CA Paris, Pôle 5 ch. 5, 23 novembre 2017, n° 16-12350
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Morel, Picard (ès qual.), ECM (Sté)
Défendeur :
Assurtis (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Schaller
Conseillers :
Mmes du Besset, Lucat
Avocats :
Mes Teytaud, Bellet, Lallement, Riere Thiebault
Faits et procédure :
La société Assurtis est une société spécialisée dans la distribution conjointe de contrats d'assurance et de crédits à la consommation, résultant de la fusion de la société April spécialisée en assurance et de la société Mediatis spécialisée dans le crédit à la consommation. Créée en 2005 suite à ce rapprochement, elle a mis en place la distribution de ces produits liant l'assurance et le crédit dans le cadre d'un réseau de franchise. Seuls les franchisés avaient un accès exclusif aux produits Assurtis et aux codes Mediatis.
En 2010, 17 des 66 franchisés ont mené une action en justice contre Assurtis sur le fondement d'un défaut d'information pré-contractuel de la part du franchiseur.
Une première série de jugements a été rendue par le Tribunal de commerce de Paris en 2010, dont fait partie le jugement rendu à l'égard de Monsieur Morel le 17 décembre 2010, puis en 2011, une autre série de jugements a été rendue à l'égard d'autres franchisés du réseau Assurtis.
La Cour d'appel de Paris a rendu six arrêts le 19 février 2014, infirmatifs ou confirmatifs selon les cas, contre lesquels pourvoi a été interjeté et que la cour de cassation a cassés.
La Cour d'appel de Paris est saisie du renvoi de ces affaires.
En l'espèce, dans le cas de la société EMAF et de son gérant M. Morel qui a manifesté son intérêt pour ce réseau, ce dernier a reçu le 20 mars 2007 le document d'information précontractuelle relatif au réseau de franchise sous l'enseigne " Assurtis " ainsi qu'une étude de zone.
Le 1er octobre 2007, la société EMAF et la société Assurtis ont conclu un contrat de franchise, pour une durée de cinq ans, sur la zone de Bourg en Bresse. Par avenant du 28 janvier 2008, le contrat a été transféré au profit de la société EMC, dont Monsieur Morel est également le gérant.
Par exploit du 1er février 2010, la société EMC et Monsieur Morel ont assigné la société Assurtis devant le Tribunal de commerce de Paris, demandant la nullité et subsidiairement la résiliation du contrat de franchise et le paiement de dommages-intérêts.
Par jugement du 17 décembre 2010, assorti de l'exécution provisoire, le Tribunal de commerce de Paris a :
écarté des débats certaines pièces ;
dit que Monsieur Morel avait intérêt à agir ;
dit la société ECM et Monsieur Morel mal fondés en leur demande d'annulation du contrat pour absence de cause ;
prononcé la nullité du contrat de franchise ;
condamné la société Assurtis à payer à la société ECM la somme de 29 900 euros en remboursement du droit d'entrée et la somme de 11 979 euros au titre du remboursement des redevances ;
condamné la société ECM à lui rembourser la somme de 4 230,44 euros au titre des commissions ;
ordonné la compensation, avec application de l'article 1154 du Code civil sur le solde ;
condamné la société Assurtis à payer à Monsieur Morel 30 000 euros à titre de dommages-intérêts pour perte de chance dans l'utilisation de ses ressources ;
rejeté sa demande au titre du manque à gagner à titre de rémunération ;
dit que la société ECM et Monsieur Morel demeurent soumis aux stipulations des articles 15.3-2 et 15.3-3 du contrat de franchise ;
dit que la société ECM devra mettre en œuvre les dispositions de l'article 18 du contrat de franchise, dans les 15 jours de la signification du présent jugement, et ce sous astreinte de 200 euros par jour de retard pendant une période de 30 jours à l'issue de laquelle il pourra de nouveau être fait droit ;
condamné la société Assurtis à payer Monsieur Morel la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
ordonné l'exécution provisoire sans constitution de garantie ;
débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraintes ;
condamné la société Assurtis aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe liquidés à la somme de 116,68 euros TTC dont 18,86 euros de TVA.
