Livv
Décisions

Cass. crim., 8 novembre 2017, n° 16-84.528

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Soulard

Rapporteur :

M. Wyon

Avocat général :

Mme Moracchini

Avocats :

SCP Célice, Soltner, Texidor, Périer, SCP Baraduc, Duhamel, Rameix

Paris, 1er prés., du 27 mai 2016

27 mai 2016

LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par la société X, contre l'ordonnance n° 14/19284 du premier président de la Cour d'appel de Paris, en date du 27 mai 2016, qui a prononcé sur la régularité des opérations de visite et de saisie effectuées par l'Autorité de la concurrence en vue de rechercher la preuve de pratiques anticoncurrentielles et d'abus de position dominante ; - Vu les mémoires en demande, en défense, et les observations complémentaires produits ;

Attendu qu'il résulte de l'ordonnance attaquée et des pièces de procédure que, statuant sur une requête de la rapporteure générale de l'Autorité de la concurrence, présentée dans le cadre d'une enquête relative à des pratiques commerciales prohibées susceptibles d'être relevées dans le cadre de la commercialisation des verres optiques, le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Paris a autorisé, par ordonnance du 2 juillet 2014, la rapporteure générale de l'Autorité de la concurrence à faire procéder en application des dispositions de l'article L. 450-4 du Code de commerce, à des opérations de visite et de saisie dans les locaux des sociétés X, Y, Z, A et B ; que les opérations de visite et de saisie se sont déroulées les 9 et 10 juillet 2014 ; que la société X a fait appel le 18 juillet 2014 de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de Paris, et a demandé l'annulation de cette ordonnance ainsi que de celle du juge des libertés et de la détention de Créteil rendue sur commission rogatoire, l'annulation des opérations de visite et saisie effectuées dans les locaux de la société X, ainsi que la restitution de pièces et scellés ; En cet état ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 450-4 du Code de commerce, 593 du Code de procédure pénale, défaut de base légale ;

"en ce que, à l'exception de certaines pièces et de certains documents, le premier président a rejeté la demande d'annulation des opérations de saisie qui ont été effectuées le 9 juillet 2014 en exécution d'une ordonnance du juge des libertés et de la détention du 2 juillet précédent ;

"alors que la cassation à intervenir de l'ordonnance n° 14/19277 rendue le 27 mai 2016 pour valider l'autorisation de visite domiciliaire entraînera par voie de conséquence l'annulation de l'ordonnance du même jour qui a statué sur le déroulement de ces opérations et privera d'objet le présent pourvoi" ;

Attendu que le pourvoi formé à l'encontre de l'ordonnance du premier président confirmant l'ordonnance du juge des libertés et de la détention ayant autorisé la rapporteure générale de l'Autorité de la concurrence à effectuer des opérations de visite et saisie ayant été rejeté par arrêt de ce jour, le moyen est devenu sans objet ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 450-4 du Code de commerce, 56 et 593 du Code de procédure pénale, 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'Homme, 66-5 de la loi du 31 décembre 1971, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'ordonnance attaquée a rejeté le recours de la société X tendant à l'annulation de l'ensemble des opérations de visite et de saisies qui se sont déroulées dans ses locaux le 9 juillet 2014 et n'a prononcé qu'une annulation partielle de la saisie des pièces visées en annexe n° 14 et des documents listés dans la pièce n° 10, à l'exception des documents 3, 9, 33, 34, 36, 37, 41, 42, 43, 48, 60, 99 et 101 ;

