CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 11 octobre 2017, n° 15-22585
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Aquitaine Distribution Fruits et Légumes (Sasu) , Robledo (Sasu), Mequinion (ès qual.), Stutz (ès qual.)
Défendeur :
Distri Sud-Ouest (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Luc
Conseillers :
Mmes Mouthon Vidilles, Comte
Avocats :
Mes Boccon Gibod, Coicaud, Regnier, Heintz, Cavalie
Faits et procédure
La Sasu Robledo est spécialisée dans l'activité d'exploitation et de vente en gros et demi-gros et détail de produits maraîchers, fruits, légumes, plantes et fleurs.
La Sasu Aquitaine Distribution Fruits et légumes, ci-après la société ADFL, est spécialisée dans le secteur d'activité du commerce de gros de fruits et légumes, suite à l'ouverture d'une procédure collective de la société Soledor, qu'elle a reprise, cette dernière exploitant une activité de négoce de fruits et légumes.
La SAS Lafi Hard Discount est spécialisée dans l'exploitation d'hypermarchés à l'enseigne Leader Price situés dans le Sud-Est et le Sud-Ouest du territoire français.
La SAS Lafi Hard Discount faisait appel aux sociétés Robledo et ADFL pour fournir en fruits et légumes des magasins Leader Price relevant de son secteur d'activité.
Par courriers du 19 février 2014, la société Lafi Hard Discount a signifié à la société Robledo et à la société ADFL sa décision de mettre fin à leurs relations commerciales au 15 septembre 2014. La société Lafi HD a indiqué qu'elle se voyait contrainte à un déférencement total de leurs produits, dès lors que celles-ci ne s'étaient pas déclarées intéressées par sa proposition de poursuite de la collaboration consécutive à la nouvelle orientation de stratégie de l'enseigne.
Par actes séparés du 9 septembre 2014, la société Robledo et la société ADFL ont assigné devant le Tribunal de commerce de Bordeaux la société Lafi Hard Discount pour rupture brutale des relations commerciales établies, partielle puis totale, et ont sollicité la réparation de leurs préjudices.
Par suite d'une fusion-absorption du 5 février 2015, la société Distri Sud-Ouest vient aux droits de la société Lafi Hard Discount.
Par jugement du 25 septembre 2015, le Tribunal de commerce de Bordeaux a :
- condamné la société Distri Sud-Ouest, venant aux droits de la société Lafi Hard Discount, à payer à la société Robledo la somme de 833 344 euros pour rupture des relations commerciales,
- débouté la société Robledo du surplus de ses demandes,
- condamné la société Distri Sud-Ouest, venant aux droits de la société Lafi Hard Discount, à payer à la société Robledo la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,
- condamné la société Distri Sud-Ouest venant aux droits de la société Lafi Hard Discount aux dépens dont frais de Greffe liquidés à la somme de 82,44 euros dont 13,74 euros de TVA.
La société Robledo a relevé appel de ce jugement par déclaration remise au greffe le 9 novembre 2015.
Par jugement du 25 septembre 2015, le Tribunal de commerce de Bordeaux a :
- condamné la société Distri Sud-Ouest, venant aux droits de la société Lafi Hard Discount, à payer à la société ADFL la somme de 1 264 091 euros pour rupture des relations commerciales,
- débouté la société ADFL du surplus de ses demandes,
- condamné la société Distri Sud-Ouest, venant aux droits de la société Lafi Hard Discount, à payer à la société ADFL la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,
- condamné la société Distri Sud-Ouest, venant aux droits de la société Lafi Hard Discount, aux dépens dont frais de Greffe liquidés à la somme de 82,44 euros dont 13,74 euros de TVA.
La société ADFL a relevé appel de ce jugement par déclaration remise au greffe le 9 novembre 2015.
La jonction des deux procédures a été ordonnée le 3 mai 2016.
La procédure devant la cour a été clôturée le 12 septembre 2017.
