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Décisions

CA Poitiers, 2e ch. civ., 31 octobre 2017, n° 16-02936

POITIERS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Eko'Logis (SARL)

Défendeur :

BNP Paribas Personal Finance , CA Consumer Finance (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Sallaberry

Conseillers :

Mme Caillard, M. Waguette

Avocats :

Mes Gomez, Recoules, Boisseau, Rousseau, Guilhem Ducleon, Gand

TI Saintes, du 4 juill. 2016

4 juillet 2016

Exposé du litige

Le 8 avril 2013, M. X s'est engagé auprès de la SARL Eko'Logis en signant :

- un bon de commande d'un chauffage thermodynamique pour un montant de 7 000 €,

- un bon de commande d'un ballon d'eau chaude pour un montant de 5 900 €,

- un avenant regroupant les deux commandes pour un montant de 12 900 €.

Le 17 avril 2013, M. X s'est engagé auprès de la SARL Eko'Logis en signant :

- un bon de commande d'un portail et d'une motorisation pour un montant de 13 200 €,

- un avenant modifiant la commande du 8 avril 2013 un montant de 12 900 €,

- un avenant regroupant l'ensemble des commandes pour un montant de 26 100 €.

Suivant offre préalable acceptée le 17 avril 2013, la SA Sofinco, désormais dénommée SA CA Consumer Finance, a consenti à M. X un contrat de prêt d'un montant de 26 100 € affecté à l'achat des matériels commandés.

Le 2 juillet 2013, M. X s'est engagé auprès de la SARL Eko'Logis en signant :

- un bon de commande d'un pack adoucisseur pour un montant de 4 000 €,

- un bon de commande d'un parquet flottant et de volets roulants pour un montant de 14 000 €,

- un avenant regroupant les deux commandes pour un montant de 18 000 €.

Suivant offre préalable acceptée le 4 juillet 2013, la SA Cetelem, désormais dénommée SA BNP Paribas Personal Finance, a consenti à M. X un contrat de prêt d'un montant de 18 000 € affecté à l'achat des matériels commandés.

Le 27 septembre 2013, M. X s'est engagé auprès de la SARL Eko'Logis en signant :

- un bon de commande pour un portail et sa motorisation pour un montant de 7 619 €,

- un bon de commande d'une VMC double flux pour un montant de 8 881 €,

- un avenant regroupant les deux commandes pour un montant de 16 500 €.

Cette dernière commande a toutefois été annulée et aucun crédit n'avait été souscrit pour son financement.

Par acte d'huissier en date du 25 novembre 2014, la SA CA Consumer Finance a fait assigner M. X devant le Tribunal d'instance de Saintes afin de le voir condamner à lui payer le solde restant dû au titre du prêt consenti dont le remboursement n'était plus honoré.

Par actes d'huissier en date du 22 mai 2015 M. X a fait assigner la SARL Eko'Logis et la SA BNP Paribas Personal Finance devant le Tribunal d'instance de Saintes afin notamment, après jonction de cette procédure avec celle introduite par la SA CA Consumer Finance, de voir prononcer l'annulation de l'ensemble des contrats conclus avec la société Eko'Logis respectivement en date des 8 avril 2013, 17 avril 2013, 2 juillet 2013 et 27 septembre 2013 et, par voie de conséquence, l'annulation des contrats de financement affectés passés auprès de la SA BNP Paribas Personal Finance avec toutes ses conséquences. Il sollicitait, en outre, l'octroi de dommages intérêts en réparation d'un préjudice moral.

M. X fondait ses demandes en annulation sur les dispositions des articles L. 122-8 et L. 122-11 et suivants du Code de la consommation, qui sanctionnent l'abus de faiblesse et les pratiques commerciales agressives dont il se disait victime de la part de la société Eko'Logis, il invoquait également l'irrégularité des bons de commandes non conformes aux dispositions protectrices énoncées par les articles L. 121-23 et L. 121-24 du Code de la consommation, ainsi que le comportement fautif des établissements financiers qui lui auraient consenti des crédits dangereux au regard de sa situation économique et de son incapacité à comprendre la portée de son engagement et l'auraient harcelé par l'envoi de très nombreux courriers de relance alors qu'il était déjà d'une nature fragile et angoissée.

