CA Paris, Pôle 2 ch. 2, 21 septembre 2017, n° 15-23732
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
UFC Que Choisir
Défendeur :
LMDE, Tulier Polge (ès qual.), Selarl Gauthier Sohm (ès qual.)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Poinseaux
Conseillers :
Mmes Hecq-Cauquil, Chesnot
Avocats :
Mes Laffon, Archambault
Vu l'appel limité interjeté le 25 novembre 2015 par l'association Union Fédérale des Consommateurs Que Choisir (UFC Que Choisir) d'un jugement rendu le 30 septembre 2015 par le Tribunal de grande instance de Créteil, lequel, déclarant son action recevable et sous le bénéfice de l'exécution provisoire, a :
* Déclaré abusives les clauses suivantes contenues dans les règlements mutualistes 2012-2013, 2013-2014, et 2014-2015 de La Mutuelle des Etudiants, Mutuelle n° 431 791 672
- article 3 Informatique et Libertés, qui ne permet pas à l'adhérent de donner un consentement express à la divulgation de données personnelles, ni même de s'y opposer lors de la souscription, mais seulement de s'y opposer postérieurement,
- article 14-3 § 5 et § 6 Conditions de prise en charge, en ce qu'à l'occasion d'une modification des bases et taux de la sécurité sociale, la mutuelle peut limiter le taux des remboursements unilatéralement et l'opposer à l'adhérent, sans que celui-ci ait été préalablement individuellement informé de la modification et sans que lui ait été offerte une possibilité de résiliation,
- ordonné la suppression desdites clauses abusives dans le règlement 2014-2015,
- autorisé l'Union Fédérale des Consommateurs Que Choisir à faire publier aux frais de La Mutuelle des Etudiants dans la limite de 4 000 euros par insertion, le communiqué judiciaire suivant, dans les quotidiens Le Monde et Le Figaro, sous le titre publication judiciaire en lettres d'un demi-centimètre de hauteur, "A la demande de l'Union Fédérale des Consommateurs Que Choisir, le Tribunal de grande instance de Créteil, par une décision du 30 septembre 2015, susceptible d'appel, a condamné La Mutuelle des Etudiants à supprimer deux clauses abusives contenues dans le règlement 2014-2015. Ce communiqué judiciaire est diffusé pour informer les consommateurs",
- dit n'y avoir lieu à astreinte,
- débouté La Mutuelle des Etudiants de ses demandes de dommages et intérêts et de frais irrépétibles,
- fixé au passif de la procédure collective de La Mutuelle des Etudiants la somme de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles,
- fixé au passif de la procédure collective de La Mutuelle des Etudiants les entiers dépens qui pourront être recouvrés par Me Fabrice Laffon, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile ;
Vu les dernières écritures notifiées par voie électronique le 18 mai 2017, par lesquelles l'Union Fédérale des Consommateurs Que Choisir, au visa des articles L. 212-1 et suivants, L. 811-1 et suivants, L. 622-1 et L. 621-7 du Code de la consommation, demande à la cour d'infirmer partiellement cette décision et, statuant à nouveau, de :
* Dire et Juger que les articles 3, 4, 8, 9, 12, 13.1, 13.2, 14.3, 16.3, 22-4.3 et 23.2 des règlements mutualistes 2012/2013, 2013/2014, 2014/2015 et 2015/2016 de la mutuelle LMDE régissant les prestations de sécurité sociale et de mutuelle étudiante offertes à des consommateurs sont des clauses abusives au sens de l'article L. 132-1 du Code de la consommation,
* ordonner en conséquence la suppression des clauses abusives précitées du règlement mutualiste 2015/2016 de la mutuelle LMDE régissant les prestations de sécurité sociale et de mutuelle étudiante et dans tout règlement mutualiste ultérieur qui viendrait à reprendre la même rédaction, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et par clause abusive, ladite astreinte commençant à courir à compter de la signification du jugement à intervenir,
* dire et juger qu'une telle pratique est à l'origine d'un préjudice direct à l'intérêt collectif des consommateurs dont l'UFC Que Choisir est bien fondée à solliciter réparation,
* fixer au passif de la mutuelle LMDE la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,
* ordonner la publication d'un communiqué judiciaire dans trois journaux grand public à diffusion nationale, sans que le coût de chaque insertion ne puisse être inférieur à 10 000 euros, et ce, dans les deux mois de la signification dudit jugement, aux frais de la mutuelle LMDE, "Communiqué judiciaire. A la requête de l'Union Fédérale des Consommateurs Que Choisir, la Cour d'appel de Paris a constaté que les Règlements Mutualistes 2012/2013, 2013/2014, 2014/2015 et 2015/2016 de la Mutuelle LMDE régissant les prestations de sécurité sociale et de mutuelle étudiante offertes recelaient des clauses abusives.
Il a en conséquence condamné la Mutuelle LMDE à supprimer les clauses abusives y figurant.
