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Décisions

CA Reims, 1re ch. civ. sect. instance, 27 octobre 2017, n° 16-02927

REIMS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Bazarchic (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Brunel

Conseillers :

Mmes Lefèvre, Magnard

TI Reims, du 27 sept. 2016

27 septembre 2016

Le 29 décembre 2014, Mme X a commandé trois vêtements sur le site internet BazarChic : un manteau de fourrure de lapin et renard bleue t.36 de 550 euros, un gilet renard Cécile noir t.44 de marque Baya de 629 euros et un grand col Carmen renard noir de 109 euros.

Le 20 janvier 2015, Mme X a renvoyé à la société BazarChic, SA, les trois articles, après l'avoir informée le 10 janvier 2015 de ce qu'elle exerçait son droit de rétractation. La société BazarChic a refusé de lui rembourser le gilet renard Cécile noir au motif que le produit retourné ne correspondait pas à la commande passée.

Le 17 décembre 2015, Mme X a fait assigner la société BazarChic devant le Tribunal d'instance de Reims en condamnation au paiement des sommes de 1 795,20 euros pour remboursement du gilet retourné, de 4 000 euros pour préjudice moral et résistance abusive et de 2 000 euros pour frais irrépétibles.

La société BazarChic a répondu que Mme X avait acheté le gilet litigieux sur un autre site de vente et ne pouvait donc user d'un droit de rétractation. Elle a réclamé condamnation de la demanderesse à lui payer des indemnités de 1 000 euros pour décision fautive d'agir devant le tribunal d'instance, de 6 000 euros pour abus du droit de rétractation, la cliente ayant fait usage de ce droit à 10 reprises sur 12 commandes passées et de 2 400 euros pour frais irrépétibles.

Le jugement du 27 septembre 2016 a condamné la société BazarChic à payer à Mme X la somme de 1 795,20 euros suite à l'usage de son droit de rétractation portant sur le gilet renard Cécile noir t.44 retourné, a rejeté toutes les demandes en dommages et intérêts et condamné la société BazarChic au paiement d'une somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, en sus des dépens.

La société BazarChic a fait appel de cette décision. Aux termes de conclusions du 23 mai 2017, elle demande à la cour, au visa des articles 1382 du Code civil, L. 221-18, L. 221-21 et L. 221-22 du Code de la consommation en leur rédaction résultant de l'ordonnance du 14 mars 2016, de rejeter toutes les demandes adverses et de condamner Mme X au paiement, sur le fondement de l'article 1382 du Code civil et à titre de dommages et intérêts, des sommes de 1 000 euros pour préjudice d'image et de 6 000 euros pour abus du droit de rétractation. Elle demande en outre sa condamnation à lui payer la somme de 2 400 euros au titre des frais irrépétibles ainsi que les dépens. L'appelante fait valoir que l'intimée, ayant reçu un gilet en renard de marque Baya, lui a retourné une veste en fourrure synthétique de marque inconnue et de moindre qualité que la société BazarChic n'a jamais commercialisée.

Selon écritures du 23 juin 2017, Mme X conclut, au visa des anciens articles L. 121-19-4, L. 121-21, L. 121-21-2, L. 121-21-3, L. 121-21-4 du Code de la consommation et 1382 du Code civil, à la confirmation du jugement sauf en ce qu'il a rejeté ses demandes en indemnisation. Elle demande donc la condamnation de l'appelante au paiement des sommes de 4 000 euros en réparation de son préjudice moral et pour résistance abusive et de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, en sus des dépens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 22 août 2017.

Sur ce, LA COUR :

Sur la demande en remboursement de Mme X :

Il est de principe qu'il appartient au vendeur d'établir qu'il a rempli son obligation de délivrance (article 1604 du Code civil).

En droit de la consommation, s'agissant des contrats conclus à distance, l'article L. 221-15 du Code de la consommation en sa rédaction résultant de l'ordonnance du 14 mars 2016 (ancien article L. 121-19-4 du même code) précise :

" Le professionnel est responsable de plein droit à l'égard du consommateur de la bonne exécution des obligations résultant du contrat conclu à distance, que ces obligations soient exécutées par le professionnel qui a conclu ce contrat ou par d'autres prestataires de service, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci.