La SARL Eko'Logis s'opposait aux demandes de M. X soutenant n'avoir commis aucune faute lors de la négociation et la souscription des différents contrats.

Les deux sociétés de crédit concluaient principalement, pour leur part, au rejet des demandes en annulation et à la condamnation de M. X à leur payer les sommes qu'il restait devoir au titre des prêts consentis.

Après avoir joint les deux instances, le Tribunal d'instance de Saintes, par jugement rendu le 4 juillet 2016, a ainsi statué :

Constate que les contrats du 27 septembre 2013 ont fait l'objet d'une annulation amiable entre les parties,

Prononce la nullité des contrats souscrits les 8 avril 2013, 17 avril 2013 et 2 juillet 2013 par M. X François auprès de la SARL Eko'Logis,

Prononce la nullité des contrats de crédits affectés souscrits les 17 avril 2013 et 4 juillet 2013 auprès de la SA CA Consumer Finance et de la SA BNP Paribas Personal Finance,

Condamne la SARL Eko'Logis à restituer à M. X François la somme de 44 100 €,

Ordonne à la SARL Eko'Logis de procéder au démontage de toutes les installations objets des contrats annulés et de procéder à la remise en état à ses frais,

Condamne M. X François à restituer à la SA CA Consumer Finance la somme de 25 238,16 € et à la SA BNP Paribas Personal Finance celle de 17 810,03 €,

Condamne la SARL Eko'Logis à payer à M. X François la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts,

Condamne la SARL Eko'Logis à payer à M. X François la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Ordonne l'exécution provisoire.

Par déclaration reçue et enregistrée au Greffe de la Cour d'appel de céans le 29 juillet 2016, la société Eko'Logis a interjeté appel de cette décision à l'encontre de toutes les parties.

En dernier état de ses écritures signifiées le 31 juillet 2017, la société Eko'Logis demande à la cour de :

Vu les articles L. 111-1, L. 121-6, L. 121-23, L. 121-24, et L. 132-10 du Code de la consommation,

Vu les articles 1109, 1112, 1115 et 1315 du Code civil (dans leur version antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016),

Dire et juger la société Eko'Logis recevable et bien fondée en son appel,

Réformer la décision déférée en ce qu'elle a prononcé la nullité des contrats de vente conclus les 8 avril 2013, 17 avril 2013 et 2 juillet 2013 entre la société Eko'Logis et M. X, en ce qu'elle a condamné la SARL Eko'Logis à restituer à M. X la somme de 44 100 €, ordonné à la SARL Eko'Logis de procéder au démontage de toutes les installations objets des contrats annulés et de procéder à la remise en état à ses frais, et condamné la SARL Eko'Logis à payer à M. X la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts, outre 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

Statuant à nouveau,

A titre principal,

Dire et juger que les contrats de vente conclus entre la société Eko'Logis et M. X n'encourent aucune nullité,

Par conséquent,

Débouter M. X de l'ensemble de ses demandes,

A titre subsidiaire,

Si par impossible la cour prononçait l'annulation des contrats de vente conclus entre Eko'Logis et M. X,

Débouter M. X de l'ensemble de ses demandes indemnitaires,

En tout état de cause,

Débouter M. X du surplus de ses demandes,

Condamner M. X à payer à la société Eko'Logis la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens.

