CA Paris, Pôle 5 ch. 10, 20 novembre 2017, n° 16-05572
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Ekis France (Sasu)
Défendeur :
Socass (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Loos
Conseillers :
Mmes Simon-Rossenthal, Castermans
Avocats :
Mes Boccon Gibod, Dumoulin, Edon
Faits et procédure
La Société d'Assistance de Services et de Support (Socass) a pour activité le conseil aux entreprises dans les métiers de la maintenance et de l'exploitation. Elle intervient dans trois secteurs principaux : automobile, ferroviaire et énergie. La société Ekis France (ci-après dénommée Ekis) a pour activité la prestation d'études, de conseil, de réalisation et de maîtrise d'œuvre. Elle intervient dans les secteurs aéronautique, spatial, ferroviaire, automobile, défense navale et énergie et nucléaire. En décembre 2009, la société Ekis a fait l'objet d'un rachat par le groupe Akka, groupe intervenant dans l'ingénierie et le conseil en technologies dans le secteur automobile, aéronautique, ferroviaire et énergie.
La société Socass a été créée en septembre 2007 à l'initiative de Monsieur Sébastien Geny-Gros, qui était cadre supérieur au sein de la société Ekis et alors que, dans le même temps il en restait salarié, à l'effet de sous-traiter une partie des activités de la société Ekis à la société Socass.
A partir de 2007, les sociétés Socass et Ekis ont entretenu des relations commerciales suivies et formalisées par des conditions générales de prestations de services dont la dernière édition, conclue le 26 septembre 2012, a fixé les conditions d'intervention du prestataire, la société Socass, au bénéfice de la société Ekis désignée dans les conditions générales sous " Akka Technologies "
Les prestations réalisées par Socass ont donné lieu à l'émission de factures qui ont été adressées entre le mois de juin et le mois de décembre 2012 à la société Ekis pour un montant total de 80 298 euros HT soit 96 036,40 euros TTC qui n'ont pas été réglées par Ekis.
En marge de ces relations contractuelles au cours de l'année 2012, les relations salariales entre Monsieur Geny-Gros et la société Ekis se sont détériorées. M. Geny-Gros a démissionné de ses fonctions le 14 janvier 2013 puis est revenu sur sa démission par courrier du 23 janvier 2013 indiquant avoir agi par impulsion. Il a été licencié pour faute grave le 19 mars 2013. M. Geny-Gros a saisi le Conseil des prud'hommes de Longjumeau qui l'a débouté de ses demandes par jugement du 9 octobre 2014. M. Geny-Gros a relevé appel de ce jugement le 8 décembre 2014.
Le 21 janvier 2013, la société Ekis a fait état auprès de la société Socass d'un comportement déloyal de la société Socass à son préjudice dans le cadre de la négociation avec le groupe PSA en vue de la reconduction du contrat qui liait Ekis à Peugeot PSA.
Par lettre recommandée en date du 21 janvier 2013, le conseil de la société Ekis a mis en demeure Socass de cesser ses agissements déloyaux et menacé d'engager une procédure, grief qui a été contesté par Socass.
Socass a mis en demeure Ekis de lui payer la somme de 96 036,40 euros TTC par courrier du 2 avril 2013, en vain. Elle a assigné la société Ekis devant le Tribunal de commerce de Lyon par exploit d'huissier du 15 mai 2013 en paiement de ladite somme. Elle a formé, en cours de procédure, une demande additionnelle visant à voir constater la rupture brutale de par la société Ekis de relations commerciales établies sur le fondement de l'article L. 442-6- 5° du Code de commerce.
Par jugement du 10 février 2016, le Tribunal de commerce de Lyon a :
condamné la société Ekis France à payer à la société Socass les 15 factures pour la somme de 96 036,40 euros TTC, augmentée des intérêts au taux de trois fois le taux d'intérêt légal à compter de la date du jugement à intervenir plus un forfait de 40 euros par facture pour les 15 factures impayées soit la somme de 600 euros,
débouté la société Ekis France de sa demande de dommages et intérêts envers la société Socass pour détournement de clientèle,
débouté la société Ekis France de sa demande d'indemnité de salaires à hauteur de 100 000 euros pour les salariés non réaffectés
débouté la société Ekis France de sa demande de 250 000 euros de dommages et intérêts au titre de la clause de non sollicitation de personnel intégrée dans les conditions générales d'achat,
débouté la société Ekis France de sa demande de dommages et intérêts pour perte d'image,
dit qu'il n'y a pas lieu d'écarter les pièces 17, 18, 19, 24, 25 et 27,
rejeté la demande d'irrecevabilité de ces pièces de la société Ekis France,
rejeté les demandes d'irrecevabilité de la société Ekis France relatives aux demandes formées par la société Socass sur le fondement de l'article L. 442-6 5° et déclaré recevables ces demandes de la société Socass formée sur ce fondement,
dit que la société Ekis France a rompu brutalement, sans préavis ses relations commerciales avec la société Socass,
prononcé la résolution judiciaire du contrat aux torts exclusifs de la société Ekis France,
débouté la société Ekis France de l'ensemble de ses autres demandes,
dit que le préjudice subi par la société Socass doit être réparé par la société Ekis France sur la base de la marge brute calculée au taux de 65 % et 6 mois d'un chiffre d'affaires équivalent à 92 076 euros pour la période, soit la somme de 58 849 euros,
condamné la société Ekis France à payer à la société Socass la somme de 58 849 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la rupture brutale des relations commerciales établies,
condamné la société Ekis France à payer à la société Socass la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
ordonne l'exécution provisoire de ce jugement,
condamné la société Ekis France aux entiers dépens.