Ce communiqué judiciaire est diffusé pour informer les consommateurs,
* dire la décision à intervenir opposable à Me Florence Tulier Polge en qualité d'administrateur judiciaire de la mutuelle LMDE et à la Selarl Gauthier-Sohm ès qualités de représentant des créanciers de la mutuelle LMDE,
* débouter la mutuelle LMDE de l'intégralité de ses demandes,
* fixer au passif de la mutuelle LMDE la somme de 10 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
* condamner Me Florence Tulier Polge en qualité d'administrateur judiciaire de la mutuelle LMDE aux entiers dépens avec distraction ;
Vu les dernières écritures en date du 9 mai 2017, aux termes desquelles La Mutuelle des Etudiants (LMDE) prie la cour, au visa des articles L. 132-1 devenu L. 122-1 et L. 421-6 devenu L. 621-1 du Code de la consommation, L. 221-5 et L. 114-7 du Code de la mutualité et 1382 du Code civil, de recevoir son appel incident, d'infirmer cette décision et :
* Principalement, de constater l'irrecevabilité des demandes de l'UFC Que Choisir,
* subsidiairement, d'infirmer le jugement entrepris :
- en ce qu'il a déclaré abusives les clauses des articles 3 Informatique et Libertés et 14-3 § 5 et § 6 Conditions de prise en charge des règlements mutualiste 2012-2013, 2013-2014, et 2014-2015 de la LMDE, et en ce qu'il a ordonné leur suppression,
- en ce qu'il a autorisé l'UFC Que Choisir à faire publier aux frais de la mutuelle des étudiants dans la limite de 4 000 euros par insertion, le communiqué judiciaire suivant dans les quotidiens Le Monde et Le Figaro, sous le titre publication judiciaire en lettres d'un demi-centimètre de hauteur "A la demande de l'Union Fédérale des Consommateurs Que Choisir, le Tribunal de grande instance de Créteil, par une décision du 30 septembre 2015, susceptible d'appel, a condamné la Mutuelle des Etudiants à supprimer deux clauses abusives contenues dans le règlement 2014-2015. Ce communiqué judiciaire est diffusé pour informer les consommateurs",
- en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes de dommages et intérêts,
Et statuant à nouveau, de :
- Constater que par ses actes de dénigrement l'association UFC Que Choisir a causé à la LMDE un trouble commercial,
- la condamner à lui payer une somme de 30 000 euros en réparation de son trouble commercial,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il n'a pas fait droit aux demandes de l'UFC Que Choisir tendant à faire déclarer abusives les clauses suivantes du règlement mutualiste :
- Article 4 intitulé Droit de rétractation concernant le point de départ du délai de rétractation de 14 jours,
- article 8 intitulé Subrogation concernant le délai de déclaration d'accident,
- article 9 intitulé Paiement de la cotisation concernant le mode de règlement,
- article 12 intitulé Pluralité d'assureurs et principe indemnitaire, concernant les garanties de même nature contractées auprès de plusieurs organismes assureurs,
- article 13 du règlement mutualiste intitulé Documents à transmettre pour percevoir le remboursement des prestations mutualistes concernant les documents susceptibles d'être réclamés par la LMDE,
- article 14 intitulé Prestations accordées par la Mutuelle au bénéficiaire du contrat en sa disposition 14. 3 Conditions de prise en charge concernant uniquement la référence au protocole CNSD. La prise en charge de la prestation des soins dentaires prothétiques (couronnes) dans le réseau conventionné LMDE prévue à l'article 4 du présent règlement mutualiste, est soumise à entente préalable. La procédure d'application de l'entente préalable est définie dans la convention LMDE signée avec un centre dentaire ou dans le protocole CNSD (document consultable dans les accueils LMDE),
- article 16 intitulé Prestations accident en sa disposition 16.3 déclaration d'accident concernant le délai de déclaration,
- article 22 intitulé Garantie couverture étudiant étranger en sa disposition 22.4-3 prestation d'accident concernant le délai de déclaration de l'accident,
- article 23 intitulé Garantie Etud'expat LMDE/CFE en sa disposition 23.2 Période de validité et ouverture des droits concernant le mode de règlement,
- la décharger des condamnations prononcées contre elle en principal, intérêts, frais et accessoires,
- condamner l'UFC Que Choisir à porter et payer à la LMDE la somme de 10 000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile et en tous les dépens, avec distraction
Sur ce, LA COUR,
Considérant que, pour un exposé complet des faits et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des parties; qu'il convient de rappeler que :
* L'UFC Que Choisir est une association de défense des consommateurs, titulaire de l'agrément visé aux articles L. 811-1 et suivants, L. 622-1 et suivants, R. 811-1 et suivants et R. 622-1 et suivants du Code de la consommation, l'autorisant à agir en justice dans l'intérêt collectif des consommateurs ;
* La Mutuelle des Etudiants est un organisme régi par les dispositions du Code de la mutualité, ayant pour mission de gérer le régime étudiant de sécurité sociale par délégation et d'offrir des complémentaires santé ;
* par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 10 septembre 2012 et e-mail du 11 septembre 2012, l'UFC Que Choisir, considérant que le règlement mutualiste de La Mutuelle des Etudiants contenait des clauses abusives au sens des articles L. 122-1 (anciennement L. 132-1) et suivants et R. 212-1 (anciennement R. 132-1) et suivants du Code de la consommation, a vainement mis en demeure la mutuelle LMDE d'avoir à modifier ses conditions contractuelles et de rééquilibrer les droits et obligations des parties ;
* le 11 septembre 2012, l'UFC Que Choisir a publié sur son site internet un rapport intitulé L'UFC Que Choisir met au " banc " les mutuelles étudiantes, critiquant La Mutuelle des Etudiants, puis, le 12 septembre 2012, un article intitulé Sécurité sociale étudiante, les mutuelles à bout de souffle, enfin, au mois d'octobre 2012, dans un numéro de la revue Que Choisir, un dossier consacré à la sécurité sociale étudiante ;
* le 25 octobre 2012, elle a publié sur son site un article intitulé Mutuelle des Etudiants, Les Parlementaires au secours de la LMDE et le 20 février 2013, un article intitulé Mutuelle des Etudiants: La MGEN au chevet de la LMDE ;
* par acte d'huissier de justice en date du 22 mai 2013, l'UFC Que Choisir a fait assigner La Mutuelle des Etudiants devant le Tribunal de grande instance de Créteil, afin de voir déclarer plusieurs clauses abusives ou illicites ;