Au soutien de son appel, elle fait valoir en substance, que les pratiques commerciales agressives, telles qu'elles sont définies par les articles L. 121-6 et L. 121-7 du Code de la consommation ne sont nullement démontrées, contrairement à ce qu'a affirmé le premier juge pour les retenir, puisqu'elles supposent des sollicitations répétées et insistantes ou l'usage d'une contrainte physique ou morale liées au contexte inexistantes en l'espèce, pas plus que n'est établie, au moment de la signature des contrats, la particulière vulnérabilité de M. X, qui doit s'apprécier au jour de la conclusion des contrats et ne peut résulter d'une mesure de curatelle levée depuis 2006, ou de la disproportion de ses achats au regard de ses capacités financières que la société Eko'Logis n'avait pas à vérifier et qui ne constitue de toutes façons pas une pratique commerciale agressive, faisant encore remarquer que M. X occupait un emploi, était inséré dans la vie active et gérait ses affaires.

Elle ajoute que les pratiques commerciales abusives ne sont cause de nullité que s'il est établi qu'elles ont vicié le consentement du co-contractant et que la preuve d'agissements assimilés à la violence, telle que définie par le Code civil, n'est pas rapportée et qu'encore M. X a réceptionné les installations objets des contrats, les a utilisées et a honoré les mensualités des prêts ce qui revient à approuver les contrats et à couvrir la nullité éventuelle.

Elle prétend encore qu'ayant indiqué très précisément les caractéristiques des biens vendus, elle n'a de ce fait pas failli à son obligation précontractuelle d'information laquelle n'est, au surplus, pas sanctionnée par la nullité du contrat. Concernant le respect des dispositions de l'article L. 121-23 du Code de la consommation, elle fait valoir qu'elle a satisfait aux exigences légales puisque tant la faculté de renonciation que ses conditions d'exercice étaient portées sur les contrats, que les mentions obligatoires y figuraient et qu'enfin, la nullité qui sanctionne des irrégularités n'est que relative et ne pourrait plus être invoquée compte tenu de l'exécution volontaire des contrats conclus.

Subsidiairement, elle estime qu'aucun préjudice moral ou économique n'est démontré ce qui justifie l'infirmation de la décision déférée en ce qu'elle a accueilli M. X en ses demandes indemnitaires.

Par dernières conclusions signifiées le 25 juillet 2017, M. X demande à la cour de confirmer le jugement entrepris et condamner la Société Eko'Logis, la société BNP Paribas Personal Finance et la SA Consumer Finance, venant aux droits de la SA Cetelem, à lui payer la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Il fait principalement valoir que le tribunal d'instance a justement prononcé l'annulation des contrats souscrits dont la multiplicité et l'inadéquation démontrent l'abus dont il a été victime n'ayant manifestement pas compris la portée de ses engagements alors qu'il ne sait ni lire ni écrire. Il estime que les sollicitations répétées et insistantes de la société Eko'Logis, caractérisées entre autres, par la signature de 12 contrats en moins de 6 mois, ainsi que la disproportion des achats réalisés au regard de ses capacités financières, de même que son état de vulnérabilité, relevée par le premier juge à l'issue de sa comparution et dont la société Eko'Logis avait pu se convaincre au fil de ses visites et démontrées par les attestations et certificats médicaux qu'il produit, ont nécessairement vicié son consentement et doivent conduire à confirmer le jugement entrepris.

Il ajoute que la nullité serait encore encourue du fait qu'aucune information précontractuelle ne lui a été fournie quant à l'origine des marchandises, les incidences de leur pose, les conditions financières et éventuellement sociales et fiscales des contrats et du fait que les documents signés ne comportaient pas toutes les mentions légales comme l'adresse du fournisseur ou encore les modalités de financement, qui ne figuraient que sur les avenants, la mention des taux d'intérêts, absente de certains contrats, et que la faculté de rétractation ne figurait pas sur un formulaire détachable ainsi que les dispositions du Code de la consommation l'exigent.

Enfin, il soutient que ses demandes indemnitaires sont parfaitement justifiées dès lors qu'il démontre qu'il s'est vu harceler par les organismes de crédit pour honorer le remboursement des prêts contractés alors même qu'il ne pouvait comprendre la portée de ses engagements qui étaient totalement disproportionnés occasionnant ainsi un préjudice tant moral qu'économique dont la réparation légitime a été admise à bon droit par le premier juge.