Prétentions des parties
Vu les conclusions du 2 août 2017 par lesquelles la société Aquitaine Distribution Fruits et Légumes, appelante, invite la cour, au visa des articles L. 721-3, D. 442-3, L. 442-6-I 5° du Code de commerce, à :
- confirmer la décision des premiers juges en ce qu'elle a retenu l'existence d'une relation commerciale établie, sa rupture brutale imputable à la société Distri Sud-Ouest, venant aux droits de la société Lafi Hard Discount, la nécessité de majorer la durée du préavis pour tenir compte d'une dépendance élevée et la pertinence des éléments comptables fournis par la partie appelante pour l'évaluation de son préjudice,
- réformer pour le surplus,
- condamner la société Distri Sud-Ouest à lui payer une indemnité d'un montant de 1 886 134 euros au titre de la rupture partielle de la relation commerciale établie,
- condamner la société Distri Sud-Ouest à lui payer une indemnité d'un montant de 4 612 619 euros au titre de la rupture totale de la relation commerciale établie,
- condamner la société Distri Sud-Ouest à lui payer une indemnité d'un montant de 108 472,34 euros au titre du coût des licenciements,
- condamner la société Distri Sud-Ouest à lui payer une indemnité d'un montant de 230 012,50 euros au titre des loyers,
- condamner la société Distri Sud-Ouest à lui payer une indemnité d'un montant de 50 000 euros au titre du préjudice moral,
- lui donner acte de ce qu'elle se réserve la possibilité d'actualiser les demandes précitées, au vu des conséquences de la procédure de redressement judiciaire actuellement en cours,
- condamner la société Distri Sud-Ouest à lui payer une indemnité d'un montant de 30 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner la société Distri Sud-Ouest en tous les dépens, de première instance et d'appel ;
Elle fait valoir que :
- la relation commerciale rompue brutalement par la société Distri Sud-Ouest, venant aux droits de la société Lafi Hard Dicount, avait pris naissance en 1996,
- cette relation commerciale établie a été brutalement rompue par la société Lafi Hard Dicount, partiellement en août 2013 puis totalement en février 2014,
- la société Lafi Hard Discount n'a pas respecté un préavis suffisant et a donc engagé sa responsabilité,
- la société Lafi Hard Discount avait l'obligation de respecter un préavis d'une durée de 36 mois, au regard de la durée et de la spécificité de la relation, des investissements réalisés par la concluante et de l'état de dépendance de celle-ci ;
Vu les conclusions du 2 août 2017 par lesquelles la société Robledo, appelante, invite la cour, au visa des articles L. 721-3, D. 442-3, L. 442- 6, I, 5° du Code de commerce, à :
- confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a reconnu l'existence d'une relation commerciale établie, l'existence d'une rupture brutale imputable à la société Lafi Hard Discount, aux droits de laquelle se trouve aujourd'hui la société Distri Sud-Ouest, la responsabilité de la société Distri Sud-Ouest et l'obligation de celle-ci d'indemniser son préjudice, retenu la nécessité de majorer la durée du préavis qui aurait dû être appliqué, du fait de l'existence d'un taux de dépendance élevé, et retenu les éléments comptables fournis par la partie demanderesse pour évaluer le préjudice subi,
- réformer pour le surplus,
- condamner la société Distri Sud-Ouest à lui payer une indemnité d'un montant de 677 170 euros au titre de la rupture partielle de la relation commerciale établie,
- condamner la société Distri Sud-Ouest à lui payer une indemnité d'un montant de 2 934 279 euros au titre de la rupture totale de la relation commerciale établie,
- condamner la société Distri Sud-Ouest à lui payer une indemnité d'un montant de 84 591,50 euros au titre des loyers acquittés par elle,
- condamner la société Distri Sud-Ouest à lui payer une indemnité d'un montant de 44 796 euros en réparation du préjudice subi par la SAS Robledo et lié au non versement par France Agrimer du concours financier,
- condamner la société Distri Sud-Ouest à lui payer une indemnité d'un montant de 160 424,16 euros au titre du coût des licenciements,
- condamner la société Distri Sud-Ouest à lui payer une indemnité d'un montant de 50 000 euros au titre du préjudice moral,
- condamner la société Distri Sud-Ouest à lui payer une indemnité d'un montant de 30 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner la société Distri Sud-ouest aux dépens de première instance et d'appel ;
Elle soutient que :
- il s'est formé entre elle et la société Lafi Hard Discount une relation commerciale établie dès 1994,
- cette relation commerciale établie a été brutalement rompue par la société Lafi Hard Discount, partiellement en août 2013 puis totalement en février 2014,
- la société Lafi Hard Discount n'a pas respecté un préavis suffisant et qu'elle a donc engagé sa responsabilité,
- la société Lafi Hard Discount avait l'obligation de respecter un préavis d'une durée de 36 mois, au regard de la durée et de la spécificité de la relation, des investissements réalisés par la concluante et de l'état de dépendance de celle-ci.
Vu les conclusions du 30 juin 2017 par lesquelles la société Distri Sud-Ouest, venant aux droits de la société Lafi Hard Discount, intimée ayant formé appel incident, demande à la cour, au visa des articles 1382 et suivants du code civil, L. 442-6, I, 5° et suivants du Code de commerce, 9 et suivants du Code de procédure civile, de :
- infirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Bordeaux le 25 septembre 2015 en ce qu'il a condamné la société Lafi Hard Discount, aux droits et obligations desquels elle vient, à payer à la société Robledo la somme de 833 344 euros, outre 4 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- confirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Bordeaux le 25 septembre 2015 pour le surplus,
Et, statuant à nouveau,
- débouter la société Robledo de l'ensemble de ses demandes,
- condamner la société Robledo à lui payer la somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner la société Robledo aux dépens, dont distraction au profit de la SCP Regnier Bequet Moisan ;
Elle explique que :
- les relations commerciales existant entre d'une part à la société Lafi Hard Discount, aux droits et obligations desquels elle vient, et d'autre part la société Robledo, ne sont pas établies,
- aucune rupture des relations commerciales, a fortiori brutale, n'est imputable à la société Lafi Hard Discount,
- aucune rupture partielle des relations commerciales, a fortiori brutale, n'est imputable à Lafi Hard Discount ;
Vu les conclusions du 30 juin 2017 par lesquelles la société Distri Sud-Ouest, venant aux droits de la société Lafi Hard Discount, intimée ayant formé appel incident, demande à la cour, au visa des articles 1382 et suivants du Code civil, L. 442-6, I, 5° et suivants du Code de commerce, 9 et suivants du Code de procédure civile, de :
- infirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Bordeaux le 25 septembre 2015 en ce qu'il a condamné la société Lafi HD, aux droits et obligations desquels elle vient, à payer à la société ADFL la somme de 1 264 091 euros, outre 3 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- confirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Bordeaux le 25 septembre 2015 pour le surplus,
Et, statuant à nouveau,
- débouter la société ADFL de l'ensemble de ses demandes,
- condamner la société ADFL à lui payer la somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner la société ADFL aux dépens, dont distraction au profit de la SCP Regnier Bequet Moisan ;
Elle reprend les mêmes moyens que ceux développés dans les conclusions concernant la société Robledo ;
SUR CE
La cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens échangés et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel.