Par arrêt du 19 février 2014 (RG n° 10/24823), la Cour d'appel de Paris a :
infirmé le jugement ;
prononcé la résiliation aux torts de la société ECM ;
condamné la société ECM à payer à la société Assurtis la somme de 9 489,44 euros au titre des redevances impayées et à titre de dommages-intérêts ;
dit les obligations l'article 15.3-2 et 15.3-3 du contrat de franchise sans objet ;
dit n'y avoir lieu à paiement d'une astreinte pour le respect des dispositions de l'article 18 du contrat de franchise ;
débouté Monsieur Morel et la société ECM de toutes leurs demandes ;
condamné Monsieur Morel et à la société ECM à payer à la société Assurtis la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles, outre les entiers dépens, recouvrés avec le bénéfice des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile ;
Par arrêt du 5 janvier 2016, la Cour de cassation a :
cassé et annulé, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de dommages-intérêts formée par M. Morel et la société ECM au titre des manquements précontractuels et en ce qu'il statue sur les dépens et l'article 700 du Code de procédure civile, l'arrêt rendu le 19 février 2014 (RG n°10/24823), entre les parties, par la Cour d'appel de Paris ; remis, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les a renvoyées devant la Cour d'appel de Paris, autrement composée ; condamné la société Assurtis aux dépens ;
vu l'article 700 du Code de procédure civile, condamné la société Assurtis à payer à M. Morel et la société ECM de 3 000 euros et rejeté sa demande ;
Vu la déclaration de saisine après renvoi devant la Cour d'appel de Paris du 25 mai 2016 de M. Christian Morel et de la société ECM ;
Vu les dernières conclusions signifiées le 21 juin 2017 par M. Christian Morel et la société ECM par lesquelles il est demandé à la cour de :
Vu les articles 1109, 1110 et 1116 du Code civil (dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016),
Vu l'article 1382 du Code civil (devenu l'article 1240 du même code),
Vu les articles L. 330-3 et R. 330-1 du Code de commerce,
Vu le code de déontologie de la franchise,
Vu le contrat de franchise,
dire et juger que Monsieur Morel et la société ECM, représentés par la Selarl AJ Partenaires, prise en la personne de Maître Picard, ès qualité de Mandataire ad hoc, sont recevables en leur action ;
confirmer le jugement entrepris en ce que, après avoir prononcé la nullité du contrat de franchise, il a condamné la société Assurtis à payer diverses sommes à titre de dommages-intérêts à la société ECM au titre des manquements précontractuels commis par cette dernière ;
infirmer pour le surplus et, statuant à nouveau ;
dire et juger que la société Assurtis a vicié le consentement de Monsieur Christian Morel et la société ECM par l'effet du dol commis par cette dernière, en :
ne les informant pas loyalement de l'absence d'expérimentation de son concept ;
ne dressant pas l'état local du marché des produits (assurance et crédit), objets du contrat ;
ne déterminant pas les perspectives de développement sur la durée du contrat ;
fournissant des objectifs de contrats d'assurance et de crédit et des chiffres prévisionnels qui ne correspondaient pas à la rentabilité du concept et du réseau ;
dire et juger que la société ECM, par le biais de Monsieur Christian Morel, a commis, lors de la conclusion du contrat de franchise, une erreur substantielle sur la rentabilité de l'activité de son entreprise qui a vicié son consentement dès lors qu'elle s'est exclusivement engagée, sur la foi notamment des informations prévisionnelles fausses qui lui ont été communiquées par la société Assurtis, en considération d'un niveau d'activité qui n'a jamais été atteint du fait du défaut de rentabilité général du réseau de franchise Assurtis ;
dire et juger que cette erreur sur la rentabilité procède d'une faute de la société Assurtis, qui a fourni, a minima, avec une légèreté blâmable des chiffres prévisionnels détachés de la rentabilité réelle de son concept, d'une part, et qui a fait signer le contrat de franchise sans avoir jamais éprouvé ni expérimenté son concept et dans des conditions ayant conduit son franchisé à commettre une erreur sur la future rentabilité de son agence et sur le niveau d'activité qu'il serait capable d'atteindre en exploitant le concept Assurtis, d'autre part ;
dire et juger que la société Assurtis s'est rendue coupable de manquements précontractuels avérés ayant conduit Monsieur Morel et la société ECM à entrer dans les liens de la franchise avec Assurtis sur la base d'un consentement vicié ;
En conséquence,
condamner la société Assurtis à payer à la société ECM, représentée par la Selarl AJ Partenaires, prise en la personne de Maître Picard, ès qualités de Mandataire ad hoc, la somme 100 000 euros à titre de dommages et intérêts au titre de la perte de chance de mieux investir ses fonds, de développer sa clientèle et de parvenir aux objectifs fixés ;
condamner la société Assurtis à payer à Monsieur Christian Morel la somme de 75 000 euros à titre de dommages et intérêts au titre de la perte de chance de mieux investir es fonds et de percevoir une juste rémunération de ses efforts ;
dire que les condamnations pécuniaires mises à la charge de la société Assurtis porteront intérêts au taux légal à compter du jour de l'assignation, valant mise en demeure, avec capitalisation des intérêts échus par application de l'article 1154 du Code civil ;