La société Ekis a relevé appel de ce jugement le 2 mars 2016.
Par conclusions signifiées le 7 septembre 2016, la société Ekis France demande à la cour, au visa des articles 1134, 1135, 1147, 1383, 1384 et 1315 du Code civil, de réformer le jugement entrepris et de :
- déclarer irrecevable la demande additionnelle de la société Socass sur le fondement de l'article L. 442-6 5èmement du Code de commerce comme ne présentant pas, au vu de l'article 70 du Code de procédure civile, un lien suffisant avec la demande initiale tendant au paiement de prétendues factures impayées comme se heurtant à une fin de non recevoir tirée de l'estoppel,
- débouter la société Socass de son appel incident infondé,
Vu les articles 10 du Code civil, 6 §1 de la Convention de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales et 9, 10 et 11 du Code de procédure civile,
- constater et juger que la société Socass ne donne aucune explication sur les conditions dans lesquelles elle est entrée en possession des pièces qu'elle produit sous les numéros 17,18, 19, 24, 25 et 27, et qui sont des documents internes de la société Akka et qui sont détenues illicitement, la société Socass et Monsieur Geny-Gros ne rapportant pas la preuve que la société Akka et/ou la société Ekis leur auraient volontairement remis ces documents,
- juger que les pièces 17, 18, 19, 24, 25 et 27 doivent être écartées des débats,
- juger, par conséquent que la demande de la société Ekis ne se heurte pas à la fin de non recevoir de l'article 122 du Code de procédure civile tirée de l'autorité de la chose jugée, la demande présentée à la Cour d'appel de Paris ne reposant pas sur le même fondement juridique que celui sur lequel la cour d'appel de Toulouse a statué, celle-ci ayant statué exclusivement sur le fondement de l'article 9 du Code civil,
- constater et juger que la société Socass ne démontre aucune rupture de ses relations contractuelles et commerciales avec Ekis, qu'elle ne démontre aucun caractère brutal de la prétendue rupture de ses relations contractuelles et commerciales avec Ekis et qu'elle ne s'explique pas sur l'existence et le quantum du prétendu préjudice subi qui découlerait de la brutalité de la rupture et qui est seule indemnisable.
- prononcer la résolution du contrat de prestations de services liant la société Ekis France à la société Socass aux torts exclusifs de la société Socass,
- condamner la société Socass à payer à la société Ekis France les sommes de, sauf à parfaire :
. 500 000 euros au titre de la perte de la marge pour 2013 sur le plateau Com-Repa,
. 100 000 euros au titre des salaires payés aux salariés non réaffectés à la fin du 1ertrimestre 2013,
. 150 000 euros au titre de la perte d'image auprès de la société PSA,
. 250 000 euros au titre de la violation de la clause de non sollicitation de personnel,
. 10 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
A titre infiniment subsidiaire, et pour le cas où la cour dirait que la créance de la société Socass est fondée,
- ordonner la compensation entre les sommes que se doivent respectivement les parties,
Elle sollicite la condamnation de la société Socass aux entiers dépens de l'instance.
Par conclusions signifiées le 30 août 2017, la société Socass demande à la cour de la déclarer recevable et bien fondée en ses demandes et de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
Elle prie la cour de :
- rejeter les fins de non-recevoir soulevées par la société Ekis et de déclarer la société Socass recevable en ses demandes fondées sur l'article L. 442-6 5° du Code de commerce ;
- déclarer la société Ekis irrecevable en ses demandes visant à écarter des pièces sur le fondement de l'article 9 du Code civil et en tout état de cause l'en débouter ;
- juger que la société Socass n'a commis aucune faute contractuelle ni manquement à l'obligation d'exécution de bonne foi des conventions ;
- juger que la société Ekis n'établit pas l'existence d'un quelconque lien de causalité entre les fautes alléguées et le prétendu préjudice dont elle ne justifie pas de l'existence;
- débouter la société Ekis de l'ensemble de ses demandes ;
- condamner la société Ekis à lui verser la somme de 200 937,00 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la rupture de relations commerciales établies ;
A titre subsidiaire ;
- ordonner la compensation judiciaire de la somme de 96 036,40 euros et de 200 937,00 euros avec toute condamnation qui pourrait être éventuellement mise à la charge de la société Socass.
Elle sollicite, en tout état de cause, la condamnation de la société Ekis à lui verser la somme de 15 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de la Selarl Christophe Edon, conseil plaidant par Maître Christophe Edon, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
SUR CE,
Sur la demande de rejet de pièces
La société Ekis sollicite le rejet des débats des pièces adverses n° 17, 18, 19, 24, 25 et 27 au motif qu'elles seraient détenues illicitement par la société Socass qui ne donne aucune explication sur les conditions dans lesquelles elle est entrée en possession de ces pièces qui sont des documents internes de la société Akka.
