non pour des activités de pêche, il ne répond pas aux attentes de l'armateur,

- la société Mécanique Tréportaise a livré un moteur non conforme aux spécifications prévues entre les parties ; en sa qualité de vendeur elle engage sa responsabilité envers eux sur le fondement notamment de l'article 1141 du Code civil,

- l'acceptation du moteur ' en l'état' n'écarte pas la mise en œuvre de l'article 1604 du Code civil, puisque la non-conformité n'était pas apparente au moment de la livraison,

- en sa qualité de professionnelle la société Mécanique Tréportaise ne pouvait ignorer le déficit de puissance du moteur livré ;

Attendu sur la garantie des vices cachés que M et Mme T. soutiennent que le moteur fourni et installé par la société Mécanique Tréportaise est affecté des vices cachés consistant en :

- des défauts techniques affectant la pompe à combustible du moteur,

- une impossibilité d'utiliser le moteur à l'usage auquel il est destiné,

Que sur l'action en responsabilité engagée sur le fondement des articles 1134 et 1147 du Code civil ils font valoir essentiellement que :

- en sa qualité de réparateur, la société Mécanique Tréportaise, qui a installé le moteur et réalisé des adaptations et modifications, est tenue, en application de l'article 1147 du Code civil d'une obligation de résultat,

- en l'absence de preuve d'une cause étrangère, les désordres constatés engagent de plein droit la responsabilité de la société Mécanique Tréportaise,

- à cet égard l'absence de faute du réparateur ne constitue pas un motif d'exonération,

- de même le défaut d'entretien (utilisation d'une huile moteur inadaptée) allégué en première instance n'est pas démontré,

Attendu qu'en réponse la société Mécanique Tréportaise fait valoir essentiellement que :

- chargée de remplacer à l'identique le moteur suivant la plaque de celui-ci (modèle DITA 3408 avec : 1800 tours et 450 chevaux) elle a exécuté cette prestation et l'expert judiciaire note que l'installation a été correctement réalisée;

- si elle ne méconnaît pas son obligation de délivrance conforme, il reste que, du fait de M C. elle s'est trouvée dans l'impossibilité de prévenir le risque d'une motorisation inadaptée,

- en application de l'article 1134 du Code civil M. C. était tenu d'une obligation de loyauté, et de bonne foi envers la société Mécanique Tréportaise,

- il devait fournir un moteur identique à celui qui devait être remplacé à savoir suivant la plaque signalétique de celui-ci soit :

- un moteur DITA modèle 3408 avec selon les spécifications du fabricant : une puissance de 450 chevaux, et 1800 tours ;

- M C. s'est procuré auprès de la société KJ services un moteur DITTA modèle 3408,

- professionnel du secteur, et informé des besoins de motorisation, M C. a été le seul interlocuteur de la société KJ services, fournisseur auquel il s'est adressé,

- la société KJ services a livré directement le moteur à la société Mécanique Tréportaise,

- or il a commandé à la société KJ services un moteur modèle 3408 C sans précision concernant le type DITA ou DITTA,

- en recevant le moteur la société Mécanique Tréportaise a constaté que celui-ci n'était pas un moteur DITA (simple turbo) mais un moteur DITTA (double turbo) ;

- elle a interrogé M C. qui lui a alors indiqué :

- que la puissance au banc d'essai était bien de 476 chevaux,

- qu'il suffisait de procéder à des adaptations, les injecteurs et la régulation électronique ayant été remplacés par une régulation mécanique équivalente à celle d'un moteur DITA,

- ce n'est qu'après qu'elle ait remplacé le moteur que M. C. lui a communiqué le procès-verbal d'essais du 26 septembre 2011 par lequel la société KG services demandait de transformer le bi- turbo en mono-turbo ;

- par ailleurs M C. a établi un rapport en date du 14 octobre 2011 par lequel il attestait de la révision du moteur,

- selon les éléments de ce rapport le moteur était censé être conforme à la commande et aux essais sur banc ;

- or :

- ce rapport mentionne à tort que le moteur a été entièrement révisé,

- M C. n'a pas transmis à la société Mécanique Tréportaise le procès-verbal d'essais du 26 septembre 2011,

- il n'a pas informé la société Mécanique Tréportaise de la nécessité de transformer le bi-turbo en mono turbo,

Attendu cela exposé que M et Mme T. fondent leurs demandes :

- à titre principal : sur le manquement à l'obligation de délivrance incombant au vendeur,

- subsidiairement : sur la garantie des vices cachés dus par le vendeur,

- et en tout état de cause : sur la responsabilité contractuelle du réparateur au sens de l'article 1147 du Code civil ;

Attendu en l'espèce qu'il y a lieu de rechercher si le contrat conclu entre la société Mécanique Tréportaise et M. et Mme T. est un contrat de vente ou un contrat d'entreprise; qu'aux termes de l'article 1787 du Code civil " lorsqu'on charge quelqu'un de faire un ouvrage on peut convenir qu'il fournira seulement son travail ou son industrie, ou bien qu'il fournira aussi la matière " ;

Attendu que M et Mme T. ont commandé à la société Mécanique Tréportaise des travaux de réparation consistant à remplacer à l'identique, le moteur de leur bateau de pêche par un moteur d'occasion ;

Qu'il est constant et il résulte des énonciations du rapport d'expertise amiable de M. S., non contestées sur ce point, que conformément au devis, la facture de remplacement du moteur établie le 20 septembre 2011 par la société Mécanique Tréportaise s'éléve à la somme de 48 250 euro hors-taxes ainsi composée :

- moteur et transport : 40 000 euro hors-taxes,

- main-d'œuvre : 8250 euro hors-taxes ;

Qu'il en ressort que d'un point de vue financier, la prestation relative à la fourniture du moteur est proportionnellement plus importante que l'installation de celui-ci, en sorte que le contrat s'analyse en une vente de moteur et non en un contrat d'entreprise ;

Attendu sur le manquement du vendeur à l'obligation de délivrance invoqué par M et Mme T., qu'aux termes de l'article 1604 du Code civil " La délivrance est le transport de la chose vendue en la puissance et possession de l'acheteur ";

Que la chose livrée doit être conforme à la commande, et en particulier aux caractéristiques convenues entre les parties ;

Que le vendeur étant tenu de délivrer un bien conforme aux prévisions contractuelles, la non-conformité à la commande caractérise en elle-même le manquement à l'obligation de délivrance (civ 3ème 10 octobre 2012) ;

Que la preuve de la non-conformité à la commande de la chose vendue incombe à l'acquéreur ;

Attendu en l'espèce que la société Mécanique Tréportaise est intervenue pour remplacer à l'identique par un moteur d'occasion, le moteur du chalutier de M et Mme T. ; que le moteur à fournir et à installer devait ainsi avoir les mêmes caractéristiques que le moteur remplacé ;

Que selon les conclusions de l'expert judiciaire :

- le moteur que la société Mécanique Tréportaise devait remplacer sur le chalutier était un modèle 3408 C DITA ' 1800 RPM (tours minute) et 243 kW (330 cv) ;

- installés sur les bateaux de pêche les moteurs de ce modèle développent 420 cv au plus mais en continu et un régime moteur de 1800 tours minute ; ils ne sont équipés que d'une seule turbo soufflante,

- le moteur fourni et installé par la société Mécanique Tréportaise n'est pas un modèle DITA mais un modèle DITTA,

- celui-ci est prévu pour équiper des navires de plaisance et non des bateaux de pêche ; il ne nécessite pas une puissance maximale continue et développe : 700 cv à 2 400 tours minute, avec deux turbo soufflantes,

- avant livraison la société KJ services a adapté le moteur DITTA en réduisant la vitesse de rotation pour la ramener à : 1 800 tours minute en charge,

- mais les deux turbo soufflantes sont restées en place,

- après ce remplacement le navire a repris son exploitation en pratiquant la pêche à la coquille saint-jacques dans une configuration où le moteur était assez peu sollicité,

- en fin de saison de pêche à la coquille saint-jacques, au printemps 2012, le bateau a été armé pour la pêche au chalut qui sollicite davantage le moteur ;

- M T. a alors constaté que le moteur fumait beaucoup et ne donnait pas toute sa puissance,