débouter la société Assurtis de toutes ses demandes, fins, moyens et conclusions ;
condamner la société Assurtis au paiement d'une somme de 12.000 euros à Monsieur Morel sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
condamner la société Assurtis aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître François Teytaud, dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Vu les dernières conclusions signifiées le 14 juin 2017 par la société Assurtis par lesquelles il est demandé à la cour de :
Vu les articles 1109 et suivants du Code civil (dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016),
Vu les articles 1382 et suivants du Code civil (devenu l'article 1240 du même code),
Vu les articles L. 330-3 et R. 330-1 du Code de commerce,
Vu l'article R. 624-2 du Code de commerce,
Vu les articles L. 622-22 et L. 641-3 du Code de commerce,
Vu la jurisprudence,
Vu les pièces communiquées par la société Assurtis,
Vu l'abandon par le franchisé de sa demande en nullité de contrat de franchise,
Vu le jugement du Tribunal de commerce de Paris du 17 décembre 2010 (RG 2010008594),
Vu l'arrêt de la cour d'appel du 19 février 2014 (RG : 10/24823),
Vu l'arrêt de la Cour de cassation du 5 janvier 2016 (pourvoi n° 14-15.700),
constater que l'arrêt de la Cour d'appel du 19 février 2014 a autorité de chose jugée en ce qu'elle a :
prononcé la résiliation du contrat de franchise aux torts de la société ECM ;
condamné la société ECM à payer à la société Assurtis la somme de 9 489,44 euros au titre des redevances impayées et dommages et intérêts pour résiliation anticipée ;
infirmer le jugement du Tribunal de commerce de Paris du 17 décembre 2010 dans toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau,
fixer la créance de la société Assurtis au passif de la société ECM à hauteur de 92 873,52 euros ;
constater que la société Assurtis n'a pas commis aucun agissement constitutif de dol ;
dire et juger que la société Assurtis n'a, en toute hypothèse, commis aucune faute dans ses obligations précontractuelles qui serait de nature à avoir vicié le consentement de la société ECM et de Monsieur Morel, et notamment dire que :
que ces derniers ont été informés par la société Assurtis, avant la signature du contrat, de l'absence d'expérimentation préalable du concept ;
que ni l'expérimentation préalable du concept, ni l'étude de marché ne sont des éléments obligatoires au regard des textes ;
que la société ECM et Monsieur Christian Morel s'étaient engagés contractuellement à effectuer sous sa propre responsabilité, une étude de marché, et une étude d'implantation dans la zone de recherche ;
que par conséquent, ils ne peuvent prétendre que son consentement aurait été vicié du fait de cette carence qui leur est imputable à eux seuls ;
qu'aucun compte d'exploitation prévisionnel n'a été remis au franchisé par Assurtis, cette exigence n'étant pas requise par les textes ;
qu'en matière de franchise, aucune obligation de rentabilité n'est imposée au franchiseur ;
constater que la Selarl AJ Partenaires, prise en sa qualité de mandataire ad hoc de la société ECM et Monsieur Christian Morel ne peuvent se prévaloir d'une quelconque erreur sur la rentabilité de l'activité entreprise ;
dire et juger la Selarl AJ Partenaires, pris en sa qualité de mandataire ad hoc de la société ECM mal fondée en ses demandes en réparation d'une perte de chance de ne pas contracter, de faire une meilleure utilisation de ses ressources, d'obtenir des gains, de réaliser des objectifs et encore de développer sa clientèle ;
dire et juger Monsieur Christian Morel mal fondé en ses demandes en réparation d'une perte de chance de mieux investir ses fonds et de percevoir une " juste " rémunération ;
dire et juger en toute hypothèse que la preuve d'un préjudice et d'un lien de causalité avec les manquements reprochés n'est pas établie ;
débouter en tout état de cause, la Selarl AJ Partenaires, prise en sa qualité de mandataire ad hoc de la société ECM et Monsieur Christian Morel de l'ensemble de leurs demandes indemnitaires ;
À titre subsidiaire,
prononcer la connexité des créances et consécutivement la compensation des sommes dues par la Selarl AJ Partenaires, prise en sa qualité de mandataire liquidateur de la société ECM et Monsieur Christian Morel au titre des condamnations prononcées à leur encontre par l'arrêt du 19 février 2014 de la Cour d'appel de Paris (RG 10/24823) avec les sommes éventuellement dues par Assurtis au titre de l'arrêt à intervenir ;
En tout état de cause,
condamner solidairement la Selarl AJ Partenaires, prise en sa qualité de mandataire ad hoc de la société ECM et Monsieur Christian Morel à payer à la société Assurtis la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
condamner la Selarl AJ Partenaires, prise en sa qualité de mandataire liquidateur de la société ECM et Monsieur Christian Morel aux dépens de première instance et d'appel dont le recouvrement sera poursuivi par Maître Frédéric Lallement, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
LA COUR renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, à la décision déférée, et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile.