Elle fait valoir un constat d'huissier du 28 mars 2013 qui mettrait en évidence que la société Socass et Monsieur Geny-Gros ont utilisé des documents confidentiels du groupe Akka après les avoir dérobés pour tenter d'obtenir des marchés sur lesquels intervenait la société Ekis, et plus généralement le groupe Akka, en violation avec l'obligation de confidentialité prévue aux conditions générales d'achat de prestations de services qui lient Socass et Ekis.
La société Socass indique que le constat d'huissier du 28 mars 2013 que la société Ekis a fait effectuer pour tenter d'établir, selon elle, l'existence de manœuvres déloyales de la société Socass et de Monsieur Geny-Gros n'est que le collationnement d'échanges de courriels de Monsieur Geny-Gros avec ses collaborateurs dont la société Ekis tente d'en détourner le sens pour soutenir ses allégations ; que lui reprocher la communication et l'utilisation de documents internes de la société Ekis reviendrait à faire grief à un sous-traitant l'utilisation de documents appartenant au maître d'ouvrage au bénéfice du client pour les besoins de l'exécution des prestations de services réalisées au bénéfice de ce dernier. Elle fait valoir que la plainte déposée par la société Ekis auprès du procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Nanterre le 5 août 2013 à l'encontre de la société Socass et de Monsieur Geny-Gros du chef des délits de vols de documents et recel a fait l'objet d'un classement sans suite en date du 20 mars 2015 démontrant l'absence totale d'élément délictuel ou déloyal.
Elle soutient que la cour d'appel de Toulouse statuant sur l'appel formé à l'encontre du jugement du juge de l'exécution près le Tribunal de grande instance de Toulouse a, par arrêt du 24 mai 2014 qui a autorité de la chose jugée, jugé que " Les pièces litigieuses sont soit établies par le dirigeant de la société Socass (17 et 18) soit affichées dans l'entreprise (comptes rendus de comité d'entreprise 19 et 25) soit publiées sur internet ; qu'il n'y a donc aucune atteinte aux dispositions de l'article 9 du Code civil qui ne paraît pas en l'espèce applicable en l'absence de démonstration de l'existence à un droit de la personne morale assimilable à la vie privée d'une personne physique. Il n'y a donc pas lieu de les écarter des débats ".
Ceci étant exposé, les pièces n° 17, 18 et 27 (présentations du point d'activité auto PSA Paris et du point de communication générale Ekis et étude Genesta du groupe Akka) sont des pièces dont M. Geny-Gros a été rendu destinataire en sa double qualité de directeur d'agence d'Ekis d'une part et de dirigeant de la société Socass, sous-traitante d'Ekis chez PSA d'autre part. Les pièces n° 19, 24 et 25 sont des compte rendus du comité d'entreprise qui ont été affichés dans l'entreprise et dont M. Geny-Gros a été destinataire. Il ne saurait dès lors être reproché à M. Geny-Gros et par voie de conséquence à la société Socass, d'avoir gardé des documents dont il était destinataire et qui intéressent notamment l'activité de sous-traitance de la société Socass. Il convient d'ajouter qu'aux termes de l'accord de confidentialité signé entre Ekis et Socass du 2 janvier 2012, il est expressément prévu que les deux sociétés seront amenées à se confier des informations de nature confidentielle.
Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté la société Ekis de sa demande.
Sur les fins de non-recevoir de la demande de la société Socass au titre de la rupture des relations commerciales
. sur le fondement de l'article 70 du Code de procédure civile
La société Ekis soutient que la demande additionnelle de la société Socass est irrecevable comme ne présentant pas un lien suffisant avec son instance initiale par laquelle elle demande le paiement de factures.
Ceci étant observé, la demande additionnelle de la société Socass au titre de la rupture brutale des relations commerciales établies présente un lien suffisant avec la demande initiale tendant au paiement de factures émises dans le cadre de ces mêmes relations commerciales et est donc recevable.
. sur l'estoppel
La société Ekis soutient que la demande de la société Socass est irrecevable sur le fondement de l'estoppel en ce que la société Socass et son gérant, Monsieur Geny-Gros, adoptent singulièrement une position contradictoire, M. Geny-Gros ayant démissionné de ses fonctions et manifesté ainsi sa volonté de ne plus vouloir travailler avec la société Ekis et la société Socass invoquant les dispositions de l'article L. 442-6 5èmement du Code de commerce.
Or et ainsi que le soutient la société Socass, la fin de non-recevoir tirée de l'estoppel ne peut être retenue dès lors que M. Geny-Gros n'est pas attrait dans la présente instance.
Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a estimé la demande de la société Socass recevable.
Sur la demande en paiement de factures de la société Socass
La société Ekis soutient que la société Socass ne démontre pas avoir exécuté effectivement ces commandes qui ne peuvent servir de fondement à une demande puisqu'il est démontré que ces commandes ont été passées par le groupe Akka et non par la société Ekis. Elle précise que Monsieur S. n'est pas et n'a jamais été salarié d'Ekis et n'avait aucun pouvoir pour signer ces commandes.