En application de l'article 954 alinéa 2 du Code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions.
Sur les demandes de la société Robledo
Sur la rupture des relations contractuelles entre la société Lafi Hard Discount et la société Robledo
La société Robledo soutient que la société Lafi Hard Discount, aux droits de laquelle vient la société Distri Sud-Ouest, a rompu brutalement leurs relations commerciales établies, d'abord partiellement en décidant de ne plus lui commander certaines références, puis intégralement en ne lui laissant pas un délai de préavis suffisant, à savoir 7 mois, au regard de l'ancienneté de leurs relations commerciales et de son lien de dépendance économique.
La société Distri Sud-Ouest conteste avoir entretenu des relations contractuelles établies avec la société Robledo, au motif que ces relations reposaient sur le régime des appels d'offres hebdomadaires, ce qui rend aléatoire l'attribution des commandes. Elle indique que la société Robledo ne démontre pas l'ancienneté des échanges contractuels entre elles. Elle relève également qu'elle n'est pas responsable de la rupture, la société Robledo n'ayant pas accepté sa proposition dans le cadre de sa réorganisation. Elle précise que le délai de préavis de 7 mois était suffisant au regard des 4 années d'échanges commerciaux. Elle fait valoir qu'elle a respecté le délai de préavis accordé.
Les parties s'opposent sur le caractère établi de leurs relations commerciales, sur la durée de celles-ci, et sur les conditions de la rupture, tant partielle que totale, des relations commerciales.
Aux termes de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce :
" Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers (...) de rompre unilatéralement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels.
Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure ".
Sur le caractère établi des relations commerciales entre la société Lafi Hard Discount et la société Robledo et leur durée
La société Robledo communique des demandes d'avoirs, des documents statistiques internes, (pièces 36 à 62), destinés à établir que les relations commerciales ont débuté au moins à compter de 1996 avec la société Lafi Hard Discount. Toutefois, ces pièces ne font pas référence à la société Lafi Hard Discount, et elles ne sont corroborées par aucune autre pièce du dossier.
S'agissant des cahiers des charges signés pour les années 2000 et 2004, s'ils ont été communiqués par la société Lafi Hard Discount à la société Robledo, ces documents étaient envoyés par la société Lafi Hard Discount à l'ensemble des fournisseurs de fruits et légumes potentiels. Par ailleurs, il n'est pas établi que des commandes ont été réalisées par la société Lafi Hard Discount à la société Robledo sur ces années et que celles-ci, le cas échéant, pouvaient caractériser des relations commerciales établies entre elles.
Les seules attestations d'un chef de rayon fruits et légumes dans trois sociétés du groupe Leader Price de 1996 à 2000, d'un salarié de la société Lafi puis de la société Lafi Services d'octobre 2000 à avril 2013, et d'un chef de rayon fruits et légumes puis directeur de magasin dans 6 sociétés du groupe entre juin 1996 et décembre 2010, dans lesquelles ils indiquent avoir travaillé avec la société Robledo, ne peuvent suffire à démontrer le caractère établi des relations commerciales entre les parties.
En revanche, les accords commerciaux signés entre la société Lafi Hard Discount et la société Robledo pour les années 2006, 2007, 2008, 2009 font référence aux volumes réalisés l'année antérieure, notamment en 2006, ceux de 2005. Ces accords prévoient également une ristourne de 3 % accordée à la société Lafi Hard Discount par la société Robledo.
Si aucun engagement de volume de commandes n'est prévu dans le contrat liant spécifiquement la société Lafi Hard Discount et la société Robledo, il n'en demeure pas moins que les références dans ces accords tant aux volumes de l'année précédente pour préciser les quantités pouvant être commandées par la société Lafi Hard Discount pendant l'année sur laquelle porte le contrat, qu'à l'octroi de ristournes et qu'à une clause de résiliation, permettent d'établir la réalité des relations commerciales établies entre les parties à compter de l'année 2005.
En outre, l'accord commercial relatif à l'année 2011 signé entre les parties démontre également la réalité des échanges, modifiant les rapports commerciaux, en ce que les commandes sont réalisées sur la base d'appels d'offres hebdomadaires, tout en assurant à la société Robledo un volume de commandes annuel minimum.
Ces éléments contractuels sont corroborés par les attestations du commissaire aux comptes de la société Robledo (pièces 23 et 29) relatives aux soldes annuels depuis 2005 jusqu'en 2013 entre la société Lafi Hard Discount et la société Robledo. Le rapport, établi par l'expert-comptable de la société Robledo (pièce 16), concernant une étude des chiffres d'affaires entre 2010 et 2013, relatifs aux relations commerciales entre les parties, confirme également la réalité de ces échanges ainsi que les volumes et le montant des chiffres d'affaires avancés. Ces chiffres ne sont pas contredits par la société Lafi Hard Discount, qui dispose également de ces informations.