Sur ce, LA COUR,
Considérant qu'il y a lieu de prendre acte de la désignation de la Selarl AJ Partenaires, prise en la personne de Maître Picard, ès qualité de mandataire ad hoc de la société ECM, radiée d'office suite à la clôture pour insuffisance d'actif du 17 avril 2015 ;
Considérant qu'aux termes de l'article 624 du Code de procédure civile, la portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce ; elle s'étend également à l'ensemble des dispositions du jugement cassé ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire ;
Qu'aux termes de l'article 625 du même code, sur les points qu'elle atteint, " la cassation replace les parties dans l'état où elles se trouvaient avant le jugement cassé " ;
Considérant qu'en l'espèce, en limitant expressément la cassation à la seule demande de dommages-intérêts formée par le franchisé au titre des manquements précontractuels du franchiseur, seule est remise en débat ladite demande de dommages et intérêts, sur le fondement des articles L. 330-3 et R. 330-1 du Code de commerce, les autres points jugés par la cour d'appel, à l'exception de l'article 700 et des dépens, étant définitivement tranchés ;
Que seule reste dans le débat l'appréciation faite par la cour du non-respect de l'obligation précontractuelle de renseignement incombant au franchiseur au regard notamment de la présentation du marché local et ses perspectives de développement, la cour n'ayant pas précisé en quoi l'expérience du franchisé, acquise dans le seul secteur de l'assurance, était suffisante pour lui permettre d'apprécier l'état du marché local d'un concept novateur alliant crédit et assurance ;
Que ne sont plus dans le débat les demandes fondées sur le dol ou les vices du consentement allégués et écartés par la cour, ni les manquements contractuels relatifs à l'exécution du contrat, ni la validité du concept Assurtis au regard des règles de la franchise, seuls les manquements à l'obligation précontractuelle d'information prévue aux articles L. 330-3 et R. 330-1 du Code de commerce, - selon laquelle il appartient au franchiseur de fournir, préalablement à la signature de tout contrat de franchise un document donnant des informations sincères qui permettent au franchisé de s'engager en connaissance de cause -, restant soumis à l'appréciation de la cour de renvoi ;
Que le champ délibérément restreint de la saisine de la cour de renvoi est rappelé expressément par la Cour de cassation, seule l'appréciation au cas par cas de la connaissance qu'a pu avoir chaque franchisé de l'étendue de son engagement restant à définir en application des articles susvisés ;
Qu'aux termes desdits articles, les informations précontractuelles qui font partie de l'obligation de renseignement du franchiseur portent notamment sur l'état et les perspectives de développement du marché concerné, outre l'ancienneté et l'expérience de l'entreprise, l'importance du réseau d'exploitants, la durée, les conditions de renouvellement, de résiliation et de cession du contrat ainsi que le champ des exclusivités ;
Qu'il est constant que ces dispositions ne mettent pas à la charge du franchiseur de fournir un " compte d'exploitation prévisionnel ", ni une " étude du marché local ", mais seulement de mettre le franchisé en mesure de s'engager " en connaissance de cause ", ce qui implique pour le franchiseur de tenir compte du degré d'expérience et de connaissance dont dispose déjà le franchisé, afin de pouvoir apprécier les informations qu'il doit lui donner pour remplir son obligation précontractuelle d'information ;
Qu'en outre, il y a lieu de tenir compte du caractère novateur ou non de la franchise mise en place ;
Qu'enfin, nonobstant le caractère d'ordre public des dispositions susrappelées, le franchisé est un commerçant indépendant et responsable de sa gestion, bénéficiant certes d'un encadrement légal protecteur, mais libre d'exercer son choix d'adhérer ou non à un réseau de franchise ;