* le 9 février 2015, le Tribunal de grande instance de Créteil a ouvert une procédure de sauvegarde à l'égard de la Mutuelle LMDE et désigné Me Florence Tulier Polge en qualité d'administrateur judiciaire ; la Selarl Gauthier-Sohm a été désignée en qualité de représentant des créanciers et l'UFC Que Choisir a déclaré sa créance ;
* par acte d'huissier de justice en date des 4 et 6 mars 2015, l'UFC Que Choisir a assigné en intervention forcée les organes de la procédure ;
Sur la recevabilité des demandes de l'UFC Que Choisir :
Considérant que la mutuelle LMDE, contestant à son règlement mutualiste, acte juridique collectif, la qualification de contrat au sens de l'article L. 421-6 du Code de la consommation, soulève l'irrecevabilité des demandes de l'UFC Que Choisir sur le fondement de ce texte ;
Que l'UFC Que Choisir soutient le caractère contractuel de ce règlement, faisant corps avec le bulletin d'adhésion, et rappelle que les dispositions relatives aux clauses abusives sont applicables quels que soient la forme ou le support du contrat ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 132-1 alinéa 4 du Code de la consommation, dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, alors applicable aux clauses abusives, "Ces dispositions sont applicables quels que soient la forme ou le support du contrat. Il en est ainsi notamment des bons de commande, factures, bons de garantie, bordereaux ou bons de livraison, billets ou tickets, contenant des stipulations négociées librement ou non ou des références à des conditions générales préétablies" ;
Que les formulaires d'adhésion à la mutuelle LMDE posent comme obligation l'acceptation des conditions, soit les droits et obligations, figurant à son règlement, dont la nature contractuelle est ainsi caractérisée ; que leur destination vers le consommateur n'est pas mise en cause ;
Que dès lors, l'UFC Que Choisir tient son droit à agir de l'article L. 421-6 alinéa 1 du Code de la consommation, dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 alors applicable, selon lequel "Les associations mentionnées à l'article L. 421-1 et les organismes justifiant de leur inscription sur la liste publiée au Journal officiel des Communautés européennes en application de l'article 4 de la directive 2009/22/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 relative aux actions en cessation en matière de protection des intérêts des consommateurs peuvent agir devant la juridiction civile pour faire cesser ou interdire tout agissement illicite au regard des dispositions transposant les directives mentionnées à l'article 1er de la directive précitée" ;
Que le rejet de la fin de non-recevoir sera ainsi confirmé ;
Sur le caractère abusif de clauses du règlement de la LMDE :
Considérant que l'UFC Que Choisir limite son appel au rejet du surplus de ses demandes tendant au constat du caractère abusif de clauses du règlement mutualiste, à l'omission de statuer sur sa demande indemnitaire et au quantum de la mesure de publicité ;
Que la mutuelle LMDE forme appel incident, aux fins d'infirmation de la décision en ce qu'elle a déclaré abusives les clauses des articles 3 Informatique et Libertés et 14-3 § 5 et § 6 Conditions de prise en charge et en a ordonné la suppression et demande sa confirmation sur le rejet des demandes de l'UFC Que Choisir portant sur le surplus des clauses incriminées ;
Considérant que selon l'article L. 132-1 du Code de la consommation, antérieur à l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et applicable en l'espèce, "Dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.
Un décret en Conseil d'Etat, pris après avis de la commission instituée à l'article L. 534-1, détermine une liste de clauses présumées abusives ; en cas de litige concernant un contrat comportant une telle clause, le professionnel doit apporter la preuve du caractère non abusif de la clause litigieuse.
Un décret pris dans les mêmes conditions détermine des types de clauses qui, eu égard à la gravité des atteintes qu'elles portent à l'équilibre du contrat, doivent être regardées, de manière irréfragable, comme abusives au sens du premier alinéa.
Ces dispositions sont applicables quels que soient la forme ou le support du contrat. Il en est ainsi notamment des bons de commande, factures, bons de garantie, bordereaux ou bons de livraison, billets ou tickets, contenant des stipulations négociées librement ou non ou des références à des conditions générales préétablies.
Sans préjudice des règles d'interprétation prévues aux articles 1156 à 1161,1163 et 1164 du Code civil, le caractère abusif d'une clause s'apprécie en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu'à toutes les autres clauses du contrat. Il s'apprécie également au regard de celles contenues dans un autre contrat lorsque la conclusion ou l'exécution de ces deux contrats dépendent juridiquement l'une de l'autre.
Les clauses abusives sont réputées non écrites.
L'appréciation du caractère abusif des clauses au sens du premier alinéa ne porte ni sur la définition de l'objet principal du contrat ni sur l'adéquation du prix ou de la rémunération au bien vendu ou au service offert pour autant que les clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible.
Le contrat restera applicable dans toutes ses dispositions autres que celles jugées abusives s'il peut subsister sans lesdites clauses.
Les dispositions du présent article sont d'ordre public" ;
Qu'aux termes de l'article L. 421-6 alinéas 2 et 3 du Code de la consommation, dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, "Le juge peut à ce titre ordonner, le cas échéant sous astreinte, la suppression d'une clause illicite ou abusive dans tout contrat ou type de contrat en cours ou non, proposé ou destiné au consommateur.
Les associations et les organismes mentionnés au premier alinéa peuvent également demander au juge de déclarer que cette clause est réputée non écrite dans tous les contrats identiques conclus par le même professionnel avec des consommateurs et de lui ordonner d'en informer à ses frais les consommateurs concernés par tous moyens appropriés" ;
Sur l'article 3 Informatique et Libertés :
Considérant qu'aux termes de cette clause, "Conformément à la loi " Informatique et Libertés " du 6 janvier 1978, la mutuelle met en œuvre un traitement de données à caractère personnel concernant le membre participant et ses ayants droit.
Les informations nominatives recueillies sont utilisées dans le cadre de la gestion du contrat souscrit auprès de la mutuelle. Elles peuvent être également utilisées à des fins commerciales dans le cadre des actions menées par la mutuelle conformément à son objet tel que défini à l'article 2 de ses statuts.