Elle ajoute que la société Socass a attendu le 21 janvier 2013 pour réclamer le règlement de ces factures dont certaines sont anciennes ; que la position privilégiée de Monsieur Geny-Gros, dirigeant de la société Socass et salarié de la société Ekis explique l'absence de réaction dans un premier temps de la société Ekis concernant ces factures ; que la mise en demeure de payer du 2 avril 2013 fait suite à la mise en demeure adressée le 21 janvier 2013 par le conseil de la société Akka à la société Socass.
La société Socass soutient que la société Ekis France est l'émettrice des bons de commande et rappelle que les deux sociétés ont toujours été en relation d'affaires dans cadre d'une mise à disposition de personnel par Socass au profit d'Ekis.
Elle souligne que la société Ekis se contente d'affirmer que ces factures sont insuffisantes à rapporter la preuve de la créance qui est alléguée sans toutefois remettre en cause l'existence même de prestations fournies ; qu'elle ne démontre pas qu'elle serait libérée de toute obligation de paiement des factures. Elle précise que M. S. a signé les bons de commande en tant que directeur des opérations d'Ekis et que le terme générique " Akka Technologie " qui figure en haut et à gauche des bons de commande est un logo et qu'au bas de chacun d'entre eux figurent les références juridiques précises de la société Ekis France.
Ceci étant exposé, les factures dont il est sollicité le paiement par la société Socass sont des factures émises au titre des prestations exécutées par cette dernière et qui ont consisté en la mise à disposition de collaborateurs pour un temps donné au cours de la période allant du 22 mars au 29 novembre 2012 dans le cadre de la sous-traitance chez PSA. La société Ekis ne peut sérieusement soutenir qu'elle n'est pas celle qui a commandé les dites prestations puisque d'une part le terme " Akka Technologie" qui figure en haut et à gauche des bons de commande n'est que logo du groupe auquel appartient la société Ekis dont les références juridiques figurent bien au bas des documents et que d'autre part, c'est M. S. qui a signé les bons de commande en tant que directeur des opérations d'Ekis et non en qualité de salarié d'une autre structure ; cette qualité étant vérifiée par sa signature de l'accord de confidentialité liant la société Ekis à la société Socass et sa présence à l'entretien préalable de M. Geny-Gros.
La réalité des prestations exécutées par la société Socass n'étant pas contestée par la société Ekis qui les a commandées, le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a condamnée cette dernière à payer la somme de 96 036,40 euros TTC, augmentée des intérêts au taux de trois fois le taux d'intérêt légal à compter de la date du jugement.
Le jugement sera infirmé en ce qu'il a condamné Ekis à payer à Socass la somme complémentaire de 40 euros par facture, soit la somme complémentaire de 600 euros à titre de forfait.
En effet, cette somme n'est pas justifiée. Il convient de relever d'ailleurs que si la société Socass sollicite la confirmation du jugement entrepris sur la condamnation d'Ekis au paiement des factures, elle n'invoque, aux termes de ses écritures que la seule somme de 96 036,40 euros TTC et non pas celle de 600 euros et qu'aux termes du dispositif de ses écritures elle sollicite, à titre subsidiaire, la compensation de cette somme de 96 036,40 euros avec son éventuelle condamnation à des dommages et intérêts au profit de la société Ekis.
Sur la demande de résolution du contrat et de dommages et intérêts de la société Ekis
La société Ekis expose que les conditions générales d'achat de prestations de services ainsi qu'un accord de confidentialité réglaient les rapports entre la société Ekis et la société Socass ; que courant de l'année 2012, la société PSA a procédé à un tour de sélection de ses fournisseurs privilégiés et que le groupe Akka n'a pas été retenu au titre de cette nouvelle sélection par la société PSA ; que courant novembre 2012, elle a déploré les manquements et carences graves de M. Geny-Gros, par ailleurs gérant de la société Socass, dans l'exécution de son contrat salarié de directeur d'agence.
. Sur le détournement de personnels
La société Ekis soutient que la société Socass a violé la clause de non-sollicitation du personnel et son obligation de loyauté en débauchant du personnel d'Ekis au cours du second semestre 2012. Elle expose qu'entre les 2 et 7 janvier 2013, elle a était destinataire de la démission de six de ses collaborateurs, lesquels étaient affectés à des postes clés de la société et travaillaient sur le plateau Com-Repa ; ces démissions faisant suite à celle de M. Stéphane Rolland qui continué son activité pendant son préavis au sein de la société Ekis, avec une adresse mail chez Socass ; qu'il est avéré que l'employeur des six collaborateurs était la société Socass ; que M. Geny-Gros, n'a pas hésité à débaucher des collaborateurs de la société Ekis, lesquels étaient affectés à des postes clés, en violation de la clause de " non sollicitation du personnel " prévue dans les conditions générales d'achat de prestations de services liant la société Socass et la société Ekis dans le but de récupérer le marché du plateau Com-Repa, ce qui a nécessairement été préjudiciable à la société Ekis, même si ces salariés ne sont pas sortis des effectifs d'Ekis puisque le départ de ces six salariés a notamment eu pour effet de désorganiser le fonctionnement de l'équipe travaillant sur le plateau Com-Repa qui était contrainte de travailler en effectif réduit et dans un climat de surprise et de stupeur générale au regard de ces démissions concomitantes résultant de la déloyauté de la société Socass.