Il ne peut donc être sérieusement contesté par la société Lafi Hard Discount l'existence de relations commerciales établies au motif que les commandes seraient uniquement réalisées sur la base d'appel d'offres. En effet, le contexte contractuel entre les parties, leurs relations commerciales depuis 2005 et ce jusqu'en 2013, le volume annuel croissant des commandes par la société Lafi Hard Discount suffisent à caractériser les relations commerciales établies entre elles.
En conséquence, il y a lieu de considérer que les sociétés Lafi Hard Discount et Robledo entretiennent des relations commerciales établies depuis l'année 2005.
Sur la rupture partielle au mois d'août 2013
La société Robledo soutient que la société Lafi Hard Discount a cessé de lui commander certaines références à compter du mois de septembre 2013. Elle indique que son chiffre d'affaires avec la société Lafi Hard Discount sur ces produits déréférencés était de 787 037 euros en 2012, et de 599 200 euros en 2013, réalisé en 8 mois.
Le chiffre d'affaires total de la société Robledo avec la société Lafi Hard Discount est de 5 908 017 euros en 2012 et de 5 015 112 euros en 2013.
La société Lafi Hard Discount conteste ces affirmations.
Les chiffres avancés par la société Robledo sont issus d'analyses comptables réalisées par le commissaire aux comptes de la société Robledo (pièce 17). La baisse des commandes en raison du déréférencement de certains produits est par ailleurs corroborée par le courrier envoyé à la société Lafi Hard Discount le 5 décembre 2013 par la société Robledo, qui lui reproche ce déférencement partiel depuis le mois de septembre 2013 et l'informe des difficultés que cela lui cause. Ce courrier n'a fait l'objet d'aucune contestation de sa part. Il est donc établi par la société Robledo l'arrêt des commandes par la société Lafi Hard Discount de certaines références.
Le déréférencement des produits constituant 12,63 % de moyenne en 2012 et 2013 du chiffre d'affaires de la société Robledo avec la société Lafi Hard Discount constitue une rupture partielle des relations commerciales.
L'arrêt de commandes de certains produits référencés constitue une rupture partielle des relations commerciales.
Or, la société Lafi Hard Discount n'a pas fait parvenir à la société Robledo de courrier l'informant de cette décision et ne fait état d'aucune faute suffisamment grave de cette dernière pouvant justifier une telle rupture. Ainsi, aucun préavis n'a été accordé à la société Robledo.
En conséquence, il y a lieu de considérer que la société Lafi Hard Discount a rompu partiellement brutalement les relations commerciales avec la société Robledo à compter du mois de septembre 2013.
La société Robledo soutient qu'elle était en relation de dépendance économique avec la société Lafi Hard Discount.
Il ressort des attestations, qui se corroborent, du commissaire aux comptes de la société Robledo et de son expert-comptable, qui ont été élaborées sur la base des documents comptables, de méthodes qui ont été clairement décrites et qui n'apparaissent pas contestables, que la part du chiffre d'affaires réalisée avec la société Lafi Hard Discount sur le chiffre d'affaires total de la société Robledo, est de :
- 54,94 % en 2010,
- 57,33 % en 2011,
- 50,97 % en 2012.
Ainsi, il est établi que la part de la société Lafi Hard Discount dans la réalisation du chiffre d'affaires total de la société Robledo était supérieure à 50 % les 3 dernières années, rendant ainsi cette dernière dépendante de la société Lafi Hard Discount.
Au regard de la durée des relations contractuelles, de la dépendance économique, du secteur d'activité et de l'importance de ces produits dans la réalisation du chiffre d'affaires total de la société Robledo avec la société Lafi Hard Discount, il y a lieu de fixer la durée du préavis en raison de la rupture partielle des relations contractuelles à 2 mois.
Sur la rupture totale par courrier du 19 février 2014
Par courrier du 19 février 2014, la société Lafi Hard Discount a informé la société Robledo qu'elle entendait rompre totalement leurs relations commerciales à compter du 15 septembre 2014, laissant ainsi un préavis de près de 7 mois.
La société Robledo soutient qu'une commande a été annulée par la société Lafi Hard Discount au mois de mai 2014 en raison de la fermeture d'un des magasins client, et à compter du 1er septembre 2014 s'agissant d'un autre magasin. Pour autant, elle ne démontre pas avoir subi une baisse des commandes pendant toute la durée du préavis, alors qu'il lui appartient d'établir qu'elle n'a pas bénéficié d'un préavis effectif.
La société Lafi Hard Discount soutient que la rupture est intervenue en raison du refus par la société Robledo de sa nouvelle organisation. Toutefois, aucune preuve n'est apportée de cette nouvelle organisation, de son contenu et des propositions faites à la société Robledo. S'il est effectivement fait référence, dans un courrier de cette dernière adressé à la société Lafi Hard Discount Discount, à cette nouvelle organisation, aucun document ne détaille la proposition faite à la société Robledo dans ce cadre. Or, seule une faute grave justifierait la rupture des relations commerciales immédiate.
Faute d'en justifier, la rupture des relations commerciales devait faire l'objet d'un préavis suffisant laissant la possibilité à la société Robledo de s'adapter à cette rupture et de se réorganiser.
