CA Versailles, 12e ch., 10 octobre 2017, n° 16-08015
VERSAILLES
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Otis (SCS)
Défendeur :
Comptoir Monégasque Général d'Alimentation et de Bazars (SA) , ACI Elévation (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Rosenthal
Conseillers :
MM. Ardisson, Leplat
Vu l'appel interjeté le 9 novembre 2016, par la société Otis d'un jugement rendu le 23 septembre 2016 par le Tribunal de commerce de Nanterre qui a :
* rejeté la fin de non-recevoir soulevée par la société Otis,
* prononcé la résolution des contrats de vente et de maintenance conclus entre la société Comogedaba et la société Otis aux torts exclusifs de cette dernière,
* débouté la société Otis de son appel en garantie de la société ACI Élévation,
* condamné la société Otis à payer à la société Comogedaba la somme de 66 199 euros au titre de la résolution du contrat de vente, outre les intérêts au taux légal à compter de la date de l'assignation, soit le 16 juillet 2015,
* condamné la société Otis à payer à la société Comogedaba la somme de 855,14 euros au titre du contrat de maintenance, outre les intérêts au taux légal à compter de la date de l'assignation, soit le 16 juillet 2015,
* débouté la société Comogedaba de sa demande de remboursement des frais d'entreposage du matériel remplacé,
* condamné la société Otis à payer la somme de 6 907 euros à la société Comogedaba au titre de l'indemnisation du préjudice subi, outre les intérêts au taux légal à compter de la date de l'assignation, soit le 16 juillet 2015, et débouté pour le surplus,
* débouté la société ACI Élévation de sa demande reconventionnelle,
* condamné la société Otis à payer à la société Comogedaba la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens;
Vu les dernières écritures en date du 29 août 2017, aux termes desquelles la société Otis prie la cour, au visa des articles 1603, 1604,1615, 1641, 1648, 1146, 1147, 1184 et 2239 du Code civil, de:
* infirmer le jugement, sauf en ce qu'il a rejeté les demandes suivantes:
- la demande de versement de la somme de 45 223 euros au titre de la perte financière liée au temps perdu par les salariés (224 heures),
- la demande de versement de la somme de 11 753 euros au titre de la perte de temps et d'énergie du responsable du supermarché,
- la demande reconventionnelle de la société Aci Elévation,
Statuant à nouveau:
A titre principal,
* dire que l'action de la société Co-Mo-Ge-Da-Ba est forclose,
* la déclarer irrecevable en ses demandes,
* ordonner la restitution des sommes versées au titre de l'exécution provisoire avec intérêts au taux légal du règlement du 4 novembre 2016,
A titre subsidiaire,
* dire que les conditions de la résolution des contrats de vente et de maintenance liant les sociétés Otis et Co-Mo-Ge-Da-Ba ne sont pas réunies,
* dire que la demande indemnitaire formée par la société Co-Mo-Ge-Da-Ba à hauteur de 6 907 euros est injustifiée dans son principe et son quantum,
* dire que la demande formée par la société Co-Mo-Ge-Da-Ba à hauteur de 855,14 euros est injustifiée dans son principe et son quantum,
* vu l'indemnisation de 7 655 euros accordée à la société Co-Mo-Ge-Da-Ba, dire que cette somme devra être déduite de toute somme pouvant être allouée à cette dernière,
Sur l'appel incident de la société Co-Mo-Ge-Da-Ba,
* dire que les demandes indemnitaires formulées par la société Co-Mo-Ge-Da-Ba ne sont justifiées ni dans leur principe, ni dans leur quantum,
* débouter la société Co-Mo-Ge-Da-Ba de ses demandes,
Sur l'appel incident de la société Aci Elévation,
* rejeter sa demande de condamnation en paiement de la somme de 14 800,92 euros,
En tout état de cause,
* dire que les dysfonctionnements du monte-charge sont exclusivement imputables à la société Aci Elévation s'agissant de vices du matériel fourni et de défauts de montage du monte-charge,
* dire que la société Aci Elévation sera condamnée à la relever et garantir de toutes condamnations qui seraient prononcées à son encontre, au vu de l'obligation de résultat qui lui incombe en sa qualité de sous-traitant,
* si la cour confirmait la résolution des deux contrats, dire que la société Aci Elévation devra l'indemniser à hauteur de 66 199 euros correspondant à son préjudice commercial et financier,
* débouter la société Aci Elévation de ses demandes,
* condamner la société Aci Elévation ou toute partie succombante au versement de la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens de la procédure;
