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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 27 septembre 2017, n° 15-23741

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Algaflex (SAS)

Défendeur :

Eole (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Luc

Conseillers :

Mme Mouthon Vidilles, M. Thomas

Avocats :

Mes Autier, Hercot, Buret, Vives

T. com. Rennes, du 17 nov. 2015

17 novembre 2015

Faits et procédure

Le 4 juin 1997, la société Algaflex, un des leaders sur le marché de la conception et fabrication de parois, murs mobiles, cloisons extensibles, a signé avec Monsieur Guillaume Gueguen un contrat d'agent commercial pour une durée indéterminée avec mandat de représentation pour la vente de ses produits dans le secteur géographique des Côtes d'Armor (22), du Finistère (29), de l'Ile et Vilaine (35), de la Mayenne (53), du Morbihan (56) et de la Sarthe (72), mandat pour lequel ce dernier bénéficiait d'une exclusivité en contrepartie de laquelle il s'engageait à réaliser un chiffre d'affaires de 4 000 000 francs ; en rémunération de ses services, l'agent recevait une commission. Ce contrat a été transféré à la société Eole que Monsieur Gueguen a constituée le 9 juin 1997.

Par deux avenants des 13 janvier 2010 et 2 février 2012, les parties ont étendu le secteur géographique de représentation des produits fabriqués par la société Algaflex à 13 départements supplémentaires: la Charente (16), la Charente Maritime (17), l'Indre et Loir (37), le Loir et Cher (41), la Loire Atlantique (44), le Maine et Loire (49) les Deux Sèvres (79), la Vendée (85), la Vienne (86), le Calvados (14), la Manche (50), l'Orne (61), la Haute Vienne (87), soit au total 19 départements, la société Eole acquérant notamment les droits et obligations conférés à la société Ventech par contrat d'agent commercial.

A partir de 1999, la société Algaflex a choisi, parallèlement au contrat d'agent commercial, la société Eole en qualité de distributeur exclusif de ses produits agissant en son nom et pour son compte pour des chantiers remportés par cette dernière, selon des prix par elle négociés et avec une marge bénéficiaire librement déterminée, sur le territoire des six premiers départements ci-dessus mentionnés, puis sur les treize autres; les deux contrats écrits de distribution proposés par la société Algaflex les 13 septembre 2004 et 28 août 2008 ont été refusés par la société Eole, de sorte que ces relations n'ont pas été formalisées.

Le 10 juin 2014, la société Eole a informé la société Algaflex de la fin de la poursuite de leurs relations commerciales, de la résiliation du contrat d'agent commercial du 4 juin 1997 et de son intention de rechercher de nouveaux fabricants ainsi qu'elle l'avait annoncé dans ses correspondances des 31 juillet et 28 novembre 2013 et 30 avril 2014.

Reprochant à la société Eole d'avoir rompu brutalement et déloyalement leurs relations d'affaires et lui enjoignant de respecter l'engagement de non-concurrence d'une année auquel elle est tenue, la société Algaflex l'a faite assigner par acte du 5 septembre 2014 devant le Tribunal de commerce de Rennes, lequel par jugement du 17 novembre 2015 a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :

- débouté la société Algaflex de sa demande d'indemnisation au titre de la résiliation sans motif et sans préavis du contrat d'agent commercial signé avec la société Eole,

- constaté l'absence de rupture brutale de relations commerciales établies au sens de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce,

- débouté la société Algaflex de sa demande formée au titre de la réparation du préjudice subi du fait des agissements déloyaux de la société Eole,

- débouté cette dernière de sa demande de restitution de la contrepartie versée au titre de la clause de non-concurrence ainsi que de sa demande au titre de la résistance abusive au respect de l'engagement de non-concurrence,

- ordonné à la société Eole de cesser toute utilisation d'images ou visuels de produits directement issus des catalogues ou documentation commerciale de la société Algaflex quels que soient les supports à l'exception de ses propres photos ou visuels de chantiers qu'elle aurait elle-même réalisés et débouté la société Algaflex de sa demande d'astreinte formée à ce titre,

- débouté la société Algaflex de sa demande au titre de la reprise par la société Eole de son visuel lors du salon Artibat et de sa demande en dommages et intérêts

- condamné la société Algaflex à payer à la société Eole la somme de 15.000 € en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile.

LA COUR,

Vu les dernières conclusions notifiées le 12 juin 2017, aux termes desquelles la société Algaflex, appelante, demande à la cour :

à titre principal,

- l'annulation du jugement du 17 novembre 2015 pour violation du principe du contradictoire,

à titre subsidiaire,

- l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes:

* au titre de la rupture par la société Eole du contrat d'agent commercial,

* pour violation par la société Eole de la clause de non-concurrence prévue au contrat d'agent commercial,

* au titre de la rupture brutale de la relation de distribution,

* au titre des autres agissements déloyaux commis par la société Eole avant et après la rupture de leurs relations commerciales établies,

* au titre de l'utilisation déloyale par la société Eole de son visuel lors du salon Artibat,

- la confirmation du jugement querellé en ce qu'il a débouté la société Eole de ses demandes reconventionnelles, en tout état de cause,

- de dire que la société Eole a engagé sa responsabilité:

* du fait de la rupture sans motif et sans préavis du contrat d'agent commercial conclu avec elle le 4 juin 1997, modifié par avenants des 13 janvier 2010 et 2 février 2012 et du fait du non-respect de la clause de non-concurrence prévue à ce contrat,