"aux motifs que vu les conclusions déposées par la société X le 2 janvier 2015, développées oralement à l'audience du 18 mars 2016, vu les observations de l'Autorité de la concurrence déposées le 29 juin 2015, développées oralement à l'audience du 18 mars 2016, vu les conclusions du ministère public déposées le 16 février 2016, développées oralement à l'audience du 18 mars 2016 ; et que, sur les griefs relatifs à la saisie irrégulière de documents, le grief d'ingérence disproportionnée ayant abouti à la saisie de documents hors champ en nombre bien supérieur aux pièces potentiellement dans le champ de l'enquête ; que le seul fait vérifié ci-dessus par le juge, qu'une messagerie électronique contienne pour partie seulement des éléments entrant dans le champ de l'autorisation judiciaire suffit à valider la saisie globale opérée ; que la saisie, dans ce cadre global, de certains documents personnels à des salariés ou de documents étrangers à l'objet de l'opération autorisée par le juge n'invalide pas la saisie mais doit conduire l'administration à restituer les documents concernés dès lors qu'ils auront été identifiés par les intéressés ; qu'au stade de l'enquête, aucune disposition légale n'impose de dévoiler contradictoirement les motifs de recherche ou mots-clés utilisés pour identifier les documents saisis ; que sur la saisie massive disproportionnée ayant abouti à la saisie de documents hors champ en nombre supérieur aux pièces potentiellement dans le champ de l'enquête, que la société X indique que trois de ses salariés (MM. 1, 2, et 3) ont fait l'objet d'une saisie intégrale et indifférenciée de la totalité de leurs messagerie et que, après filtrage par mots-clés, moins de 15 % peuvent potentiellement entrer dans le champ de l'ordonnance ; qu'elle fonde ces allégations sur sa pièce n° 9 qui est un document rédigé en langue anglaise et non traduit ; mais que l'Autorité de la concurrence expose que, sur plus de 2 million de fichiers, les rapporteurs en ont retenu un peu moins de 2000 soit moins de 0,1 % ; que, de plus, le périmètre des investigations portant sur " le secteur de la commercialisation des verres optiques " le champ est beaucoup plus large que celui résultant des mots-clés utilisés par l'appelante pour parvenir à son nombre de documents dits " hors champ " ; que le grief ainsi soulevé doit être écarté ; que le grief relatif aux saisies réalisées en violation du droit fondamental à la confidentialité des correspondances avocat-client ; que sur les saisies de fichiers de messageries électroniques réalisées en violation du droit fondamental à la confidentialité des correspondances avocat-client bénéficiant à ce titre de la protection prévue par l'article 66-5 de la loi du 31 décembre 1971, que la présence de tels courriels ne saurait entraîner la nullité de la saisie informatique des messageries dans leur entier mais uniquement des courriels identifiés comme comportant de tels échanges ; que la cour ordonnera l'annulation de la saisie des documents listés dans la pièce n° 10 de l'appelante à l'exception des documents suivants qui ne portent pas sur des échanges entre la société X et ses propres avocats documents n° 3, 9, 33, 34, 36, 37, 41, 42, 43, 44, 48, 60, 99 et 101 ; que les deux documents sur support papier, (scellé n° 7, côte n° 57 à 60, ordinateur de M. 4) et le scellé n° 3 côte 90 à 95, messagerie de M. 5 (PV Charenton, pièce n° 4) ne comportent aucune correspondance avocat-client ; qu'il n'y a pas lieu d'ordonner l'annulation de leur saisie pas plus que des 4 dossiers intitulés "personal folders,pst" effectuée à partir de l'ordinateur de M. 6 (scellé n° 1 - PC de M. 6-X, PV Charenton, pièce n° 4) ; que le grief relatif aux saisies ont été réalisées en violation du droit fondamental au respect de la vie privée ; que l'article 8 § 2 de la Convention européenne des droits de l'Homme dispose, tout en énonçant le droit au respect de sa vie privée et familiale, que "Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi, vise un but légitime et être nécessaire dans une société démocratique (bien être économique du pays)" ; qu'en l'espèce l'article L. 450-4 du Code commerce autorise une telle ingérence pour la recherche de la preuve de pratiques anticoncurrentielles ; que le seul fait vérifié ci-dessus par le juge, qu'une messagerie électronique contienne pour partie seulement des éléments entrant dans le champ de l'autorisation judiciaire suffit à valider la saisie globale opérée ; que la saisie, dans ce cadre global, de certains documents personnels à des salariés ou de documents étrangers à l'objet de l'opération autorisée par le juge n'invalide pas la saisie mais doit conduire l'administration à restituer les documents concernés dès lors qu'ils auront été identifiés par les intéressés ; que dans la présente espèce l'appelante a listé dans sa pièce n° 14 des messages identifiés dont il se déduit de leur intitulé qu'ils relèvent de la vie privée ; que les salariés concernés sont MM. 7, 8, Mme 9, MM. 2, 4, 6, 3, 10, et 1 ; qu'il convient d'ordonner l'annulation de la saisie des pièces visées en annexe n° 14 " ;