- ce moteur est affecté d'un déficit de puissance disponible d'environ 100 cv par rapport au moteur DITA qui équipait précédemment le chalutier ;

- en définitive, le moteur ne présente pas un fonctionnement normal que ce soit pour la pêche au chalut ou pour la pêche à la coquille saint-jacques ; en effet le navire ne pouvait naviguer durablement avec une forte déficience de pression d'air de suralimentation, ce qui veut dire encrassement rapide ; 'l'utilisation de ce moteur serait irresponsable' ;

- 'le moteur Caterpillar 3408 C DITTA installé à bord du chalutier " mes gamins " n'est pas semblable au moteur précédent' ;

- les désordres et dysfonctionnements observés sur le moteur de propulsion résultent ainsi d'une inadaptation de celui-ci à l'utilisation qui en est faite sur ce navire ;

- le défaut de pression d'air aurait pu être décelé par la société Mécanique Tréportaise lors des essais effectués après installation du moteur, et cette entreprise aurait dû s'interroger lorsqu'à l'arrivée du moteur dans ses ateliers, elle a constaté que celui-ci était équipé de 2 turbosoufflantes au lieu d'une seule,

Attendu qu'il résulte ainsi de ces conclusions claires, précises et solidement motivées, qu'alors que la commande portait sur un moteur identique au moteur initial, l'une des caractéristiques du moteur livré, à savoir la puissance du moteur n'est pas conforme à la commande ; qu'en outre et plus généralement alors que selon les normes du constructeur, le moteur initial était prévu pour équiper un bateau de pêche, le moteur livré est conçu pour équiper un bateau de plaisance ; que si des travaux d'adaptation auraient pu permettre d'utiliser sur un bateau de pêche le moteur livré, ces travaux n'ont pas été pleinement réalisés ;

Que l'existence d'un défaut de conformité entre le moteur commandé et le moteur livré et installé est ainsi établie ;

Attendu que dans ses rapports avec M et Mme T., la société Mécanique Tréportaise, vendeur professionnel, ne peut s'exonérer de sa responsabilité contractuelle en invoquant des manquements contractuels de son fournisseur;

Attendu que l'expert judiciaire note en effet que la société Mécanique Tréportaise aurait pu déceler le défaut de pression d'air et qu'elle " aurait dû s'interroger lorsqu'elle " a constaté que le moteur qui lui était livré était équipé de deux turbosoufflantes ;

Que l'action en responsabilité pour manquement à l'obligation de délivrance engagée par M et Mme T. contre la société Mécanique Tréportaise est donc fondée dans son principe ;

II) SUR LES RECOURS DE :

- la société Mécanique Tréportaise contre M C.

- de celui-ci contre la société Mécanique Tréportaise

- et sur l'action de M. et Mme t. contre M. C.

a) Sur les données techniques et de fait concernant la commande du moteur par la société Mécanique Tréportaise à M C., ainsi que sur les circonstances de l'adaptation de la puissance du moteur

Attendu sur les caractéristiques du moteur commandé par la société Mécanique Tréportaise qu'il résulte des pièces produites et en particulier du rapport d'expertise et des courriels échangés avant la livraison du moteur que :

- la société Mécanique Tréportaise a commandé à M C. un moteur de marque Carterpillar 3408 C d'occasion correspondant aux caractéristiques figurant sur la plaque signalétique de l'ancien équipement,

- selon courriel du 22 juillet 2011 M. C. demandait à la société KJ services de lui fournir un " 3408 C " " 1800 RPM 243 kW " ;

- cette dernière indication correspond à 330 cv ;

- par courriel du 1er août 2011 la société KJ Services a proposé un moteur CAT 3408 C mais d'une puissance de 700 cv,

- cette puissance étant supérieure à celle du moteur à remplacer, elle se proposait de la ramener à 400 cv ;

-par courriel du même jour M C. a écrit à la société Mécanique Tréportaise qu'il pouvait fournir un moteur CAT 3408 C " testé sur banc d'essai aux environs de 400 cv " ;

- la société KJ Services a établi le 26 septembre 2011 un rapport de passage du moteur au banc d'essai ;

- dans ce rapport elle précise qu'il s'agit d'un moteur CAT 3408 DITTA et que le moteur doit être transformé " pour passer de double turbo à simple turbo " ;

Attendu que sur ces points l'expert judiciaire apporte les appréciations et avis suivants :

- dans sa proposition du 1er août 2011, adressée à la société Mécanique Tréportaise, le vendeur, M C. indique qu'il s'agit d'un moteur Caterpillar, modèle 3408 C, sans préciser qu'il s'agit d'un modèle 3408 C DITTA, et annonce un banc d'essai pour une puissance d'environ 400cv, sans précision quant au régime du moteur pendant les essais ;

- dans son rapport de révision il indique que la puissance du moteur est de 330 cv (246 KW)

- le rapport d'essais sur banc mentionne pourtant une puissance de 145 KW à 50% de charge et une puissance de 476 KW (650 cv) à 100 % de charge ;

- ce rapport de révision ne correspond donc pas à la réalité des caractéristiques de fonctionnement de ce moteur,

- le moteur livré ne pouvait être installé par la société Mécanique Tréportaise sans adaptation dès lors que :

- le rapport du 26 septembre 2011mentionne la nécessité de remplacer le bi-turbo par un simple turbo,

- et qu'il résulte de ce document que le passage au banc n'a pas été effectué en testant plusieurs régimes de vitesse mais uniquement " à moteur tournant à vitesse constante " (voisine de 2000 t/m avec une puissance maximale de 475 cv) ;

- en définitive le moteur n'a pas été adapté aux caractéristiques figurant sur la plaque signalétique de l'ancien moteur ;

- si la société Mécanique Tréportaise avait demandé le rapport d'essais elle aurait pu aisément constater que ce moteur n'avait été testé qu'à régime constant, ce qui ne correspond pas à l'utilisation faite à bord du chalutier,

- la société Mécanique Tréportaise ne pouvait avoir connaissance de ces paramètres de fonctionnement sans avoir en main le rapport de passage au banc du moteur,

- elle ne pouvait sur ces points, que se fier aux informations données par M C.,

- il n'y avait pas de raison qu'elle procéde à des démontages ou à des essais sur banc pour vérifier si la révision / rénovation avait bien été effectuée,

- elle pouvait cependant déceler le déficit d'alimentation en air et elle aurait dû s'interroger en constatant qu'il s'agissait d'un moteur équipé de deux turbo-soufflantes ;

b) Sur l'action en garantie formée par la société Mécanique Tréportaise contre M C. et sur l'action en garantie formée par celui-ci contre la société Mécanique Tréportaise

Attendu que M. C. fait valoir que :

- la société Mécanique Tréportaise pourtant professionnelle de la réparation de navires et seule chargée de l'adaptation du moteur, a choisi d'adapter la tubulure pour installer un bi-turbo,

- elle n'a jamais sollicité le procès-verbal d'essais du 26 septembre 2011,

- il en résulte qu'ayant accepté le moteur en l'état elle ne peut invoquer :

- ni un manquement à l'obligation de livraison conforme,

- ni un vice caché à la livraison,

- il n'est tenu d'aucune obligation de conseil à l'égard de la société Mécanique Tréportaise, elle-même professionnelle dans le domaine considéré ;

- subsidiairement,

- le montant des condamnations doit être limité à celui qu'a retenu le tribunal et la responsabilité de M C. ne saurait être supérieure à 10 % du montant des condamnations ;

Attendu que la société Mécanique Tréportaise soutient que M. C. a engagé sa responsabilité en qualité de vendeur tant sur le fondement de l'article 1147 du Code civil en ne transmettant pas le procès-verbal d'essais du 26 septembre 2011, que sur celui de l'article 1604 du même code relatif à l'obligation de délivrance, en ce compris le procès-verbal d'essais du 26 septembre 2011 mentionnant l'obligation de transformer le bi-turbo en mono-turbo ;

Qu'elle fait valoir que :

- M. C. professionnel du secteur d'activité concerné, était informé dès l'origine des besoins de motorisation de l'armateur,

- elle n'avait pas à changer le double turbo par un simple turbo dès lors que M. C. ne l'avait pas informé de cette prescription contenue dans le rapport d'essais établi par la société KJ services,

- M C. n'a pas transmis le rapport d'essais du 26 septembre 2011 qui constitue un accessoire de la chose vendue,