Vu les dernières écritures en date du 30 août 2017, par lesquelles la société Comptoir Monégasque Général d'Alimentation et de Bazars, dite Co-Mo-Ge-Da-Ba, demande à la cour de:
* débouter la société Otis de l'appel interjeté à l'encontre du jugement,
* confirmer le jugement querellé en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir soulevée par la société Otis et prononcé la résolution des contrats de vente et de maintenance conclus entre Co-Mo-Ge-Da-Ba et la société Otis, et ce aux torts exclusifs de cette dernière,
* confirmer la condamnation d'Otis à rembourser le prix d'achat du matériel,
* lui donner acte de ce qu'elle a effectivement reçu, dans le cadre de l'exécution provisoire du jugement querellé, le montant des condamnations et ce le 2 novembre 2016,
Pour le surplus, accueillir son appel incident,
* réformer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande indemnitaire, hormis les primes versées aux salariés pour un montant de 6 907 euros,
* condamner la société Otis au paiement de la somme complémentaire de 60 000 euros,
* dire que s'appliqueront sur ces sommes les intérêts au taux légal à compter de l'assignation,
* lui donner acte de ce qu'elle s'en rapporte à justice sur l'appel en garantie formalisé par la société Otis à l'encontre de la société Aci Elévation,
* condamner la société Otis au paiement de la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens;
Vu les dernières écritures en date du 31 janvier 2017, par lesquelles la société Aci Elévation, formant appel incident, demande à la cour de:
* confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté toute partie d'une action contre elle dès lors qu'il était demandé la résolution d'un contrat souscrit par Otis avec demande de remboursement qui ne saurait concerner le fournisseur,
* dire qu'au visa des articles 1134 et 1147 du Code civil, Otis doit établir la faute contractuelle de son fournisseur et son lien direct et certaine avec les dommages allégués au principal, ce qu'il n'a pas fait et ne fait toujours pas devant la cour, alors même qu'il répond de deux contrats dont le contrat de maintenance et de dépannage qui ne peut pas lui être opposé,
* dire que la demande de résolution du contrat d'Otis avec demande de remboursement ne saurait la concerner,
* dire en effet qu'au visa des articles 1134 et 1147 du Code civil, Otis qui ne le fait pas, doit seulement établir la faute contractuelle d'ACI Élévation et son lien direct et certain avec les dommages allégués au principal,
* dire qu'en l'espèce, la société Otis répond de deux contrats dont le contrat de maintenance et de dépannage qui ne peut lui être opposé,
* dire que le monte-charge était sous contrat d'entretien et de dépannage Otis, ce qui implique la remise en état au plus vite par Otis, remise en état qui ne saurait être considérée comme résultant de l'obligation d'ACI Élévation qui a fourni le matériel,
* dire qu'il s'agit ici uniquement de la relation contractuelle qu'Otis a avec son client Co-Mo-Ge-Da-Ba,
* dire que trois mois pour intervenir en réparation du monte-charge n'est pas une prestation normale sur le plan technique,
* dire que la faute d'Otis dans l'exécution de son contrat de maintenance, d'entretien et de dépannage est ainsi indéniablement caractérisée et c'est bien cette absence de dépannage pendant plus de trois mois qui est à l'origine de l'action en résolution de la vente par Co-Mo-Ge-Da-Ba,
* dire au surplus, que l'expert judiciaire n'a pas constaté la matérialité des dommages,
* dire que la disparition des preuves par Otis par le remplacement de la machine, prive la société Otis de démontrer la faute et la causalité directe et certain de celle-ci avec les dommages allégués au principal,
* dire que l'expert judiciaire n'envisage que des hypothèses nullement vérifiées qui sont contraires à l'établissement d'une faute contractuelle d'Aci réelle et certaine en lien avec les pannes,
* dire que la société Otis en sa qualité de professionnel de réputation européenne de l'élévation et de contractant de Co-Mo-Ge-Da-Ba aurait dû faire ressortir la nécessité de portes avec plaque protectrice en option,
* dire que cette option existe chez Aci Elévation depuis 2009,
* dire que ladite option n'a pas été commandée par Otis,
* dire qu'elle est fournisseur, qu'elle a répondu à un cahier des charges qui lui a été soumis par Otis sans qu'Otis n'ait attiré son attention sur une éventuelle spécificité des lieux alors que c'est la société Otis qui, après étude du site et détermination des besoins de son client a passé commande d'une machine standard,
