CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 29 novembre 2017, n° 15-01080
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Build Quality (SARL)
Défendeur :
Forankra AB (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Luc
Conseillers :
Mme Mouthon Vidilles, Comte
Avocats :
Mes Vignes, Peyratout, Vidal, Teytaud, Goldberg, Younan
Faits et procédure
La société Build Quality est spécialisée dans le commerce de gros de fournitures et équipements industriels.
La société Forankra ABT AB, ci-après la société Forankra, de droit suédois, développe et fabrique des équipements d'arrimage et de levage de cargaison.
Le 8 mars 2007, les deux sociétés, après avoir entretenu des relations commerciales depuis l'année 2004, ont conclu un accord à durée indéterminée relatif à l'approvisionnement en produits manufacturés par le groupe chinois Top Sun.
Par courrier du 19 juin 2012, la société Forankra a résilié le contrat d'approvisionnement à effet au 30 septembre 2012.
Contestant cette résiliation, la société Build Quality a assigné la société Forankra devant le Tribunal de commerce de Paris par acte du 18 juillet 2013.
Par jugement du 1er décembre 2014, le Tribunal de commerce de Paris a :
- condamné la société Forankra ABT AB à payer à la société Build Quality la somme de 68 529 euros au titre de l'insuffisance de préavis, majorée des intérêts au taux légal à compter du 30 septembre 2012,
- condamné la société Forankra ABT AB à payer à la société Build Quality la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire sans constitution de garantie,
- dit les parties mal fondées pour leurs demandes plus amples ou autres et les en a déboutées,
- condamné la société Forankra ABT AB aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 82,44 euros dont 13,52 euros de TVA.
La société Build Quality a relevé appel de ce jugement par déclaration remise au greffe le 14 janvier 2015.
La procédure devant la cour a été clôturée le 10 octobre 2017.
LA COUR
Vu les conclusions du 8 octobre 2017 par lesquelles la société Build Quality, appelante, invite lacour, au visa des articles L. 442-6, I, 5° du Code de commerce, 1240 et 1382 ancien du Code civil, à :
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit et jugé que la société Forankra ABT AB s'était rendue l'auteur d'une rupture brutale de ses relations commerciales établies avec elle et rejeté les demandes reconventionnelles de la société Forankra ABT AB,
- infirmer le jugement pour le surplus,
en conséquence,
- condamner la société Forankra ABT AB à lui payer la somme de 191 353,53 au titre des bénéfices manqués compte tenu de l'insuffisance du préavis notifié avec intérêts au taux légal à compter du 30 septembre 2012,
- condamner la société Forankra ABT AB à lui payer la somme de 150 000 pour rupture abusive et déloyale des relations commerciales établies,
- dire non fondé l'appel incident de la société Forankra ABT AB,
- débouter la société Forankra ABT AB de toutes ses demandes,
- condamner la société Forankra ABT AB à lui payer la somme de 8 000 sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens ;
Elle fait valoir que :
- les relations commerciales entre les parties ont débuté dès l'année 2004,
- ces relations ont ensuite été formalisées par un contrat du 8 mars 2007,
- le courant d'affaires entre les deux sociétés était stable et constant,
- le chiffre d'affaires généré par ses relations commerciales avec la société Forankra représentait une part importante de son chiffre d'affaires global, allant jusqu'à 70% en 2011,
- elle était en état de dépendance économique vis-à-vis de la société intimée,
- elle ne pouvait proposer les produits vendus à la société Forankra à d'autres de ses clients, compte tenu de leur spécificité,
- le préavis de 3 mois qui lui a été accordé n'a pas été effectif puisqu'il n'a duré, en réalité, qu'un seul mois,
- elle aurait dû bénéficier d'un préavis de 18 mois,
- c'est de mauvaise foi que l'intimée affirme qu'elle aurait appris que la société Build Quality ne bénéficiait d'aucun accord de distribution exclusive avec la société Top Sun,
- l'intimée ne lui a jamais fait part du prétendu manque de compétitivité des prix qu'elle pratique,
- elle conteste avoir commis des actes de tromperie à l'égard de la société Forankra ;
Vu les conclusions du 2 octobre 2017 par lesquelles la société Forankra ABT AB, intimée ayant formé appel incident, demande à la cour, au visa des articles L. 442-6 I 5° du Code de commerce, 1134 et 1382 du Code civil, de :
- confirmer le jugement du Tribunal de commerce de Paris entrepris en ce qu'il a retenu :
* l'existence de relations commerciales entre elle et la société Build Quality entre 2004 et 2012,
* que la rupture n'a pas été la conséquence d'une défaillance quelconque de la société Build Quality,
* que la rupture a été notifiée avec un préavis de trois mois : juillet, août et septembre,