* de l'interruption sans préavis et donc brutale des relations commerciales établies avec elle,

* des agissements déloyaux commis à son endroit,

- la condamnation de la société Eole à lui payer les sommes de:

* 13 508,05 € HT en réparation du préjudice subi du fait de la résiliation sans motif et sans préavis du contrat d'agent commercial conclu avec elle le 4 juin 1997 et modifié par deux avenants,

* 9 879,84 € indûment perçue en contrepartie de l'engagement de non-concurrence prévu à l'article 9 du contrat d'agent commercial,

* 50 000 € au titre de la résistance abusive au respect de l'engagement de non-concurrence,

* 2 080 528,30 € HT en réparation du préjudice subi du fait de la rupture brutale des relations de distribution exclusives,

* 150 000 € en réparation du préjudice subi du fait des agissements déloyaux,

* 100 000 € à titre de dommages et intérêts du fait de la reprise de son visuel sur le salon Artibat organisé à Rennes les 22, 23 et 24 octobre 2014,

* 30 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- d'ordonner à la société Eole de retirer immédiatement de son site Internet/et ou de tout autre support lui appartenant tout contenu relatif à elle et/ou aux cloisons extensibles et murs mobiles conçus par elle et notamment les images de ces produits et de cesser toute utilisation quelle qu'elle soit de ces produits comme de leur image, sous astreinte de 5 000 € par jour et par infraction constatée,

- de rejeter toutes les prétentions de la société Eole à son endroit ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 13 mai 2017 aux termes desquelles la société Eole, intimée ayant formé appel incident, sollicite de la cour :

- la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société Algaflex de toutes ses demandes dirigées à son encontre et en ce qu'il a condamné cette dernière à lui verser la somme de 15 000 € en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile,

- la condamnation de la société Algaflex à lui régler la somme de 100 000 € à titre de dommages et intérêts pour concurrence déloyale ainsi que la somme de 30 000 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

SUR CE

Sur la demande de nullité du jugement

La société Algaflex sollicite, par application des articles 15 et 16 du Code de procédure civile, la nullité du jugement du 17 novembre 2015 dès lors qu'elle n'a pas eu connaissance des conclusions n° 3 de son adversaire en date du 2 septembre 2015, soit la veille de l'audience de plaidoiries, et n'avoir pas été, en conséquence, à même d'en débattre contradictoirement, alors que les premiers juges les ont prises en compte. Elle prétend que le conseil de l'intimée n'a pas répondu à sa correspondance officielle du 11 février 2016 par laquelle elle lui réclamait la preuve de la communication de ses dernières conclusions. La société Eole conteste le manquement au principe du contradictoire qui lui est reproché et réplique qu'elle a transmis ses écritures n° 3 au conseil de la société Eole le 2 septembre 2015, soit avant l'audience du 3 septembre 2015 et qu'elles ne constituaient qu'une réponse à des conclusions de 67 pages communiquées le 31 juillet 2015 auxquelles étaient jointes 15 pièces nouvelles. Elle objecte avoir répondu le même jour au courriel du 11 février 2016 et réplique qu'il appartenait à la société Algaflex de solliciter le report de l'audience si elle estimait devoir répondre aux dernières écritures.

Contrairement aux allégations de la société Algaflex, la société Eole justifie (pièce n° 77) avoir répondu au courriel de son adversaire du 11 février 2016 et adressé à 15h54 le même jour à 18h13 en joignant le mail de communication de ses conclusions avec ses pièces jointes (constituées des conclusions n° 3 et d'une pièce supplémentaire). Dans ces conditions et compte tenu du principe de l'oralité de la procédure devant la juridiction consulaire, il appartenait à l'appelante de solliciter lors de l'audience de plaidoirie du 3 septembre 2015 le renvoi de l'affaire ou le rejet des écritures n° 3, si elle estimait devoir y répondre par écrit. De surcroît, il apparaît de l'analyse des écritures antérieures que l'intimée apportait, par ses dernières conclusions n° 3, une réponse à celles de son adversaire constituées de 67 pages, notifiées en pleine période estivale, auxquelles étaient annexées 15 pièces nouvelles. Enfin l'appelante ne précise pas à quel moyen ou argument elle n'aurait pas été en mesure de répliquer.

Dès lors, le jugement du 17 novembre 2015 n'encourt pas la nullité et la société Algaflex sera déboutée de la demande formée à ce titre.

Sur le contrat d'agent commercial

La société Algaflex fait grief, en premier lieu, à la société Eole d'avoir mis un terme au contrat d'agent commercial sans mise en demeure préalable et sans préavis, en contravention à l'article 10 de la convention du 4 juin 1997 et à l'article L. 134-11 du Code de commerce, alors qu'elle n'avait commis aucune faute suffisamment grave, de sorte que celle-ci doit l'indemniser de son préjudice et de celui consécutif au non-respect de la clause de non-concurrence. Elle fait valoir que les fautes alléguées par la société Eole à son endroit illustrent en réalité les propres insuffisances de cette dernière à son égard, en sa qualité d'agent commercial, laquelle s'est approprié son travail, son savoir-faire et sa clientèle, de manière déloyale.