* dire que le CCTP a été rédigé et analysé par Otis,
* dire qu'elle n'a pas été associée à la rédaction du CCTP du maître de l'ouvrage dont seul Otis est l'auteur après analyse des besoins,
* dire qu'Otis a pris des options sur ce CCTP qui figurent dans sa proposition à Marché U, comme le démontre son devis,
* dire qu'Otis a recommandé à Marché U l'option deux " garde-corps latéraux " (en plus de celui obligatoire) et non l'option " rebond anti-roulement " ou surtout " portillon embarqué" qui aurait empêché tout contact entre la charge et la paroi lisse côté porte,
* dire qu'Otis a émis un avis technique circonstancié qui engage sa seule responsabilité contractuelle, notamment au titre de son devoir de conseil et d'information,
* dire qu'il appartenait à Otis de proposer à Co-Mo-Ge-Da-Ba l'option adaptée, ce qu'elle n'a pas fait,
* dire qu'elle n'a aucun lien contractuel avec Co-Mo-Ge-Da-Ba et que seule Otis avait le devoir de conseiller son client sur la solution la plus adaptée, en sa qualité de spécialiste des monte-charges, ascenseurs et, d'une manière générale, de tout élévateur,
* dire que les options prises par Otis dans le cadre de sa commande se sont avérées insuffisantes pour empêcher tout accrochage de la cabine du monte-charge, il lui appartient donc de supporter seule la responsabilité de l'accrochage de la cabine du monte-charge,
* débouter en conséquence la société Otis de sa demande en garantie,
* confirmer le jugement sur ce point,
* dire en tout état de cause, qu'une demande de résolution de marché telle que demandée au principal est incompatible avec les causes multiples examinées par l'expert judiciaire qui relèvent soit du contrat de vente, soit du contrat de maintenance et de dépannage,
* dire que la demande de résolution en principal est incompatible avec de simples dysfonctionnements sur quelques semaines et alors même que la société Otis a pris de sa propre initiative la responsabilité de remplacer le matériel hors le contradictoire des défenderesses,
* dire que les demandes de préjudice ne sont pas établies,
* dire en revanche que Aci Elévation aurait due être reçue dans sa demande reconventionnelle de condamnation de la société Otis à la somme de 12 334,40 euros HT, soit 14 800,92 euros TTC,
* dès lors, condamner Otis à lui régler la somme de 12 334,40 euros HT, soit 14 800,92 euros TTC, assortie des intérêts légaux,
* condamner la société Otis ou tout succombant au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens;
Sur ce, LA COUR,
Considérant que, pour un exposé complet des faits et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des parties; qu'il convient de rappeler que :
* la société Comptoir monégasque général d'alimentation et de bazars, dite Co-Mo-Ge-Da-Ba exploite un supermarché de proximité à Monaco, sous l'enseigne Marché U,
* en 2011, elle a souhaité remplacer le monte-charge existant entre la surface de vente et le sous-sol destiné aux réserves,
* elle s'est rapprochée de la société Otis dont l'offre a été acceptée, pour un montant de 73 554 euros TTC,
* deux contrats ont été conclus: un contrat de vente le 16 juin 2011, un contrat de maintenance le 5 juillet 2011,
* la société Otis a sous-traité la fourniture du monte-charge à la société Aci Elévation,
* la réception du monte-charge est intervenu le 16 septembre 2011,
* la société Co-Mo-Ge-Da-Ba s'est plainte de plusieurs pannes depuis la mise en service,
* par ordonnance de référé du 5 décembre 2012, Guy E. a été désigné en qualité d'expert,
* l'expert a déposé son rapport le 20 février 2014,
* le 15 juillet 2015, la société Co-Mo-Ge-Da-Ba a assigné la société Otis devant le Tribunal de commerce de Nanterre en résolution des contrats de vente et de maintenance, en paiement de dommages et intérêts,
* la société Otis a appelé en garantie la société Aci Elévation
* c'est dans ces circonstances qu'est intervenu le jugement déféré;
Sur la prescription:
Considérant qu'au soutien de son appel, la société Otis fait valoir, à titre principal, la prescription de l'action de la société Co-Mo-Ge-Da-Ba;
Qu'elle prétend que cette action est en garantie des vices cachés qui se prescrit par deux ans conformément aux dispositions de l'article 1648 du Code civil;