L'évaluation de la durée du préavis à accorder est fonction de toutes les circonstances de nature à influer son appréciation au moment de la notification de la rupture, notamment de l'ancienneté des relations, du volume d'affaires réalisé, du secteur concerné, de l'état de dépendance économique de la victime, des dépenses non récupérables engagées par elle et du temps nécessaire pour retrouver un partenaire.
En conséquence, au regard de l'ancienneté des relations commerciales établies, à savoir 9 ans, entre 2005 et 2013, à la nature de l'activité considérée, à la réalité du marché concerné, au volume d'affaires et de l'état de dépendance économique de la société Robledo, il y a lieu de fixer le délai de préavis dont elle aurait dû bénéficier en raison de la décision de la société Lafi Hard Discount de rompre leurs relations commerciales, à 10 mois.
Dès lors, le délai de préavis de 7 mois laissé par la société Lafi Hard Discount à la société Robledo n'était pas suffisant.
Sur le préjudice
Il est constant que le préjudice résultant du caractère brutal de la rupture est constitué par la perte de la marge dont la victime pouvait escompter bénéficier pendant la durée du préavis qui aurait dû lui être accordé. La référence à retenir est la marge sur coûts variables, définie comme la différence entre le chiffre d'affaires dont la victime a été privée sous déduction des charges qui n'ont pas été supportées du fait de la baisse d'activité résultant de la rupture.
Sur la réparation du préjudice découlant de la rupture partielle
Le chiffre d'affaires annuel de la société Robledo avec la société Lafi Hard Discount en 2012 sur les produits déréférencés s'est élevé à 787 037 euros (soit 65 586 euros de moyenne mensuelle) et sur les 8 premiers mois de l'année 2013 à 599 200 euros (soit 74 900 euros de moyenne mensuelle).
Le taux de marge sollicité par la société Robledo est de 23,71 %. Il est justifié par l'étude de son expert-comptable et n'est pas contesté.
Pour établir la marge perdue que la société Robledo pouvait escompter percevoir si la société Lafi Hard Discount n'avait pas cessé de commander les produits qu'elle a déréférencés à compter du mois de septembre 2013, pendant les 5 mois de préavis auxquels elle avait droit et qui ne lui ont pas été accordés, il convient de calculer la marge perdue sur la moyenne de chiffre d'affaires mensuel réalisé entre 2012 et 2013 par la société Robledo, à savoir la somme de 33 309 euros (23,71% x [70 243 x 2]).
Dès lors, le préjudice subi par la société Robledo en raison de la rupture brutale partielle des relations commerciales par la société Lafi Hard Discount s'élève à la somme de 33 309 euros.
Sur la durée du préavis de la rupture totale, son effectivité et la réparation du préjudice en découlant
La société Robledo soutient avoir subi un préjudice au titre de sa perte de marge pendant la durée du préavis, mais aussi des coûts des loyers acquittés, des coûts des licenciements, du non versement par France Agrimer du concours financier et de son préjudice moral.
La société Lafi Hard Discount conteste les demandes tant dans leur principe que dans leur quantum.
En l'espèce, il n'est pas établi que la société Lafi Hard Discount n'a pas respecté le délai de préavis de 7 mois. Ainsi, la société Robledo n'a été privée que de 3 mois de préavis.
Le préjudice subi par la société Robledo en raison de la rupture brutale des relations commerciales par la société Lafi Hard Discount est caractérisé par la marge à laquelle elle pouvait prétendre pendant les 3 mois de poursuite de leurs relations commerciales, dont elle a été privée.
Il convient au préalable de réaliser la moyenne des chiffres d'affaires des trois dernières années réalisés par la société Robledo avec la société Lafi Hard Discount. Les chiffres avancés par la société Robledo sont issus d'études comptables réalisées tant par son expert-comptable que par son commissaire aux comptes, qui ne sont pas contestées sérieusement par la société Lafi Hard, laquelle dispose d'ailleurs également de ces données.
Les chiffres d'affaires annuels réalisés par la société Robledo avec la société Lafi Hard en 2011, 2012 et 2013 s'élèvent respectivement aux sommes de 5 069 100 euros, 5 908 017 euros et 5 015 112 euros, soit une moyenne de 5 330 743 euros.
Le taux de marge étant de 23,71%, il apparaît que la marge mensuelle moyenne de la société Robledo est de 105 326,59 euros.
En revanche, le non-versement du concours financier par France Agrimer, le coût des bâtiments et des licenciements ne constituent pas des préjudices indemnisables générés par la brutalité de la rupture, car la société Robledo ne démontre pas que ces coûts ont été causés directement par la brutalité de la rupture des relations commerciales par la société Lafi Hard Discount. Il y a lieu de rejeter la demande de la société Robledo de ces chefs.
En conséquence, le préjudice subi par la société Robledo du fait de la rupture brutale des relations commerciales par la société Lafi Hard Discount, n'ayant pas bénéficié de 3 mois de préavis supplémentaires, doit donc être fixé à la somme de 315 979 euros.
Enfin, la société Robledo n'établit pas son préjudice moral, ne démontrant pas avoir subi une dégradation de son image commerciale, ni qu'elle est due, le cas échéant, à la rupture brutale des relations commerciales par la société Lafi Hard Discount.