La société Eole estime pour sa part bien fondée la rupture du contrat au regard des fautes graves commises par la société Algaflex, telles que la livraison de tiers sur le secteur géographique qui lui est dévolu, l'envoi d'offres ou de devis de remise en état directement auprès de clients situés dans le territoire concédé (client Novotel, marché Center Parcs des Trois Moutiers) ; elle conteste également être intervenue en qualité d'agent commercial de la société Hufcor.

Aux termes du contrat d'agent commercial du 4 juin 1997, la société Algaflex a confié à la société Eole un mandat exclusif de négocier la vente de ses produits (murs mobiles et cloisons extensibles) dans 6, puis 19 départements, au nom et pour le compte de son mandant, et donc sans clientèle propre pour la société Eole. L'article 10 de ce contrat prévoit que " si l'une des parties n'exécute pas ses obligations, 15 jours après une mise en demeure non suivie d'effet, le contrat sera résilié ". Aux termes de l'article L. 134-11 du Code de commerce, chaque partie peut mettre fin au contrat d'agence moyennant un préavis, mais les dispositions sur le préavis ne s'appliquent pas lorsque le contrat prend fin en raison d'une faute grave de l'une des parties.

Au cas particulier, la société Eole ne justifie nullement de l'envoi d'une mise en demeure visant la rupture du contrat d'agent commercial ; en effet les correspondances des 31 juillet, 30 septembre, 5 et 28 novembre 2013 ou 30 avril 2014 invoquées par elle sont relatives aux difficultés de livraisons des murs mobiles et des cloisons extensibles pour les seuls clients ou chantiers de la société Eole et en conséquence, ne peuvent se rapporter qu'au contrat de distribution liant les parties, puisque pour le contrat d'agent commercial la société Eole n'a pas de clientèle propre.

L'intimée ne rapporte pas davantage la preuve de manquements graves imputables à la société Algaflex. Ainsi cette dernière établit que pour la livraison alléguée de marchandises dans le département de Maine et Loire (49), la commande n° 54023 du 20 janvier 2014 émanant de la société Conseil Antilles Agencement, dont le siège est à Ducos en Martinique, était en réalité destinée à un chantier situé avenue des Arawaks à Fort de France (pièce 47 de l'appelante) et n'a fait que transiter par le département 49. Par ailleurs, elle démontre n'avoir effectué aucun service après-vente sur le chantier du Novotel de Caen mais avoir au contraire transféré immédiatement à son agent commercial la demande de remise en état du 12 mars 2014 (pièce 45 de l'intimée). Enfin, pour le marché Center Parcs des Trois Moutiers, l'appelante justifie qu'elle aurait été en droit d'emporter ce chantier, puisque le client, maître d'ouvrage se trouvait en dehors du territoire concédé (Paris) en application des articles 3 et 7 du contrat d'agent commercial du 4 juin 1997.

En revanche si la livraison en septembre 2013 de fournitures de pièces détachées pour un montant HT de 100 € en exécution d'un accord national conclu avec la chaîne Accor aurait dû donner lieu au versement d'une commission au profit de l'agent commercial, ce manquement ne revêt pas la gravité requise permettant à l'intimée de priver l'appelante de tout délai de préavis et indemnité, dès lors que la faute grave est celle qui porte atteinte à la finalité commune du mandat d'intérêt commun et rend impossible le maintien du lien contractuel, ce qui ne peut être le cas de cette modeste livraison.

Conformément aux dispositions de l'article L. 134-11 du Code de commerce, la société Eole, liée par un contrat à durée indéterminée depuis 17 ans avec la société Algaflex, aurait dû, à tout le moins, respecter le délai de prévenance de 3 mois que cette dernière sollicite et ne pas la priver de la marge brute qu'elle pouvait escompter tirer pendant la durée de ce préavis ; le préjudice subi par celle-ci est déterminé par la moyenne mensuelle de la marge sur trois exercices, à multiplier par le nombre de mois de préavis, dont aurait dû bénéficier la victime de la rupture, soit eu égard aux chiffres avancés par l'appelante et vérifiés par la société CRC, commissaire aux comptes, la somme de 13 506 € (212 986 €/3 = 70 995 € /12= 5 916/mois X 76,10%= 4 502 X 3 = 13 506 € ) que la société Eole sera condamnée à verser à la société Algaflex, à titre d'indemnité compensatrice de préavis. La décision des premiers juges sera donc infirmée de ce chef.

En second lieu, la société Algaflex reproche à la société Eole d'avoir violé la clause de non-concurrence figurant à l'article 9 dudit contrat selon laquelle " l'agent, pendant une durée d'un an à compter de la date de la rupture effective du contrat le liant au mandant, s'engage à ne pas concurrencer celui-ci directement ou indirectement, par personnes ou capitaux interposés et à ne pas collaborer directement ou indirectement avec toute entreprise ayant une activité semblable, similaire ou connexe à l'activité du mandant. Cette interdiction sera limitée au secteur géographique prospecté par l'agent à la date de la rupture. Pendant l'exécution de cette clause, la société Algaflex versera une contrepartie financière. Cette contrepartie cesse d'être due en cas de violation par l'agent de cette clause " ; elle réclame en conséquence la restitution de la somme de 9 879,84 € indûment perçue en rémunération de l'engagement de non-concurrence auquel l'intimée ne s'est jamais conformée et le paiement d'une somme de 50 000 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive à l'exécution de cette clause.