- c'est ce défaut de transmission qui l'a empêchée de prévenir le risque de motorisation inadaptée et qui l'a amenée à commettre une erreur d'appréciation,

- en outre le rapport de révision du moteur comporte les anomalies relevées par l'expert judiciaire et qui ont induit en erreur la société Mécanique Tréportaise

- en définitive M. C. a attesté à tort la conformité du moteur à la commande en annonçant une puissance conforme et une révision de la pompe d'injection,

- le réglage du moteur ne se fait que sur un banc d'essais ; il relève non pas de l'installateur mais de celui qui fournit l'organe de propulsion ;

Attendu cela exposé que selon les dispositions de l'article 1615 du Code civil " l'obligation de délivrer la chose comprend ses accessoires, et tout ce qui est destiné à son usage perpétuel " ;

Qu'en application de ce texte il appartient au vendeur de remettre à son co-contractant les accessoires nécessaires à l'utilisation de la chose vendue ;

Attendu en l'espèce que la société Mécanique Tréportaise ne produit aucun élément de preuve de nature à établir qu'elle ait indiqué à M C. que le moteur devait équiper un chalutier et que le moteur à remplacer était d'un modèle DITA ;

Qu'il est cependant constant que M C. avait pris l'engagement de livrer un moteur présentant les caractéristiques mentionnées sur la plaque signalétique du moteur initial puis en présence d'une différence de puissance, d'adapter le moteur en réduisant celle-ci ;

Que l'expert judiciaire retient que les énonciations du rapport de révision établi par M C. ne correspondent pas à la réalité des caractéristiques de fonctionnement de ce moteur, et que le moteur livré présente un déficit de puissance de 100 cv par rapport à celle du moteur remplacé ;

Attendu que dans ce rapport de révision M C. a laissé entendre à la société Mécanique Tréportaise que KJ services avait procédé aux adaptations nécessaires pour réduire efficacement la puissance au niveau de celle du moteur initial ; que le rapport d'expertise montre cependant qu'aucune adaptation concernant l'alimentation en air n'a été réalisée ;

Que dans un contexte où le moteur proposé par la société KJ Services a dû être adapté par celle-ci pour en réduire la vitesse, et où même après la livraison, il devait encore faire l'objet de travaux d'adaptation, le procès-verbal d'essais sur banc doit être considéré comme constituant un accessoire de la chose vendue;

Que même si le réparateur aurait pu de son côté déceler le défaut d'alimentation en air et s'interroger en présence d'un moteur à double turbo il reste que ce rapport du passage au banc d'essais contenait des informations importantes sur ce point en ce que :

- d'une part il en ressortait aisément que le passage au banc n'avait pas été effectué en testant plusieurs régimes de vitesse mais uniquement " à moteur tournant à vitesse constante ", donnée insuffisante concernant une utilisation sur un bateau de pêche,

- et d'autre part que la nécessité de passer à un simple turbo y est mentionnée de façon claire et précise ;

Qu'en outre le rapport de révision établi par M C. mentionne de façon erronée que les essais ont été réalisés à divers régimes de moteur ; qu'il résulte du procès-verbal d'essais établi par la société KJ Services que le moteur n'a pas été essayé à différents régimes mais à régime constant ;

Qu'il appartenait en conséquence à M C. qui, dans son courriel du 1er août 2011 avait fait état d'essais sur banc, de transmettre spontanément le rapport du 26 septembre 2011, ce qu'il n'a pas fait ;

Attendu que le fait que la société Mécanique Tréportaise soit un professionnel en matière de réparation de navire ne dispensait pas M C. de son obligation de fournir cet accessoire de la chose vendue ;

Attendu que de ce qui précède il résulte que les désordres résultent en partie d'un manquement de M C. à ses obligations contractuelles envers la société Mécanique Tréportaise ;

Attendu que le rapport d'expertise judiciaire fait ressortir que, de son côté en sa qualité d'acquéreur professionnel en matière de réparations navales, la société Mécanique Tréportaise était en mesure de connaître le défaut de conformité du moteur livré ; que la société Mécanique Tréportaise qui indique avoir constaté, à la livraison, que le moteur livré comportait deux turbines, ne pouvait ignorer que ce type de moteur, destiné à équiper des bateaux de plaisance ne pouvait être installé en l'état sur un bateau de pêche ;

Attendu que compte tenu de ce qui précède, et en considération de la nature et du niveau de gravité des fautes respectivement commises par M C. et la société Mécanique Tréportaise, la cour dispose des éléments d'appréciation suffisants pour fixer à 50%, dans les rapports entre la société Mécanique Tréportaise et M C., la part de responsabilité de celui-ci ;

c) Sur l'action de M et Mme T. dirigée contre M C.

Attendu que M et Mme T. invoquent à titre principal à l'égard de M C. un manquement à son obligation de délivrance ;

Qu'ils font valoir principalement que :

- M C. s'était engagé à livrer un moteur adapté aux activités de pêche et révisé ;

- or le rapport d'expertise établit que le moteur vendu par M. C. :

- n'est pas un modèle DITA mais un modèle DITTA,

- n'a pas été révisé,

- est impropre à l'usage auquel il était destiné,

- et que (concernant la pompe à combustible) il est affecté de vices cachés préexistants à l'installation du moteur à bord du chalutier ;

- M C. a manqué à son obligation de livraison conforme ;

- la réception sans réserves ne couvre pas le défaut de conformité dès lors que celui-ci n'était pas apparent à la réception,

- en outre M C. devait livrer le rapport d'essai du 26 septembre 2011 qui constitue un accessoire de la chose vendue ;

Attendu qu'en réponse M. C. reprend les moyens ci-dessus exposés à propos des recours entre la société Mécanique Tréportaise et lui ; qu'il ajoute essentiellement que :

- il n'a aucun rapport contractuel avec M et Mme T.,

- il n'est débiteur d'une obligation de conseil qu'à l'égard de la société Mécanique Tréportaise,

- or celle-ci étant une professionnelle dans le domaine considéré, l'obligation de conseil disparaît, s'agissant de professionnels de la même spécialité ;

Attendu cela exposé que le sous acquéreur jouit de tous les droits et actions attachés à la chose qui appartenait à son auteur ; qu'il dispose à cet effet contre le vendeur initial d'une action contractuelle directe fondée sur la non-conformité de la chose livrée (civ 1ère 22 février 2000) ; qu'il exerce à cet égard l'action de son auteur ;

Qu'il appartient au sous acquéreur d'établir que le vendeur initial n'a pas livré à l'acquéreur une chose conforme aux caractéristiques convenues avec celui-ci (Civ 1ère 3 juin 1997) ;

Attendu en l'espèce qu'en qualité de sous acquéreurs du moteur, M et Mme T. disposent à l'encontre de M C. d'une action contractuelle directe fondée sur la non-conformité de la chose livrée ; qu'il leur appartient de démontrer que M C. a manqué à son obligation de délivrance envers la société Mécanique Tréportaise ;

Attendu que compte tenu des développements ci-dessus concernant les recours entre la société Mécanique Tréportaise et M C., l'action formée contre celui-ci, par M et Mme T. qui exercent à cet égard, l'action de leur auteur, est fondée en son principe ; qu'elle doit être admise dans les mêmes conditions que celle de la société Mécanique Tréportaise contre M C., et donc dans la limite de 50 % retenue ci-dessus ;

III) SUR L'ACTION DE M C. CONTRE LA SOCIÉTÉ KG SERVICES

Attendu que l'assignation en garantie délivrée à la société KG Services introduit dans l'instance principale une action en intervention forcée ; qu'elle n'a pas donné lieu à un enrôlement distinct en sorte que la demande de jonction d'instance est sans objet ;

Attendu qu'au soutien de son appel en garantie dirigé contre la société KG Services M C. fait valoir que :

- il est un intermédiaire qui a acheté le moteur litigieux à la société KG Services,

- le 22 juillet 2011 il a sollicité en urgence cette société pour la fourniture d'un moteur Caterpillar de Type 3 408 C,

- le 1er août 2011 la société KG Services lui a proposé ce produit au prix principal de 20 500 livres, étant précisé que la marchandise a été acheminée directement jusqu'à Dieppe dans les locaux de la Société Mécanique Tréportaise,