"1°) alors que le juge est tenu de répondre aux conclusions dont il est régulièrement saisi ; qu'en se contentant de statuer au visa des écritures déposées par la société X le 2 janvier 2015, sans viser ni analyser les conclusions récapitulatives déposées le 29 mai 2015, en réponse aux observations de l'Autorité de la concurrence en date du 27 février 2015, le juge délégué a méconnu les termes du litige et, par suite, entaché sa décision d'un défaut de réponse aux conclusions ;

"2°) alors que lesdites conclusions récapitulatives, accompagnées de pièces nouvelles, avaient pour objet de réfuter les dernières allégations de l'Autorité de la concurrence qui tentait de ramener à 0,1 % l'ampleur des pièces saisies par rapport aux pièces consultées ; qu'en retenant ce ratio au motif que l'étude réalisée par le cabinet Alix Partners qui faisait ressortir que ce ratio était de 25 %, aurait été " rédigée en anglais ", sans viser ni analyser ladite étude versée aux débats en langue française sous le n° 9 bis, tel qu'elle avait été annexée aux conclusions du 29 mai 2015, le juge a de plus fort méconnu les termes du litige et partant violé le principe du " procès équitable " correspondant à l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'Homme ;

"3°) alors qu'en se référant à un " périmètre d'investigations " portant sur l'ensemble du secteur de la commercialisation des verres optiques, le président de la cour d'appel, qui n'examine pas la contestation soulevée par la demanderesse dans ses conclusions du 29 mai 2015, lesquelles faisaient valoir que le périmètre ainsi revendiqué par l'Administration procédait d'une interprétation trompeuse de l'ordonnance d'autorisation, laquelle n'avait été rendue qu'au visa de pratiques intéressant exclusivement " la vente en ligne de produits optiques ", a, une fois encore, méconnu les termes du litige en violation des textes susvisés ;

"4°) alors de toutes façons que prive sa décision de motifs la décision attaquée qui laisse dépourvues de toute réponse les conclusions de la société X reprochant aux enquêteurs d'avoir saisi près de 10 % de documents antérieurs à la limite temporelle correspondant au début de l'activité, en 2008, des sites de vente par internet" ;

Attendu que, pour rejeter le recours de la société X tendant à l'annulation de l'ensemble des opérations de visite et de saisie et ne prononcer qu'une annulation partielle de la saisie de certains documents et pièces au regard de la protection du secret des correspondances entre un client et son avocat et du droit au respect de la vie privée, l'ordonnance attaquée prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, dépourvues d'insuffisance comme de contradiction, d'où il résulte que le juge, qui a, d'une part, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont il était saisi, d'autre part, examiné les conditions du déroulement des opérations, apprécié les modalités et la portée de la sélection des documents effectuée, et souverainement apprécié que l'Autorité de la concurrence était intervenue de manière sélective et ciblée, l'existence de cette sélection résultant du nombre de fichiers saisis au regard du nombre de fichiers existant et, enfin, établi que la saisie des documents a porté sur les fichiers comportant des éléments entrant dans le champ de l'autorisation accordée par le juge des libertés et de la détention, a justifié sa décision ; d'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 450-4 du Code de commerce, 56 et 593 du Code de procédure pénale, 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'Homme, 66-5 de la loi du 31 décembre 1971, 4, 5 et 455 du Code de procédure civile, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'ordonnance attaquée a rejeté le recours de la société X tendant à l'annulation de l'ensemble des opérations de visite et de saisies qui se sont déroulées dans ses locaux le 9 juillet 2014 et n'a prononcé qu'une annulation partielle de la saisie des pièces visées en annexe n° 14 et des documents listés dans la pièce n° 10, à l'exception des documents 3, 9, 33, 34, 36, 37, 41, 42, 43, 48, 60, 99 et 101 ;