Le membre participant, ainsi que toute personne objet d'une gestion pour compte de tiers, peut demander communication ou rectification de toute information le concernant qui figurerait sur les fichiers de la mutuelle. Il peut exercer ses droits d'accès, de rectification et d'opposition à toute prospection commerciale en s'adressant à la mutuelle un courrier accompagné d'une photocopie d'un titre d'identité à l'adresse suivante : LMDE - Service Juridique - BP [...]";
Que selon l'article 2 des statuts de la LMDE, celle-ci peut conclure des accords en vue d'offrir à ses membres participants et à leurs ayants droit un service global intégrant les garanties et les produits qu'elle ne peut elle-même servir ; cette offre conforme à l'esprit de l'article L. 111-1 du Code de la mutualité doit viser à l'amélioration des conditions de vie (physiques, matérielles et morales) des étudiants ;
Considérant que la mutuelle LMDE, demandant la réformation du jugement l'ayant déclarée abusive, expose que cette clause ne se rapporte pas au consentement de l'adhérent à la divulgation de ses données personnelles, donné par le bulletin d'adhésion, dans son format papier, dont la taille de la police inférieure à 2,8 mm n'est pas démontrée, portant une case devant être cochée en cas de refus et sous sa forme électronique, présentant au contraire une case devant être décochée en cas d'acceptation de cette divulgation ;
Qu'elle soutient que le tiers destinataire des données est précisé, par référence à l'article 2 de ses statuts et que cette clause ne permet pas la cession à des fins commerciales des données personnelles des étudiants à des partenaire non identifiés ;
Qu'elle affirme la conformité du traitement des données personnelles à la réglementation de la CNIL, contestant les critiques portées à cet égard par sa présidente dans un courrier du 11 mars 2014, ainsi que l'absence de déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, la communication des données personnelles excluant les fins de prospection commerciale ;
Considérant que l'UFC Que Choisir oppose le défaut d'accord exprès préalable de l'adhérent quant à la communication de ses données personnelles à des fins commerciales, et l'absence de possibilité d'exercer le droit d'opposition avant sa souscription ;
Qu'elle souligne la taille des caractères de la clause du bulletin d'adhésion relative à l'utilisation des données personnelles, largement inférieure à 2 mm, alors que le corps 8, dimension minimum des caractères selon la Commission des clauses abusives, correspond à 2,8 mm et observe que la clause de l'article 3 diffère de celle du bulletin d'adhésion ;
Qu'elle soutient l'absence de précision quant aux tiers destinataires des données personnelles du souscripteur, les partenaires de la LMDE étant, pour les adhérents, indéterminés ;
Qu'elle fait valoir sa saisine et l'avis de la CNIL, dont résulte le défaut de conformité de cette clause à l'article 32-I de la loi du 6 janvier 1978, comme ne mentionnant pas le caractère obligatoire ou facultatif des informations connectées, le caractère succinct du bulletin d'adhésion, l'absence de précision de la mention des destinataires et le défaut d'information préalable du règlement mutualiste ;
Considérant que le consentement de l'adhérent à la divulgation de ses données personnelles doit être préalable à la souscription ; qu'en l'espèce, la clause incriminée ne prévoit qu'une faculté d'opposition postérieure à l'adhésion et la circonstance de cases, totalement illisibles, à cocher ou décocher à cette fin sur le bulletin d'adhésion, en format papier ou électronique, n'est pas de nature à couvrir l'irrégularité du règlement mutualiste ; que les destinataires de ces informations ne sont nullement identifiables par l'adhérent, par la seule référence à l'article 2 des statuts, relatif à l'objet de la mutuelle, lequel ne fournit aucun renseignement portant sur l'identité des partenaires commerciaux de la LMDE ;
Que le jugement ayant retenu la création pour la LMDE, professionnel, d'un avantage sans contrepartie pour l'adhérent et le caractère abusif de cette clause sera en conséquence confirmé sur ce point ;
Sur l'article 4 Droit de rétractation :
Considérant que cette clause, en son alinéa 1, prévoit qu'"En cas d'adhésion par correspondance, conformément à l'article L. 221-18 du Code de la mutualité, l'adhérent à une garantie LMDE dispose d'un délai de 14 jours à compter de la date de souscription du contrat pour y renoncer par lettre recommandée avec accusé de réception adressée à (...).
En cas de commencement d'exécution du contrat à l'initiative de l'adhérent pendant cette période, les éventuelles dépenses effectuées par la LMDE en application du contrat seront déduites de la cotisation qui sera remboursée dans un délai de 30 jours à compter de la demande.
Un modèle de courrier de rétractation est disponible sur www.lmde.com ou en accueils LMDE" ;
Considérant que l'UFC Que Choisir fait valoir le défaut de conformité du point de départ du délai prévu au règlement, plus court et moins favorable aux adhérents, à l'article L. 221-18 du Code de la mutualité, selon lequel, lors de l'adhésion d'une personne physique à un règlement à distance, le délai commence à courir soit à compter du jour où l'adhésion a pris effet, soit à compter du jour où l'intéressé reçoit les conditions d'adhésion et les informations, si cette dernière date est postérieure ;
Qu'elle souligne que les dates d'adhésion et de prise d'effet peuvent être dissociées, ainsi que prévu à l'article 15-1-1 du règlement mutualiste, et que les modalités d'exercice de la faculté de rétractation et les conséquences de sa mise en œuvre, en cas de prise d'effet rétroactive, ne sont pas précisées ;
Qu'elle fait valoir l'incertitude sur la remise effective du règlement mutualiste aux adhérents, dont la connaissance est présumée en ce qu'il est disponible sur internet ;
Considérant que la mutuelle LMDE soutient l'absence de déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties et rappelle qu'ainsi que l'a retenu le tribunal, la date de souscription du contrat est le jour où l'adhésion a pris effet, soit à la signature du bulletin d'adhésion, et que la souscription n'est pas antérieure à l'adhésion, alors que peut l'être la prise d'effet des garanties, donnant lieu à confusion ;
Qu'elle souligne les modalités d'exercice du droit de rétractation, lorsque la prise d'effet est antérieure à l'adhésion, prévues à l'article 4 alinéa 2 ;
Que, sur la remise antérieure du règlement mutualiste, elle fait valoir que cette remise n'est pas l'objet de la clause 4, que la durée de 14 jours du délai de rétractation est expressément prévue sur les bulletins d'adhésion, papier et internet ; qu'au demeurant, elle soutient remettre l'ensemble des documents pré-contractuels, en accueil ou sur demande, et fournir un accès à leur téléchargement ;
Considérant que selon l'article L. 221-18 du Code de la mutualité, "II. - 1° Toute personne physique ayant adhéré à distance, à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale ou professionnelle, à un règlement ou à un contrat collectif à adhésion facultative, dispose d'un délai de quatorze jours calendaires révolus pour y renoncer, sans avoir à justifier de motif ni à supporter de pénalités. Ce délai commence à courir :
a) Soit à compter du jour où l'adhésion a pris effet ;
b) Soit à compter du jour où l'intéressé reçoit les conditions d'adhésion et les informations, conformément à l'article L. 222-6 du Code de la consommation, si cette dernière date est postérieure à celle mentionnée au a" ;
Considérant que le point de départ du délai de rétractation est, selon l'article 4 du règlement mutualiste, la date de souscription, correspondant, ainsi que l'ont exactement relevé les premiers juges, à la date de signature du bulletin d'adhésion ; que la date de prise d'effet des garanties, distincte de celle de l'adhésion, est fixée en tout état de cause au 1er octobre, que l'adhésion soit antérieure ou postérieure à cette date, et ne peut constituer l'unique point de départ des délais de renonciation pour l'ensemble des adhérents ; que la remise du règlement mutualiste est étrangère à l'article 4, lequel ne crée aucun déséquilibre significatif entre les parties ; que le jugement rejetant la demande sur ce point sera confirmé ;
Sur l'article 8 Subrogation, 16-3 Déclaration d'accident et 22-4-3 Prestations accident 3° Déclaration d'accident :
Considérant qu'aux termes de l'article 8, "Pour le paiement des prestations à caractère indemnitaire mentionnées à l'article L. 224-8 du Code de la mutualité la mutuelle est subrogée jusqu'à concurrence desdites prestations dans les conditions de l'article L. 224-9 du même Code.