- dans la mesure où le moteur est le siège des désordres, il est bien fondé à appeler en garantie la société KG Services ;

Que dans le dispositif de son assignation il vise, sans autre précision, les articles 1147 et 1641 du Code civil ;

Attendu qu'en sa qualité de demandeur en garantie il appartient à M. C. d'indiquer les raisons précises de fait et de droit pour lesquelles il sollicite la garantie de la société KG Services ;

Attendu qu'il résulte du rapport d'expertise que l'avarie résulte d'une inadaptation du moteur de remplacement qui a été installé, celui-ci étant prévu pour un bateau de plaisance, alors que le chalutier concerné devait être équipé d'un moteur adapté à des activités de pêche ;

Attendu que dans les rapports entre la Société Mécanique Tréportaise et M C. la responsabilité contractuelle de celui-ci a été retenue pour manquement à l'obligation de délivrance du procès-verbal de passage du moteur au banc d'essai, document qui apporte des précisions nécessaires à l'adaptation de la puissance du moteur par la Société Mécanique Tréportaise ;

Que M C. n'indique pas quel manquement contractuel il reproche à la société KG Services et plus généralement les raisons précises de fait et droit pour lesquelles celle-ci devrait le garantir à raison du dommage résultant du défaut de délivrance retenu contre lui ;

Que compte tenu de ces éléments la demande en garantie formée par M C. contre la société KG Services n'est pas fondée ; qu'elle ne peut aboutir ;

IV) SUR L'ACTION EN GARANTIE engagée par la société Mécanique Tréportaise, M et Mme t. ainsi que M C., à l'encontre de LA SOCIÉTÉ GAN ASSURANCES

Attendu qu'invoquant le contrat d'assurance responsabilité civile professionnelle qu'elle a souscrit, la société Mécanique Tréportaise demande la garantie de la société Gan Assurances ;

Attendu que pour conclure à l'absence d'obligation à garantie, la société Gan Assurances fait état d'une limitation et d'une exclusion de garantie ;

Attendu que concernant la limitation de garantie elle expose que :

- l'article 1er de l'annexe des conditions spéciales A 892 de la police d'assurance responsabilité civile prévoit que l'assurance porte sur les navires :

- d'une jauge maximale de 25 tonneaux,

- et d'un moteur d'une puissance réelle maximale de 300 chevaux;

- or le volume de jauge du chalutier concerné est de 45,39 tonneaux

- et la puissance réelle de celui-ci est de 350 chevaux ;

- dès le 26 septembre 2011 la société Mécanique Tréportaise a eu connaissance de la puissance du moteur qu'elle devait installer sur le navire puisque les essais du moteur réalisés ont mis en évidence une puissance maximale de 475 chevaux ;

- la société Mécanique Tréportaise, professionnelle de la réparation, a cependant accepté d'intervenir sur un moteur dont les caractéristiques dépassent les limites de sa garantie contractuelle ;

Attendu que concernant l'exclusion de garantie, la société Gan Assurances expose que :

- l'article 6 K 1 de l'annexe des conditions particulières de la police d'assurance exige que le dommage ait une origine accidentelle caractérisée, ce qui n'est pas le cas en l'espèce s'agissant d'une avarie ;

Attendu que concernant l'opposabilité des clauses de limitation et d'exclusion de garantie invoquées, elle fait valoir que :

- il appartient à l'assuré qui conteste le contenu du contrat d'assurance de rapporter la preuve de ce contenu ;

- les clauses de limitation et d'exclusion de garantie qu'elle invoque présentent de façon claire et explicite les conditions d'application du contrat ;

Attendu que concernant le manquement au devoir de conseil qui lui est reproché la société Gan Assurances fait valoir que :

- le contrat d'assurance a pour objet de couvrir le risque inhérent à l'exercice de l'activité professionnelle,

- l'intensité de l'obligation d'information et de conseil varie en fonction de la qualité du créancier de cette obligation et notamment de sa qualité de professionnel ;

- la société Mécanique Tréportaise professionnelle de la réparation disposant des compétences nécessaires pour connaître le risque garanti et le risque exclu, ne peut soutenir que l'assureur ne l'a pas informée sur l'étendue de la garantie obligatoire proposée et qu'il aurait manqué à son information et de conseil,

- M et Mme T. tiers au contrat d'assurance ne peuvent invoquer un manquement de l'assureur au devoir le conseil et d'information envers l'assurée,

- le fait d'avoir accordé sa garantie à raison de précédents sinistres n'emporte pas acceptation de garantie dans le cadre de la présente instance,

Attendu qu'à titre subsidiaire la société Gan Assurances fait valoir qu'elle ne doit pas sa garantie dans la mesure où les dommages ne sont pas imputables à son assurée qui n'a commis aucune faute dans l'exécution des prestations d'installation ;

Attendu qu'en réponse la société Mécanique Tréportaise fait valoir essentiellement que :

- la société Gan Assurances n'a pas satisfait à l'obligation d'information prévue par les articles L. 112- 2 du Code des assurances (fourniture d'une fiche d'information sur le prix et les garanties),

- les clauses de limitation et d'exclusion de garantie invoquées par la société Gan Assurances ne lui sont pas opposables dès lors que :

- alors que les conditions particulières du contrat datées du 8 janvier 1993, signées du souscripteur, font référence aux modèles A 890 et A 892, les conditions générales et les conditions spéciales produites aux débats par la société Gan Assurances ne mentionnent pas de modèles A 890 et A 892;

- ces conditions générales et spéciales ne sont pas signées ;

- les conditions particulières du contrat datées du 8 janvier 1993, signées du souscripteur, ne visent pas l'existence d'une annexe ;

- par ailleurs l'annexe des conditions spéciales A 892 produite par la société Gan Assurances n'est ni datée ni signée ;

- la société Gan Assurances a manqué à son obligation d'information et de conseil dans la mesure où :

- elle a rédigé des conditions qui, en excluant de nombreux bateaux de la garantie, vident le contrat d'assurance de son utilité,

- elle a fait bénéficier la société Mécanique Tréportaise de ses garanties pour deux précédents sinistres sans attirer son attention sur l'éventuelle insuffisance de la couverture d'assurance ;

- c'est en conséquence la garantie responsabilité civile (conditions particulières) au titre de la réparation navale qui s'applique et non l'annexe invoquée par la société Gan Assurances,

- cette garantie prévoit la prise en charge de dommages après livraison de matériel (risque E) et/ou après achèvement de travaux (risque F) ;

Attendu que de leur côté M et Mme T. ajoutent que :

- le fait d'avoir couvert des sinistres afférents à des bateaux d'une puissance supérieure à celle prévue à l'annexe contractuelle invoquée, s'analyse en un avenant implicite au contrat d'assurance ainsi qu'en un aveu de l'assureur de ce qu'il garantit ce type de navire,

- l'article 6 K 1 invoqué ne figure pas dans une annexe aux conditions particulières du contrat d'assurance mais dans une annexe aux conventions spéciales A 892, non datée, ni signée, et en conséquence inopposable à l'assurée,

- la charge de la preuve de l'existence de la teneur des clauses de limitation d'exclusion incombe à l'assureur,

- ce n'est que si aucune des parties n'est en mesure de produire la police d'assurance que la charge de la preuve du contenu du contrat repose également sur l'assuré ;

- même si M et Mme T. sont tiers au contrat d'assurance, la société Gan Assurances, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, doit les indemniser des conséquences dommageables du manquement à son devoir de conseil et d'information commis envers son assurée, la société Mécanique Tréportaise ;

Attendu que M C. reprend pour l'essentiel l'argumentation développée par la société Mécanique Tréportaise et par M et Mme T. ;

Attendu cela exposé qu'au soutien de ses prétentions la société Gan Assurances verse aux débats les documents suivants, en copie :

- les conditions particulières 'responsabilité civile' datées du 8 janvier 1993 et signées par la société Mécanique Tréportaise, étant observé :

- que la société Gan Assurances a joint à ce document signé un ensemble d'autres documents qui seront ci-après examinés,

- que ces conditions particulières font état :

- de conditions générales modèle A 890,

- et de conventions spéciales modèle A 892,

- et qu'elles ne visent pas d'annexe " aux conventions spéciales A 892 ",

- des conditions générales, document non daté et non signé ne comportant pas la mention " modèle A 890 ",

- des conventions spéciales, document non daté et non signé, ne comportant pas la mention " modèle A 892 ",

- un document intitulé " Annexe aux conventions spéciales A 892 " ;

Attendu que le document susvisé, signé par la société Mécanique Tréportaise comporte les mentions :

" - 3 - Clauses : " Voir Annexe ci-jointe ",

Le souscripteur reconnaît avoir reçu un exemplaire des Conditions Générales modèle A 890 et des Conventions Spéciales : " Assurance de la responsabilité civile des entreprises industrielles et commerciales : " Modèle A 892 " ";

Qu'à la suite immédiate de la première page de ce document (conditions particulières) figure la copie d'un tableau listant les différentes natures de risques répertoriés de A à F, présentés en deux colonnes :

- Nature des risques : " Suivant définition aux Conventions Spéciales modèle A 982 " ;

- Garantie accordée par sinistre : " Sous réserve s'il y a lieu des limitations prévues à l'article IV § D des conditions générales modèle A 890 relatives aux dommages dits exceptionnels ;

Attendu que les conditions particulières, en ce compris le tableau susvisé, définissent des risques definis par les lettres " A à F ".

