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Décisions

Cass. 2e civ., 6 juillet 2017, n° 16-19.354

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Flise

Avocats :

Me Le Prado, SCP Matuchansky, Poupot, Valdelièvre

Aix-en-Provence, prés., du 27 janv. 2015

27 janvier 2015

LA COUR : - Attendu, selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel, qu'entre 2004 et 2011, M. et Mme X ont confié la défense de leurs intérêts à M. Y , avocat, dans un grand nombre de dossiers ; que, par lettre du 10 juin 2013, ils ont saisi le bâtonnier de l'ordre des avocats d'une contestation des honoraires de M. Y ; que par décision du 13 octobre 2013, le bâtonnier a rejeté la demande de M. et Mme X au motif qu'elle relevait éventuellement du domaine de la responsabilité et non de la fixation des honoraires ; que le 6 novembre 2013, M. et Mme X ont formé un recours contre cette décision ;

Sur le premier moyen : - Vu l'article 565 du Code de procédure civile ; - Attendu que pour déclarer recevable l'action en contestation d'honoraires d'avocat formée par M. et Mme X mais seulement dans la limite d'un montant de réclamation de 240 015,22 euros, l'ordonnance énonce qu'en application de l'article 564 du Code de procédure civile, les parties ne peuvent soumettre à la cour d'appel des demandes nouvelles ; que M. et Mme X sollicitent la restitution d'honoraires à hauteur de 389 507,40 euros en cause d'appel, ce qui est nettement supérieur au montant de leurs demandes devant le bâtonnier, qui, en l'absence de détail des factures, ne permettait pas de distinguer précisément celles faisant l'objet d'une demande nouvelle ; qu'ils avaient certes augmenté leurs demandes dans une lettre datée du 7 octobre 2013, mais reçue par le bâtonnier le 16 octobre 2013, soit postérieurement à la décision querellée rendue le 13 octobre 2013 ; que ces demandes nouvelles n'ont ainsi pas été formées en temps utile devant le bâtonnier et ne sont en conséquence pas recevables en appel ;

Qu'en statuant ainsi, alors que M. et Mme X s'étaient bornés à augmenter le montant de leur demande de restitution d'honoraires, ce qui ne constituait pas une demande nouvelle, le premier président a violé le texte susvisé ;

Et sur le second moyen, pris en sa première branche : - Vu l'article 10 de la loi n° 1130 du 31 décembre 1971 ensemble l'article L. 441-3 du Code de commerce ; - Attendu qu'il résulte de ces textes que ne peuvent constituer des honoraires librement payés après service rendu ceux qui ont été réglés sur présentation de factures ne répondant pas aux exigences du second d'entre eux, peu important qu'elles soient complétées par des éléments extrinsèques ;

Attendu que pour rejeter la demande de M. et Mme X, l'ordonnance énonce que le client qui a payé librement des honoraires après service rendu ne peut solliciter du juge de l'honoraire la restitution des sommes versées ; qu'en l'espèce, toutes les factures contestées ont été réglées ; que si une grande partie des factures produites ne précisaient pas les diligences effectuées, elles étaient accompagnées d'une lettre de l'avocat expliquant ses diligences et le cas échéant de la copie des actes effectués (la plupart du temps des conclusions) ; que M. X qui dirigeait plusieurs sociétés disposait des compétences nécessaires pour apprécier le travail fourni par son avocat ; que c'est dès lors en parfaite connaissance de cause qu'il a réglé pendant plusieurs années, de 2007 à 2010, les factures émises par M. Y pour plus d'une centaine de dossiers, la plupart de nature commerciale ; qu'il a d'ailleurs continué à confier des dossiers à M. Y au fil des ans ce qui démontre qu'il était satisfait de son intervention et qu'il n'estimait pas ses honoraires exorbitants ;

Qu'en statuant ainsi, alors que les factures de l'avocat ne précisaient pas les diligences effectuées ce dont il résultait que le client pouvait solliciter la réduction des honoraires, le premier président a violé les textes susvisés ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du second moyen : casse et annule, sauf en ce qu'elle déclare le recours recevable et écarte des débats la pièce n° 4 de M. Y, l'ordonnance rendue le 27 janvier 2015, entre les parties, par le premier président de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sauf sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ladite ordonnance et, pour être fait droit, les renvoie devant le premier président de la Cour d'appel de Lyon.