Considérant qu'en l'espèce, il résulte des documents d'information précontractuelle remis à Monsieur Morel le 20 mars 2007 qu'il a bien été destinataire des documents d'information préalable requis par la loi, qu'il était rappelé la nature du contrat de franchise qui associe une entreprise propriétaire d'une enseigne (le Franchiseur) à plusieurs commerçants indépendants (les Franchisés, qualité revendiquée par Monsieur Morel, et que seuls le contenu desdits documents et le niveau de connaissance qu'a pu en avoir Monsieur Morel étaient contestés ;
Que les pièces communes versées aux débats par Assurtis démontrent que les franchisés du réseau Assurtis étaient des professionnels, triés sur la base de leur expérience acquise soit dans le domaine de l'assurance, soit dans le domaine du crédit, cette exigence faisant partie des pré-requis pour valider la candidature des courtiers souhaitant devenir des franchisés Assurtis ;
Qu'à ce titre, certains candidats ont été recalés lors de la constitution du réseau ;
Que Monsieur Morel, qui a fourni son curriculum vitae mentionnant sa grande expérience dans le domaine de l'Assurance dans l'Ain (01) où il a travaillé de 1990 à 2007 comme Agent Général AVIVA, ainsi que ses compétences dans le domaine du crédit, ayant été employé au Crédit Agricole de l'Ain de 1977 à 1988, a été retenu au sein du réseau des franchisés en cours de constitution ;
Qu'il s'est vu remettre l'étude de zone couvrant le secteur envisagé de Bourg en Bresse ;
Qu'enfin, il s'est avéré que Monsieur Morel, gérant d'EMAF puis d'ECM, s'est fait en réalité remplacer par son épouse Madame Morel à l'agence de Bourg en Bresse, que c'est elle qui était uniquement présente lors des fiches de visite et qui s'est vu proposer des formations (voir fiches de visite - pièces n°180 à182) ;
Considérant qu'il n'est pas contesté que ce réseau de franchise était totalement novateur et constituait une expérience originale, ce que le franchiseur a clairement exposé dans la documentation d'information précontractuelle ;
Qu'il n'a pas été occulté que ce projet ne pouvait dès lors se fonder sur des bilans ou des comptes de résultats antérieurs, ni sur un budget prévisionnel, le réseau Assurtis étant en cours de constitution, ce qui était clairement énoncé dans tous les documents d'information ;
Que son originalité provenant du mariage inédit de l'assurance et du crédit ne permettait en effet pas d'établir des prévisions certaines, ni de recruter des candidats disposant déjà de cette double expérience, au demeurant inexistante, ce qui était clairement indiqué dans les documents d'information précontractuels distribués et qui a justifié que les professionnels recrutés provenaient soit du secteur des assurances, soit du secteur du crédit, mais chacun ayant déjà acquis une bonne connaissance locale des secteurs concernés, et chacun étant informé de l'offre de formation dont il allait pouvoir bénéficier dans le domaine du crédit (la plupart des agents recrutés provenant du secteur de l'assurance) ;
Qu'au titre de la communication faite par Assurtis sur son concept (pièces communes communiquées par Assurtis - cote 2), notamment dans un document intitulé " April Développement et Mediatis lancent le premier réseau de franchise en assurances et crédits " figuraient les offres de formation en crédit proposées par Assurtis au bénéfice des candidats déjà spécialisés en assurance : " l'offre Assurtis : une large gamme de produits en assurance : assurance auto quel que soit le profil de clientèle, assurance habitation, assurance santé, assurance moto... et en crédit : rejoindre Assurtis c'est bénéficier d'une formation permettant d'obtenir la carte de démarchage crédit pour distribuer crédits revolving, crédits amortissables, regroupement de créances " ;
Qu'ainsi, cette offre de formation dans le crédit impliquait nécessairement pour le candidat à l'adhésion au réseau de franchise qu'une connaissance de la matière serait requise pour exploiter, de sorte qu'il ne pouvait ignorer que, soit il devait déjà s'y connaître, soit il devra se former ;
Qu'enfin, il n'est pas contesté que la documentation s'adressait à des professionnels expérimentés, soit de l'assurance, soit du crédit (Monsieur Morel ayant les deux) réputés dès lors être suffisamment avisés pour comprendre les termes de ladite documentation ;