* que la société Build Quality a toujours reçu de manière significative des commandes pendant ces trois mois d'été (30 % des commandes de l'année en 2010 et 36 % en 2011),
* que le préavis accordé était donc de trois mois effectifs, non impacté par les vacances scolaires estivales,
* que ni l'exclusivité imposée à la société Build Quality, sur le territoire suédois, pour une société française, ni son importance sur le marché suédois ou européen, ne s'opposait à ce que la société Build Quality puisse vendre des produits d'importation à d'autres clients,
* que la société Build Quality ne rapporte pas la preuve que la responsabilité de son état de dépendance lui incombait,
* qu'elle avait tout loisir de s'approvisionner directement auprès d'autres concurrents chinois,
- infirmer le jugement entrepris sur les autres points,
à titre principal :
* constater que la résiliation du contrat d'approvisionnement entre les parties par elle est intervenue dans des conditions légitimes et loyales, et que la société Build Quality s'est vue accorder un préavis de rupture suffisant par elle compte tenu des faits de l'espèce,
* constater que la société Build Quality n'était plus en mesure de lui proposer les meilleurs prix du marché pour les équipements objet du contrat d'approvisionnement, ce en violation de ses engagements contractuels,
* constater que la société Build Quality s'est sciemment abstenue de l'informer qu'elle n'avait jamais conclu de contrat de distribution avec la société Top Sun en Europe et qu'elle a donc été victime d'une tromperie de la part de la société Build Quality,
en conséquence,
* dire qu'au vu de la tromperie susvisée et de la défaillance contractuelle de la société Build Quality, elle aurait été fondée à prononcer la résiliation immédiate du contrat d'approvisionnement,
* dire que la société Build Quality n'est pas fondée à se prévaloir d'une rupture brutale des relations commerciales établies, non caractérisée au cas d'espèce,
* dire que la société Build Quality ne rapporte pas la preuve d'un quelconque comportement déloyal de sa part à son encontre ni de circonstances vexatoires ayant accompagné la résiliation,
à titre subsidiaire,
* constater que la société Build Quality ne justifie aucunement ses réclamations financières tant au titre de sa prétendue perte de marge qu'au titre de sa demande de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de la rupture déloyale alléguée, et ce en violation des articles 9, 15 et 132 du Code de procédure civile,
* dire que la société Build Quality ne rapporte pas la preuve d'un quelconque comportement déloyal de sa part à son encontre ou de circonstances vexatoires ayant accompagné la résiliation,
à titre très subsidiaire,
* constater le caractère démesuré et injustifié des réclamations financières formulées par la société Build Quality au titre de sa prétendue perte de marge résultant de la rupture déloyale alléguée,
* constater que la société Build Quality s'est volontairement placée en situation de dépendance économique vis à-vis d'elle en choisissant de ne pas développer sa clientèle,
en conséquence,
* dire que la société Build Quality ne saurait se prévaloir d'un délai de préavis supérieur à 6 mois, correspondant à préjudice ne pouvant, en tout état de cause, excéder un montant de 27 526,43 euros,
en tout état de cause,
* constater le préjudice subi par elle du fait de la tromperie dont la société Build Quality s'est rendue coupable et des défaillances contractuelles de la société Build Quality,
en conséquence,
* rejeter l'ensemble des demandes, fins et conclusions de la société Build Quality,
* condamner la société Build Quality à lui verser la somme de 30 000 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice subi,
* condamner la société Build Quality à lui payer la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
* condamner la société Build Quality aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction pour ceux le concernant au profit de Me Teytaud, Avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile ;
Elle explique que :
- elle a, de bonne foi, résilié le contrat d'approvisionnement de la société Build Quality moyennant un préavis de 3 mois et demi,
- la demande est disproportionnée,
- la société Build Quality s'est volontairement mise en état de dépendance économique à son égard,
- il était loisible à la société Build Quality de diversifier sa clientèle, tant par la commercialisation d'autres produits de la marque Top Sun, que par le démarchage d'autres clients,
- le contexte justifiait une telle résiliation,
- le préavis était suffisant,
- elle a été trompée par l'appelante sur sa qualité de représentant de la société Top Sun, ce qui lui a causé un préjudice financier,
- les prix pratiqués par la société appelante n'étaient pas compétitifs,
- elle a été victime d'une tromperie de la part de la société Build Quality qui s'est sciemment abstenue de l'informer qu'elle ne représentait plus la société Top Sun en Europe, en violation du principe de bonne foi et de loyauté contractuelle.