Attendu que l'examen de l'annexe aux conventions spéciales A 892 susvisée, invoquée par la société Gan Assurances montre que les clauses de limitation (article 1) et d'exclusion (article 6 K1) dont elle se prévaut, sont contenues dans ce document, et non dans une " annexe aux conditions particulières " comme le soutient, en ce qui concerne la clause d'exclusion, la société gan assurances;

Attendu qu'il appartient à la société Gan assurances d'établir qu'elle a porté à la connaissance de la société Mécanique Tréportaise le document intitulé " annexe aux conventions spéciales A 892 " ;

Attendu que cette " Annexe aux conventions spéciales A 892" comprend les stipulations suivantes :

- " Définition - article 1. " L'assurance porte sur les embarcations sans moteur et voiliers avec ou sans moteur auxiliaire d'une jauge brute maximale de 25 tonneaux ainsi que sur les embarcations à moteur d'une puissance réelle maximale de 300 chevaux sauf conventions spéciales " ;

- " Risque K : Responsabilité civile après travaux ou livraison

Les articles 12 et 13 des conventions spéciales A 892 (risques E et F) sont abrogés et remplacés par les dispositions suivantes :

" Article 6 : K1- Responsabilité civile du fait des activités de réparation d'entretien et d'aménagement " : la garantie s'étend aux dommages matériels ou immatériels occasionnés par le bateau lui-même, sous la condition toutefois qu'ils résultent d'un accident caractérisé ;

Que ces éléments établissent que le document intitulé : " Annexe aux conditions spéciales A 892 ", produit aux débats, a été établi postérieurement aux conditions particulières signées par la société Mécanique Tréportaise, le tableau joint à ces conditions particulières faisant état des risques E et F alors que l'article K de l'annexe aux conditions spéciales A 892 indique que les dispositions contractuelles qui prévoyaient ces risques ont été abrogées ;

Attendu en outre qu'alors que les conditions particulières susvisées signées par la société Mécanique Tréportaise font état de :

- Conditions générales " modèle A 890 ",

- Conventions Spéciales : " Modèle A 892 ",

le document intitulé "Suite des conditions particulières A 892 C P" produit par la société Gan Assurances ne reprend pas la notion de " Conventions spéciales A 892 " ;

Attendu que compte tenu de ce qui précède la société Gan Assurances n'établit pas avoir porté à la connaissance de l'assurée, le document intitulé " Annexe aux Conventions spéciales A 892 " qu'elle invoque ;

Qu'il s'en déduit que la clause cantonnant la couverture du risque à certains bateaux (en fonction de la puissance et du tonnage) et la clause d'exclusion invoquées par la société gan assurances ne sont pas opposables à la société Mécanique Tréportaise et à M et Mme T. ;

Que la société Mécanique Tréportaise est donc fondée à se prévaloir du contrat constitué des conditions particulières,- en ce compris leur tableau définissant les risques A à F susvisés, - qu'elle a signées ;

Que les dispositions contractuelles afférentes au risque E relatif aux dommages imputables aux matériels ou produits après leur livraison et au risque F relatif aux dommages imputables aux travaux après leur achèvement doivent en conséquence recevoir application ;

V) LE RECOURS DE LA SOCIÉTÉ GAN ASSURANCES CONTRE M C.

Attendu que comme son assurée et dans les mêmes limites la société Gan Assurances est fondée à demander que M C. la garantisse à concurrence de 50 % des condamnations prononcées à son encontre es qualités d'assureur de la société Mécanique Tréportaise ;

VI) SUR LE PRÉJUDICE

Attendu que selon les dispositions de l'article 1610 du Code civil : " Si le vendeur manque à faire la délivrance dans le temps convenu entre les parties l'acquéreur peut, à son choix, demander la résolution de la vente, ou sa mise en possession si le retard ne vient que du fait du vendeur ;

Que l'article 1611 du même code dispose que : " Dans tous les cas, le vendeur doit être condamné aux dommages et intérêts, s'il résulte un préjudice pour l'acquéreur, du défaut de délivrance au terme convenu " ;

Attendu que si dans le dispositif de leurs dernières conclusions récapitulatives, ils évoquent l'éventualité d'une demande de résolution du contrat conclu avec la société Mécanique Tréportaise, M et Mme T. ne forment pas expressément cette demande ; qu'ils demandent l'indemnisation du préjudice résultant du manquement à l'obligation de délivrance imputable à cette société ainsi qu'à M C. ;

Que la demande d'indemnisation porte sur les chefs de dommages suivants :

- préjudice matériel :

- restitution (en cas de résolution du contrat) du montant de la facture de vente et d'installation du moteur litigieux : 59 783 euro

- remplacement du moteur par un moteur neuf : 79 234, 75 euro

- frais divers/travaux d'expertise : passage au banc de la pompe à injection : 710,25 euros

- travaux de réparation de la pompe à injection (facture du 10 novembre 2012) : 6006,96 euros,

- travaux de révision de la coque : 6000 euro

- travaux de réparation et de révision liée à l'immobilisation du bateau : 18 000euro

- préjudice immatériel :

- immobilisation du bateau du 3 mai 2012 au 31 décembre 2016 : 12 478 euro par mois X 56 mois = 698 768 euro,

- immobilisation à compter du 1er janvier 2017 : indemnité mensuelle de 12 478 euro jusqu'au versement d'une indemnité permettant le remplacement du moteur ou la révision du moteur,

- préjudice moral :

- indemnité d'un montant de 7500 euro à chacun des époux T. ;

a) Sur le préjudice matériel

Sur la demande en restitution du prix de vente et d'installation du moteur initial

Attendu qu'en l'absence de demande de résolution du contrat, la demande en restitution du prix du moteur litigieux et du coût de son installation formulées dans l'éventualité d'une demande de résolution, ne peut aboutir ;

Sur le coût de remplacement du moteur

Attendu que M et Mme T. font valoir essentiellement que :

- l'expert judiciaire propose deux solutions :

- remonter le moteur initial après l'avoir reconditionné,

- remplacer celui-ci par un moteur neuf ;

- la première de ces solutions ne peut être retenue dès lors que la société Mécanique Tréportaise ne prouve pas que l'ancien moteur se trouve dans les locaux de la société KJ services, que ce moteur est disponible, et que même révisé il donnerait satisfaction,

- malgré sa promesse la société Mécanique Tréportaise n'a pas réinstallé l'ancien moteur conformément au devis de M C. du 12 mars 2013 ni justifié que ce moteur était disponible,

- dans son dire du 29 avril 2013 la société Mécanique Tréportaise conditionnait l'offre à l'accord de sa banque ;

- or l'offre est caduque puisque la société Mécanique Tréportaise n'a jamais confirmé l'accord de prêt,

- dans plusieurs dires ils ont confirmé leur accord pour passer commande du moteur en indiquant leurs conditions et notamment :

- établissement des devis par la société Mécanique Tréportaise pour un reconditionnement total,

- commande par la société Mécanique Tréportaise avec avoir pour le compte de qui il appartiendra ;