En cas d'accident, le membre participant doit impérativement signaler ce dernier à la mutuelle dans les conditions définies à l'article 16 du présent règlement afin que cette dernière puisse exercer son droit de recours contre tiers" ;
Que l'article 16-3 dispose que "Sauf cas de force majeure, tout accident doit être déclaré dans les 5 jours à l'aide d'un formulaire adressé à la mutuelle et accompagné d'un certificat médical descriptif des blessures" ;
Que, de même, selon l'article 22-4-3, "Sauf cas de force majeure, tout accident doit être déclaré dans les 5 jours à l'aide d'un formulaire adressé à la mutuelle et accompagné d'un certificat médical descriptif des blessures".
Considérant que, sur l'article 8, l'UFC Que Choisir soutient que le terme impérativement est de nature à laisser penser qu'une sanction est encourue à défaut de respect de cette disposition et que la brièveté du délai de cinq jours pour déclarer l'accident peut créer un déséquilibre entre les droits et obligations des parties ;
Que, sur les articles 16-3 et 22-4-3, elle conteste la restriction aux seuls cas de force majeure de la possibilité de déclarer un accident au-delà du délai de cinq jours, ainsi que l'absence de précision sur la sanction encourue, de nature à créer un déséquilibre entre les droits et obligations des parties, en méconnaissance de l'article L. 211-1 alinéa 1er du Code de la consommation ;
Considérant que la mutuelle LMDE rétorque, sur l'article 8, que l'absence de prévision d'une sanction signifie qu'aucune sanction n'est encourue par un rappel à la loi dans ce domaine, que le délai n'est qu'incitatif et ne s'applique pas aux cas de force majeure, ainsi que le mentionne l'article 16.3, et que cette clause bénéficie aux adhérents, comme permettant l'exercice du recours prévu à l'article L. 224-9 du Code de la mutualité contre des tiers, avec, en cas de succès, un effet positif sur les prestations et les cotisations ;
Que, sur les articles 16-3 et 22-4-3, elle réplique que le délai de déclaration du risque, emprunté aux dispositions de l'article L. 113-2 4° du Code des assurances, est conforme aux exigences légales, que l'hypothèse de l'accident est un cas de force majeure et qu'aucune sanction ou déchéance ne résulte de cette clause ;
Considérant que force est de constater qu'aucune sanction ni déchéance n'assortit le délai de cinq jours pour déclarer un accident, que les termes impérativement et sauf cas de force majeure ne peuvent suffire à insinuer ; que la durée du délai, insuffisante en cas d'accident selon l'UFC Que Choisir, ne s'applique pas aux hypothèses de force majeure auxquelles peuvent correspondre les accidents empêchant les adhérents de procéder à leur déclaration ; que le déséquilibre entre les parties n'étant pas établi, le rejet de la qualification de clause abusive par les premiers juges sera confirmé ;
Sur les articles 9 Paiement de la cotisation et 23-2 Période de validité et ouverture des droits :
Considérant que selon l'article 9, "La cotisation est individuelle. Sauf disposition contraire, elle peut faire l'objet d'un prélèvement automatique sur un compte bancaire en une seule fois ou par paiement fractionné" ;
Que l'article 23-2, se rapportant à la garantie Etud'Expat LMDE/CFE, dispose que "Le membre participant doit régler la première période de sa cotisation intégralement par carte bancaire ou chèque bancaire.
Dans le cadre de la tacite reconduction, le paiement de la cotisation du trimestre à venir s'effectue exclusivement par prélèvement sur un compte bancaire domicilié [...]. Un échéancier est adressé au membre participant par courrier électronique (e-mail)" ;
Considérant que l'UFC Que Choisir fait valoir la rédaction ambigüe de ces articles, laissant à penser que seul le prélèvement automatique est autorisé, faute d'explication sur la notion de disposition contraire et de référence au bulletin d'adhésion, lequel prévoit d'autres moyens de paiement, alors que l'article L. 212-1 du Code de la consommation prohibe l'obligation d'un unique moyen de paiement créant un déséquilibre au préjudice du consommateur ;
Considérant que la mutuelle LMDE maintient n'imposer aucun moyen de paiement, la clause de l'article 9 n'indiquant que la faculté de payer par prélèvement automatique, alors que le bulletin d'adhésion y ajoute les possibilités de régler par carte bancaire ou chèque ;
Que, sur l'article 23-2, elle observe que le paiement par prélèvement permet à l'étudiant de bénéficier du paiement fractionné du montant de sa cotisation sans autres démarches, soit un service en sa faveur, que la clause ne s'applique qu'aux étudiants expatriés et au seul renouvellement tacite de l'adhésion au-delà de trois mois ;
Qu'elle conteste l'application des articles R. 132-1 et R. 132-2 du Code de la consommation, ainsi que la transposition des recommandations de la Commission des clauses abusives relative aux contrats d'assurance de protection juridique de fourniture d'accès à l'Internet ;
Considérant que les premiers juges ont considéré à juste titre que l'article 9 énonçait une possibilité de paiement, mais n'imposait pas le prélèvement automatique comme seul et unique moyen de paiement aux adhérents ; que cette clause, dépourvue d'ambiguïté, n'introduit pas de déséquilibre entre les parties ;
Que la clause de l'article 23-2 ne concerne que la garantie Etud'Expat LMDE/CFE, destinée aux étudiants français expatriés et pouvant être souscrite pour une durée de trois mois reconductible tacitement par trimestre, le prélèvement automatique n'étant imposé que pour sa reconduction ; que, dès lors que l'adhérent a eu le choix, lors de la souscription de la garantie, entre plusieurs modes de paiement, la circonstance de son renouvellement trimestriel par prélèvement automatique uniquement est justifiée par les circonstances particulières de son expatriation et ne crée pas un déséquilibre caractérisant une clause abusive ;
Sur l'article 12 Pluralité d'assureurs et principe indemnitaire :
Considérant que cette clause prévoit que "Si le membre participant souscrit auprès de plusieurs assureurs ou groupements mutualistes des contrats pour un même intérêt contre un même risque, il doit donner immédiatement à la mutuelle connaissance des autres assurances.