Il y a donc lieu d'infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Distri Sud-Ouest venant aux droits de la société Lafi Hard Discount à payer à la société Robledo la somme de 833 344 euros pour rupture des relations commerciales.
Statuant à nouveau, il y a lieu de condamner la société Distri Sud-Ouest venant aux droits de la société Lafi Hard Discount à payer à la société Robledo les sommes de :
- 33 309 euros en raison de la rupture brutale partielle des relations commerciales par la société Lafi Hard Discount,
- 315 979 euros pour rupture brutale des relations commerciales par la société Lafi Hard Discount.
Il y a lieu de débouter la société Robledo du surplus de ses demandes.
Sur les demandes de la société ADFL
La société ADFL soutient que la société Lafi Hard Discount, aux droits de laquelle vient la société Distri Sud-Ouest, a rompu brutalement leurs relations commerciales établies, d'abord partiellement en décidant de ne plus lui commander certaines références, puis intégralement en ne lui laissant pas un délai suffisant, à savoir 7 mois, au regard de l'ancienneté de leurs relations commerciales et de son lien de dépendance économique. Elle soutient qu'elle bénéficie des relations commerciales pré-existantes de la société Soledor dont elle a repris l'activité suite à l'ouverture d'une procédure collective, et qui avait déjà la société Lafi Hard Discount comme cliente.
La société Distri Sud-Ouest conteste avoir entretenu des relations contractuelles établies avec la société ADFL, au motif que leurs relations reposaient sur le régime des appels d'offres hebdomadaires, ce qui rend aléatoire l'attribution des commandes. Elle indique que la société ADFL ne démontre pas l'ancienneté des échanges contractuels entre elles. Elle considère que la société ADFL ne peut invoquer les relations commerciales qu'elle entretenait avec la société Solidor, dont elle a acquis le fonds de commerce, pour justifier de relations commerciales depuis 1994. Elle précise qu'il n'est pas prouvé qu'elle a accepté de reprendre avec la société ADFL les relations commerciales antérieurement nouées avec la société Solidor. Elle relève également qu'elle n'est pas responsable de la rupture, la société ADFL n'ayant pas accepté sa proposition dans le cadre de sa réorganisation. Elle précise que le délai de préavis de 7 mois était suffisant au regard des 4 années d'échanges commerciaux. Elle fait valoir qu'elle a respecté le délai de préavis accordé.
Les parties s'opposent sur le caractère établi de leurs relations commerciales, sur la durée de celles-ci, et sur les conditions de la rupture, tant partielle que totale, des relations commerciales.
Sur le caractère établi des relations commerciales entre la société Lafi Hard Discount et la société ADFL et leur durée
La société ADFL ne communique aucune pièce prouvant que les relations commerciales entre la société Soledor et la société Lafi Hard Discount ont perduré depuis 1994, jusqu'à la cession du fonds de commerce. Par ailleurs, le projet d'accord commercial entre elles pour l'année 2009 ne peut être probant, en ce qu'il n'est pas signé.
Les seules attestations d'un chef de rayon fruits et légumes dans trois sociétés du groupe Leader Price de 1996 à 2000, d'un salarié de la société Lafi puis de la société Lafi Services d'octobre 2000 à avril 2013, et d'un chef de rayon fruits et légumes puis directeur de magasin dans 6 sociétés du groupe entre juin 1996 et décembre 2010, dans lesquelles ils indiquent avoir travaillé avec la société Soledor, ne peuvent suffire à démontrer le caractère établi des relations commerciales entre les parties.
En outre, si l'acte de cession des actifs de la société Solidor à la société Robledo et à la société ADFL porte notamment sur l'activité Leader Price, au titre des éléments incorporels, il n'en demeure pas moins, qu'aucune pièce comptable ne démontre l'ancienneté et l'ampleur des échanges. Cette seule pièce ne peut établir le caractère établi de relations commerciales.
En revanche, les accords commerciaux signés entre la société Lafi Hard Discount et la société ADFL pour les années 2010 et 2011 font référence aux volumes réalisés l'année antérieure, notamment en 2010, ceux de 2009. Ces accords prévoient également une ristourne de 3 % accordée à la société Lafi Hard Discount par la société ADFL.
Si aucun engagement de volume de commande n'est prévu dans le contrat liant spécifiquement la société Lafi Hard Discount et la société ADFL, il n'en demeure pas moins que les références dans ces accords tant aux volumes de l'année précédente pour préciser les quantités pouvant être commandées par la société Lafi Hard Discount pendant l'année sur laquelle porte le contrat, qu'à l'octroi de ristournes et qu'à une clause de résiliation, permettent d'établir la réalité des relations commerciales établies entre les parties.
En outre, l'accord commercial relatif à l'année 2011 signé entre les parties démontre la réalité des échanges, modifiant les rapports commerciaux, en ce que les commandes seraient réalisées sur la base d'appel d'offres hebdomadaires, tout en assurant à la société ADFL un volume de commande annuel minimum (5 600 tonnes par an).
Ces éléments contractuels sont corroborés par les attestations du commissaire aux comptes de la société ADFL (pièces 19, 20, 23 et 24) relatives aux soldes annuels et chiffres d'affaires avec la société Lafi Hard Discount depuis 2009 jusqu'en 2013. Le rapport, établi par l'expert-comptable de la société ADFL (pièce 17), concernant une étude des chiffres d'affaires entre 2010 et 2013, relatifs aux relations commerciales entre les parties, confirme également la réalité de ces échanges ainsi que les volumes et le montant des chiffres d'affaires avancés. Ces chiffres ne sont pas contredits par la société Lafi Hard Discount, qui dispose également de ces informations.