La société Socass soutient qu'aucune preuve n'est rapportée sur une éventuelle sollicitation des personnels d'Ekis par Socass sachant de plus que dans le type d'activité de ces deux société les mouvements de personnels entre les différentes société dépendent des niveaux d'activité respectifs de chacun des acteurs et des effectifs dont ils disposent.
La société Ekis ne peut prétendre que les six salariés ont été débauché par la société Socass puisque ces dernier n'ont finalement jamais quitté la société Ekis.
Elle ajoute que, dans ce contexte de perte de référencement entrainant pour elle une perte financière conséquente et nécessitant le reclassement de 70 collaborateurs, la société Ekis a sollicité la société Socass à laquelle elle sous-traitait son activité Com-Repa depuis 5 années, de reprendre plusieurs de ses collaborateurs à l'effet de participer à l'effort de reclassement, tel que cela résulte de l'entretien préalable au licenciement de M. Geny-Gros du 22 février 2013 au cours duquel il a été relevé qu'il avait été demandé à ce dernier de de favoriser le départ des salariés ; que c'est donc à la demande de cette dernière, que dans le cadre du reclassement de ses collaborateurs, six collaborateurs de la société Ekis ont donné simultanément leur démission de leurs fonctions.
Ceci étant exposé, les pièces versées aux débats par la société Socass établissent qu'en prévision d'une baisse d'activité chez PSA, le directeur des opérations d'Ekis, M. Salut invitait le 11 avril 2010, les responsables d'agences à " positionner progressivement les collaborateurs sur de nouveaux marchés " et que selon le procès-verbal du comité d'entreprise d'Ekis du 18 septembre 2012, la société Ekis faisait le point des mesures destinées au reclassement des collaborateurs. Le compte rendu de l'entretien préalable au licenciement de M. Geny-Gros relate la précision apportée par M. Christophe Salut, directeur des opérations " qu'au vu de la perte des contrats, la direction d'Ekis n'avait pas la volonté de freiner le départ des salariés qui auraient souhaiter partir ". En outre, le fait que les six salariés démissionnaires sont, en cours d'exécution de leur préavis, revenus sur leur démission, ce qui a été accepté par la société Ekis, s'explique par le fait que cette dernière a appris que finalement PSA maintenait pour un temps la plateau Com-Repa et illustre bien le fait de la volonté d'Ekis de reclasser ses collaborateurs, étant précisé, qu'en tout état de cause, la société Ekis ne saurait reprocher à la société Socass d'avoir débaucher ces six salariés qui n'ont finalement jamais quitté l'entreprise.
La société Ekis ne justifie pas non plus que la démission des six salariés a eu pour effet de désorganiser le fonctionnement de l'équipe travaillant sur le plateau Com-Repa.
. Sur le détournement de documents confidentiels
La société Ekis soutient que la société Socass et à Monsieur Geny-Gros ont manqué à leurs obligations de loyauté et de confidentialité en détournant des documents lui appartenant au cours du second semestre 2012. Elle verse aux débats un constat d'huissier en date du 28 mars 2013 qui établirait l'existence de manœuvres déloyales de ces derniers.
La société Socass prétend que le constat d'huissier n'est que le collationnement d'échanges de courriels de M. Geny-Gros avec ses collaborateurs dont la société Ekis qui tente d'en détourner le sens pour soutenir ses allégations.
Ainsi qu'il a été exposé ci-dessus, il ne peut être reproché à la société Socass d'avoir utilisé des documents nécessaires à son activité de sous-traitance et des documents internes communiqués par les supérieurs hiérarchiques de M. Geny-Gros à ce dernier.
En outre, il sera souligné que la plainte déposée par la société Ekis auprès du procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Nanterre le 5 août 2012 à l'encontre de la société Socass et de M. Geny-Gros du chef de vols de documents et recel a fait l'objet d'un classement sans suite en date du 20 mars 2015.
. Sur la tentative de récupération de marché avec les sociétés Altran et Assytem
La société Ekis expose qu'au cours de la réunion du 30 novembre 2012, le groupe PSA l'a informée de ce que la société Socass avait cherché durant l'année 2012 à se faire référencer au sein du panel fournisseurs PSA mais qu'elle avait été écartée en raison de sa trop petite taille ; que la société Socass avait alors cherché de nouveaux partenaires et s'était rapprochée des sociétés Altran et Assystem, concurrentes de la société Ekis ;
Elle indique que le 7 janvier 2013, le groupe PSA a informé le groupe Akka que le plateau Com-Repa était attribué à son concurrent Altran avec le concours de la société Socass.
Elle indique également que les agissements déloyaux et gravement préjudiciables de la société Socass et de son dirigeant se sont poursuivis puisqu'au même moment, le groupe Akka a appris par le groupe PSA qu'un planning de réversibilité était mis en place entre les sociétés Socass et Assystem afin de basculer les données de compétence Akka/Socass vers Assystem/Socass sans que le groupe Akka n'en ait été préalablement informé. Elle indique que M. Geny-Gros a reconnu, lors de l'entretien du 9 janvier 2013, avoir démarché les concurrents d'Akka, en violation de l'obligation de non concurrence prévue au titre des conditions générales d'achat.