- M et Mme T. n'avaient pas à commander le moteur auprès de la société KJ services qui n'est pas leur cocontractant,

- la société Mécanique Tréportaise disposait des données techniques suffisantes pour commander le moteur,

- seule la solution d'un moteur neuf est techniquement envisageable aujourd'hui,

- au prix du remplacement du moteur et aux postes retenus par l'expert judiciaire s'ajoute le coût de la remise en état du bateau immobilisé depuis l'avarie du 3 mai 2012, soit la somme de 18 000 euros ;

Attendu que pour contester ces demandes la société Mécanique Tréportaise fait valoir essentiellement que :

- aucun motif particulier ne justifierait d'écarter la solution préconisée par l'expert judiciaire consistant à remonter le moteur initial après reconditionnement,

- elle avait proposé à M. T., le 23 avril 2013, la mise en œuvre de cette solution, dont le prix s'établit à 50 550 euros,

Attendu que la société Gan Assurances reprend pour ce qui la concerne l'argumentation développée par la société Mécanique Tréportaise ; qu'elle fait valoir essentiellement que s'il était retenu qu'elle doit sa garantie l'indemnité se limiterait aux sommes prévues au contrat soit : risque K1 : 551 336 euros (soit un million de francs) ;

Attendu que les principales conclusions de l'expert judiciaire relatives au coût de la remise en état du chalutier sont les suivantes :

- " la solution la plus adaptée, et la moins onéreuse pour remédier aux désordres consiste à remplacer le moteur litigieux par le moteur qui se trouvait à l'origine sur le bateau de M. T., après rénovation de ce moteur ;

- une seconde solution consiste à remplacer le moteur litigieux par un moteur neuf adapté au coût de 79 234,75 euros après réfaction pour vétusté,

- les travaux de réparation s'élèvent concernant la première solution à la somme de 50 550 euro et la seconde solution (avec réfaction pour vétusté) à la somme de 79 234, 75 euros

- s'ajoutent aux travaux de réparation, les postes suivants :

- travaux recherches de pannes engagés par la société Mécanique Tréportaise :....... 17 227, 72 euros,

- frais engagés par l'armement, liés à l'expertise (travaux sur la pompe à combustible) :... 6717,21 euros,

- révision de la coque :... 6000 euros " ;

Attendu que l'expert judiciaire considère ainsi que le remplacement du moteur litigieux par le moteur qui se trouvait à l'origine sur le bateau constitue la solution la plus adaptée ;

Qu'aucun élément du dossier ne permet de contredire cet avis technique ; que selon les courriels échangés à l'occasion de la fourniture du moteur litigieux, les conventions entre les parties prévoyaient la remise de l'ancien moteur du bateau à la société KJ Services ; que par courrier du 28 août 2013 le conseil de la société Mécanique Tréportaise indiquait à l'expert judiciaire que la société KJ Services venait d'achever le reconditionnement du moteur initial ;

Attendu qu'il convient en conséquence de retenir la solution n° 1 proposée par l'expert judiciaire pour un coût de 50 550 euros ;

Que s'agissant des frais annexes l'expert judiciaire retient les postes de préjudice matériel suivants :

- frais divers/travaux d'expertise : passage au banc de la pompe à injection : 710,25 euros

- travaux de réparation de la pompe à injection (facture du 10 novembre 2012) : 6006,96 euros,

- travaux de révision de la coque : 6000 euro

Que les demandes d'indemnisation présentées à ces titres sont en lien direct et certain avec l'avarie et sont ainsi justifiées ; qu'il sera donc alloué au titre du remplacement du moteur et des postes susvisés la somme de 63 267, 21 euros ;

Attendu que la demande en paiement de la somme de 18 000 euros relative à des frais de réparation et de révisions liées à l'immobilisation du bateau sera examinée à la suite des demandes concernant le préjudice immatériel, qui soulèvent en particulier la question des raisons de la durée de cette immobilisation ;

b) Sur le préjudice immatériel

Attendu que M et Mme T. font valoir essentiellement que :

- sur la durée du préjudice :

- la période d'indemnisation ne peut s'arrêter à la date de l'offre de remplacement du moteur faite par la société Mécanique Tréportaise,

- en effet celle-ci n'a pas donné suite à son offre,

- elle l'a subordonnée à la fourniture d'éléments concernant la puissance du moteur à installer,

- or ils lui ont répondu que cette puissance devait correspondre à celle du moteur qui avait été extrait du chalutier ;

Sur l'évaluation du préjudice

- calculé à partir de documents comptables (attestation de leur expert-comptable ; comptes de résultat et Grands Livres) le préjudice immatériel s'établit à la somme de 698 768 euro au 31 décembre 2016, ainsi calculée :

- perte mensuelle sans tenir compte des salaires de l'équipage du bateau dans le calcul des frais communs, 12 478 euros pendant 56 mois (du 3 mai 2012 au 31 décembre 2016)

- il s'y ajoute une indemnité mensuelle jusqu'au versement de la somme permettant de remettre un nouveau moteur en état et/ ou jusqu'à la pose d'un moteur en état de marche,

- l'expert-comptable prend en compte la période annuelle d'arrêt d'activité pour calculer la moyenne des mises à terre brutes puis nettes,

- de même l'expert judiciaire retient que le préjudice est à juste titre calculé sur deux exercices complets ;

- le fait que les résultats de l'exercice du 1er octobre 2010 au 30 septembre 2011 soient négatif est sans influence dès lors que cette situation ne correspond pas à une perte d'exploitation et ne fait que prendre en compte une opération purement comptable à savoir la dotation aux amortissements pour 50 071 euros du 1er octobre 2010 au 30 septembre 2011 et 47 128 euros du 1er octobre 2011 au 30 septembre 2012 ;

- par ailleurs s'agissant de ce dernier exercice, il faut relever pour l'analyse des résultats de celui-ci que le navire a dû arrêter son activité au cours de cet exercice, le 3 mai 2012, date de l'avarie ;

- M T. n'a jamais déposé de dossier de demande de sortie de pêche concernant son navire, ce qui résulte d'une attestation de l'administrateur en chef des affaires maritimes de février 2017 ;

- le reproche fait par la société Mécanique Tréportaise concernant un manquement à une prétendue obligation pour les victimes de limiter son propre préjudice, ne peut être retenu au regard du principe de la réparation intégrale du préjudice,

- n'ayant jamais reçu de provision de la part de la société Mécanique Tréportaise ils ne pouvaient faire l'avance des travaux ;

Attendu que la société Mécanique Tréportaise fait valoir essentiellement :

Sur la durée du préjudice

- l'armement T. aurait dû à compter du 23 avril 2013 lui permettre de satisfaire son offre de financement de la réparation en lui indiquant la puissance de moteur qu'il souhaitait voir installer, ce qu'il n'a pas fait ;

- M et Mme T. n'ont pris aucune initiative pour sauvegarder leur patrimoine,

- ainsi aucune indemnité pour préjudice immatériel ne pourrait être due au-delà du 23 avril 2013 ;

Sur l'évaluation du préjudice

- M et Mme T. invoquent une perte d'exploitation de 257 000 euro sur la période du 3 mai 2012 au 30 avril 2013,

- or cette estimation :

- ne résulte que d'éléments comptables fournis unilatéralement par l'expert-comptable de M T.,

- ne tient pas compte des aléas propres à la campagne de pêche 2012/2013,

- n'est pas étayée par la comparaison :

- d'une part entre plusieurs comptes de résultats : sur la période de mai 2009 à mai 2012,

- d'autre part avec deux ou trois bateaux comparables,

- en outre les résultats d'exploitation pour 2009 et 2010 sont négatifs, et les résultats des années antérieures ne sont pas produits,

- l'armement T. n'a pas communiqué le logo book, livre de pêche (montrant les zones et types de pêche)

- le chalutier " mes gamins " est voué à la pêche à la coquille du 1er octobre au 15 mai de chaque année,

- le reste de l'année il se vouait à la pêche au chalut moins rentable et aux travaux d'entretien,

- par ailleurs, construit en 1980, le chalutier de M T. était vétuste au moment de l'avarie de mai 2012,

- il avait subi deux sinistres successifs,

- son mauvais état l'empêchait de faire une saison complète,

- compte tenu de ces difficultés M T. a présenté sa candidature à un plan de sortie de pêche le 17 mai 2013,