"aux motifs que sur le grief relatif aux saisies réalisées en violation du droit fondamental à la confidentialité des correspondances avocat-client ; que sur les saisies de fichiers de messageries électroniques réalisées en violation du droit fondamental à la confidentialité des correspondances avocat-client bénéficiant à ce titre de la protection prévue par l'article 66-5 de la loi du 31 décembre 1971, que la présence de tels courriers ne saurait entraîner la nullité de la saisie informatique des messageries dans leur entier mais uniquement des courriels identifiés comme comportant de tels échanges ; que la cour ordonnera l'annulation de la saisie des documents listés dans la pièce n° 10 de l'appelante à l'exception des documents suivants qui ne portent pas sur des échanges entre la société X et ses propres avocats : documents n° 3, 9, 33, 34, 36, 37, 41, 42, 43, 44, 48, 60, 99 et 101 ; que les deux documents sur support papier, (scellé n° 7, côte n° 57 à 60, ordinateur de M. 4) et le scellé n° 3 côte 90 à 95, messagerie de M. 5 (PV Charenton, pièce n° 4) ne comportent aucune correspondance avocat-client ; qu'il n'y a pas lieu d'ordonner l'annulation de leur saisie pas plus que des 4 dossiers intitulés " personal folders.pst " effectuée à partir de l'ordinateur de M. 6 (scellé n° 1 " PC de M. 6-X, PV Charenton, pièce n° 4) ;

"1°) alors qu'est illicite la saisie de correspondances couvertes par la confidentialité qui entoure les relations entre l'avocat et son client, en ce qu'elle permet à l'Administration de prendre connaissance de leur teneur et donne tout loisir à ses agents, indépendamment d'une utilisation directe des supports matériels desdites correspondances, d'orienter les poursuites et d'obvier par avance aux moyens de la défense ; qu'en déclarant que les saisies portant sur ces documents devaient seulement être annulées, et ne justifiaient pas l'annulation de l'ensemble des opérations, le premier président n'a aucunement pris une mesure appropriée à la réparation du préjudice subi par l'exposante et a violé les articles 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'Homme, ainsi que les articles L. 450-4 du Code de commerce et 56 du Code de procédure pénale ;

"2°) alors qu'il en est d'autant plus ainsi et que viole de plus fort les textes susvisés, le juge d'appel qui se contente d'affirmer abstraitement que la présence de courriers confidentiels ne saurait entraîner la nullité de la saisie informatique et qui ne répond pas aux conclusions faisant valoir que les correspondances avec les avocats devaient, en application de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme, bénéficier d'une " protection renforcée " et qu'en l'espèce, loin d'avoir envisagé des mesures utiles à préserver les droits de la défense, les agents de l'Autorité de la concurrence, qui disposaient cependant de moyens de sélection appropriés, n'avaient pas " fait preuve de la moindre prudence "et qu'en saisissant plus de cent courriers d'avocats, ils n'avaient pris " aucune précaution ", ce dont il résultait qu'une annulation partielle et sélective des pièces saisies ne correspondait pas à une réparation effective du préjudice subi par les victimes de tels comportements ;

"3°) alors qu'en faisant droit sans réserve à la demande de l'Administration d'exclure de l'annulation l'ensemble des pièces qu'il vise parce qu'elles ne constitueraient pas des " échanges " avec les avocats, le juge délégué, qui n'analyse aucune d'entre elles et qui fait silence sur la production n° 10 où la société demanderesse précisait l'objet de chacun des courriers, interdit à la Cour de cassation d'exercer le moindre contrôle sur la cause des exclusions qui sont prononcées de façon globale et invérifiable et prive ainsi sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;

"4°) alors et de toutes façons que la " protection renforcée" dont doivent bénéficier les correspondances avec les avocats est fonctionnelle et doit, au-delà de la simple détention de leur support matériel, s'étendre également à la reproduction de tels courriers et à la retranscription au sein de l'entreprise, pour permettre leur diffusion, des avis des avocats dans d'autres documents, ces reproductions totales ou partielles étant susceptibles de compromettre les droits de la défense, de sorte qu'en acceptant de distraire du champ de l'annulation qu'il prononce, les pièces n° 3, 9, 33, 34, 36, 37, 41, 42, 43, 44, 48, 60, 99 et 101 ainsi que d'autres documents sur support papier aux motifs qu'ils ne constituent pas formellement " des échanges entre la société X et ses propres avocats ", le juge délégué a violé ensemble les principes susvisés ainsi que l'article 66-5 de la loi du 31 décembre 1970" ;

Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 450-4 du Code de commerce, 56 et 593 du Code de procédure pénale, 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'Homme, 4, 5 et 455 du Code de procédure civile, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'ordonnance attaquée a rejeté en partie le recours de la société X tendant à l'annulation pour atteinte à la vie privée des opérations de visite et de saisies qui se sont déroulées dans ses locaux le 9 juillet 2014 et n'a annulé à ce titre que les pièces visées en annexe n° 14 ;