Elle indique que la commande obtenue in extremis du groupe PSA, laquelle fait suite à la révélation des agissements déloyaux de la société Socass et de son gérant à l'encontre de la société Ekis, n'est qu'une commande ponctuelle d'un an et non un renouvellement de marché.
Elle soutient que M. Geny-Gros a profité de sa situation de salarié au sein de la société Ekis pour organiser un véritable détournement de clientèle au profit de sa propre société Socass en subtilisant et en exploitant des informations stratégiques et confidentielles, propriété du groupe Akka Technologies ; que la société Socass, dirigée par Monsieur Geny-Gros, a recelé et utilisé des documents confidentiels, volés par Monsieur Geny-Gros, pour tenter d'obtenir des marchés sur lesquels intervient la société Ekis, et plus généralement le groupe Akka.
Elle indique que, malgré quelques commandes ponctuelles pour le plateau Com-Repa au groupe Akka, le groupe PSA ne travaillera plus avec Ekis ; que le chiffre d'affaires confié à la société Ekis, pour le plateau Com-Repa, est au premier semestre de 309 970 euros, sachant qu'environ 400 000 euros sur cette période ont été confiés à la société Altran avec l'aide frauduleuse de la société Socass et de son gérant, Monsieur Geny-Gros ; que chiffre d'affaires est à comparer aux 1 657 941 euros réalisés par la société Ekis pour le plateau Com-Repa sur la totalité de l'année 2012 ; qu'elle a subi une perte de marge de 500 000 euros, sauf à parfaire.
La société Socass soutient que la société Ekis monte de toutes pièces un argumentaire pour tenter d'imputer à la société Socass et à Monsieur Geny-Gros la perte du marché Com-Repa par la société Ekis en janvier 2012, ce dont ils ne sont nullement responsables et des agissements qualifiés de déloyaux alors qu'ils ont été dictés par la société Ekis elle-même.
Elle expose qu'au début de l'année 2012, la société PSA a informé la société Ekis qu'elle ne renouvellerait pas, au mois de janvier 2013, le référencement de cette dernière sur un certain nombre de prestations et notamment celle désignée sous l'appellation " plateau technique Com-Repa " que la société Ekis a pris, dès le mois d'avril 2012, des dispositions internes de réorganisation à l'effet de tenir compte de cette perte de marché à effet du début l'année 2013 ; que le 11 avril 2012, M. Christophe Salut, supérieur hiérarchique de Monsieur Geny-Gros et directeur des opérations, invitait les responsables d'agences, "en prévision d'une baisse d'activité chez PSA" à " positionner progressivement les collaborateurs sur de nouveaux marchés (au fil de l'eau fonction des réductions de périmètre côté PSA " ; qu'au mois de septembre 2012, la société Ekis a mis en place des mesures destinées à faciliter le départ de tous nos collaborateurs vers la ou les sociétés qui reprendront (ses) parts de marché " et à mettre en place le reclassement des salariés affectés aux plateaux techniques dont le référencement s'achevait à la fin de l'année ; que ce ne sont ni M. Geny-Gros ni la société Socass qui sont à l'origine de cette perte de référencement du groupe Akka au sein de PSA, mais une décision interne de cette dernière bien antérieure (2009) aux manquements contractuels imputés à la concluante.
La société Socass expose que, courant de l'année 2012, le groupe PSA avait d'ores et déjà déréférencé la société Ekis au profit de la société Altra et que dès lors, la société Socass et Monsieur Geny-Gros ne pouvaient œuvre en 2012 à la perte d'un marché au détriment de la société Ekis et au bénéfice de la société Altran dont le choix avait déjà été fait bien des mois auparavant par le client final, le groupe PSA. Elle indique que les seuls documents versés aux débats sont les lettres recommandées en date du 21 janvier 2013 adressées aux sociétés Altran et Assystem ;
Elle précise que la société PSA a finalement décidé de renouveler le référencement du groupe Akka pour l'année 2013, et celui notamment d'Ekis pour le plateau technique Com-Repa au moins jusqu'en juin 2013 ce qui fait renoncer Ekis à la rupture conventionnelle de la relation contractuelle entre elle-même et M. Geny-Gros et le licenciement de celui-ci ainsi que la renonciation à démission des 6 salariés.
Ceci étant exposé il convient de préciser que la société Ekis n'indique pas que la société Socass aurait tenté de lui ravir le marché Compa-Repa en novembre 2012 mais qu'elle aurait appris par PSA que la société Socass aurait tenté de se faire référencer au sein du panel fournisseur et qu'elle a été écartée en raison de sa petite taille et que devant cet échec elle a cherché de nouveaux partenaires, les sociétés Altran et Assystem.
Or, ainsi que l'a relevé le tribunal, les difficultés du secteur automobile ont particulièrement directement touché le groupe Akka, la société Ekis et la société Socass du fait de la baisse annoncée d'activité pour ces sociétés dès le début 2012 comme en témoigne l'article de l'usine nouvelle cité et l'étude Genesta (" le ralentissement de l'activité en France, en particulier sur le secteur automobile (sortie du référencement de PSA notamment, le groupe ayant effectué des arbitrages ").