Considérant que la société Co-Mo-Ge-Da-Ba réplique que son action ne repose pas sur la théorie du vice caché mais du défaut de conformité; qu'elle fait valoir que les vices affectant le matériel ont abouti à une violation de l'obligation de délivrance assujettie à la prescription de cinq ans de l'article 1224 du Code civil, que le monte-charge vendu par la société Otis n'est pas un appareil standard, mais avait été conçu pour s'intégrer au site avec mise en œuvre d'une technique particulière, que son usage a démontré que ses imperfections ne le rendaient pas conforme à sa destination, que le matériel n'a pas répondu aux exigences attendues, rappelant que l'expert a contrôlé et confirmé que sur une période d'exploitation de 15 mois, le monte-charge a été totalement immobilisé pendant 124 jours soit quatre mois, à partir de la dernière panne du 27 septembre 2012 ce fut une immobilisation totale de trois mois qu'a subi l'engin, d'où d'ailleurs la décision prise par la direction du magasin de commander un autre monte-charge à un autre fournisseur, appareil qui a été installé en février 2013 qui, depuis lors, fonctionne sans interruption et de manière tout à fait satisfaisante;
Considérant que la non-conformité de la chose aux spécifications convenues par les parties est une inexécution de l'obligation de délivrance; qu'en revanche, la non-conformité de la chose à sa destination normale ressort à la garantie des vices cachés;
Considérant en l'espèce, ainsi que le relève la société Otis, qu'aux termes de son assignation, la société Co-Mo-Ge-Da-Ba a rappelé que le monte-charge, objet du contrat, devait présenter les caractéristiques suivantes: monte-charge AIC CIN de charge 1000 kilos, de vitesse 0,15m/seconde, de classe Groupe 3, conforme aux directives européennes 2004/108/CEE du 3 mai 2009 et 2005/95/CE du 12 décembre 2006, que l'expert judiciaire a constaté que ces caractéristiques ne remettaient pas en question la conformité de l'appareil aux stipulations contractuelles, n'a relevé aucune différence entre le monte-charge livré et celui contractuellement commandé;
Que force est de constater que le monte-charge livré répond aux caractéristiques contractuelles convenues selon le devis et qu'ainsi la société Otis a rempli son obligation de délivrance, aucun défaut de conformité ne pouvant lui être opposé, de sorte que l'action de la société Co-Mo-Ge-Da-Ba ne peut être fondée que sur la garantie des vices cachés;
Considérant que l'article 1648 du Code civil dispose que l'action résultant des vices rédhibitoires doit être intentée par l'acquéreur dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice;
Considérant que la société Otis expose que les dysfonctionnements du monte-charge sont survenus dès sa réception le 16 septembre 2011, que le premier incident important est intervenu le 29 septembre 2011, que la société Co-Mo-Ge-Da-Ba a délivré une assignation aux fins de désignation d'un expert le 31 octobre 2012, que l'action est forclose depuis le 30 septembre 2013, qu'à supposer que le point de départ de la forclusion ait commencé à courir à compter du jour où la société Co-Mo-Ge-Da-Ba a eu connaissance certaine du vice, le délai de forclusion a commencé à courir le 27 mars 2013, date de la diffusion du pré-rapport de l'expert, de sorte que l'action introduite le 16 juillet 2015 est forclose;
Considérant que la société Co-Mo-Ge-Da-Ba fait valoir que même sur le fondement du vice caché, son action n'est pas tardive puisqu'elle a saisi le Tribunal de commerce de Nanterre le 16 juillet 2015, alors que le rapport de Monsieur X avait été déposé le 20 février 2014, de sorte que le délai de deux ans n'était pas expiré;
Qu'elle expose que le moyen tiré de la tardiveté de son action soulevé par la société Otis ne peut qu'être rejeté, dès lors que le délai d'action court à compter de la découverte du vice qui ne se confond pas avec le jour de la manifestation des dysfonctionnements de la chose vendue et qu'une telle découverte résulte notamment du dépôt du rapport d'expertise qui permet à l'acquéreur de prendre connaissance avec certitude de l'existence du défaut caché et de son ampleur, de sorte que le rapport d'expertise de Monsieur X ayant été déposé le 20 février 2014, c'est à compter de cette date que le délai de deux ans de l'article 1648 du Code civil pourrait commencer à être décompté et non à compter de la notification du pré-rapport qui ne constitue qu'un document provisoire qui ne peut être pris en compte pour apprécier la connaissance que l'acquéreur a eu du vice, lequel doit se révéler à lui dans toute son ampleur; qu'elle ajoute que lorsqu'elle a saisi le président du Tribunal de première instance de Monaco le 31 octobre 2012, elle ignorait la nature des vices affectant l'appareil dont elle savait seulement qu'il dysfonctionnait, que seule l'expertise diligentée a permis de constater quatre vices ou désordres à l'origine des pannes récurrentes affectant l'appareil;