"aux motifs que le seul fait vérifié ci-dessus par le juge, qu'une messagerie électronique contienne pour partie seulement des éléments relevant de la vie privée suffit à valider la saisie globale opérée ; que la saisie, dans ce cadre global, de certains documents personnels à des salariés n'invalide pas la saisie mais doit conduire l'administration à restituer les documents concernés dès lors qu'ils auront été identifiés par les intéressés ; que dans la présente espèce l'appelante a listé dans sa pièce n° 14 des messages identifiés dont il se déduit de leur intitulé qu'ils relèvent de la vie privée ; que les salariés concernés sont MM. 7, 8, Mme 9, MM. 2, 4, 6, 3, 10, et 1 ; qu'il convient d'ordonner l'annulation de la saisie des pièces visées en annexe n° 14 ; ... ; et que (page 6 alinéa 11) la saisie, dans ce cadre global, de documents étrangers à l'objet de l'opération autorisée par le juge n'invalide pas la saisie mais doit conduire l'administration à restituer les documents concernés dès lors qu'ils auront été identifiés par les intéressés ; que la demande d'annulation des fichiers saisis sur les ordinateurs de MM. 6, 4, 11 et 7 doit être rejetée ;

"1°) alors que dans ses conclusions, non visées du 29 mai 2015, la société X demandait au juge d' " annuler les saisies des pièces informatiques relevant de la sphère privée et listée en pièce 14 bis ", laquelle était produite en annexe, de sorte qu'en limitant l'annulation de la saisie au seul contenu de la pièce 14 sans prendre en compte la liste exhaustive des courriers litigieux (pièce 14 bis), le premier président a méconnu les termes du litige en violation des textes susvisés ;

"2°) alors qu'en refusant d'annuler l'ensemble des documents figurant dans l'annexe 14 bis, sans s'en expliquer, le juge délégué a entaché sa décision d'un flagrant défaut de motifs en violation de l'article 455 du Code de procédure civile ;

"3°) alors qu'en refusant d'annuler la saisie des quatre dossiers intitulés " personal folders.pst " effectuée à partir de l'ordinateur de M. 6 au seul motif " qu'ils ne comportent aucune correspondance avocat-client ", tandis que la demanderesse sollicitait, en réalité, cette annulation parce que l'intitulé même des-dits fichiers et leur contenu révélaient qu'il s'agissait de documents personnels et donc au titre du droit au respect de la vie privée, le juge délégué a, de nouveau, méconnu l'objet du litige en violation des textes susvisés" ;

Les moyens étant réunis ; - Attendu que, pour refuser d'annuler l'ensemble des opérations de visite et de saisie, l'ordonnance prononce par les motifs repris aux moyens ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, le premier président, qui, d'une part, par une appréciation qui relève de son pouvoir souverain, exempte d'insuffisance ou de contradiction, a limité l'annulation de la saisie à certains fichiers contenant des données confidentielles couvertes par le secret des correspondances échangées avec un avocat ou de caractère privé sans rapport avec les soupçons d'actes prohibés, la saisie irrégulière de certains documents étant sans effet sur la validité des opérations de visite et des autres saisies et, d'autre part, a pu souverainement admettre la copie intégrale des fichiers de messageries, sans individualisation de chaque message, et leur saisie dans leur globalité, ceux-ci contenant des éléments pour partie utiles à la preuve des agissements présumés, a justifié sa décision ; d'où il suit que les moyens ne sauraient être accueillis ;

Sur le cinquième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 450-4 et R. 450-2 du Code de commerce, 56 et 593 du Code de procédure pénale, 66-5 de la loi du 31 décembre 1971, 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'Homme, 4 et 455 du Code de procédure civile ;

"en ce que le juge délégué par le premier président de la Cour de Paris a rejeté les demandes d'annulation de la société X consécutives aux irrégularités commises pendant la visite et à la saisie de pièces hors du champ de l'autorisation ;