Selon ses conclusions signifiées le 20 décembre 2016, la société BNP Paribas Personal Finance demande à la cour de :

Vu les articles L. 121-24 et L. 311-24 et suivants du Code de la consommation,

Vu l'article 1353 du Code civil,

A titre principal,

- Infirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat principal conclu entre M. X et la société Eko'Logis et en ce qu'il a prononcé la nullité conséquente du contrat de crédit conclu entre M. X et la société BNP Paribas Personal Finance le 4 juillet 2013,

- Juger valable le contrat principal conclu entre M. X et la société Eko'Logis et le contrat de crédit conclu entre M. X et la société BNP Paribas Personal Finance le 4 juillet 2013,

- Condamner M. X à payer à la société BNP Paribas Personal Finance les sommes suivantes :

19 410,16 € en principal, outre les intérêts de retard au taux contractuel de 6,31 % à compter de la date de la mise en demeure, soit le 5 mars 2015,

1 249,12 € au titre de l'indemnité de retard avec intérêts au taux légal à compter de la date de la mise en demeure, soit le 5 mars 2015,

- Confirmer le jugement en ses autres dispositions

A titre subsidiaire,

- Si la cour devait confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat principal conclu entre M. X et la société Eko'Logis,

- Confirmer le jugement en ce qu'il a condamné M. X à payer à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 17 810,03 € correspondant au capital emprunté diminué des remboursements effectués,

- Confirmer le jugement en ses autres dispositions,

En toutes hypothèses,

- A titre principal,

Condamner M. X à payer à la société BNP Paribas la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civil et les entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de Maître Chantal Rousseau, de la Selarl BRT, conformément aux dispositions de l'article 696 du Code de procédure civile,

- A titre subsidiaire et si la nullité aux torts du vendeur était prononcée,

Condamner la société Eko'Logis à payer à la société BNP Paribas la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et les entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de Maître Chantal Rousseau, de la Selarl BRT, conformément aux dispositions de l'article 696 du Code de procédure civile.

La société BNP Paribas Personal Finance fait valoir principalement que pour justifier l'annulation des contrats, le tribunal a retenu des pratiques commerciales agressives de la part de la société Eko'Logis en procédant cependant par voie d'affirmations dès lors que les arguments avancés par M. X, à qui incombe la charge de la preuve, sont inopérants pour les établir comme le démontre la société Eko'Logis. Il considère que le contrat principal ne devant pas être annulé, le contrat de crédit affecté subsiste et avec lui l'obligation de M. X de s'acquitter du remboursement des sommes prêtées.

Subsidiairement, il conclut à la confirmation du jugement entrepris qui, en conséquence de l'annulation subséquente du contrat de crédit, a ordonné la restitution des fonds versés en l'absence de toute faute imputable à l'organisme financier susceptible de l'en priver.

En l'état de ses dernières conclusions signifiées le 22 décembre 2016, la société Consumer Finance demande à la cour de :

Statuer ce que de droit sur la validité des contrats principaux de vente conclus entre M. X et la société Eko'Logis et par voie de conséquence sur la validité du contrat accessoire de crédit conclu entre M. X et la société CA Consumer Finance,

Si la cour venait à infirmer le jugement entrepris en ce qu'il déclare nuls les contrats principaux de vente et avenants conclus entre M. X et la société Eko'Logis et prononce, par voie de conséquence, la nullité du contrat accessoire de crédit conclu entre M. X et la société CA Consumer Finance :

Condamner M. X, sur le fondement de l'article L. 311-24 du Code de la consommation, à payer à la société CA Consumer Finance, au titre du dossier n° 81032876104, la somme en principal actualisée au 30 octobre 2014 de 29 911,68 €, assortie des intérêts calculés au taux contractuel de 7,95 % sur la somme de 26 100 € à compter du 6 octobre 2014, date de la déchéance du terme, et au taux légal sur le surplus,