La société Eole conteste avoir eu un autre mandat d'agent lui permettant de représenter un fabricant concurrent, et donc avoir souscrit un second contrat d'agent commercial. Elle estime en conséquence les demandes en restitution de l'indemnité et en paiement de dommages et intérêts infondées.

Il est constant que la société Eole s'est obligée à ne pas concurrencer la société Algaflex directement ou indirectement, par personnes ou capitaux interposés, pendant une durée d'une année à compter du 10 juin 2014 sur le territoire d'exclusivité réservé, et ce, quel que soit son mode d'intervention. Or, il ressort des procès-verbaux dressés par Maîtres Durand et Godefroy, huissiers de justice, que la société Eole était référencée sur le site internet du salon Artibat qui s'est tenu à Rennes en Ile et Vilaine (35) les 22, 23 et 24 octobre 2014 en qualité d'exposant de murs mobiles et de cloisons extensibles et qu'elle y a occupé un stand 10AF23 dans le hall 10 A. Elle reconnaît au demeurant, dans ses conclusions (page 9), avoir eu une activité d'achat, de revente et de pose de produits concurrents à ceux de la société Algaflex, de sorte que contrairement à ses allégations, elle ne peut prétendre avoir respecté son obligation de non-concurrence limitée dans le temps et l'espace, qui doit s'entendre de façon beaucoup plus large que la seule signature d'un autre contrat d'agent commercial.

La société Eole devra en conséquence être condamnée à restituer à la société Algaflex la somme de 8 233,20 € HT versée au cours des mois de mai 2014 à juin 2015 pour n'avoir pas respecté cette obligation contractuelle. La décision des premiers juges sera également infirmée de ce chef.

En revanche, la demande en dommages et intérêts de 50 000 € formée par la société Algaflex, qui ne justifie par aucune pièce avoir subi un préjudice supplémentaire, ne saurait prospérer, de sorte que le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur le contrat verbal de distribution liant les parties

La société Algaflex se plaint d'une rupture brutale des relations commerciales établies sans préavis et sans qu'aucune faute de sa part ne le justifie. Elle excipe d'un chiffre d'affaires en constante augmentation depuis plus de quinze ans (passant de 87 469,05 € en 1999 à 2 023 308 € en 2013) et impute la responsabilité de la rupture de la relation de distribution à la seule société Eole, qui a diminué considérablement à compter de mai 2014 le volume des commandes de ses produits donnant lieu à un chiffre d'affaires de seulement 186 243 € pour le second semestre 2014 contre 1 078 591 € au second semestre 2013, soit une chute de plus de 80 % entre le premier et le second semestre 2014 qui n'est pas due à une crise du marché. Elle fait également valoir que l'intimée n'a jamais manifesté clairement son intention de rompre les relations avant le 4 juillet 2014 et a entretenu l'incertitude sur son intention de rompre sans jamais lui notifier la durée de préavis qu'elle entendait lui octroyer.

Enfin elle conteste la réalité des manquements allégués par son distributeur.

La société Eole nie avoir brutalement rompu les relations d'affaires avec son fabricant, puisque selon elle, elle a dénoncé les manquements de ce dernier de manière réitérée et la rupture ne visait qu'à mettre fin à l'obligation d'achat exclusive des produits de l'appelante. Elle conteste également l'existence d'une rupture partielle ainsi que le démontrerait le chiffre d'affaires réalisé en 2014, qui a atteint la somme de 1 334 143 €, dont 636 548 € après le 30 avril 2014. Surtout, elle se prévaut des fautes commises par la société Algaflex justifiant la rupture des relations, relatives aux hausses importantes de prix qui lui ont été imposées systématiquement, sans qu'elle en soit informée à l'avance et qui étaient contraires aux tendances du marché, à l'application à son égard de prix discriminatoires, à la cessation brutale de fabrication des produits, à l'intervention de sa partenaire sur le secteur de la distribution exclusive qui lui avait été concédé, aux difficultés de livraison tardives et incomplètes.

L'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce dispose que :

" Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait par tout producteur, commerçant industriel ou personne immatriculée au registre des métiers (...) de rompre brutalement, même partiellement une relation commerciale établie sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée en référence aux usages du commerce par des accords interprofessionnels (...) Les dispositions qui précédent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis en cas d'inexécution par l'autre parties de ses obligations ou en cas de force majeure ".

Le caractère établi des relations commerciales entre les parties n'est aucunement contesté par elles.

En revanche la société Eole invoque une exception d'inexécution et dénonce, en premier lieu, la politique tarifaire du fabricant, qui ne l'aurait pas informée des augmentations de prix, de sorte que lorsqu'elle avait souscrit des marchés publics et privés longtemps à l'avance, elle ne pouvait plus répercuter cette hausse de prix. Elle prétend que cette augmentation des prix est abusive, n'est pas liée à l'évolution du cours de matières premières et n'a pas été postérieure à la rupture.

La société Algaflex réfute cette thèse et prétend réévaluer ses tarifs annuellement en fonction du coût des matières premières (bois, laine de roche, quincaillerie, tissu....) et du coût de la main d'œuvre, pour suivre au mieux les tendances du marché et ne pas vendre à perte, et ce, en avertissant toujours ses distributeurs. Elle se prévaut des engagements de la société Eole, en qualité d'agent commercial, notamment celle de respecter strictement les prix ; elle ajoute que ses devis ont une durée de validité de 90 jours.