Considérant que chacun des franchisés a été recruté sur un secteur géographique qu'il maîtrisait ou qu'il envisageait de développer sur la base de ses propres connaissances, au regard de son expérience plus ou moins longue mais certaine, et que chacun des franchisés s'était engagé à réaliser une étude de marché et une étude d'implantation préalable, ce qu'ils n'ont pas faits, une trame vierge contenant déjà les formules de calcul et des explications précises sur l'élaboration d'un budget prévisionnel leur ayant été fournis dans la documentation précontractuelle d'information ;
Qu'il est établi par les articles de presse et documents publicitaires versés aux débats que ce réseau a bien fonctionné pendant les trois premières années, affichant une belle progression et un bon maillage territorial, et que le réseau a compté jusqu'à 66 agences sur tout le territoire français ;
Qu'en l'espèce, ainsi que cela résulte du CV qu'il avait fourni, Monsieur Morel a travaillé dans le domaine du Crédit de 1977 à 1988 puis dans le domaine de l'assurance depuis 1988, qu'il a couvert la région de l'Ain (01) justifiant sa connaissance du marché local de l'agence Assurtis qu'il a ouverte à Bourg en Bresse (01) ;
Que Monsieur Morel n'a pas réalisé l'étude de marché et l'étude d'implantation auxquelles il s'était engagé, mais qu'il a attendu six mois avant de signer le contrat de franchise, ce qui lui a permis d'effectuer ses propres analyses, ainsi que son propre budget prévisionnel sur la base des trames fournies, sans pour autant en référer à Assurtis, qui n'en a pas connu les résultats ;
Qu'il est démontré que Monsieur Morel a été informé des aléas liés au caractère novateur du réseau Assurtis par la documentation remise ;
Qu'en effet, les documents remis à ce titre étaient tout à fait explicites et ne permettaient pas à Monsieur Morel de se méprendre sur l'absence de résultats chiffrés, ni sur l'absence d'exploitation préalable du concept ;
Que la société Assurtis n'avait assuré aucune garantie de rentabilité dont il appartenait à chaque franchisé d'apprécier, en toute autonomie et au regard de sa propre expérience, la valeur économique du projet ;
Qu'au vu des éléments susrappelés et de l'engagement de formation proposé par Assurtis dans le domaine du crédit dont il pouvait bénéficier, et qui a été proposé à son épouse à qui il avait confié l'agence de Bourg en Bresse, c'est dès lors en toute connaissance de cause qu'il s'est engagé ;
Qu'en conséquence, et en l'absence de preuve de tout manquement aux obligations précontractuelles susrappelées, Monsieur Morel doit être débouté de ses demandes de dommages et intérêts à ce titre ;
Qu'il conservera la charge des dépens et de ses frais irrépétibles et devra indemniser Assurtis à ce titre ;
Que la décision des premiers juges sera dès lors infirmée sur les points remis en débat, l'arrêt de la cour d'appel du 19 février 2014 étant définitif sur les autres points ;
Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, sur renvoi après cassation, sur la demande dommages-intérêts au titre de manquements précontractuels, sur l'article 700 du Code de procédure civile et sur les dépens, donne acte de la désignation de la Selarl AJ Partenaires, prise en la personne de Maître Picard, ès qualité de Mandataire ad hoc de la société ECM, radiée d'office suite à la clôture pour insuffisance d'actif du 17 avril 2015, infirme la décision entreprise sur les chefs discutés, Statuant à nouveau, déboute Monsieur Christian Morel et la Selarl AJ Partenaires, prise en la personne de Maître Picard, ès qualité de Mandataire ad hoc de la société ECM de leur demande de dommages-intérêts, condamne Monsieur Christian Morel et la Selarl AJ Partenaires, prise en la personne de Maître Picard, ès qualité de Mandataire ad hoc de la société ECM à payer à la société Assurtis la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, condamne Monsieur Christian Morel et la Selarl AJ Partenaires, prise en la personne de Maître Picard, ès qualité de Mandataire ad hoc de la société ECM aux dépens dont distraction au profit de Maître Lallement, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.