Il ne peut donc être sérieusement contesté par la société Lafi Hard Discount l'existence de relations commerciales établies au motif que les commandes seraient uniquement réalisées sur la base d'appels d'offres. En effet, le contexte contractuel entre les parties, leurs relations commerciales depuis 2009 et ce jusqu'en 2013, le volume annuel important des commandes par la société Lafi Hard Discount suffisent à caractériser les relations commerciales établies entre elles.
En conséquence, il y a lieu de considérer que les sociétés Lafi Hard Discount et ADFL entretiennent des relations commerciales établies depuis l'année 2009.
Sur la rupture partielle au mois d'août 2013
La société ADFL soutient que la société Lafi Hard Discount a cessé de lui commander certaines références à compter du mois de septembre 2013. Elle indique que son chiffre d'affaires avec la société Lafi Hard Discount sur ces produits déréférencés était de 2 485 249 euros en 2012, et de 2 359 676 euros en 2013, réalisé en 8 mois.
Le chiffre d'affaires total de la société ADFL avec la société Lafi Hard Discount est de 13 824 072 euros en 2012 et de 12 800 580 euros en 2013.
La société Lafi Hard Discount conteste ces affirmations.
Les chiffres avancés par la société ADFL sont issus d'analyses comptables réalisées par le commissaire aux comptes de la société ADFL (pièce 19). La baisse des commandes en raison du déréférencement de certains produits est par ailleurs corroborée par le courrier envoyé par la société ADFL, qui reproche ce déférencement partiel depuis le mois de septembre 2013 et l'informe des difficultés que cela lui cause, à la société Lafi Hard Discount le 5 décembre 2013, qui n'a fait l'objet d'aucune contestation. Il est donc établi par la société ADFL l'arrêt des commandes par la société Lafi Hard Discount de certaines références.
Le déréférencement des produits constituant 18,20 % de moyenne en 2012 et 2013 du chiffre d'affaires de la société ADFL avec la société Lafi Hard Discount constitue une rupture partielle des relations commerciales.
L'arrêt de commande de certaines références constitue une rupture partielle des relations commerciales.
Or, la société Lafi Hard Discount n'a pas fait parvenir à la société Robledo de courrier l'informant de cette décision et ne fait état d'aucune faute suffisamment grave de cette dernière pouvant justifier une telle rupture. Ainsi, aucun préavis n'a été accordé à la société Robledo.
En conséquence, il y a lieu de considérer que la société Lafi Hard Discount a rompu partiellement brutalement les relations commerciales avec la société ADFL à compter du mois de septembre 2013.
La société ADFL soutient qu'elle était en relation de dépendance économique avec la société Lafi Hard Discount.
Il ressort des attestations, qui se corroborent, du commissaire aux comptes de la société ADFL et de son expert-comptable, qui ont été élaborées sur la base des documents comptables, de méthodes qui ont clairement décrites et qui n'apparaissent pas contestables, que la part du chiffre d'affaires réalisé avec la société Lafi Hard Discount sur le chiffre d'affaires total de la société ADFL, est de :
- 73,84 % en 2010,
- 70,54 % en 2011,
- 76,40 % en 2012.
Ainsi, il est établi que la part de la société Lafi Hard Discount dans la réalisation du chiffre d'affaires total de la société ADFL était supérieure à 70 % les 3 dernières années, rendant ainsi cette dernière en état de dépendance économique très important avec la société Lafi Hard Discount.
Au regard de la durée des relations contractuelles, de la dépendance économique, du secteur d'activité et de l'importance de ces produits dans la réalisation du chiffres d'affaires total de la société ADFL avec la société Lafi Hard Discount, il y a lieu de fixer la durée du préavis en raison de la rupture partielle des relations contractuelles à 3 mois.
Sur la rupture totale par courrier du 19 février 2014
Par courrier du 19 février 2014, la société Lafi Hard Discount informe la société ADFL qu'elle entend rompre totalement leurs relations commerciales à compter du 15 septembre 2014, laissant ainsi un préavis de près de 7 mois.
La société ADFL soutient qu'une commande a été annulée par la société Lafi Hard Discount au mois de mai 2014 en raison de la fermeture d'un des magasins client, et à compter du 1er septembre 2014 s'agissant d'un autre magasin. Pour autant, elle ne démontre pas avoir subi une baisse des commandes pendant toute la durée du préavis, alors qu'il lui appartient d'établir qu'elle n'a pas bénéficié d'un préavis effectif.
La société Lafi Hard Discount soutient que la rupture est intervenue en raison du refus par la société ADFL de sa nouvelle organisation. Toutefois, aucune preuve n'est apportée de cette nouvelle organisation, de son contenu et des propositions faites à la société ADFL. S'il est effectivement fait référence, dans un courrier de cette dernière adressé à la société Lafi Hard Discount, à cette nouvelle organisation, aucun document ne détaille la proposition faite à la société ADFL dans ce cadre. Or, il appartient à la société Lafi Hard Discount de prouver que la rupture des relations commerciales immédiate ou dans les délais annoncés était justifiée par une faute suffisamment grave de la société ADFL.