Au préalable, il importe d'observer que la société Algaflex ne saurait exciper d'une violation par la société Eole des clauses du contrat d'agent commercial relatives aux prix, aux commissions ou à la faculté pour elle d'interrompre librement la commercialisation de ses produits, puisque ces clauses ne sauraient s'appliquer à leurs relations de distribution, qui ne sont que verbales et dont la finalité est différente ; en effet dans le contrat d'agent commercial, l'activité de la société Eole est de négocier et conclure des contrats pour le compte et au nom de son mandant, sans clientèle propre, alors qu'aux termes du contrat verbal de distribution, elle commercialise en son nom et pour son compte.

A juste titre, la société Eole est fondée à se plaindre d'une information habituellement très tardive des hausses de prix des produits ou des arrêts de fabrication par la société Algaflex, qui seule décide de la gamme de ses produits. Ainsi il ressort des pièces 21, 22 et 24 de la société Algaflex, que suivant courriel du 18 octobre 2012 cette dernière a expliqué à la société Eole que pour les devis de l'année 2011 et les années antérieures à 2011, il conviendra d'appliquer la nouvelle tarification des cloisons extensibles pour juillet 2012 et que les devis réalisés à partir du 1er août 2012 devront appliquer les tarifs de juillet 2012 ; par courriel du 3 janvier 2013 cette dernière lui a communiqué " les tarifs 2013 en vigueur à utiliser dès à présent ", selon courriel du 12 février 2014 elle lui a également transmis " le nouveau tarif 2014 pour les murs mobiles en vigueur à compter de ce jour ". De même, la société Algaflex n'a informé son distributeur de l'arrêt de fabrication des cloisons extensibles Algasonic en mai 2014 que par lettre du 5 mai 2014 ; la circonstance que le fabricant a pu honorer l'ensemble des commandes du distributeur relatives aux cloisons Algasonic en octobre 2013, en avril et mai 2014 ne prive pas ce dernier d'invoquer la tardiveté de cette information, susceptible de le désorganiser et de lui faire perdre un client.

Néanmoins, la société Eole ne démontre pas l'existence d'un préjudice en lien avec cette négligence, puisqu'elle ne produit aucun appel d'offres ou marchés aux termes desquels elle se serait obligée à conserver ses propres prix pendant 18 mois, de sorte qu'elle n'aurait pas pu répercuter les hausses de prix sur ses clients. Par ailleurs, l'intimée reconnaît que la société Algaflex lui assurait un maintien des prix annoncés pendant un délai de 90 jours.

Sur les hausses de prix abusives alléguées, il apparaît de l'analyse de la pièce 19 de la société Eole que les tarifs 2014 ont connu une hausse bien supérieure aux autres années pour l'ensemble des produits; ainsi de 2011 à 2012, l'augmentation n'a jamais été supérieure à 3,56 %, de 2012 à 2013 si l'augmentation a plafonné à 6,13 %, huit diminutions de prix ont été également appliquées de 23,85 % à 6,67 %, alors que de 2013 à 2014 aucune diminution de prix n'a été opérée et les hausses significatives de prix ont été nombreuses, sans que la société Algaflex puisse les justifier. Si l'argumentation développée par la société Eole selon laquelle les hausses de prix des produits n'étaient pas liées aux prix du marché si elles sont comparées à l'évolution du cours des matières premières comme l'acier ou l'aluminium, n'est pas totalement pertinente, dans la mesure où la société Algaflex n'achète ses produits que transformés, la société Algaflex pour sa part ne produit aux débats aucune pièce expliquant cette hausse des prix et notamment sur le coût de la main d'œuvre qu'elle invoque ou sur une vente à perte pour elle alléguée.

Ainsi, il ressort de ces divers éléments que la société Algaflex a pratiqué à l'égard de son distributeur une politique tarifaire brutale, en l'informant systématiquement très tardivement, et en lui imposant en 2014 des prix très élevés, sans justifier par des éléments objectifs cette hausse de sorte qu'elle n'a pas permis à son distributeur d'anticiper sa propre politique commerciale à l'égard de ses clients.