Considérant que les premiers désordres sont survenus le 29 septembre 2011, que la société Co-Mo-Ge-Da-Ba a obtenu une mesure d'expertise ordonnée par le président du Tribunal de première instance de Monaco le 31 octobre 2012;
Considérant que lors de la saisine du juge des référés, la société Co-Mo-Ge-Da-Ba a rappelé, aux termes de son assignation, les pannes ayant entraîné l'immobilisation de l'appareil, sans toutefois en définir les causes, de sorte qu'elle a demandé que soit confié à un expert le soin de déterminer la cause des pannes récurrentes qui l'affecte;
Que la société Co-Mo-Ge-Da-Ba n'a pu avoir connaissance de l'existence des vices rédhibitoires et de leur ampleur qu'à l'occasion de la notification du pré-rapport d'expertise du 27 mars 2013 qui a mis en exergue les désordres repris dans le rapport final du 20 février 2014, à savoir les profilés de guidage de la cabine, la centrale hydraulique, l'accrochage de la cabine sur la paroi de la gaine, le taquet de chargement;
Considérant dès lors que le délai imparti par le premier alinéa de l'article 1648 du Code civil est un délai de prescription et non de forclusion, que conformément à l'article 2239 du même code, la prescription est également suspendue lorsque le juge fait droit à une demande d'instruction présentée avant tout procès. Le délai de prescription recommence à courir, pour une durée qui ne peut être inférieure à six mois, à compter du jour où la mesure a été exécutée;
Qu'ainsi, la décision du juge des référés du 5 décembre 2012, ayant ordonné une mesure d'expertise, a suspendu la prescription jusqu'au jour où la mesure d'instruction a été exécutée, soit en l'occurrence le 20 février 2014;
Que le délai de prescription ayant été suspendu jusqu'au dépôt du rapport d'expertise intervenu le 20 février 2014, aucune prescription n'est acquise, la société Co-Mo-Ge-Da-Ba ayant assigné la société Otis devant le Tribunal de commerce de Nanterre le 15 juillet 2015, soit avant l'expiration du délai de deux ans imparti par le premier alinéa de l'article 1648 du Code civil;
Que par voie de conséquence, la société Co-Mo-Ge-Da-Ba est recevable en ses demandes;
Sur la résolution du contrat de vente:
Considérant que la société Otis rappelle que lorsque le contrat ne contient aucune clause expresse de résolution, il appartient aux tribunaux d'apprécier souverainement, en cas d'inexécution partielle, si cette inexécution a assez d'importance pour que la résolution doive être immédiatement prononcée ou si elle ne sera pas suffisamment réparée par une condamnation à des dommages et intérêts;
Qu'elle expose que la société Co-Mo-Ge-Da-Ba se prévaut d'une inexécution partielle eu égard à la gravité et la fréquence des pannes affectant le monte-charge, que les dysfonctionnements de l'appareil étaient dus à des défectuosités dans la conception (taquets de chargement, la fabrication (centrales défaillantes) et l'installation (guides déformés) imputables au fournisseur, la société Aci Elévation, qu'elle est intervenue afin de réaliser des interventions curatives qui ont permis d'éliminer ces défauts, l'appareil fonctionnant normalement entre les mois de janvier et septembre 2012, puis entre les mois de décembre 2012 et février 2013, date à laquelle la société Co-Mo-Ge-Da-Ba a décidé de remplacer le monte-charge, que cet appareil a été immobilisé trois mois en raison de la défectuosité de la centrale hydraulique que la société ACI Élévation a refusé de lui fournir, que du fait des dysfonctionnements, elle a octroyé à la société Co-Mo-Ge-Da-Ba un rabais de 7 355 euros soit 10% du prix du marché qui a indemnisé la gêne occasionnée;
Qu'elle prétend ainsi qu'aucune carence coupable ne peut lui être reprochée et qu'aucune résolution du contrat de vente n'est justifiée;
Considérant que la société Co-Mo-Ge-Da-Ba lui oppose les conclusions techniques du rapport d'expertise judiciaire qui a relevé le caractère anormalement grave et récurrent des pannes affectant l'installation, un dysfonctionnement n'ayant pas pour cause une utilisation défaillante, les causes des désordres, la carence de la société Otis dans la gestion des dysfonctionnements;
Qu'elle observe justement que:
- l'expert, page 25 de son rapport, a rappelé que : Il est avéré que le monte-charge a présenté à deux reprises la défectuosité de la centrale hydraulique. La première panne a conduit à une immobilisation de 7 jours, puis 12 mois plus tard, de nouveau, une panne de la centrale hydraulique avec immobilisation de l'appareil pendant 3 mois. Puis pour la période de septembre 2011 à septembre 2012, cinq autres pannes sont venues contrarier le fonctionnement du monte-charge entraînant de nouvelles immobilisations correspondant à près de 30 jours d'arrêt supplémentaire;
- de la page 32 à la page 35, l'expert a décrit la cause des pannes récurrentes qui ont affecté l'appareil en retenant quatre origines de désordres : une déformation des profilés de guidage de la cabine, une centrale hydraulique défectueuse, un défaut de conception ne permettant pas d'éviter les risques d'accrochage des chariots supportant les marchandises sur la paroi de la gaine, une multiplication de pannes provenant d'un défaut sur la carte mère de l'armoire de commande;
- page 44, l'expert a précisé que depuis la mise en service, en septembre 2011, de nombreuses pannes ont entaché le bon fonctionnement du monte-charge conduisant à de fréquentes et longues immobilisations de l'appareil dont la fonction était vitale pour l'approvisionnement de la surface de vente du supermarché. Sur la période de septembre 2011 à décembre 2012, le monte-charge a été immobilisé pendant 124 jours. Ces immobilisations ont perturbé l'organisation et le fonctionnement de l'enseigne commerciale Marché U. La dernière panne du 27 septembre 2012 a provoqué l'immobilisation du monte-charge pendant trois mois;
- dans sa conclusion (pages 44-45), l'expert a rappelé que de la mise en service du matériel en septembre 2011 à décembre 2012, le monte-charge dont s'agit a été immobilisé pendant 124 jours, l'expert ayant noté que ces immobilisations ont perturbé l'organisation et le fonctionnement de l'enseigne commerciale Marché U;
Considérant que force est de constater que la société Otis s'est engagée contractuellement à mettre en œuvre le devis descriptif proposé le 19 mai 2011, que le contrat de vente et de réalisation prévoyait à l'annexe 5, article 11 que Otis se réserve le droit de sous-traiter tout ou partie de la présente commande. Dans ce cas, Otis fera agréer son sous-traitant auprès du maître d'ouvrage qui ne pourra le refuser sans motif dûment justifié et qu'en l'espèce la société Otis n'a jamais fait agréer son sous-traitant;
Considérant que les constatations expertales précitées révèlent que dès sa livraison, le monte-charge a connu une série de pannes préjudiciables à la gestion du supermarché alimentaire, que l'ultime panne sur la centrale hydraulique ayant immobilisé l'appareil à compter du 27 septembre 2012 n'a engendré aucune intervention efficace de la société Otis, que ces désordres sont imputables aux manquements contractuels de la société Otis;
Que dans ces circonstances, la société Co-Mo-Ge-Da-Ba a indéniablement dû subir les dysfonctionnements du monte-charge au vu des fréquentes pannes qui ont été relevées; que ces dysfonctionnements graves et importants, ayant entraîné une immobilisation du monte-charge, rendent le monte-charge impropre à l'usage auquel il était destiné et constituent des vices cachés imputables à la carence contractuelle de la société Otis dont la gravité est suffisante pour justifier la résolution du contrat de vente, peu important que celle-ci ait proposé une remise sur le prix et que de guerre lasse, la société Co-Mo-Ge-Da-Ba ait décidé au mois de février 2013 de s'adresser à un autre entreprise pour commander un matériel de remplacement;
Que le jugement sera confirmé sur la résolution du contrat de vente;
Sur la résolution du contrat de maintenance:
Considérant que la société Otis soutient que le contrat de vente et le contrat de maintenance sont indivisibles, que le seul manquement au contrat de maintenance est l'arrêt du monte-charge pendant trois mois du fait de la défaillance de la deuxième centrale hydraulique, pièce qui n'était distribuée que par la société Aci Elévation qui a refusé de lui fournir, de sorte qu'elle a dû la rechercher auprès d'un autre fournisseur;
Considérant que la société Co-Mo-Ge-Da-Ba réplique à l'indivisibilité des contrats;
Considérant que forme un même ensemble contractuel indivisible le contrat de fourniture, pose du monte-charge et le contrat de maintenance lequel ne se conçoit pas sans le premier; qu'il convient au surplus de relever, au vu de ce qui précède, que la société Otis, seule contractante de la société Co-Mo-Ge-Da-Ba, a manqué à ses obligations au titre de ce contrat de maintenance;