Les garanties de même nature contractées auprès de plusieurs organismes assureurs produisent leurs effets dans la limite de chaque garantie quelle que soit sa date de souscription. Dans cette limite, le membre participant peut obtenir l'indemnisation en s'adressant à l'organisme de son choix.
Le remboursement des dépenses de santé suite à une maladie, maternité ou accident par la mutuelle ne peut être supérieur au montant des frais restant à la charge effective de l'adhérent" ;
Considérant que l'UFC Que Choisir reproche à cette clause son absence de précision sur le risque de double emploi de plusieurs assurances complémentaires, son absence sur le bulletin d'adhésion, l'obligation de vérification du consommateur, l'exonération du professionnel de son obligation de conseil et son illicéité, faute de reproduction de l'article 9 alinéa 1 de la loi du 31 décembre 1989 imposée par l'article 2 du décret du 30 août 1990 en caractères très apparents sur toute proposition, bulletin de souscription ou d'adhésion, conditions générales et notes d'information ;
Considérant que la mutuelle LMDE soutient exécuter son obligation d'information et de conseil, en évoquant l'hypothèse où l'étudiant est couvert par la mutuelle parentale et conteste amener ainsi l'étudiant à payer une complémentaire santé sans contrepartie, alors que les prestations peuvent se compléter, par ce rappel du caractère légal indemnitaire des prestations mutualistes ;
Considérant que cet article rappelle le principe de cumul de garanties applicable en matière d'assurance et les conséquences du caractère indemnitaire de ses prestations, conformément à l'article 2 du décret du 30 août 1990 ; que le risque de double emploi est clairement évoqué par la mention de garanties de même nature contractées auprès de plusieurs organismes assureurs ; qu'ainsi, un manquement de la LMDE à une obligation d'information et de conseil n'est pas établie ; que le jugement ayant rejeté la qualification de clause abusive de cet article sera en conséquence confirmé ;
Sur l'article 13 Documents à transmettre pour percevoir le remboursement des prestations mutualistes :
Considérant que doivent être transmis, aux termes de l'article 13.1 du règlement mutualiste de la LMDE," Lorsque le remboursement mutualiste concerne des prestations non prises en charge par la sécurité sociale : les factures originales acquittées et le cas échéant, les prescriptions médicales et tout autre document demandé par la LMDE pour le traitement du dossier et selon l'article 13.2, Lorsque le remboursement mutualiste intervient en complément de celui de la sécurité sociale :
- Les originaux des décomptes transmis par la sécurité sociale et le cas échéant, les factures originales acquittées et tout autre document demandé par la LMDE pour le traitement du dossier" ;
Considérant que l'UFC Que Choisir soutient le caractère abusif de cette clause, faute pour le consommateur de connaître l'ensemble des documents pouvant lui être réclamés par la LMDE, de façon discrétionnaire, soit un pouvoir exclusif d'interprétation du contrat, abusif en application de l'article R. 212-1 4° du Code de la consommation, selon lequel sont de manière irréfragable présumées abusives "(...) les clauses ayant pour objet ou pour effet de : 4° Accorder au seul professionnel le droit de déterminer si la chose livrée ou les services fournis sont conformes ou non aux stipulations du contrat ou lui conférer le droit exclusif d'interpréter une quelconque clause du contrat" ;
Considérant que la mutuelle LMDE oppose que cette clause ne lui donne aucun pouvoir discrétionnaire pour exiger une pièce se rapportant à une situation particulière, dont la liste exhaustive ne peut être fixée, rappelant que l'article L. 161-1-4 du Code de la sécurité sociale permet aux caisses de réclamer tout justificatif nécessaire, sans rapport avec l'interprétation du contrat ;
Considérant que la mutuelle est en droit de vérifier les conditions d'application de la garantie par la production de justificatifs relatifs aux prestations et dépenses non prises en charge par l'organisme de sécurité sociale ; que les premiers juges ont justement relevé que la multiplicité de ces situations ne permet pas d'établir une liste exhaustive des documents servant de justificatifs ; que la demande de production de justificatifs de prestations ou dépenses ne confère pas à la mutuelle un droit exclusif d'interprétation du contrat au sens de l'article R. 212-1 4°, permettant de qualifier l'article 13 de clause abusive ;
Sur l'article 14-3 Conditions de prise en charge :
Considérant que selon l'article 14-3, "L'Assemblée Générale de la LMDE définit les prestations mutualistes et les cotisations afférentes. Les cotisations et prestations des différentes garanties sont détaillées aux titres 3 et 4 du présent règlement.
Sont visées :
- les prestations mutualistes qui interviennent en complément des prestations du régime obligatoire de sécurité sociale en France,
- les prestations mutualistes à caractère forfaitaire,
- les prestations mutualistes couvrant les frais de santé prévus à l'article 22 du présent règlement.
Les taux des prestations mutualistes s'appliquent sur les bases de remboursement et les taux de remboursement de la sécurité sociale française en vigueur à la date de l'assemblée générale annuelle de la mutuelle compétente en la matière.