La société Ekis ne justifie par aucune pièce avoir été informée par PSA lors d'une réunion du 30 novembre 2012 des manœuvres de Socass et ne justifie pas de l'existence desdites manœuvres ni d'un rapprochement fautif de la société Socass avec les sociétés Altran et Assystem ; les lettres recommandées que la société Ekis a adressées à ces deux dernières sociétés ne sauraient rapporter cette preuve d'autant qu'il convient de souligner qu'elles font état du fait mensonger selon lequel M. Geny-Gros aurait reconnu qu'il avait tenté de détourner des marchés avec le groupe PSA au profit de sa société Socass et au profit et en concert avec ces deux dernières sociétés alors qu'elle ne justifie aucunement de cet aveu ; la lecture du compte rendu de l'entretien préalable versé aux débats par la société Socass ne faisant état à aucun moment M. Geny-Gros a reconnu de tels faits.
Il ressort du mail rédigé par M. Régis Sandrin, vice-président de la société Akka le 23 janvier 2012,que la décision de PSA de ne pas garder Ekis comme fournisseur stratégique est motivée par " le fait que nos compétences et activités actuelles avec PSA manquaient d'antériorité et de présence globale au sein des directions techniques DRL " et que " la priorité a donc été donnée par PSA au maintien des fournisseurs en place, Akka Technologies étant désormais identifié comme un acteur de référence à moyen terme ".
Le référencement d'Akka comme acteur de référence à moyen terme est illustré par le fait qu'Akka a été référencée en 2012 et que cette nouvelle commande, qui, ainsi que l'expose Ekis, n'a duré qu'une année, n'est pas contrairement à ce qu'elle soutient, la conséquence de la prise de conscience par PSA de la tentative de détournement d'activité orchestrée par Socass, Altran et Assystem ; l'emploi du mot " tentative " impliquant qu'en tout état de cause aucun détournement d'activité n'est avéré.
Le procès-verbal d'huissier versé aux débats par Ekis n'est que la compilation de courriers mails établissant notamment le transfert par M. Geny-Gros depuis sa boite mail Ekis vers sa boite personnelle de documents relatifs à l'activité de la société Ekis que son double statut d'employé Ekis et de dirigeant de la société sous-traitante justifie. La pré-rédaction d'attestations en sa faveur s'expliquent par le conflit existant entre la société Ekis et M. Geny-Gros en sa qualité d'employé ; des négociations ayant eu lieu relativement à une rupture conventionnelle du contrat de travail de M. Geny-Gros.
La société Ekis sera dès lors déboutée de sa demande de résolution du contrat de prestations de services, étant précisé au surplus, qu'elle est en tout état de cause mal fondée à solliciter la résolution d'un contrat qu'elle a elle-même préalablement rompu puisqu'il résulte du mail du 15 janvier 2013, qu'elle a indiqué ne valider aucune commande de sous-traitance au profit de la société Socass.
Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté la société Ekis de ses demandes de dommages et intérêts au titre du détournement de clientèle, de salaires des salariés non réaffectés, de violation de la clause de non sollicitation de personnel et pour perte d'image.
Sur la demande de dommages et intérêts pour rupture abusive des relations commerciales établies de la société Socass
La société Socass soutient que la société Ekis a rompu brutalement les relations établies entre les deux sociétés depuis 2007 dès lors qu'il est constaté qu'aucune commande de sous-traitance après celle passée en date du 29 novembre 2012 portant la référence 2012 EK 1062 n'a été passée et qu'il n'est produit aucun justificatif permettant de prendre en compte un quelconque préavis accordé à la société Socass.
Elle indique qu'elle a réalisé les chiffres d'affaires suivants :
- 2010 : 437 575 euros,
- 2011 : 271 309 euros,
- 2012 : 295 801 euros,
soit un chiffre d'affaires annuel moyen calculé sur les trois derniers exercices de 334 895 euros.
Elle fait valoir l'attestation de son expert-comptable qui souligne l'évolution du chiffre d'affaires réalisé par la société Socass avec la société Ekis dans les proportions suivantes :
- exercice 2009 / 2010 : 185 496 euros HT,
- exercice 2010 / 2011 : 67 352 euros H,
- exercice 2011/2012 : 299 609 euros HT,
ce qui révèle une forte progression au cours de l'exercice 2011-2012.
Elle indique que le Tribunal de commerce de Lyon a retenu un préavis d'une durée de 6 mois et calculé le préjudice subi par la société Socass comme suit :
chiffre d'affaire moyen sur la période : 184 152 euros
préavis 6 mois : 92 076 euros
marge brute : 65 %
préjudice : 58 849 eruos
Elle sollicite l'indemnisation de son préjudice comme suit :
chiffre d'affaire moyen sur la période : 334 895 euros
préavis 12 mois : 334 895 euros
marge brute : 60 %
préjudice : 200 937 eruos
La société Ekis soutient que si une rupture brutale a existé, c'est bien du fait de la société Socass et de son gérant ; que dès le mois de septembre 2012, la société Ekis a été informée par son salarié, Monsieur Geny-Gros, de sa volonté de démissionner sous la forme d'une rupture conventionnelle ; qu'il a démissionné de ses fonctions le 14 janvier 2013 ; que la société Socass reconnaît dans ses écritures être devenue en direct le prestataire du groupe PSA ; qu'elle ne peut donc se plaindre d'une rupture brutale de la relation avec la société Ekis, le contrat n'ayant pas été rompu par la société Ekis, comme le démontre sa demande reconventionnelle en résolution du contrat ; que la société Socass ne démontre pas avoir fait des offres de travail à la société Ekis qui auraient été refusées ; que le mail de la société Ekis à son service achat indiquant ne valider aucune commande de sous-traitance au profit de la société Socass, date de janvier 2013 et non pas de janvier 2012.