En second lieu, la société intimée fait grief à la société appelante d'avoir appliqué des prix discriminatoires pour la concurrencer sur son propre secteur. Cette dernière objecte qu'en raison de dualité de leurs relations (contrat d'agent commercial et distributeur exclusif) la société Eole en retirait toujours un bénéfice soit en qualité de distributeur soit en qualité d'agent commercial ; elle considère qu'il était plus avantageux pour la société Eole, lorsqu'elle entrevoyait la possibilité de fixer une marge bénéficiaire sur la revente des produits Algaflex supérieure au montant de sa commission en qualité d'agent commercial, de soumissionner à des marchés en son propre nom, soit à l'inverse de soumissionner à des marchés au nom et pour le compte de la société Algaflex pour percevoir une commission plus conséquente calculée sur le chiffre d'affaires rapporté. Il ressort des tableaux récapitulatifs des chiffres d'affaires et pièces comptables produits par la société Algaflex (pièces 39, 40, 41) que si pour la société Eole en 1999 son chiffre d'affaires en sa qualité d'agent commercial (904 088 €) était plus important que celui réalisé en qualité de distributeur (87 469 €), à partir de l'année 2003 ce rapport s'est inversé à un point tel qu'en 2013 le chiffre d'affaires de l'agent commercial n'était plus que de 83 187€ et celui du distributeur de 2 023 308 €, soit plus de 24 fois supérieur, de sorte que l'activité d'agent commercial était devenue tout à fait mineure au regard de celle de distributeur et que la société Eole se trouvant dans l'obligation de s'approvisionner exclusivement auprès de la société Algaflex était ainsi dépendante de la politique commerciale développée par le fabricant pour satisfaire sa propre clientèle, ce qui était accentué par la puissance économique de ce dernier (plus de 17 millions de chiffre d'affaires) par rapport au distributeur (3,5 millions de chiffre d'affaires). Ainsi l'argument de l'appelante selon lequel la société intimée en fonction du gain espéré choisissait d'intervenir en qualité d'agent commercial ou en qualité de distributeur, pour systématiquement en retirer un bénéfice, est dénué de sérieux. C'est au contraire l'appelante qui pouvait avoir recours en temps opportun pour elle au contrat d'agent commercial lorsque les deux sociétés se trouvaient en concurrence. A titre d'exemple, il peut être observé que le 9 juillet 2013 sur un chantier à Limoges " Bâtiment Bureau parc d'activités d'Ester " la société Algaflex a répondu à un appel d'offres en proposant des tarifs de fournitures et pose de menuiseries pour un montant global de 8 212 € HT, soit une différence de prix de 4 386 €, par rapport au prix de la société Eole de 12 580 €, qui devait pour sa part acquérir préalablement le produit Algaflex pour un montant conséquent de 5 850 € HT, l'appelante n'apportant aucune preuve d'une marge extravagante que l'intimée aurait entendu pratiquer. Ainsi la société Algaflex était en mesure de concurrencer facilement la société Eole et choisir de lui verser une modique commission ainsi qu'il ressort du tableau produit (pièce 46 de la société Algaflex).

En troisième lieu, la société Eole impute à la société Algaflex des manquements à son obligation de respecter le territoire de distribution exclusive qu'elle lui avait concédé; à ce titre elle invoque le contrat signé en 2006 par l'appelante avec la société Accorequip qui l'aurait en définitive privée de réaliser des chantiers sur son secteur exclusif.

L'appelante objecte que ce contrat n'interfère en rien avec les accords exclusifs conclus avec la société Eole sur son secteur de représentation.

Le contrat de référencement du 6 juillet 2006 signé entre les sociétés Accorequip et Algaflex a pour objet le référencement de la seconde par la première pour tous produits et services afin de permettre à la société Algaflex d'avoir accès aux débouchés constitués par l'ensemble des établissements, hôtels des enseignes du groupe Accor et des partenaires dans tous les pays ; les produits sélectionnés sont précisés à l'annexe 1 comme suit : " Agencement Menuiserie et cloisons mobiles ". Si l'intimée ne peut démontrer l'existence et le quantum du préjudice résulté de la violation de l'obligation d'exclusivité par l'appelante, dès lors que cette dernière a refusé de lui communiquer le chiffre d'affaires réalisé avec la société Accorequip, en revanche le principe de cette violation est établi, puisque les territoires concédés à la société Eole n'ont pas été exclus de ce contrat litigieux. Cette faute était donc de nature à porter atteinte à la compétitivité de la société Eole.

En quatrième lieu, la société Eole dénonce le non-respect des délais de livraison convenus, qui l'a exposée à des pénalités de retard, ainsi que l'incomplétude des livraisons.

La société Algaflex conteste les retards de livraisons, fait valoir que ses délais ne sont donnés qu'à titre indicatif et soutient que de simples défaillances dans le service après-vente ne peuvent suffire à dispenser l'auteur de la rupture du respect du délai de préavis.

Il ressort des pièces n° 5, 6, 29 à 35, 37 de la société Eole que celle-ci dès le 17 octobre 2012 s'est plainte des délais de fabrication en hiver, a mis en demeure à de multiples reprises les 31 juillet, 30 septembre et 5, 20 et 28 novembre 2013 la société Algaflex de respecter les délais de livraisons, que cette dernière a reconnu clairement les 30 octobre et 13 novembre 2013 ses retards de livraison, en les attribuant à des absences de son personnel, à une forte augmentation des commandes de sorte que les délais de livraisons ont été portés à sept semaines pour les cloisons Ecoplast et à 10 semaines pour les cloisons Série 7000 Algawood et Algasonic ou encore à un retard de fabrication d'un autre fabricant (de strat thermopal pièce 37 de la société Eole) et a admis que " la situation s'avère critique en production pour toute la fin de l'année, que les délais de la moitié des affaires en panneaux au moins vont être décalés ", de sorte qu'il est ainsi établi que ce n'est pas la société Eole qui est à l'origine des difficultés, contrairement aux allégations de l'appelante, même si des décalages dûs au distributeur ont pu se produire, et que les parties étaient conscientes de l'importance du respect des délais pour leurs clients communs, même s'ils n'étaient qu'indicatifs en théorie.

Enfin, la société Algaflex excipe d'une renonciation de la société Eole à se prévaloir des divers manquements reprochés et en veut pour preuve, d'une part, l'existence d'une nouvelle commande en juillet 2014 portant sur des murs mobiles et d'autre part, une attente de 6 mois après l'envoi de son premier courrier par lequel elle invoquait des griefs.

