Cass. com., 8 novembre 2017, n° 16-15.296
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Chiron ACVF (SAS) , Piollet (ès qual.)
Défendeur :
Sinergy (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Rapporteur :
Mme Orsini
Avocat général :
Mme Beaudonnet
Avocats :
SCP Thouin-Palat, Boucard, SCP Monod, Colin, Stoclet
LA COUR : - Sur le moyen unique, pris en sa première branche : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 10 février 2016), que la société Chiron ACVF (la société Chiron), spécialisée dans la transformation de viande de boeuf et la production de steaks hachés surgelés, a conclu, le 21 décembre 2004, un contrat d'approvisionnement avec la société Lucie, centrale de référencement des sociétés du groupe Leclerc ; qu'après avoir procédé, le 24 août 2005, à un retrait préventif des produits de la société Chiron et avoir fait analyser des échantillons de ces produits, la société Lucie, par lettre du 12 septembre 2005, a résilié le contrat en invoquant des réclamations de consommateurs, des défauts graves et des non-conformités aux spécifications contractuelles et réglementaires ; qu'estimant brutale la rupture de leur relation commerciale, la société Chiron et M. Piollet, en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan, ont assigné la société Sinergy, venue aux droits de la société Lucie, en paiement de dommages-intérêts, sur le fondement des articles L. 442-6, I, 5° du Code de commerce et 1382 du Code civil ;
Attendu que la société Chiron et M. Piolet, ès qualités, font grief à l'arrêt du rejet de leur demande alors, selon le moyen, que si l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce institue une responsabilité d'ordre public à laquelle les parties ne peuvent pas renoncer par anticipation, il ne leur interdit pas de convenir des modalités de la rupture de leur relation commerciale ; que lorsqu'il est contractuellement stipulé que la résiliation immédiate ne pourra être prononcée que pour un manquement spécifiquement défini, l'un des cocontractants ne peut rompre la relation commerciale que si ce manquement est caractérisé ; qu'en l'espèce, l'article 13.2 du contrat d'approvisionnement conclu entre les sociétés Chiron et Lucie prévoyait qu'une résiliation immédiate ne pouvait être prononcée qu' " en cas de manquements graves pouvant générer un risque pour la santé et/ou la sécurité des consommateurs " ; qu'en retenant pourtant que " la société Lucie peut faire état des dispositions in fine [de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce] pour prétendre que la gravité des manquements de la société Chiron justifiait qu'elle mette fin immédiatement au contrat ", cependant que la société Lucie ne pouvait invoquer que les manquements contractuellement prévus par l'article 13.1 du contrat d'approvisionnement, la cour d'appel a violé l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce, ensemble l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu qu'il résulte des dispositions de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce que la gravité du comportement d'une partie à une relation commerciale autorise l'autre partie à y mettre fin sans préavis ; qu'ayant caractérisé la gravité du manquement de la société Chiron à ses obligations contractuelles et réglementaires, la cour d'appel a pu en déduire, peu important les modalités formelles de résiliation contractuelle, que la société Lucie était fondée à rompre sans préavis leur relation commerciale; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen, pris en ses deuxième à huitième branches, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Par ces motifs : rejette le pourvoi.