Sauf décision contraire de l'assemblée générale de la mutuelle, la modification desdits bases et taux au cours de l'année universitaire considérée est sans incidence sur le montant des prestations et des cotisations mutualistes" ;
De même, "Sauf décision contraire de l'assemblée générale de la mutuelle, la modification des taux ou des bases de remboursement de la sécurité sociale française ou de la nomenclature des actes professionnels au cours de l'année universitaire considérée est sans incidence sur les taux des prestations mutualistes et le montant des cotisations mutualistes" ;
Qu'aux termes de l'alinéa 9, "La prise en charge de la prestation "des soins dentaires prothétiques (couronnes) dans le réseau conventionné LMDE", prévue au titre 4 du présent règlement mutualiste, est soumise à entente préalable. La procédure d'application de l'entente préalable est définie dans la convention LMDE signée avec un centre de santé dentaire ou dans le protocole CNSD (document consultable dans les accueils LMDE)" ;
Considérant que la mutuelle LMDE, demandant la réformation du jugement ayant déclaré abusives les dispositions des alinéas 5 et 6, expose que cette clause ne permet de modifier ni les prestations, ni les cotisations, mais évoque implicitement la possibilité pour l'assemblée générale de modifier le règlement mutualiste en cours d'année en cas de modification des bases de remboursement de la sécurité sociale, déremboursements réglementaires ;
Qu'elle fait valoir que les adhérents sont préalablement informés de la modification du montant des prestations, en application des articles 6, selon lequel "Tous actes ou délibérations ayant pour objet une modification des statuts et des règlements sont portés à la connaissance des membres par la mutuelle", et 21, prévoyant que "Les modifications des montants ou des taux de cotisations ainsi que des prestations sont applicables dès qu'elles ont été notifiées aux membres" ;
Qu'elle conteste le caractère abusif de l'absence de possibilité de résiliation immédiate de l'adhésion en cas de modification des prestations ou cotisations, soutenant que l'objet de cette clause est de minimiser les effets d'un déremboursement de la sécurité sociale sur le reste à charge de l'étudiant, faisant valoir la régularité des pouvoirs de modification de l'assemblée générale, en application des articles L. 114-7 et L. 221-5 du Code de la mutualité, dispositions législatives spéciales devant prévaloir sur celles, réglementaires et générales, de l'article R. 132-2 3° du Code de la consommation ;
Qu'elle oppose au déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties l'aspect favorable aux adhérents de cette clause, leur permettant d'obtenir un remboursement plus avantageux, en limitant les effets d'un déremboursement réglementaire de la part de la sécurité sociale ;
Considérant que l'UFC Que Choisir reproche à ces dispositions de permettre, à travers le règlement mutualiste, la modification unilatérale par la mutuelle LMDE des taux et montants des prestations, ainsi que les conditions d'exécution du contrat ;
Qu'elle soutient le caractère abusif de la modification, ayant une incidence sur le montant de la cotisation, sans notification préalable à l'adhérent, en violation de l'article R. 212-1 3° du Code de la consommation ; qu'elle relève que le règlement mutualiste ne reprend pas l'exigence de notification préalable à l'application des modifications du montant des cotisations ou des prestations, contrairement aux dispositions de l'article L. 114-7 du Code de la mutualité ; qu'elle observe que cette clause ne vise pas spécifiquement la seule modification à la baisse de la base de remboursement, mais offre la possibilité d'augmenter les prestations, avec une incidence sur le montant des cotisations ;
Qu'elle souligne le caractère unilatéral, dans les faits, de cette disposition, le consentement exprès préalable de chaque consommateur n'étant pas recueilli à l'occasion d'une assemblée générale, en violation de l'article R. 212-4 du Code de la consommation et l'absence de corollaire à la modification unilatérale, tel que l'offre d'une faculté de résiliation ;
Considérant qu'aux termes de l'article R. 132-2 du Code de la consommation, "Dans les contrats conclus entre des professionnels et des consommateurs, sont de manière irréfragable présumées abusives, au sens des dispositions des premier et quatrième alinéas de l'article L. 212-1 et dès lors interdites, les clauses ayant pour objet ou pour effet de : 3° Réserver au professionnel le droit de modifier unilatéralement les clauses du contrat relatives à sa durée, aux caractéristiques ou au prix du bien à livrer ou du service à rendre" ;
Que selon l'article R. 212-4 alinéa 3 du même Code, "Le 3° de l'article R. 212-1 et le 6° de l'article R. 212-2 ne font pas obstacle à l'existence de clauses par lesquelles le contrat, lorsqu'il est conclu à durée indéterminée, stipule que le professionnel peut apporter unilatéralement des modifications liées au prix du bien à livrer ou du service à rendre à la condition que le consommateur en ait été averti dans un délai raisonnable pour être en mesure, le cas échéant, de résilier le contrat" ;
Que l'article L. 221-5 I du Code de la mutualité dispose que "Toute modification des statuts et règlements décidée par l'assemblée générale d'une mutuelle ou d'une union doit être portée à la connaissance des membres participants et des membres honoraires par la mutuelle ou l'union.
Toute modification des prestations définies au bulletin d'adhésion et des montants de cotisations fait l'objet d'une notification au membre participant ou honoraire.