Toutefois, il peut s'exonérer de tout ou partie de sa responsabilité en apportant la preuve que l'inexécution ou la mauvaise exécution du contrat est imputable soit au consommateur, soit au fait, imprévisible et insurmontable, d'un tiers au contrat, soit à un cas de force majeure. "

Les vêtements commandés en ligne par Mme X le 29 décembre 2014 lui ont été livrés les 7 et 9 janvier 2015. Elle a informé la société BazarChic de sa volonté d'exercer son droit de rétractation par courriel du 10 janvier 2015, donc dans le délai de 14 jours prévu par l'article L. 221-18, lequel prévoit également que le consommateur n'a pas à motiver sa décision. Mme X indiquait notamment, au sujet du gilet renard Cécile noir, qu'il " ne correspond pas à l'article commandé (veste plus courte et manches longues) Ci-joints les photos ". Elle a renvoyé à la société BazarChic, par colis reçu le 22 janvier 2015, une veste en fourrure synthétique noire qui ne ressemble pas au gilet commandé.

Chaque partie impute à l'autre la substitution de cette veste à l'article choisi. Il convient dès lors de faire application du principe posé par l'article L. 221-15 et de considérer que le professionnel assume la responsabilité de l'exécution de l'obligation contractuelle, sauf preuve de ce que la mauvaise exécution est imputable au consommateur, ou à un tiers ou à la force majeure.

L'attestation rédigée par le gérant de la société Baya (pièce n° 11 de la société BazarChic) indique que la veste retournée par Mme X n'a jamais été fabriquée par la société Baya, ni vendue par elle à la société BazarChic. Cela signifie que le vêtement retourné n'est pas un produit de la société Baya, mais cela ne permet pas d'imputer de manière certaine son arrivée chez l'un ou l'autre au fait de Mme X, ou d'un tiers ou à la force majeure. Par suite, la cour approuve le jugement déféré en ce qu'il a retenu la responsabilité de la société BazarChic et l'a condamnée à payer à Mme X la somme de 1 795,20 euros suite à l'usage de son droit de rétractation.

Sur les demandes en dommages et intérêts de Mme X :

Elle sollicite condamnation de la société BazarChic au paiement d'une somme de 4 000 euros " au titre de son préjudice moral et pour résistance abusive "

Il est démontré que Mme X a fréquemment utilisé son droit de rétractation suite à ses achats en ligne auprès de la société BazarChic. La différence de modèle et de qualité entre le vêtement commandé et celui retourné est également surprenante. Ces circonstances particulières à l'espèce expliquent les réticences de la venderesse, à l'égard de laquelle une résistance fautive n'est pas caractérisée. Le préjudice moral invoqué n'est pas davantage établi.

Le premier juge a donc exactement apprécié que les demandes en dommages et intérêts de Mme X devaient être rejetées.

Sur les demandes en dommages et intérêts de la société BazarChic :

La venderesse demande condamnation de sa cliente au paiement des sommes de 1 000 euros pour préjudice d'image et de 6 000 euros pour abus du droit de rétractation.

La société BazarChic reproche à Mme X de lui avoir retourné un article autre que celui qu'elle avait reçu et d'avoir abusivement utilisé son droit de rétractation. Cependant, la démonstration de ce que l'acheteuse a agi frauduleusement pour se faire rembourser un produit effectivement livré n'est pas apportée, et le fait qu'elle ait recouru très fréquemment sans raison valable à l'utilisation du droit de rétractation n'est pas non plus prouvé.

Par suite, le jugement est confirmé en ce qu'il déboute la société BazarChic de ses demandes d'indemnisation.

La société BazarChic succombe en son recours et supporte les dépens d'appel. Elle doit payer une indemnité de 800 euros à Mme X au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour.

Par ces motifs, Confirme le jugement du 27 septembre 2016, Condamne la société BazarChic à payer à Mme X une somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, Rejette toutes autres demandes, Condamne la société BazarChic aux dépens d'appel.