Mais la constance des courriers de mise en demeure adressés par l'intimée à l'appelante les 31 juillet 2013, 30 septembre 2013, 5 novembre 2013, 20 novembre 2013, 28 novembre 2013 prive cette argumentation de pertinence. Il en est de même de l'existence d'une nouvelle commande en juillet 2014 puisque la société Eole n'entendait se défaire que de l'obligation d'exclusivité mais conserver la société Algaflex comme un de ses fabricants.

Dans ces conditions, il ressort des divers éléments évoqués ci-dessus la preuve de plusieurs manquements suffisamment graves et persistants - propres à porter atteinte aux intérêts commerciaux du distributeur - commis par la société Algaflex de nature à exempter la société Eole du respect d'un préavis minimal ; l'appelante sera donc déboutée de sa demande d'indemnisation du fait de la rupture brutale des relations commerciales et la décision des premiers juges sera confirmée de ce chef.

Sur les agissements déloyaux reprochés à la société Eole par la société Algaflex

La société Algaflex fait grief à la société Eole d'avoir violé son devoir de collaboration loyale dans l'exécution de ses engagements tant pour le contrat d'agent commercial que pour celui de distributeur. Elle prétend que celle-ci a refusé de lui communiquer les coordonnées de ses clients ayant commandé ses produits et a démarché cette clientèle pour le profit de ses concurrents. Elle soutient que la société Eole est ainsi référencée sur le site internet de son concurrent la société Hufcor depuis juillet 2013, dont elle est le distributeur depuis plusieurs années et dont elle a exposé les produits et distribué les catalogues au salon Artibat à Rennes en octobre 2014 ; elle lui reproche aussi d'avoir supprimé toute référence à la société Algaflex sur ses produits, ce qui participe d'un démarchage déloyal. Elle dénonce également le fait que l'intimée a exploité et exploite encore les images des produits fabriqués par elle avec les plans conçus par elle en fraude ses droits pour favoriser la vente pour son propre compte de produits concurrents. Elle estime que l'usurpation de l'image des produits Algaflex traduit sa volonté délibérée de tirer profit sans bourse déliée des investissements de son ancien partenaire et constitue un agissement parasitaire fautif en vertu de l'article 1382 du Code civil. Elle évalue le préjudice consécutif à ses agissements à la somme de 150 000 €. Elle sollicite également qu'il soit ordonné à la société Eole de retirer immédiatement tout contenu relatif à Algaflex et ou à ses produits de son site internet et de cesser toute utilisation que ce soit de ses produits comme de leur image, sous astreinte de 5 000 € par jour et infraction.

La société Eole conteste le comportement qui lui est imputé et argue qu'elle n'a jamais été l'agent général ou le distributeur de la société Hufcor ; elle estime n'avoir pas utilisé illicitement les produits du fabricant puisqu'elle n'a utilisé que des produits sur lesquels elle avait réalisé une prestation d'agencement en partenariat avec des architectes ou ses clients.

Pour le contrat d'agent commercial, il ressort de la pièce 17 de la société Algaflex que la société Eole lui a bien communiqué le 11 juillet 2014, suite à sa demande, son fichier client, sans que la première ne justifie avoir réclamé postérieurement à cette date d'autres éléments d'information sur cette clientèle.

En ce qui concerne le contrat verbal de distribution, pendant le cours des relations commerciales, contrairement aux allégations de la société Algaflex, le site internet de la société Eole comportait bien la référence de la société Algaflex en ouvrant un onglet. Il résulte également du procès-verbal de Maître Durand, huissier de justice en date du 12 mai 2014 que la société Eole a publié à la date de juillet 2013 sur le site internet de la société Hufcor en Allemagne une simple fiche technique relative à un mur mobile type 100/100K, de sorte qu'il n'est pas démontré que la clause d'exclusivité portant sur des territoires concédés (19 départements français) ait été violée et que ce type de murs mobiles était un des produits conçus et fabriqués par la société Algaflex lorsqu'il est comparé à la liste des murs mobiles (pièce 20 de l'intimée). Par ailleurs, la page extraite du site internet de la société Hufcor (pièce 91 de la société Algaflex) sur laquelle apparaît la société Eole comme " son représentant " ne porte aucune date, l'appelante la datant elle-même du 30 juillet 2015, donc postérieurement à la rupture des relations commerciales. De même les constatations de Maître Godefroy, huissier de justice, le 22 octobre 2014 au salon de la construction de l'ouest Artibat à Rennes sur la présence de la société Eole, exposant proposant des produits (murs mobiles) sur lesquels figure le nom du fabricant Hufcor sont postérieures à la rupture des relations d'affaires entre les parties, étant observé que la clause de non-concurrence pendant une année après la rupture ne figure que dans le contrat d'agent commercial et ne saurait s'appliquer aux relations verbales de distribution. A cet égard il peut être utilement observé que l'appelante elle-même n'avait pas fait mention d'une telle clause dans les deux projets de contrat de distribution proposés à M. Gueguen et refusés par lui. En outre, la société Algaflex n'est pas fondée à se prévaloir de faits anciens de suppression de la marque Algaflex sur ses produits commis par la société Eole en 2007, dès lors que les parties ont signé le 7 septembre 2009 un protocole transactionnel à ce sujet.

