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Décisions

CA Dijon, 2e ch. civ., 26 octobre 2017, n° 14-02232

DIJON

Arrêt

Infirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Vautrain

Conseillers :

Mme Dumurgier, M. Wachter

Avocats :

Mes Bekhedda, Djeatsa Fouematio, Gras Comtet

TI Mâcon, du 20 nov. 2014

20 novembre 2014

Le 12 février 2013, Mme X a acquis auprès de M. Arthur S., exploitant un commerce sous l'enseigne Arthur Auto, un véhicule Renault Scenic mis en circulation le 28 octobre 2004 et affichant 138 000 kilomètres, moyennant le prix de 3 750 €.

Par lettre du 6 mai 2013, Mme X a informé M. Z de ce qu'elle avait constaté sur ce véhicule une consommation excessive d'huile.

Par exploit du 3 avril 2014, faisant valoir que l'automobile acquise était affectée d'un vice caché, Mme X a fait assigner M. Z devant le Tribunal d'instance de Mâcon aux fins d'obtenir, sur le fondement de l'article 1641 du Code civil, sa condamnation au paiement de la somme de 8 000 € au titre des frais de remise en état arbitrés par expert, outre 1 800 € en réparation du préjudice de jouissance.

M. Z s'est opposé à ces demandes, indiquant que le véhicule avait toujours été régulièrement entretenu, contestant qu'il ait été affecté lors de sa vente d'un vice caché, soutenant que l'expertise ne lui était pas opposable comme n'y ayant pas été appelé, et affirmant qu'il n'existait pas de préjudice, le véhicule ayant été revendu par Mme X.

Par jugement du 20 novembre 2014, le tribunal a considéré que le rapport d'expertise produit par la demanderesse était opposable au défendeur dès lors qu'il était justifié que celui-ci avait été convoqué aux opérations, a relevé qu'il résultait de ce document qu'en raison d'un problème de lubrification le turbocompresseur était hors d'usage, que ce problème était latent lors de la vente, et que l'expert avait chiffré le coût de la remise en état à 8 000 €, le préjudice de jouissance devant quant à lui être évalué à 500 €. Le tribunal a en conséquence :

- condamné M. Z à payer à Mme X la somme de 8 500 € à titre de dommages et intérêts ;

- condamné M. Z à payer à Mme X la somme de 400 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

- condamné M. Z aux dépens.

M. Z a relevé appel de cette décision le 17 décembre 2014.

Par conclusions notifiées le 10 juillet 2015, l'appelant demande à la cour :

Déclarer recevable fondé l'appel interjeté par M. Z ;

Y faisant droit,

Vu les conditions de l'article 1641 du Code civil,

- de constater que les prétentions de Mme X ne reposent que sur le rapport d'expertise qu'elle produit elle même ;

- de constater que le jugement déféré ne s'est fondé exclusivement que sur l'expertise réalisée à la demande de Mme X ;

Et par conséquent,

- d'infirmer la décision entreprise et statuant à nouveau,

- de dire et juger qu'il n'existait pas de vices cachés au moment de la vente du véhicule Renault Scenic immatriculé CV-583- ZG ;

- de dire et juger le fait de l'acheteur à l'origine des désordres pour lesquels il est demandé réparation ;

Par voie de conséquence,

- de décharger M. Z des condamnations prononcées contre lui en principal, intérêts, frais et accessoires ;

- de condamner Mme X à porter et payer au concluant la somme de 2 000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions notifiées le 8 septembre 2015, Mme X demande à la cour :

Vu les articles 1641 et suivants du Code civil,

- de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a :

* condamné M. Z à payer à Mme X la somme de 8 000 € à titre de dommages et intérêts au titre de la réfection du véhicule ;

* condamné M. Z aux entiers dépens ;

Le réformant,

- de condamner M. Z à payer à Mme X la somme de 1 800 € à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice de jouissance ;

Y ajoutant,

- de condamner M. Z à payer à Mme X la somme de 2 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- de condamner M. Z aux entiers dépens d'appel, dont distraction au profit de Me Géraldine Gras Comtet, avocat sur son affirmation de droit.

La clôture de la procédure a été prononcée le 14 février 2017.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer pour l'exposé des moyens des parties à leurs conclusions récapitulatives visées ci-dessus.

Sur ce, LA COUR,

L'article 1641 du Code civil dispose que le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.

Il sera relevé d'abord que Mme X fonde ses prétentions sur l'existence d'un vice caché non pas pour poursuivre la résolution de la vente, ni pour se faire restituer une partie du prix, comme prévu par l'article 1644, mais pour obtenir le paiement du coût de remise en état, lequel est supérieur de plus du double au prix d'achat du véhicule, ainsi que de dommages et intérêts.

Quoi qu'il en soit, il lui incombe de rapporter la preuve du vice caché qu'elle invoque au soutien de sa demande.

Pour ce faire, ainsi d'ailleurs que pour justifier du montant de ses prétentions, elle invoque, à l'exclusion de toute autre pièce, les conclusions d'une expertise non judiciaire réalisée à sa seule demande par le biais de son assureur. C'est en conséquence sur ce seul document que le premier juge s'est fondé pour faire droit aux prétentions de Mme X.

Or, si le juge ne peut certes refuser d'examiner une pièce régulièrement versée aux débats et soumise à la discussion contradictoire, il ne peut cependant se fonder exclusivement sur une expertise réalisée à la demande de l'une des parties. Il importe peu à cet égard que la partie à laquelle cette expertise est opposée ait ou non été appelée aux opérations.

Dès lors ainsi que le vice caché ne résulte en l'occurrence d'aucune autre pièce que de l'expertise réalisée à la demande de l'intimée, il ne saurait être considéré comme établi de manière certaine, alors au demeurant que l'expertise litigieuse, qui impute le dysfonctionnement du véhicule au mauvais fonctionnement du turbocompresseur consécutif à l'endommagement de son axe, est particulièrement lapidaire quant à l'origine de ce dommage, se limitant à indiquer qu'un bruit métallique était perceptible, que l'expert impute de manière simplement dubitative ("très probablement") à un défaut de lubrification.

Mme X ne rapportant pas la preuve nécessaire au succès de ses prétentions, celles-ci devront être rejetées, la décision déférée étant en conséquence infirmée en toutes ses dispositions.

L'équité ne justifie pas qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme X sera condamnée aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Par ces motifs, Statuant en audience publique et par arrêt contradictoire, Déclare M. Z, exerçant sous l'enseigne Arthur Auto, recevable et fondé en son appel ; En conséquence : Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 20 novembre 2014 par le Tribunal d'instance de Mâcon ; Statuant à nouveau : Rejette les demandes formées par Mme X à l'encontre de M. Z, exerçant sous l'enseigne Arthur Auto ; Rejette la demande formée par M. Z, exerçant sous l'enseigne Arthur Auto, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ; Condamne Mme X aux entiers dépens de première instance et d'appel.