Attendu que M C. fait valoir essentiellement que M et Mme T. n'ont rien fait pour limiter les pertes et permettre un pré-financement des frais de réparation ;

Attendu que la société Gan Assurances reprend pour ce qui la concerne l'argumentation développée par la société Mécanique Tréportaise ;

Attendu cela exposé que concernant la durée de la période d'indemnisation les principales conclusions de l'expert judiciaire sont les suivantes :

- période d'immobilisation du 3 mai 2012 au 30 avril 2013

- la date du 30 avril 2013 correspond à la date du courrier du conseil de la société Mécanique Tréportaise dans lequel une proposition technique et financière est établie pour le remplacement du moteur litigieux,

- à partir de cette date les travaux de réparation pouvaient être effectués,

Attendu suivant dire à l'expert judiciaire en date du 22 mai 2013 la société Mécanique Tréportaise annonçait que, sans reconnaissance de responsabilité elle était disposée notamment à faire l'avance :

- du coût de la fourniture du moteur de remplacement selon devis émis par M C. : 32 550 euro,

- des frais de dépose et de repose : 13 500 euro,

- de l'intervention du charpentier naval pour l'ouverture et la fermeture du pont/bois intervention estimée à : 4500 euros ;

Attendu que par dire du 28 août 2013 le conseil de la société mécanique Tréportaise écrivait à l'expert judiciaire :

" Ma cliente vient d'être informée que la société KJ Services avait achevé le reconditionnement du précédent moteur équipant le chalutier " mes gamins " à l'origine.

La société KJ Services indique qu'elle sera en mesure de faire passer l'organe de propulsion au banc d'essais lorsqu'elle sera instruite de la puissance à laquelle il conviendra de le régler.

Il appartient à l'armateur de se déterminer sur ce point et de faire son affaire des contingences réglementaires qu'il implique en matière de limitation et de contrôle de puissance par l'autorité maritime " ;

Attendu que M et Mme T. par leur conseil répondaient par dire du 20 septembre 2013 : " En ce qui concerne la puissance moteur, il appartient à la société mécanique Tréportaise de leur livrer un moteur réglé de manière identique à celui extrait du chalutier mes gamins " ;

Attendu que par dire récapitulatif du 26 novembre 2013 la société Mécanique Tréportaise a ainsi précisé l'objet de l'élément d'information attendu :

- " à ce jour si l'ancien moteur a été reconditionné par la société KJ services, aucune commande n'a encore été passée, faute par le demandeur d'avoir :

- donné son aval à la solution proposée,

- fourni les indications déjà sollicitées pour opérer le remontage de la pompe à la puissance requise ;

- il s'agit en effet pour l'armateur de prendre ses responsabilités et d'indiquer clairement à quelle puissance il convient de règler la pompe à injection, étant donné la différence objective constatée entre :

- la puissance déclarée aux Affaires Maritimes,

- et la puissance réellement embarquée ;

- l'armement T. prétend qu'il appartient à la société Mécanique Tréportaise de leur livrer un moteur réglé de manière identique à celui du moteur extrait de leur chalutier,

- or la société Mécanique Tréportaise n'a jamais été amenée à régler la puissance du moteur qui ne peut être opérée que sur banc,

- en outre la puissance indiquée sur l'acte de francisation est inférieure à la puissance réellement embarquée et à l'heure actuelle il ne justifie pas du droit de prétendre à une puissance de 450 cv " ;

Attendu que par dire du 29 novembre 2013 M et Mme T. rappelant avoir donné leur accord sur le réemploi de l'ancien moteur, ont répondu que :

- " la puissance administrative n'est absolument pas en cause,

- le moteur installé n'est pas adapté pour un navire de type chalutier-coquillard,

- il appartenait à la société Mécanique Tréportaise de leur livrer un moteur de manière identique à celui extrait de leur chalutier ;

Attendu que de ce qui précède il résulte que dans son dire du 26 novembre 2013 la société Mécanique Tréportaise expliquait que :

- la puissance indiquée sur l'acte de francisation était inférieure à la puissance réellement embarquée et l'armateur ne justifiait pas du droit de prétendre à une puissance de 450 cv ;

- elle n'avait jamais été amenée à régler la puissance du moteur ;

Attendu sur le premier de ces points, relatif à l'acte de francisation, qu'il résulte du rappel de l'échange de dires susvisé que M et Mme T. ont répondu en indiquant que la révision du moteur ne devait pas se faire en fonction de la puissance administrative,

Que s'agissant du second point ils ont fait connaître leur position en demandant un réglage de la puissance à l'identique de celle du moteur extrait du chalutier ;

Attendu que la société Mécanique Tréportaise, professionnelle en matière de réparation navale, n'établit ni n'allègue avoir transmis cette réponse à la société KJ services, spécialiste des moteurs Caterpillar et en particulier des travaux de révision des moteurs de cette marque, ainsi que des prestations de passage au banc d'essais ;

Que le fait que de son côté, la société Mécanique Tréportaise n'ait pas elle-même procédé au réglage du moteur et qu'elle ait ignoré la donnée technique concernée est en conséquence sans influence sur la solution du litige ;

Attendu que compte tenu de ce qui précède il ne peut être reproché à M et Mme T. d'avoir empêché le processus de révision du moteur en ne transmettant pas un élément d'information technique ;

Attendu que dans ce contexte la période d'immobilisation du navire due à l'avarie ne peut être arrêtée à la date des dires susvisés de la société Mécanique Tréportaise ;

Attendu que le moteur n'étant pas révisé à ce jour il convient de retenir que la période d'immobilisation du bateau dûe à l'avarie, commencée le 3 mai 2012 se poursuit aujourd'hui, et qu'elle comprend également la durée prévisible de réalisation des prestations de révision et d'installation du moteur, durée qu'au vu des pièces du dossier, en particulier les devis, il y a lieu d'arrêter au 31 décembre 2017 ;

Attendu que la période d'immobilisation du bateau dûe à l'avarie, s'établit en conséquence du 3 mai 2012 au 31 décembre 2017 soit au total : 68 mois ;

Que pour le surplus de la durée d'immobilisation invoquée, la prétention de M et Mme T. ne peut aboutir car elle correspond à un préjudice éventuel ;

Attendu que concernant l'évaluation du préjudice les principales conclusions de l'expert judiciaire sont les suivantes :

- Perte journalière

- l'attestation de l'expert-comptable de M et Mme T. fixe la moyenne des mises à terre brute du chalutier à la somme de 774 858 euros sur une période comprise entre le 3 mai 2009 et le 30 avril 2011.

- les frais communs pris en compte dans cette attestation s'élèvent à la somme moyenne de 206 847 euro soit 33,7 % du montant des mises à terre, ce qui est cohérent pour ce type de chalutier.

- les comptes de résultats détaillés produits montrent que les pourcentages de frais variables varient de façon importante au cours de la période considérée :

- ces différences s'expliquent par le fait que le chalutier a subi des avaries importantes au mois d'avril, de juin et de novembre 2010,

- en prenant en compte le pourcentage moyen de 37 % de frais variables on obtient une perte nette de 232 618 euros sur les deux exercices soit une perte nette mensuelle de 19 385 euros,

- ce mode de calcul qui est celui couramment utilisé en matière de calcul de perte de pêche aboutit à une perte de valeur mensuelle très proche de celle qui est exposée par le demandeur (21 417 euro par mois),

- si on déduit les salaires et charges sociales de l'équipage on obtient une perte nette mensuelle de 12 478 euros ;

- la comparaison avec d'autres navires du même type ne revêt aucun caractère obligatoire, d'autant plus que dans ce cas, il est possible de trouver un navire qui péchera mieux que celui de M. T., ce qui aurait pour effet d'augmenter le résultat de façon indue ;

- en définitive la perte de pêche mensuelle nette s'établit, sans les salaires de l'équipage, à la somme de 12 478 euros ;

Attendu que l'expert judiciaire a répondu de façon détaillée et précise à chacun des arguments et moyens exposés ci-dessus que la société Mécanique Tréportaise a présenté dans le cadre de ses dires ;

Que s'agissant de la méthode de calcul du préjudice il retient ainsi que :