"aux motifs que la saisie, dans ce cadre global, de certains documents personnels à des salariés ou de documents étrangers à l'objet de l'opération autorisée par le juge n'invalide pas la saisie mais doit conduire l'Administration à restituer les documents concernés dès lors qu'ils auront été identifiés par les intéressés ; que le seul fait vérifié ci-dessus par le juge, qu'une messagerie électronique contienne pour partie seulement des éléments relevant de la vie privée suffit à valider la saisie globale opérée ; que la saisie, dans ce cadre global, de certains documents personnels à des salariés n'invalide pas la saisie mais doit conduire l'Administration à restituer les documents concernés dès lors qu'ils auront été identifiés par les intéressés ; que sur la violation du droit à la présence effective et utile d'un conseil extérieur, que si l'appelante ne disconvient pas que les enquêteurs ne lui ont pas refusé la présence de ses avocats, présence qui a été effective, elle reproche aux enquêteurs de ne pas avoir autorisé les avocats à assister à la sélection puis à l'examen des documents figurant sur les ordinateurs portables et d'avoir refusé de communiquer aux représentants de l'entreprise la liste des mots-clés pour procéder à leur sélection ; mais que l'article 450-4 du Code de commerce autorise l'occupant des lieux ou son représentant à prendre seuls connaissance des pièces et documents " avant leur saisie " ; que les contestations portant sur le déroulement des opérations de saisie elles-mêmes sont inopérantes ; que, par ailleurs, les enquêteurs ne sont aucunement tenus de dévoiler contradictoirement les moteurs de recherche ou mots-clés utilisés pour identifier les documents saisis ; que la violation du droit à un recours effectif du fait de l'insuffisance des inventaires, que l'article R. 450-2 du Code de commerce ne soumet pas les inventaires à aucune forme particulière ; qu'en l'espèce, si la liste des documents papier et si la liste des fichiers informatiques comportent des descriptions ou libellés non suffisamment explicites pour déterminer si les documents qu'ils comportent entrent ou non dans le champ de l'ordonnance, cette circonstance ne conduit pas à annuler l'ensemble des fichiers qui les comportent dès lors qu'ils contiennent au moins pour partie seulement des éléments entrant dans le champ de l'autorisation judiciaire ; que la saisie, dans ce cadre global, de documents étrangers à l'objet de l'opération autorisée par le juge n'invalide pas la saisie mais doit conduire l'Administration à restituer les documents concernés dès lors qu'ils auront été identifiés par les intéressés ; que la demande d'annulation des fichiers saisis sur les ordinateurs de MM. 6, 4, Guillobez et 7 doit être rejetée ;

"1°) alors qu'en énonçant tour à tour que l'occupant des lieux est autorisé " à prendre connaissance des pièces et documents avant leur saisie " en vertu de l'article L. 450-4 du Code de commerce et cependant que " les contestations portant sur le déroulement des opérations de saisie sont inopérantes ", le juge délégué a usé d'une motivation contradictoire et inintelligible en violation des textes visés au moyen ;

"2°) alors que l'article 450-4 du Code de commerce, en autorisant l'occupant des lieux à prendre connaissance des documents avant leur saisie, implique que l'occupant ou son avocat puisse assister à la procédure de sélection des documents que les agents enquêteurs décident de saisir ; qu'en estimant au contraire que la saisie irrégulière de pièces étrangères au champ de l'autorisation ne pourrait donner lieu qu'à une restitution par l'Administration à la demande des intéressés et que, par ailleurs, les enquêteurs ne sauraient se voir reprocher d'avoir empêché les avocats d'assister à la sélection des documents au cours de l'opération, le juge délégué réduit, en violation des textes susvisés, les garanties de la partie visitée à un éventuel contrôle en aval de la visite et élimine l'existence du contrôle en amont tel qu'il est exigé par la jurisprudence et tel qu'il est pourtant organisé par les articles L. 450-4 et R. 450-2 du Code de commerce et 56 du Code de procédure pénale qui prévoient la présence de l'occupant des lieux dès le début de la visite, son éventuelle assistance par les avocats, la possibilité de prendre connaissance des pièces et documents avant leur saisie et la nécessité d'établir un inventaire différent en cas de difficulté ;

"3°) alors qu'en réduisant le rôle des avocats pendant le déroulement de la visite à une simple assistance passive aux opérations des enquêteurs, le juge délégué prive de toute effectivité l'exercice des droits de la défense en violation des textes susvisés et notamment de l'article 6 de la loi du 31 décembre 1971 et des articles 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'Homme ;