Débouter M. X de ses plus amples demandes fins et conclusions,

Condamner M. X à payer à la société CA Consumer Finance la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamner M. X aux entiers dépens,

Si la cour venait à confirmer le jugement entrepris en ce qu'il déclare nuls les contrats principaux de vente et avenants conclus entre M. X et la société Eko'Logis et par suite, le contrat accessoire de crédit conclu entre M. X et la société CA Consumer Finance :

Confirmer le Jugement entrepris quant aux conséquences attachées à cette nullité et notamment en ce qu'il a :

Condamné la SARL Eko'Logis à restituer à M. X le prix de vente,

Condamné M. X à restituer à la société CA Consumer Finance la somme de 25 238,16 €

Confirmer le Jugement entrepris en ce qu'il déboute M. X de ses autres demandes formées à l'encontre de la société CA Consumer Finance,

Statuer ce que de droit sur le surplus des demandes formées par M. X,

Condamner tout succombant à payer à la société CA Consumer Finance la somme de 500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamner tout succombant aux entiers dépens.

La société CA Consumer Finance développe des moyens et arguments similaires à ceux présentés par la société BNP Paribas Personal Finance.

Il est expressément référé aux écritures des parties pour plus ample exposé des faits ainsi que de leurs moyens et prétentions.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 21 août 2017.

Motifs de la décision :

La recevabilité de l'appel n'est pas contestée.

Sur la nullité des contrats.

La pratique commerciale agressive, sanctionnée par la nullité du contrat conclu, est définie par l'article L. 122-11 du Code de la consommation comme celle qui du fait de sollicitations répétées et insistantes ou de l'usage d'une contrainte physique ou morale, et compte tenu des circonstances qui l'entourent :

- altère ou est de nature à altérer de manière significative la liberté de choix d'un consommateur,

- vicie ou est de nature à vicier le consentement d'un consommateur,

- entrave l'exercice des droits contractuels d'un consommateur.

La société Eko'Logis reproche au premier juge d'avoir retenu à son encontre des pratiques commerciales agressives, au sens de l'article susvisé, en reprenant les arguments développés par M. X alors cependant qu'ils n'auraient pas été démontrés par les éléments et pièces versés aux débats.

En l'espèce, les sollicitations répétées ou insistantes sont suffisamment établies au regard de la multiplicité des contrats souscrits dont il convient de préciser que tous résultent du démarchage à domicile par le même commercial de la société Eko'Logis entre avril et septembre 2013. Entre ces dates rapprochées, pas moins de 12 contrats et avenants ont été signés par M. X dont plusieurs le même jour.

M. X est resté durant cette période sous l'influence certaine de la société Eko'Logis, qui est intervenue à son domicile pour la pose des divers appareils commandés qui nécessitaient une installation, et le commercial de la société Eko'Logis a pu ainsi maintenir une forme de pression sur M. X pour l'inciter à contracter davantage et de manière irraisonnée au regard tant de ses ressources, qui ne lui permettaient pas de tels investissements, qu'au regard de ses besoins puisque la société Eko'Logis, par le biais de M. Y son commercial, a fait commander à M. X, le 17 avril 2013, un portail et sa motorisation pour plus de 13 200 € et que le 27 septembre 2013, le même M. Y lui faisait de nouveau signer un bon de commande d'un portail et de sa motorisation, cette fois pour " seulement " 7 619 €, outre une VMC double flux pour 8 881 €.

Si l'évidence d'un double emploi, s'agissant du portail, a conduit à l'annulation de ce dernier bon de commande, il n'en demeure pas moins qu'en toute connaissance de cause la société Eko'Logis avait réussi à convaincre M. X, dont elle prétend qu'aucune circonstance particulière n'altérait le consentement, à faire cette acquisition parfaitement inutile compte tenu de la commande aux mêmes fins passée seulement 5 mois auparavant.