Qu'il en résulte que sera également confirmé le jugement en ce qu'a été prononcée la résolution du contrat de maintenance;
Sur la réparation des préjudices:
Considérant que du fait de la résolution des contrats, le tribunal a justement alloué, à titre de remboursement, à la société Co-Mo-Ge-Da-Ba la somme de 66 199 euros au titre du contrat de vente et la somme de 855,14 euros au titre du contrat de maintenance;
Que la société Co-Mo-Ge-Da-Ba sollicite la réformation du jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande indemnitaire, hormis les primes " monte-charge " versées à ses salariés pour un montant de 6 907 euros;
Qu'elle sollicite en cause d'appel, 45 223 euros au titre du manque de compétitivité du personnel manutentionnaire et du point de vente, 11 753 euros au titre des heures perdues par le responsable du supermarché, 2 500 euros au titre du démontage de l'appareil, soit un total de 59 476 euros arrondi à 60 000 euros;
Considérant que la société Otis ne saurait prétendre que la société Co-Mo-Ge-Da-Ba a déjà été indemnisée pour la gêne occasionnée par les dysfonctionnements du monte-charge, puisque lui a été accordé un rabais de plus de 7 000 euros sur le marché initial;
Qu'en effet, cette somme ne lui a pas été versée et ne constitue pas l'indemnisation de son préjudice;
Considérant qu'il est constant que la manutention des marchandises a été perturbée par les pannes du monte-charge, qu'un surcoût de manutention a affecté du personnel, ainsi qu'en atteste Madame T. déléguée du personnel, que ce préjudice a été justement réparé par le tribunal par l'octroi de la somme de 6 907 euros correspondant au montant des primes "monte-charges" versées aux salariés, la société Co-Mo-Ge-Da-Ba ne justifiant d'aucun autre préjudice chiffrable au titre de la perte prétendue de compétitivité du personnel et du point de vente;
Considérant que l'expert judiciaire a précisé que pour 124 jours d'immobilisation du monte-charge, le responsable du supermarché avait dû passer en moyenne tous les jours deux heures pour organiser et surveiller la manutention faite par le personnel qui, dans certains cas, devait passer sur le trottoir pour amener des charges encombrantes dans le magasin; qu'au vu des bulletins de paie de Monsieur D., communiqués en cours d'expertise, il sera alloué à la société Co-Mo-Ge-Da-Ba, à titre de dommages et intérêts, la somme complémentaire de 11 753 euros réparant son préjudice financier causé par le coût salarial supporté du fait des dysfonctionnements du monte-charge;
Qu'il sera enfin accordé à la société Co-Mo-Ge-Da-Ba la somme de 2 500 euros à titre de dommages et intérêts, correspondant aux frais occasionnés par le démontage du monte-charge litigieux;
Que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 16 juillet 2015;
Sur l'appel en garantie:
Considérant que la société Otis sollicite l'infirmation du jugement en ce qu'il a rejeté sa demande en garantie formé à l'encontre de la société Aci Elévation, sous-traitant;
Qu'elle fait valoir en substance que la société Aci Elévation avait connaissance du site et de l'usage projeté de l'appareil, qu'elle lui a sous-traité l'intégralité de la fourniture et de l'installation de l'ascenseur, que l'immobilisation du monte-charge n'a été causée que par la défaillance du matériel installé par la société Aci Elévation qui a manqué à son devoir de conseil et d'information, a refusé de fournir une centrale hydraulique alors que sa garantie était acquise;
Considérant que la société Aci Elévation prétend au contraire que la société Otis ne lui a pas sous-traité l'ensemble des travaux, qu'elle n'a assuré que la fabrication du monte-charge pour 34 000 euros qu'elle a livré à la société Otis liée à la société Co-Mo-Ge-Da-Ba par un contrat principal qui portait sur la somme de 73 554 euros, que cet écart de prix démontre que les deux contrats ne sont pas superposables et que la résolution du marché demandée par la société Co-Mo-Ge-Da-Ba est sans effet sur le contrat secondaire, qu'enfin le dépannage de la machine était sous la responsabilité de la société Otis qui connaissait les besoins de son client ayant réalisé une étude sur site;
Considérant qu'afin d'être relevée et garantie par la société Aci Elévation, il appartient à la société Otis de démontrer une faute et son lien de causalité avec la résolution du marché;