"4°) alors que le juge délégué ayant, lui-même, constaté que la liste des documents informatiques et papiers composant les inventaires comportait " des descriptions ou libellés non suffisamment explicites pour déterminer si les documents qu'ils comportent entrent ou non dans le champ de l'autorisation ", il ne pouvait refuser d'en tirer les conséquences et de prononcer la nullité des saisies correspondant à ces irrégularités ; qu'en se bornant à renvoyer à la partie visitée le soin d'identifier, par elle-même, les documents irrégulièrement saisis à seule fin d'en obtenir une éventuelle restitution, non satisfactoire en elle-même, le juge délégué a méconnu son office et violé l'ensemble des textes susvisés ;

"5°) alors qu'en affirmant que l'article R. 450-2 du Code de commerce ne soumet les inventaires à " aucune forme particulière ", tandis que les articles L. 450-4 et 56 du Code de procédure pénale imposent, au contraire, si l'identification des documents devant être saisis, sous le contrôle de l'occupant à qui ils appartiennent, ne peut être opérée immédiatement et sur place, le recours à des " scellés provisoires " jusqu'au moment où les difficultés relatives à l'élaboration des inventaires sur place pourront être surmontées, toujours en présence des personnes qui ont assisté à la visite, le juge délégué viole, par la même, lesdits textes ;

"6°) alors que viole les textes visés au moyen le juge délégué qui laisse dépourvues de toute réponse les conclusions de la demanderesse qui démontrait précisément que, après avoir présenté des inventaires inintelligibles comportant des références telles que " archive.pst ", " outlook(2).ost "(ordinateur de M. 6), " DMS CMM.ppt ", " business.pst ", " DMS.pst ", " FGX.pst", " growth.pst ", " outlook.ost ", " service.pst ", " services.pst ", "elements envoyés.pst ", (ordinateur de M. 4), " DP001 - Y.pst ", " VF-MG-04-06 " (ordinateur de M. 7), le service d'enquête avait finalement réalisé des inventaires plus explicites, ce dont il résultait une violation délibérée des formes de la saisie au moment où celle-ci avait été opérée" ;

Attendu que, pour rejeter les demandes d'annulation fondées sur des irrégularités commises pendant la visite et sur la saisie de pièces se situant hors du champ de l'autorisation, l'ordonnance prononce par les motifs repris au moyen ;

Sur le moyen, pris en ses quatre premières branches et en sa sixième branche : - Attendu qu'il résulte des énonciations de l'ordonnance, partiellement reprises au moyen, que le premier président, après avoir rappelé que l'article L. 450-4 du Code de commerce autorise l'occupant des lieux ou son représentant à prendre seuls connaissance des pièces et documents avant leur saisie, a jugé que les contestations portant sur le déroulement des opérations de saisie elles-mêmes sont inopérantes ;

Attendu qu'en statuant ainsi, par des motifs exempts d'insuffisance comme de contradiction, qui répondent aux chefs péremptoires des conclusions dont il était saisi, le premier président, qui n'a pas méconnu les dispositions conventionnelles et légales invoquées, a justifié sa décision, dès lors que, d'une part, le juge, qui a constaté que la présence des avocats de la société X avait été effective avant la saisie, a pu estimer, sans méconnaître les dispositions de l'article L. 450-4 du Code de commerce, que ce texte ne les autorisait pas à assister à la sélection des documents devant être saisis ni à se faire communiquer les mots-clés utilisés pour cette sélection, d'autre part, la loi ne soumet les inventaires à aucune forme particulière, et, enfin, la société demanderesse ayant reçu copie des fichiers saisis, a ainsi été mise en mesure, nonobstant l'éventuelle insuffisance du libellé des références dans l'inventaire, d'en connaître le contenu, et d'établir dans le cadre de son recours que certaines pièces saisies ne pouvaient l'être ;

Qu'ainsi les griefs allégués ne sont pas encourus ;

Sur le moyen, pris en sa cinquième branche : - Attendu que la confection de scellés provisoires, lorsque l'inventaire sur place présente des difficultés, est une faculté laissée à l'appréciation des enquêteurs agissant sous le contrôle du juge ; d'ou il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

Et attendu que l'ordonnance est régulière en la forme ;

Rejette le pourvoi.