- le calcul des pertes subies est conforme à l'usage,

- la période de référence utilisée pour l'évaluation du préjudice représente deux années entières d'exploitation (3 mai 2009 au 30 juin 2010 et du 3 mai 2010 au 30 juin 2011) et de ce fait tient compte tant des aléas liés aux conditions atmosphériques que des périodes d'arrêt de l'exploitation pour des réparations ou des travaux d'entretien du bateau;

Attendu qu'en l'absence d'éléments techniques de nature à établir que la vétusté du navire ait pu avoir une incidence sur l'exploitation du navire, cette circonstance n'est pas de nature à exclure ou à diminuer le droit à indemnisation du préjudice ;

Qu'il en est de même des deux sinistres successifs invoqués, aucun élément du dossier ne permettant d'affirmer que le bateau est en mauvais état au point de ne pouvoir faire habituellement une saison complète ;

Attendu que le moyen pris d'une sortie de pêche ne peut être retenu dans la mesure où M et Mme T. produisent aux débats l'attestation de l'administrateur en chef des affaires maritimes du 24 février 2017 qui indique que M T. n'a pas déposé de demande de sortie de pêche ;

Mais attendu que l'entreprise de M et Mme T. a pour seule activité l'exploitation du chalutier concerné ; qu'en conséquence, les données susvisées, limitées à l'approche des produits et des frais variables d'exploitation y afférents, ne peuvent être prises en considération de façon isolée, distincte de l'ensemble des données du bilan de l'entreprise dont elles font partie intégrante ; que le préjudice résultant de l'avarie doit en effet s'apprécier de manière globale en considération du bénéfice ou de la perte comptables réalisés tels que résultant de l'application des règles comptables en particulier en matière d'amortissements ;

Attendu qu'il convient de relever à cet égard que selon les pièces produites, les bilans des exercices comptables susvisés : 1er octobre 2009 au 30 septembre 2010 et 1er octobre 2010 au 30 septembre 2011 présentent un caractère déficitaire ;

Attendu cependant que, couvrant la période d'activité de l'entreprise de la fin octobre 2011 (date de l'installation du moteur) jusqu'au 3 mai 2012, date du sinistre, le compte de résultat de la période du 1er octobre 2011 au 30 septembre 2012 doit également être pris en considération comme élément d'appréciation du préjudice ;

Qu'alors que, de fait, il ne porte que sur une période d'activité effective de pêche de six mois, ce compte de résultat mentionne pour l'exercice du 1er octobre 2011 au 30 septembre 2012 :

- un montant net de chiffre d'affaires de 335 477 euros contre 343 668 euros pour l'exercice précédent,

- un bénéfice comptable de 8 525 euros, contre un résultat déficitaire de 52 420 euros pour l'exercice précédent,

- un " total de produits " de 423 925 euros contre 373 260 euros pour l'exercice précédent ;

Que proportionnellement à la durée de la période antérieure à la date de l'avarie, ces données font ressortir :

- d'une part que l'activité effective de pêche de la période allant de fin octobre 2011 au 3 mai 2012 s'est traduite d'un point de vue comptable par un résultat bénéficiaire ;

- et d'autre part que si l'entreprise de M et Mme T. a connu un déficit pendant la période de septembre 2009 à septembre 2011, elle a montré par la suite une capacité effective à dégager des bénéfices ; qu'en considération de l'ensemble des données ci-dessus la cour dispose des éléments d'appréciation pour fixer à la somme de 5 000 euros la perte mensuelle de bénéfice résultant de l'avarie ;

Qu'en conséquence et en considération de la durée de la période d'immobilisation due à l'avarie, et ci-dessus retenue, il convient de fixer à la somme de : 5 000 euros X 68 mois = 340 000 euros, l'indemnité destinée à compenser le préjudice immatériel :

c) Sur la demande en paiement relative au devis de 18 000 euros

Attendu qu'au soutien de leur demande en paiement d'une somme complémentaire de 18 000 euros M et Mme T. produisent aux débats un devis du 20 juin 2014 intitulé " travaux pour remise en état de navigation du chalutier " ; que ce devis mentionne un ensemble de travaux sur plusieurs parties du chalutier (dessus gaillard, coque, pont, pavois) ; qu'à défaut d'élément complémentaire d'appréciation qui permettrait d'affirmer que les travaux listés dans ce devis aient été rendus nécessaires par l'avarie, ce chef de demande ne peut aboutir ;

d) Sur la demande d'indemnisation au titre du préjudice moral

Attendu que M et Mme T. exposent que :

- leur préjudice est aggravé par le fait de devoir supporter les difficultés financières qui en résultent et qui les affectent moralement ;

- M T. subit une grave dépression du fait de son impossibilité de naviguer avec son navire depuis le 2 mai 2012,

Attendu que la société Mécanique Tréportaise conclut au rejet de la demande en faisant valoir que :

- la demande relative au préjudice moral allégué ne peut aboutir au regard de l'attitude de M et Mme T. qui ont décliné l'offre d'avance des fonds nécessaires à la remise en état du navire et qui ont multiplié les dires au cours des opérations d'expertise,

Attendu cela exposé que l'avarie a apporté des troubles aux conditions d'existence de M et Mme T., le chalutier immobilisé depuis le 3 mai 2012 étant nécessaire à l'exercice de l'activité professionnelle de M T., et représentant la source de revenus du couple ; qu'en conséquence il sera alloué à Mme T. une indemnité pour préjudice moral de 3 000 euros et à M T., au vu du certificat médical du 21 septembre 2016 qui fait état d'un état anxio-dépressif, une indemnité de 4 000 euros ;

VII) SUR LES AUTRES DEMANDES

Attendu que l'équité commande :

- de confirmer les dispositions du jugement déféré relatives aux frais hors dépens,

- d'allouer à M et Mme T., ensemble, une indemnité de procédure d'appel de 5 000 euros

- de rejeter les demandes en paiement d'indemnité de procédure formées par les autres parties ;

Attendu qu'en application des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile :

- les dispositions du jugement déféré relatives aux dépens seront confirmées,

- les dépens d'appel seront mis à la charge in solidum de la société Mécanique Tréportaise et de la société Gan Assurances, étant rappelé que M C. sera condamné à les garantir de cette condamnation à hauteur de 50 % du montant total des dépens ;

Par ces motifs, LA COUR, Statuant par décision réputée contradictoire, mise à disposition au greffe, Confirme le jugement déféré en ses dispositions relatives : - au principe de l'obligation de la société Mécanique Tréportaise et de la société Gan Assurances d'indemniser M et Mme T. de leur préjudice, - à l'indemnité pour frais hors dépens allouée à M et Mme T., - aux dépens, Infirme le jugement déféré en ses dispositions relatives : - aux demandes dirigées contre M C.- à l'indemnisation des chefs de dommages concernant le remplacement du moteur, le préjudice immatériel, et le préjudice moral, Statuant de nouveau des chefs infirmés : Condamne in solidum la société Mécanique Tréportaise, la société Gan Assurances et M. Guy C., celui-ci dans la limite de 50 % du montant des condamnations, à payer à M et Mme T. avec intérêts au taux légal à compter du 20 septembre 2012 et capitalisation des intérêts, les sommes de : - 63 267, 21 euros au titre du préjudice matériel, - 340 000 euros, au titre du préjudice immatériel, Condamne in solidum la société Mécanique Tréportaise et la société Gan Assurances et M. Guy C., celui-ci dans la limite de 50 % du montant des condamnations, à payer au titre du préjudice moral : - à M T. la somme de 4 000 euros, - et à M T. la somme de 3 000 euros ; Condamne M. Guy C. à garantir la société Mécanique Tréportaise et la société Gan Assurances à concurrence de 50 % des condamnations prononcées à l'encontre de celles-ci par la présente décision en principal, intérêts, capitalisation des intérêts, et frais hors dépens et dépens. Déclare M C. mal fondé en sa demande de garantie dirigée contre la société KG Services, L'en déboute, Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires au dispositif de la présente décision. Condamne in solidum la société Mécanique Tréportaise et la société Gan Assurances à payer à M et Mme T., ensemble, une indemnité de procédure d'appel de 5 000 euros. Condamne in solidum la société Mécanique Tréportaise et la société Gan Assurances aux dépens d'appel et autorise la distraction des dépens dans les termes de l'article 699 du Code de procédure civile.