Dans ces conditions, il apparaît que la rupture des relations commerciales devait faire l'objet d'un préavis suffisant laissant la possibilité à la société ADFL de s'adapter à cette rupture et de se réorganiser.
En conséquence, au regard de l'ancienneté des relations commerciales établies, à savoir 5 ans, entre 2009 et 2013, de la nature de l'activité considérée, de la réalité du marché concerné, du volume d'affaires et de l'état de dépendance économique très important de la société ADFL, il y a lieu de fixer le délai de préavis dont elle aurait dû bénéficier en raison de la décision de la société Lafi Hard de rompre leurs relations commerciales, à 7 mois.
En l'espèce, il n'est pas établi par la société ADFL que la société Lafi Hard Discount n'a pas respecté le délai de préavis de 7 mois.
Dès lors, le délai de préavis de 7 mois laissé par la société Lafi Hard Discount à la société ADFL était suffisant. Il y a donc lieu de rejeter l'ensemble des demandes indemnitaires autres que celles relatives à la réparation de la rupture partielle.
Sur le préjudice
Le chiffre d'affaires annuel de la société ADFL avec la société Lafi Hard Discount en 2012 sur les produits déréférencés s'est élevé à 2 485 249 euros (soit 207 104 euros de moyenne mensuelle) et sur les 8 premiers mois de l'année 2013 à 2 359 676 euros (soit 294 959 euros de moyenne mensuelle).
Le taux de marge sollicité par la société ADFL est de 16,84 %. Il est justifié par l'étude de son expert-comptable et n'est pas contesté.
Pour établir la marge perdue que la société ADFL pouvait escompter percevoir si la société Lafi Hard Discount n'avait pas cessé de commander les produits qu'elle a déréférencés à compter du mois de septembre 2013, pendant les 3 mois de préavis auxquels elle avait droit et qui ne lui ont pas été accordés, il convient de calculer la marge perdue sur la moyenne de chiffre d'affaires mensuel réalisé entre 2012 et 2013 par la société ADFL, à savoir la somme de 126 821,11 euros (16,84 % x [251 031,50 x 3]).
Dès lors, le préjudice subi par la société ADFL en raison de la rupture brutale partielle des relations commerciales par la société Lafi Hard Discount s'élève à la somme de 126 821,11 euros.
Il y a donc lieu d'infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Distri Sud-Ouest venant aux droits de la société Lafi Hard Discount, à payer à la société ADFL la somme de 1 264 091 euros pour rupture des relations commerciales.
Statuant à nouveau, il y a lieu de condamner la société Distri Sud-Ouest, venant aux droits de la société Lafi Hard Discount, à payer à la société ADFL la somme de 126 821,11 euros et de débouter la société ADFL du surplus de ses demandes.
Sur les dépens et l'application de l'article 700 du Code de procédure civile
Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement sur les dépens et l'application qui y a été équitablement faite des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
La société Distri Sud-ouest SAS, partie perdante, doit être condamnée aux dépens d'appel, ainsi qu'à payer à la société Robledo et à la société ADFL respectivement la somme supplémentaire de 6 000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel.
Le sens du présent arrêt conduit à rejeter la demande par application de l'article 700 du Code de procédure civile formulée par la société Distri Sud-ouest.
Par ces motifs, LA COUR, infirme le jugement du 25 septembre 2015 rendu par le Tribunal de commerce de Bordeaux dans l'affaire opposant la société Distri Sud-Ouest, venant aux droits de la société Lafi Hard Discount, à la société Robledo, sauf en ce qu'il a : - condamné la société Distri Sud-Ouest, venant aux droits de la société Lafi Hard Discount, à payer à la société Robledo la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, - condamné la société Distri Sud-Ouest, venant aux droits de la société Lafi Hard Discount, aux dépens dont frais de Greffe liquidés à la somme de 82,44 euros dont 13,74 euros de TVA, Le confirmant sur ces points, infirme le jugement du 25 septembre 2015 rendu par le Tribunal de commerce de Bordeaux dans l'affaire opposant la société Distri Sud-Ouest, venant aux droits de la société Lafi Hard Discount, à la société ADFL, sauf en ce qu'il a : - condamné la société Distri Sud-Ouest, venant aux droits de la société Lafi Hard Discount, à payer à la société ADFL la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, - condamné la société Distri Sud-Ouest, venant aux droits de la société Lafi Hard Discount, aux dépens dont frais de Greffe liquidés à la somme de 82,44 euros dont 13,74 euros de TVA, Le confirmant sur ces points, Statuant à nouveau, condamne la société Distri Sud-ouest, venant aux droits de la société Lafi Hard Discount, à payer à la société Robledo les sommes de : 33 309 euros en raison de la rupture brutale partielle des relations commerciales par la société Lafi Hard Discount, 315 979 euros pour rupture brutale des relations commerciales par la société Lafi Hard Discount, condamne la société Distri Sud-Ouest, venant aux droits de la société Lafi Hard Discount, à payer à la société ADFL la somme de 126 821,11 euros, déboute la société ADFL du surplus de ses demandes, condamne la société Distri Sud-Ouest aux dépens d'appel, ainsi qu'à payer à la société Robledo et à la société ADFL respectivement la somme supplémentaire de 6 000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel, rejette toute autre demande.