Le consentement ainsi donné par M. X à toutes ces acquisitions inadaptées à ses revenus et besoins ne s'expliquent que par l'incapacité de celui-ci à résister à la pression du commercial de la société Eko'Logis qui s'était nécessairement convaincu de la vulnérabilité du client, et ce dès la première visite de son commercial, dès lors d'une part que le premier juge a relevé, lors de la comparution de M. X à l'audience, que sa vulnérabilité et ses difficultés de compréhension correspondaient à une réalité certaine, ce qui démontre le caractère évident et apparent de ces difficultés, et que d'autre part :

- son médecin traitant (attestation Bonnenfant) le décrit comme présentant une personnalité particulièrement vulnérable et influençable qui le rend très vulnérable à toute personne pouvant nuire à ses intérêts,

- sa famille (attestations Jousson et Faucher) le dit facilement influençable et faible, ne sachant pas lire

- et, enfin, ses amis (attestations Cocu, Mery Herault et Gaudin) le présentent comme très influençable, peureux et timide.

La société Eko'Logis ne peut sérieusement soutenir que la vulnérabilité de M. X n'est pas démontrée à la date de conclusion des prêts en 2013 alors qu'il ressort des attestations précitées que les traits de caractère induisant cette vulnérabilité font partie de la personnalité de M. X et existaient déjà dès son enfance.

Il apparaît, en conséquence, que les agissements de la société Eko'Logis, compte tenu de la vulnérabilité de M. X, ont vicié son consentement et que c'est à bon droit que le premier juge a annulé l'intégralité des contrats consentis, en ceux compris les contrats de crédit affectés qui en dépendaient.

La décision devra être confirmée sur ce point.

Sur la demande de dommages intérêts.

Il est indéniable que l'impossibilité pour M. X de rembourser les crédits consentis pour financer les acquisitions qu'il avait faites lui a valu un harcèlement de la part des deux organismes de crédit Sofinco et Cetelem, ainsi que la multitude de courriers de relance qu'il verse aux débats le démontrent, sans oublier les appels téléphoniques incessants.

S'il est légitime de considérer qu'au regard de la personnalité fragile de M. X, celui-ci a pu subir de ce fait un réel préjudice, il apparaît cependant qu'à défaut de justifier de toute autre cause de préjudice, notamment les conséquences sur sa santé et son travail, alléguées mais non démontrées, ce préjudice ne pouvait être fixé par le premier juge à 5 000 € et qu'une somme de 2 500 € est suffisante pour une juste indemnisation. La décision sera réformée en ce sens.

La décision entreprise, qui n'était pas autrement critiquée, sera donc confirmée pour le surplus.

La société Eko'Logis, succombant à l'instance d'appel, conservera la charge des dépens et sera condamnée à payer à M. X une indemnité complémentaire de 3 500 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile pour l'indemniser des frais irrépétibles exposés pour les besoins de l'instance d'appel.

Les demandes d'indemnité de procédure formées par les deux sociétés de crédit, BNP Paribas Personal Finance et CA Consumer Finance, seront rejetées.

La distraction des dépens sera autorisée au bénéfice de Maître Chantal Rousseau de la Selarl BRT, avocat, conformément à la demande.

Par ces motifs, LA COUR, statuant contradictoirement, publiquement et en dernier ressort, - Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a alloué à M. X la somme de 5 000 € à titre de dommages intérêts, Statuant à nouveau du seul chef infirmé, - Condamne la société Eko'Logis à payer à M. X la somme de 2 500 € à titre de dommages intérêts, Y ajoutant, - Déboute les sociétés BNP Paribas Personal Finance et CA Consumer Finance de leurs demandes d'indemnités en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, - Condamne la société Eko'Logis à payer à M. X une indemnité complémentaire de 3 500 € en application, en cause d'appel, des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, - Condamne la société Eko'Logis aux dépens de l'instance d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.