Elle ajoute que le préjudice allégué n'est pas démontré, d'autant que la société Socass ne produit pas des bilans pour les périodes litigieuses.
Le tribunal a jugé que l'argument tiré de la perte d'un marché "Com-Repa" au profit du groupe Altran pour justifier la fin immédiate et donc sans préavis, des relations établies depuis 2007 n'était pas fondé sachant de plus que dès le début 2013, l'exécution du marché soi-disant détourné par la société Socass avait repris en partie au profit de la société Ekis et que les relations établies depuis 2007 entre les deux sociétés avaient bien été rompues brutalement et sans préavis ce qui constituait une faute selon les dispositions de l'article L. 442-6 5° du Code de commerce impliquant réparation du préjudice.
Ceci étant exposé, l'article L. 442-6 I du Code de commerce érige en faute le fait de rompre brutalement une relation commerciale établie sans préavis ou avec un préavis ne tenant pas compte de la durée de la relation commerciale.
La finalité du préavis est d'accorder au partenaire évincé le temps nécessaire pour lui permettre de préparer le redéploiement de son activité, d'organiser sa reconversion, de trouver un autre partenaire ou une solution de remplacement.
La durée du préavis utile doit être appréciée au regard des relations commerciales antérieures au moment de la rupture, du volume d'affaires réalisé, du secteur concerné, de l'état de dépendance de la victime, des dépenses non récupérables engagées par elle et du temps nécessaire pour retrouver un partenaire ou assurer une reconversion économique.
En l'espèce, il n'est pas contesté que les parties ont débuté leurs relations en 2007 sans qu'aucune des parties ne précise la date exacte (sauf à préciser que la société Socass indique avoir été créée en septembre 2007). La société Ekis ne conteste pas n'avoir plus passé de commande auprès de la société Socass à compter du 29 novembre 2012 et avoir, par mail du 15 janvier 2013, indiquer souhaiter ne valider aucune commande de sous-traitance au profit de la société Socass. Elle a donc mis fin à la relation commerciale existant entre les parties sans aucun préavis à compter du 29 novembre 2012 et ne saurait reprocher à la société Socass de n'avoir pas sollicité de nouvelle commande dès lors que cette dernière ne pouvait pas ignorer la volonté de la société Ekis de ne plus lui confier de nouvelles missions.
Il n'y a donc pas lieu à prononcer la résolution judiciaire du contrat mais à constater la rupture de celui-ci par la société Ekis le 29 novembre 2012.
La durée des relations entre les parties au moment de la rupture aurait nécessité un préavis de trois mois et non de six mois comme retenu par le tribunal, d'autant que le marché PSA a été repris en partie par la société Ekis.
Le préjudice indemnisable résulte du caractère brutal de la rupture qui n'a pas permis à la partie qui l'a subie de prendre les dispositions nécessaires en temps utile pour donner une nouvelle orientation à ses activités et non de la rupture elle-même. Le préjudice est constitué par la marge brute que la victime de la rupture pouvait escompter tirer pendant la durée du préavis qui aurait dû être respecté.
La société Socass ne verse aux débats aucune pièce comptable (bilan, compte de résultat) à l'exception d'une attestation de son expert-comptable qui ne peut, en l'absence d'autre pièces justificatives, permettre à la cour de calculer la perte de marge nette qu'elle pouvait escompter pendant la durée du préavis qui aurait dû être respecté.
En l'absence de pièce justificative, la société Socass sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts.
La société Ekis, partie perdante au sens de l'article 699 du Code de procédure civile sera condamnée aux dépens d'appel et déboutée de sa demande d'indemnité de procédure. Elle sera condamnée, sur ce même fondement, à payer à la société Socass, la somme de 4 000 euros.
Par ces motifs, LA COUR, infirme le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Lyon le 10 février 2016 sur les dommages et intérêts alloués à la société Socass au titre de la rupture des relations commerciales établies, sur le montant du forfait alloué à la société Socass et sur la résolution judiciaire du contrat ; Statuant à nouveau sur ce chef, dit que la société Ekis France a rompu le contrat l'unissant à la société Socass le 29 novembre 2012 ; déboute la société Socass de sa demande de dommages et intérêts ; déboute la société Socass de sa demande en paiement du forfait de 600 euros ; confirme le jugement entrepris en ses autres dispositions ; Y ajoutant, condamne la société Ekis France aux dépens d'appel dont distraction au profit de la Selarl Christophe Edon, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile ; déboute la société Ekis France de sa demande d'indemnité de procédure ; condamne la société Ekis à payer à la société Socass la somme de 5 000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile.