Livv
Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 5, 5 octobre 2017, n° 16-03834

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Tan Market (SAS)

Défendeur :

André Kacher (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Schaller

Conseillers :

Mme du Besset, Mme Castermans

Avocats :

Mes Bellichach, Soussan, Pachalis

T. com. Lille, du 1er juill. 2014

1 juillet 2014

Faits et procédure :

La société Tan Market, qui exploite un fonds de commerce de supermarché à Lille, s'est approvisionnée en viande et produits cashers à compter de janvier 2011 auprès de la société André Kacher, entreprise de commerce de viande de boucherie.

Déplorant des problèmes récurrents de péremption de marchandises livrées, la société Tan Market a demandé à la société André Kacher des avoirs correspondants aux produits défectueux. La société André Kacher n'a pas donné suite à ces demandes d'avoirs et a reproché à la société Tan Market plusieurs retards de paiements.

Par lettre recommandée du 27 septembre 2012, la société André Kacher a mis la société Tan Market en demeure de lui payer neuf factures restées impayées et lui a indiqué qu'elle cessait ses relations avec elle compte tenu de leurs divergences.

Par lettre recommandée du 29 août 2012, la société Tan Market a contesté cette rupture unilatérale des relations commerciales.

Par acte du 19 décembre 2013, la société André Kacher a saisi le Tribunal de commerce de Lille afin de faire condamner la société Tan Market au paiement des sommes réclamées.

Par jugement en date du 1er juillet 2014, le Tribunal de commerce de Lille a :

donné acte à la société Tan Market du bien-fondé de sa demande d'avoir sur la facture " indemnité " pour un montant de 598 euros,

débouté la société André Kacher de sa demande d'indemnité transactionnelle d'un montant de 716,76 euros,

condamné la société Tan Market à payer à la société André Kacher la somme de 4 180,28 euros au titre de factures impayées et majorée de la somme de 86,66 euros au titre d'intérêts de retard de paiement, ces sommes portant intérêts au taux légal à compter du 27 septembre 2012,

condamné la société Tan Market à payer à la société André Kacher la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

condamné la société Tan Market à prendre en charge tous les frais et dépens de l'instance, taxés et liquidés à la somme de 81,12 euros en ce qui concerne les frais de greffe,

débouté les parties de toutes leurs autres demandes fins et conclusions.

Vu l'appel interjeté par la société Tan Market le 22 août 2014 devant la Cour d'appel de Douai puis le 11 février 2016 devant la Cour d'appel de Paris,

Vu l'arrêt de la Cour d'appel de Douai du 31 mars 2016 déclarant irrecevable l'appel interjeté devant elle,

Vu les dernières conclusions signifiées le 12 mai 2017 par la société Tan Market par lesquelles il est demandé à la cour de :

- dire et juger que la Cour d'appel de Paris est seule compétente pour connaître de l'appel formé par la société Tan Market contre le jugement du Tribunal de commerce de Lille en date du 1er juillet 2014, au motif que le tribunal a statué sur une demande fondée sur l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce ;

- dire et juger que le délai d'appel contre le jugement du Tribunal de commerce de Lille en date du 1er juillet 2014 n'a pas commencé à courir, l'acte de notification dudit jugement, en date du 24 juillet 2014, mentionnant une cour d'appel incompétente pour connaître de l'appel de la société Tan Market ;

En conséquence :

- dire et juger la société Tan Market recevable et bien fondée en toutes ses demandes, fins, moyens et prétentions ; y faire droit et en conséquence ;

- rejeter les demandes de la société André Kacher ;

- dire et juger que la société André Kacher a commis de nombreux manquements à ses obligations, tant en termes de qualité des produits livrés que de respect des dates limite de consommation raisonnables ;

- dire et juger que la société André Kacher s'est rendue coupable d'une rupture brutale et fautive des relations commerciales établies qu'elle entretenait depuis près de deux ans avec la société Tan Market ;

- dire et juger que la société Tan Market a subi un important préjudice au titre de la perte de marge et de clientèle induite par la rupture brutale susvisée ;

- dire et juger que la société Tan Market a subi un important préjudice moral et une atteinte à sa réputation du fait des incidents sanitaires récurrents déplorés sur les produits livrés ;

- dire et juger que la facture n° 3016946 portant sur des " frais de dossier " pour un montant de 598 euros TTC n'est pas justifiée ;

condamné la société Tan Market à payer à la société André Kacher la somme de 4 180,28 euros au titre de factures impayées et majorée de la somme de 86,66 euros au titre d'intérêts de retard de paiement, ces sommes portant intérêts au taux légal à compter du 27 septembre 2012,

condamné la société Tan Market à payer à la société André Kacher la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

condamné la société Tan Market à prendre en charge tous les frais et dépens de l'instance, taxés et liquidés à la somme de 81,12 euros en ce qui concerne les frais de greffe,

débouté les parties de toutes leurs autres demandes fins et conclusions.

Vu l'appel interjeté par la société Tan Market le 22 août 2014 devant la Cour d'appel de Douai puis le 11 février 2016 devant la Cour d'appel de Paris,

Vu l'arrêt de la Cour d'appel de Douai du 31 mars 2016 déclarant irrecevable l'appel interjeté devant elle,

Vu les dernières conclusions signifiées le 12 mai 2017 par la société Tan Market par lesquelles il est demandé à la cour de :

- dire et juger que la Cour d'appel de Paris est seule compétente pour connaître de l'appel formé par la société Tan Market contre le jugement du Tribunal de commerce de Lille en date du 1er juillet 2014, au motif que le tribunal a statué sur une demande fondée sur l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce ;

- dire et juger que le délai d'appel contre le jugement du Tribunal de commerce de Lille en date du 1er juillet 2014 n'a pas commencé à courir, l'acte de notification dudit jugement, en date du 24 juillet 2014, mentionnant une Cour d'appel incompétente pour connaître de l'appel de la société Tan Market;

En conséquence :

- dire et juger la société Tan Market recevable et bien fondée en toutes ses demandes, fins, moyens et prétentions ; y faire droit et en conséquence ;

- rejeter les demandes de la société André Kacher ;

- dire et juger que la société André Kacher a commis de nombreux manquements à ses obligations, tant en termes de qualité des produits livrés que de respect des dates limite de consommation raisonnables ;

- dire et juger que la société André Kacher s'est rendue coupable d'une rupture brutale et fautive des relations commerciales établies qu'elle entretenait depuis près de deux ans avec la société Tan Market ;

- dire et juger que la société Tan Market a subi un important préjudice au titre de la perte de marge et de clientèle induite par la rupture brutale susvisée ;

- dire et juger que la société Tan Market a subi un important préjudice moral et une atteinte à sa réputation du fait des incidents sanitaires récurrents déplorés sur les produits livrés ;

- dire et juger que la facture n° 3016946 portant sur des " frais de dossier " pour un montant de 598 euros TTC n'est pas justifiée ; dire et juger que la demande d'indemnité transactionnelle formulée en première instance par la société André Kacher ne l'est pas davantage ;

En conséquence,

- infirmer le jugement du Tribunal de commerce de Lille du 1er juillet 2014 en ce qu'il a :

implicitement rejeté, sans pour autant l'indiquer dans son dispositif, la demande d'indemnisation de la société Tan Market au titre de la rupture brutale de la relation commerciale qui la liait à la société André Kacher ;

condamné la société Tan Market à payer à la société André Kacher la somme de 4 180,28 euros au titre des factures impayées, majorée de la somme de 86,66 euros au titre d'intérêts de retard de paiement ;

condamné la société Tan Market à payer à la société André Kacher la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

- confirmer le jugement du Tribunal de commerce de Lille en ce qu'il a :

débouté la société André Kacher de sa demande au titre de la facture n° 3016946 portant sur des " frais de dossier " ne découlant d'aucune stipulation contractuelle ;

débouté la société André Kacher de sa demande d'indemnité transactionnelle d'un montant de 716,76 euros ;

- condamner la société André Kacher à payer à la société Tan Market la somme de 12 144 euros au titre de la perte de marge et de clientèle induite par la rupture déplorée ;

- condamner la société André Kacher à payer à la société Tan Market la somme de 5 000 euros au titre du préjudice résultant de la désorganisation des approvisionnements et des rapports avec la clientèle induites par la rupture brutale commise par la société André Kacher ;

- condamner la société André Kacher à payer à la société Tan Market la somme de 5 000 euros au titre de son préjudice moral et de l'atteinte à sa réputation ;

- condamner la société André Kacher à payer à la société Tan Market la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel dont le montant pourra être recouvré par Maître Jacques Bellichach, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions signifiées le 19 juillet 2016 par la société André Kacher par lesquelles il est demandé à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris sauf en ce qu'il a débouté la société André Kacher de sa facture au titre de la facture portant sur des frais de dossier.

En conséquence :

- condamner la société Tan Market à payer à la société André Kacher la somme de 5 495,02 euros, hors intérêts au taux légal à compter du 27 septembre 2012 ;

- condamner la société Tan Market à payer à la société André Kacher la somme de 2 000 euros au titre du préjudice résultant du non-paiement de sa créance ;

- dire et juger que la rupture des relations contractuelles est parfaitement fondée et que la société André Kacher ne saurait être condamnée à ce titre ;

- débouter la société Tan Market de l'ensemble de ses demandes ;

- condamner la société Tan Market à payer à la société André Kacher la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- condamner la société Tan Market aux entiers dépens de l'instance.

Au soutien de ses prétentions, la société Tan Market fait valoir que le relevé d'un moyen tiré de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce entraîne la compétence matérielle exclusive de la Cour d'appel de Paris et ajoute que son action est recevable puisque la mention erronée, dans l'acte de notification d'un jugement, de la voie de recours ouverte, de son délai ou de ses modalités a pour effet de ne pas faire courir le délai d'appel.

Sur la rupture des relations commerciales, elle soutient qu'une relation commerciale était incontestablement établie entre elle et la société André Kacher et qu'il est indifférent à cet égard qu'aucune commande n'ait été en cours au moment de la rupture. Elle poursuit en estimant que cette rupture doit être considérée comme brutale au motif qu'aucun préavis n'a été respecté, que les relations commerciales étaient établies depuis près de deux ans, que la société André Kacher est l'un des principaux acteurs du marché casher en France ce qui implique que la recherche d'un nouveau fournisseur requiert un certain délai, et enfin que leurs échanges commerciaux étaient financièrement importants.

Elle précise qu'elle-même n'a commis aucune inexécution qui aurait pu exonérer la société André Kacher de sa responsabilité, son refus de payer certaines factures étant justifié par les manquements de la société André Kacher à ses obligations contractuelles notamment celles liées au respect du contrat-date et celles de livraison de produits répondant aux exigences normales de qualité.

Elle sollicite l'indemnisation de son préjudice qu'elle chiffre à 2 100 euros de marge brute pour quatre mois, multiplié par quatre en raison des fêtes juives pendant ces quatre mois, soit 8 400 euros au total, outre 3 744 euros de perte de clientèle et 5 000 euros d'indemnité forfaitaire pour la désorganisation des approvisionnements et 5 000 euros pour l'atteinte à sa réputation.

En réponse, la société André Kacher indique avoir entretenu des relations commerciales avec la société Tan Market depuis 2011 et avoir livré régulièrement des marchandises à la société Tan Market dont une partie n'a pas été réglée par cette dernière à hauteur de 4 778,28 euros, bien qu'elle admette en avoir été destinataire, que la dette est certaine, outre les pénalités de retard, qu'aucune déduction n'est justifiée, que la société Tan Market ne rapporte pas la preuve que les produits livrés étaient périmés, que le contrat d'approvisionnement ne comportait aucune clause relative aux dates limites de conservation, que la société André Kacher n'a pas manqué à ses obligations.

Sur la rupture des relations commerciales, elle estime qu'aucune relation commerciale n'était établie, que la conclusion régulière de contrats ponctuels ne fait pas naître un contrat-cadre à exécution successive, et ce à plus forte raison au regard du faible volume des commandes, de l'existence d'autres fournisseurs de produits identiques et de son importance économique toute relative en comparaison de la société Tan Market. Elle ajoute également avoir laissé à la société Tan Market un délai de 3 mois à compter de la décision de suspension de livraison avant de lui notifier sa décision d'arrêt total. Elle fait enfin état de l'aide qu'elle a apportée à la société Tan Market en lui adressant une proposition de lui fournir une liste de sociétés du secteur de capacité supérieure à la sienne et le cas échéant de les lui présenter.

Elle considère en outre que, conformément à l'article L. 442-6 du Code de commerce, les délais anormaux de paiement de ses factures et le non-paiement d'une partie d'entre elles, ainsi que la nécessité de relancer plusieurs fois la société Tan Market, mais en vain, justifient qu'il ait été procédé à la résiliation du contrat.

Elle affirme enfin que la société Tan Market ne justifie pas de son préjudice de sorte que ses demandes indemnitaires ne peuvent qu'être rejetées.

S'agissant de son préjudice propre, elle souligne que le non-acquittement des dettes de la société Tan Market lui cause un trouble de trésorerie important qui commande sa condamnation au paiement d'une somme de 2 000 euros.

La cour renvoie, pour plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, en application des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile.

Sur ce, LA COUR,

Sur la recevabilité de l'action de la société Tan Market :

Considérant que la cour n'est saisie ni d'office ni par une des parties d'aucune demande d'irrecevabilité de l'appel sur le fondement de l'article D. 442-3 du Code de commerce, aux termes duquel la cour d'appel compétente pour connaître des décisions rendues au visa de l'article L. 442-6 du Code de commerce est la Cour d'appel de Paris ;

Qu'à cet égard, au demeurant, le moyen serait inopérant puisque la Cour d'appel de Paris est saisie;

Que la société André Kacher ne soulève en outre pas le défaut de respect du délai d'appel ;

Qu'en conséquence, la Cour d'appel de Paris n'étant saisie d'aucune demande d'irrecevabilité, il n'y a pas lieu de statuer sur le moyen de défense de la société Tan Market ;

Sur la rupture abusive de la relation commerciale :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce, engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers, de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels. Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure ;

Que la notion de relation commerciale au sens de l'article L. 442-6 dudit code s'entend indépendamment de la conclusion d'un contrat écrit ;

Qu'en l'espèce, il n'est pas contesté que pendant près de deux ans, la société Tan Market s'est approvisionnée en viande auprès de la société André Kacher, sans qu'un contrat écrit n'ait été signé entre les parties ;

Que toutefois, il ressort du compte client produit par la société Tan Market que cette dernière passait commande très régulièrement à la société André Kacher, pour des montants relativement conséquents ;

Que le montant total de ces commandes était de 50 821,60 euros, ce que ne conteste pas la société André Kacher ;

Qu'environ 150 factures ont été émises sur deux ans ;

Que même en l'absence de contrat écrit normalisant leurs relations, la succession de commandes régulières et financièrement significatives, au regard du montant total, pendant une durée de deux années, est suffisante pour caractériser la relation commerciale au sens de l'article 442-6 du Code de commerce ;

Que le fait que les deux sociétés n'aient aucune transaction en cours au moment de la rupture n'écarte pas l'existence d'une relation commerciale établie ;

Que le jugement sera infirmé sur ce point ;

Considérant que la société André Kacher ne démontre pas que les retards de paiement qu'elle allègue constituent une inexécution justifiant la rupture des relations sur le fondement de l'article L. 442-6 du Code de commerce, en application duquel la preuve d'une faute d'une gravité suffisante doit être rapportée et que de simples retards de paiement, indépendamment des troubles qu'ils sont susceptibles de causer, sont insuffisants à caractériser une telle faute ;

Qu'il appartenait à la société André Kacher de respecter un délai de préavis suffisant en application de ces dispositions, ce qu'elle n'a pas fait, le simple fait de proposer à la société Tan Market de lui présenter d'autres fournisseurs n'étant pas suffisant ;

Qu'au regard de la durée des relations commerciales depuis deux ans, et compte tenu de l'absence d'éléments établissant une dépendance économique particulière, un préavis d'une durée de deux mois paraît suffisant ;

Que l'indemnisation demandée par la société Tan Market fondée sur un pourcentage de marge brute de 30 % de son chiffre d'affaires, multiplié par quatre en raison des fêtes juives ne repose sur aucun élément justifiant tant le pourcentage de marge brute demandé que le coefficient de multiplication ;

Que la société Tan Market ne produit qu'une pièce comptable correspondant au compte client de la société André Kacher, établissant sa moyenne d'achat entre le mois de février 2011 et celui de mai 2012 ;

Qu'en l'absence de tout autre justificatif de son préjudice, la société Tan Market ne pourra qu'être déboutée de sa demande au titre de la perte de marge brute pendant le préavis ;

Que la société Tan Market ne rapporte pas davantage la preuve des autres préjudices qu'elle allègue et dont elle doit par conséquent également être déboutée ;

Qu'il y a lieu, par motifs propres, de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société Tan Market de toutes ses demandes d'indemnisation ;

Sur la demande de paiement de la société André Kacher :

Considérant qu'aux termes de l'article 1134 (ancien) du Code civil, applicable en la cause, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi.

Qu'aux termes de l'article 1315 (ancien) du Code civil, applicable en la cause, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver et réciproquement celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ;

Considérant que les factures émises par la société André Kacher à l'attention de la société Tan Market n'étaient pas contestées hormis la facture n° 3016946 correspondant à des " prestations frais de dossier " inexpliquées de 598 € et pour laquelle le tribunal a à juste titre rejeté la demande en paiement ;

Que la société Tan Market s'oppose à la demande en paiement des autres factures au motif que les produits livrés et facturés auraient été périmés ou défectueux et qu'elle avait formulé des demandes d'avoirs pour ces livraisons non conformes ;

Que la charge de la preuve du motif justifiant le non-paiement des factures lui incombe ;

Qu'elle produit plusieurs photographies mettant en lumière la proximité très réduite entre la date de livraison de certains produits avec leur date de péremption, et la qualité insuffisante d'un point de vue sanitaire d'autres produits ;

Que si le caractère avarié des marchandises photographiées est certain, il ne peut en être déduit qu'elles étaient avariées lors de la livraison ;

Qu'il ne peut en effet en être déduit que les marchandises ont été reçues dans cet état par la société Tan Market ;

Qu'en ce qui concerne le non-respect du " contrat-date ", un e-mail du 17 juin 2011 de la société Tan Market adressé à la société André Kacher établissant que cette dernière a livré le 17 juin 2011 un produit dont la date limite de consommation était le 23 juin 2011, ce qui n'est pas contesté, ne suffit pas pour établir le non-respect coutumier du " contrat-date " ;

Qu'aucune autre preuve des défauts de livraison allégués n'est rapportée par la société Tan Market ;

Qu'elle ne pouvait, par conséquent, s'opposer valablement au paiement des factures correspondantes ;

Que c'est dès lors à juste titre que les premiers juges ont condamné la société Tan Market au paiement de la somme de 4 180,26 euros correspondant à la somme des factures, déduction faite de la facture de 598 euros non justifiée ;

Considérant qu'en application de l'article 1153 (ancien), applicable en la cause, dans les obligations qui se bornent au paiement d'une certaine somme, les dommages-intérêts résultant du retard dans l'exécution ne consistent jamais que dans la condamnation aux intérêts au taux légal, sauf les règles particulières au commerce et au cautionnement ;

Que le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts des intérêts moratoires de la créance ;

Qu'en l'espèce, si la société André Kacher invoque un préjudice financier résultant du défaut de paiement par la société Tan Market de ses factures, elle ne produit toutefois aucune pièce justificative de ce préjudice ;

Qu'elle devra être déboutée de sa demande d'indemnisation à ce titre ;

Considérant que l'équité commande d'allouer à la société Andre Kacher la somme supplémentaire de 2 000 euros, en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, dit n'y avoir lieu de statuer sur l'irrecevabilité de l'appel ; confirme, par motifs propres, le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a omis de statuer sur la rupture brutale des relations commerciales avec la société Tan Market ; Statuant de nouveau sur le point réformé, constate la brutalité de la rupture des relations commerciales établies, dit que le préjudice n'est pas justifié, déboute la société Tan Market de sa demande d'indemnisation sur le fondement de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce ; Y ajoutant, condamne la société Tan Market à payer à la société Andre Kacher la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ; condamne la société Tan Market aux dépens ; rejette toutes autres demandes.