En revanche sur l'utilisation des images, il ressort des procès-verbaux dressés par Maître Durand, huissier de justice, les 24 juin, 31 juillet, 25 septembre, 23 décembre 2014 et 30 mars 2015 que les photographies des murs mobiles suivants : " Classic ", " Stylist " et " Lumière " se trouvant sur le site de la société Eole figurent en couverture ou à l'intérieur des catalogues de la société Algaflex ; cet huissier de justice a également constaté que les photographies du mur mobile " Cintre " d'un chantier de Saint Germain en Laye (78), du mur mobile " Classic " d'un chantier de la grande Halle de Cournon d'Auvergne (63), du mur mobile " Stylist " d'un chantier du Centre de conférence Leclerc de Saint Quentin Fallavier (38), du mur mobile d'un chantier du Méridien Etoile à Paris - fabriqués et posés par la société Algaflex - apparaissent sur le site de la société Eole. Enfin, Maître Durand a capturé à la rubrique " Murs mobiles " de la page d'accueil du site de la société Eole la photographie d'un mur mobile modèle " Lumière " sur laquelle est visible la poignée en demi-lune cerclée de vert, qui constitue une des spécificités de la société Algaflex. Pour sa défense, la société Eole ne saurait prétendre, dès lors qu'elle ne verse aucune pièce corroborant ses simples allégations, avoir eu recours à son propre photographe pour saisir ces images ou avoir réalisé une prestation d'agencement originale en partenariat avec des architectes ou des clients. Dans ces conditions, il sera fait droit à la prétention de l'appelante visant à enjoindre à l'intimée de cesser d'utiliser et diffuser les photographies et images des produits fabriqués par la société Algaflex, sous astreinte de 300 € par jour et par infraction constatée dans les conditions fixées au dispositif du présent arrêt.

Ce comportement déloyal ouvre droit pour la société Algaflex à des dommages et intérêts estimés par la cour à la somme de 20 000 € ; la décision des premiers juges sera infirmée de ce chef.

La société Algaflex réclame également le paiement d'une somme de 100 000 € à titre de dommages et intérêts du fait de la reprise de son visuel sur le salon Artibat organisé à Rennes les 22,23 et 24 octobre 2014.

La société Eole conteste s'être appropriée la signalétique orange et blanche dans sa communication commerciale au cours du dit salon.

Les premiers juges ont justement statué par des motifs que la cour adopte, qu'il ne peut davantage être déterminé si le visuel litigieux représente un chantier réalisé par la société Eole avec des produits de la société Algaflex ou s'il s'agit d'un visuel repris d'un catalogue ou d'une documentation commerciale de cette dernière ; la décision de rejet de ce chef de demande sera en conséquence confirmée.

Sur la demande en concurrence déloyale formée par la société Eole

La société Eole sollicite une indemnisation de 100 000 € en raison de manœuvres accomplies par la société Algaflex qui constitueraient des faits de concurrence déloyale à son endroit. Elle lui reproche d'une part, de s'être adressée aux membres principaux de son personnel et non à son dirigeant pour déstabiliser la société, d'autre part, d'avoir directement démarché sa clientèle pour détourner les commandes à son profit, d'avoir débauché son commercial, d'avoir repris son visuel sur le salon Artibat en reprenant une couleur de police blanche sur un fond orange, tous griefs contestés par la société Algaflex, qui s'oppose à cette prétention.

En vertu du principe de la liberté du commerce et de l'industrie, le démarchage de la clientèle d'autrui est libre, pourvu qu'il ne s'accompagne pas d'actes déloyaux. Au cas particulier il ne saurait être reproché à la société appelante d'avoir voulu informer ses principaux interlocuteurs dans l'équipe de sa partenaire afin d'obtenir une meilleure organisation possible de cette rupture brutale de relations.

Par ailleurs la circonstance que deux salariés ont démissionné dans un temps rapproché ne saurait suffire à établir l'existence de procédés déloyaux, dans la mesure où un salarié peut librement démissionner. En conséquence, faute de preuve de l'existence de manœuvres dolosives, la société Eole sera déboutée de cette demande et la décision des premiers juges confirmée de ce chef.

Chaque partie succombant partiellement en ses prétentions, les dépens seront partagés par moitié entre elles et en équité, les demandes formées au titre de l'article 700 du Code de procédure civile seront rejetées.

Par ces motifs, LA COUR, rejette la demande en nullité du jugement du 17 novembre 2015 formée par la société Algaflex; confirme le jugement entrepris hormis sur les dispositions relatives au contrat d'agent commercial, aux agissements déloyaux et à l'utilisation d'images ; statuant à nouveau de ces seuls chefs, dit que la société Eole a rompu abusivement le contrat d'agent commercial en date du 4 juin 1997 et n'a pas respecté la clause contractuelle de non-concurrence ; en conséquence, condamne la société Eole à verser à la société Algaflex la somme de 13 506 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ; condamne la société Eole à restituer à la société Algaflex la somme de 8 233,20 € versée en contrepartie de la clause de non-concurrence du contrat du 4 juin 1997 ; condamne la société Eole à verser à la société Algaflex la somme de 20 000 € au titre d'agissements déloyaux ; ordonne à la société Eole de retirer de son site internet et ou de tout autre support lui appartenant tout contenu relatif à la société Algaflex et/ou aux cloisons extensibles et murs mobiles conçus par cette dernière et notamment les images de ces produits et de cesser toute utilisation quelle qu'elle soit de ces produits comme de leur image, sous astreinte de 300 € par jour et par infraction constatée, astreinte commençant à courir dans les 15 jours de la signification du présent arrêt ; fait masse des dépens et dit qu'ils seront partagés par moitié entre les parties ; Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.