Que force est de constater que le rapport d'expertise judiciaire ne démontre aucune faute de la société Aci Elévation, l'expert ayant seulement constaté que le monte-charge a connu de nombreuses pannes depuis sa mise en service au point d'entacher son fonctionnement, relevant que : En sa qualité de prestataire de service, la société Otis, selon contrat signé le 1er septembre 2011, devait assurer les prestations d'entretien et de dépannage. Force est de constater que le prestataire Otis n'a pas respecté les clauses de son contrat, sachant qu'en fonction des difficultés rencontrées pour l'approvisionnement des pièces de rechange, le prestataire a laissé l'appareil à l'arrêt pendant plusieurs mois. La société Otis avait également une obligation d'information et de conseil. Le devoir d'information n'a pas été assuré. C'est ainsi que le monte-charge est resté hors service pendant 3 mois. Cette dernière immobilisation a causé un vif mécontentement du client;
Que le tribunal a justement retenu que le contrat du marché a été signé entre la société Otis et la société Co-Mo-Ge-Da-Ba, que la société Otis a choisi le modèle de monte-charge, a pris la décision de mettre en place certaines options et préconisations qui se sont révélées inadaptées à l'usage de la machine, que la société Otis avait une obligation de conseil et d'information envers son client et devait assurer l'entretien et le dépannage du monte-charge;
Que la société Otis, qui a passé commande d'une machine standard auprès de la société Aci Elévation qui est personnalisable et adaptable, aurait dû déterminer les besoins de son client en termes de destination de l'appareil, de sa fréquentation, de son rythme d'utilisation;
Que la société Aci Elévation fournisseur de la société Otis a répondu au cahier des charges qui lui a été soumis, que le CCTP a été rédigé et analysé par la société Otis laquelle pouvait évaluer un risque particulier, de sorte que celle-ci ne peut reprocher à la société Aci Elévation d'avoir manqué à son devoir de conseil et d'information;
Que par ailleurs, la société Otis n'ayant pas conservé les centrales hydrauliques prétendument défectueuses, ne peut être prouvée la défaillance de ces centrales comme cause directe et certaine des pannes du monte-charge, de sorte qu'il n'est nullement établi que la défaillance de ce matériel et le refus supposé de fourniture d'une pièce de rechange soient à l'origine du dysfonctionnement de l'appareil;
Qu'il en résulte que le jugement sera également confirmé en ce qu'il a débouté la société Otis de son appel en garantie diligenté à l'encontre de la société Aci Elévation;
Sur la demande reconventionnelle de la société Aci Elévation:
Considérant que la société Aci Elévation poursuit l'infirmation du jugement qui n'a pas fait droit à sa demande en paiement de la somme de 12 334,10 euros HT au titre d'une facture correspondant à une remise en état du monte-charge intervenue le 13 janvier 2012, selon devis du 11 janvier 2012;
Qu'elle soutient que cette intervention s'est faite hors garantie en raison de l'intervention d'une entreprise non agréée sur le monte-charge;
Mais considérant que le tribunal a justement observé que l'expertise n'a pas permis d'établir la preuve de l'intervention d'un tiers, de sorte que la remise en état relevant de la garantie contractuelle, aucune somme n'est due à la société Aci Elévation, le courrier adressé par la société Otis à la société Co-Mo-Ge-Da-Ba le 1er août 2012 étant inopérant à établir un quelconque enrichissement sans cause de la société Otis;
Sur les autres demandes:
Considérant que le premier juge a exactement statué sur le sort des dépens et les dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile dont il a fait une équitable application;
Qu'en vertu de ce texte, il y a lieu de faire droit aux prétentions de la société Co-Mo-Ge-Da-Ba, au titre de ses frais irrépétibles exposés à l'occasion de ce recours, contre la société Otis qui succombe et doit supporter la charge des dépens d'appel;
Par ces motifs, Statuant par décision contradictoire, Confirme le jugement déféré sauf sur le montant des indemnités réparatrices, Statuant à nouveau sur ce point, Condamne la société Otis à payer à la société Co-Mo-Ge-Da-Ba, en sus des sommes allouées par le tribunal, les sommes de 11 753 euros et 2 500 euros à titre de dommages et intérêts, Dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du 16 juillet 2015, Y ajoutant, Condamne la société Otis à payer à la société Co-Mo-Ge-Da-Ba la somme de 3 500 euros au titre des frais irrépétibles d'appel, Rejette toutes autres demandes, Condamne la société Otis aux dépens d'appel et dit que ceux-ci pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.