Lorsque les statuts délèguent au conseil d'administration l'adoption des règlements des opérations individuelles mentionnées au II de l'article L. 221-2, leur modification fait l'objet d'une notification au membre participant ou honoraire" ;
Que la possibilité pour l'assemblée générale d'une mutuelle de modifier les bases et taux de remboursement a pour corollaire l'obligation de notifier cette modification à l'adhérent et de lui offrir la possibilité de résilier son contrat ;
Qu'en l'espèce, faute de notification de la modification des prestations et du montant des cotisations, hors l'hypothèse de renouvellement de l'adhésion, et en l'absence de faculté de résiliation, la LMDE se trouve en situation de modifier unilatéralement les clauses du contrat relatives aux caractéristiques ou au prix de la garantie ; que la suppression de cette clause, présumée abusive de manière irréfragable, sera confirmée ;
Que, sur l'alinéa 9, l'UFC Que Choisir fait valoir la violation de l'article R. 212-1 du Code de la consommation, selon lequel sont de manière irréfragable présumées abusives "(...) les clauses ayant pour objet ou pour effet de : 1° Constater l'adhésion du non-professionnel ou du consommateur à des clauses qui ne figurent pas dans l'écrit qu'il accepte ou qui sont reprises dans un autre document auquel il n'est pas fait expressément référence lors de la conclusion du contrat et dont il n'a pas eu connaissance avant sa conclusion", en soutenant que ces dispositions relatives à l'entente préalable concernent, non seulement les chirurgiens-dentistes adhérents, mais en premier lieu les étudiants, comme précisant leur prise en charge ;
Que la mutuelle LMDE soutient que cette clause rappelle le principe de l'entente préalable et ne s'impose pas à l'adhérent, mais aux chirurgiens-dentistes qui décident d'adhérer au protocole MFP-CNSD signé entre des mutuelles de la fonction publique et la confédération nationale des syndicats dentaires et permet simplement à l'adhérent de bénéficier de soins dentaires, dans des conditions de remboursement plus favorable ;
Considérant que cette disposition ne se rapporte qu'aux démarches nécessaires à l'obtention de l'entente préalable par les professionnels chirurgiens-dentistes, en fonction d'évolutions du protocole MFP-CNSD, dont le domaine excède les prestations de la seule LMDE, protocole auquel les étudiants ne sont pas adhérents ; que l'article R. 212-1 1° n'a donc pas vocation à s'appliquer à l'alinéa 9 de l'article 14-3 ;
Sur les demandes de réparation de l'UFC Que Choisir :
Considérant que l'UFC Que Choisir, outre la suppression sous astreinte des clauses abusives du règlement mutualiste 2015-2016 et de tout règlement ultérieur, demande réparation du préjudice direct porté à l'intérêt collectif des consommateurs, à la fixation au passif de la mutuelle LMDE de la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts et à la publication d'un communiqué judiciaire, avec majoration à hauteur de 10 000 euros du coût de chaque insertion ;
Qu'elle soutient l'atteinte portée à l'intérêt collectif des consommateurs par l'insertion dans le règlement mutualiste de clauses abusives ou illicites, soit des pratiques déloyales de professionnels en contradiction avec les droits des consommateurs ; qu'elle fait valoir les frais supportés pour informer et assurer la défense des consommateurs, distincts des frais irrépétibles et demande réparation du préjudice apprécié au regard du nombre d'étudiants concernés et de l'estimation du chiffre d'affaire de la LMDE que celle-ci se refuse à communiquer ;
Considérant que la mutuelle LMDE sollicite la confirmation du jugement sur le rejet de la demande de dommages et intérêts et son infirmation sur la publication d'un communiqué judiciaire, soulignant que l'information du public a d'ores et déjà été assurée par la campagne de dénigrement menée par l'UFC Que Choisir à son encontre ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le jugement ayant déclaré abusives les clauses des articles 3 et 14-3 alinéas 5 et 6 du règlement mutualiste et ordonné leur suppression sera confirmé ; que leur suppression dans le règlement mutualiste 2015-2016 sera ordonnée, sans qu'une astreinte apparaisse nécessaire ;
Que l'insertion de clauses abusives est une faute par nature portant nécessairement atteinte à l'intérêt collectif des consommateurs ; que le préjudice doit être apprécié au regard du chiffre de 320 000 adhérents revendiqué par la LMDE, mais également du nombre de deux clauses, dont la suppression est confirmée, et sera justement réparé par l'allocation de la somme de 7 000 euros ;
Que la publication d'un communiqué judiciaire sera confirmée dans les termes retenus par les premiers juges, la majoration de 4 000 à 10 000 euros de chaque insertion n'étant pas justifiée par la réalité de l'information du consommateur ;
Sur la demande reconventionnelle de la mutuelle LMDE :
Considérant que la LMDE demande réparation à hauteur de 30 000 euros, sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, du préjudice commercial entraîné par la campagne de dénigrement à laquelle s'est livrée l'UFC Que Choisir à son encontre, caractérisée par le manque d'objectivité et de prudence des publications :
- le 11 septembre 2012, sur son site internet d'un rapport intitulé L'UFC Que Choisir met au " banc " les mutuelles étudiantes, ne faisant apparaître que le nom de la LMDE,
- le 12 septembre 2012, d'un article intitulé Sécurité sociale étudiante, les mutuelles à bout de souffle et au mois d'octobre 2012, dans la revue Que Choisir, d'un dossier relatif à la sécurité sociale étudiante, essentiellement consacrés à la LMDE, présentée comme succédant à la MNEF, dont le scandale est rappelé,
- le 25 octobre 2012, sur son site, d'un article intitulé Mutuelle des Etudiants, Les Parlementaires au secours de la LMDE et le 20 février 2013, d'un article intitulé Mutuelle des Etudiants : La MGEN au chevet de la LMDE à la suite d'une mesure d'exonération profitant à toutes les mutuelles complémentaires santés à destination des étudiants ;
Considérant que l'UFC Que Choisir rétorque avoir publié une étude relevant les atteintes portées par l'ensemble des onze mutuelles étudiantes aux intérêts des consommateurs, ainsi que l'a relevé la presse nationale, amenant le constat d'une gestion insatisfaisante des mutuelles étudiantes ;
Qu'elle souligne que la LMDE apparaît en évidence en raison de sa position dominante sur le marché et rappelle que la Cour des comptes a relevé, dans un rapport de septembre 2013, le très fort taux d'insatisfaction des adhérents de LMDE et la situation préoccupante de cette mutuelle ;
Mais considérant que l'UFC Que Choisir, par les publications incriminées, dont les passages caractérisant un dénigrement ne sont pas précisés, a agi conformément à son objet, usant de son droit de critique avec pour finalité l'information des consommateurs et non le dénigrement de la seule LMDE ; que le rejet de sa demande d'indemnisation sera confirmé ;
Sur les autres demandes:
Considérant que l'équité ne commande pas, en l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, au titre de la procédure d'appel ; qu'il y a lieu, en outre de laisser à la charge des parties les dépens par elles exposés au cours de cette procédure ;
Par ces motifs , statuant publiquement et contradictoirement, déclare la présente décision opposable à Me Florence Tulier Polge en qualité d'administrateur judiciaire de la mutuelle LMDE et à la Selarl Gauthier-Sohm ès qualités de représentant des créanciers de la mutuelle LMDE ; confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré, sauf sur le rejet de la demande de dommages et intérêts de l'UFC Que Choisir ; statuant à nouveau sur ce point, fixe la créance de l'UFC Que Choisir au passif de la procédure collective de la mutuelle LMDE au montant de 7 000 euros à titre de dommages et intérêts ; ordonne la suppression des clauses des articles 3 informatique et libertés et 14-3 alinéas 5 et 6 conditions de prise en charge du règlement mutualiste 2015-2016 et de tout règlement mutualiste ultérieur reprenant la même rédaction ; rejette toutes autres demandes ; laisse à la charge de chacune des parties les dépens exposés en appel.