Sur ce
LA COUR se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens échangés et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel.
En application de l'article 954 alinéa 2 du Code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions.
Sur la rupture brutale des relations commerciales établies entre les parties
Les parties s'accordent pour considérer que les relations commerciales établies ont débuté entre elles à compter de l'année 2004 et que par courrier du 19 juin 2012 la société Forankra ABT AB a signifié à la société Build Quality la fin de leurs relations commerciales au 30 septembre 2012.
Elles s'opposent sur les fautes reprochées par la société Forankra ABT AB à la société Build Quality, qui auraient pu justifier la rupture immédiate des relations commerciales, mais aussi sur la durée du préavis dont aurait dû bénéficier la société Build Quality suite à la décision de la société Forankra ABT AB de cesser ses commandes auprès d'elle, passé un délai de préavis de 3 mois, par courrier du 19 juin 2012. L'état de dépendance économique de la société Build Quality à l'égard de la société Forankra ABT AB est aussi débattu. Les parties sont également en désaccord sur l'effectivité du préavis de 3 mois accordé par la société Forankra ABT AB et sur le montant du préjudice subi par la société Build Quality.
Aux termes de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce :
" Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers (...) de rompre unilatéralement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels.
Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure ".
La rupture des relations commerciales établies peut intervenir à effet immédiat à la condition qu'elle soit justifiée par des fautes suffisamment graves imputées au partenaire commercial.
Sur la brutalité de la rupture
Il ressort de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce que la brutalité de la rupture résulte de l'absence de préavis écrit au regard des relations commerciales antérieures. L'évaluation de la durée du préavis à accorder est fonction de toutes les circonstances de nature à influer son appréciation au moment de la notification de la rupture, notamment de l'ancienneté des relations, du volume d'affaires réalisé, du secteur concerné, de l'état de dépendance économique de la victime, des dépenses non récupérables engagées par elle et du temps nécessaire pour retrouver un partenaire.
Le contrat du 8 mars 2007 liant les parties dispose, dans la traduction libre non contestée par les parties, que la société Build Quality " fournira toute information et ne répondra à aucune demande de devis ou ne vendra aucun élément/produit similaire à ceux de Forankra, dans la zone de marché de Forankra et fera toujours bénéficier Forankra des meilleurs prix et introduira tous les petits clients à Forankra afin de permettre l'exploration des marchés de Forankra. En contrepartie, Forankra nommera Build Quality en tant que fournisseur pour l'ensemble de ses achats en ce qui concerne ses besoins en produits fabriqués par le groupe Zhejeiang Top Sun (...). Forankra ne pourra procéder à l'achat de produits du groupe Zhejeiang Top Sun (...) qu'auprès de ou par l'intermédiaire de Build Quality ".
La société Forankra ABT AB reproche à la société Build Quality d'avoir écrit des courriers menaçants pendant la durée du contrat et une fois le courrier de notification de la rupture et de préavis envoyé, mais aussi de lui avoir caché qu'elle n'avait pas la qualité de représentant des produits Top Sun en Europe.
Si dans le contrat il est spécifié que la société Build Quality fera bénéficier la société Forankra ABT AB des meilleurs prix, il n'est pas précisé que la société Build Quality revêt la qualité de représentant du groupe Zhejeiang Top Sun en Europe ni qu'à ce titre elle est en mesure de proposer des prix inférieurs aux autres fournisseurs. Elle s'engage seulement dans le contrat à proposer à la société Forankra ABT AB les meilleurs prix, ce qui n'implique pas qu'il s'agit des meilleurs prix du marché.
Les reproches de la société Forankra ABT AB à l'égard de la société Build Quality sur ses tarifs ne caractérisent pas plus la faute de la société Build Quality, l'engagement étant général sur ce point.
Les échanges de courriels des mois de février 2010 et décembre 2011, dont la traduction libre n'est pas contestée, ne portent pas sur des menaces, qui ne sont d'ailleurs pas explicitées par la société Forankra ABT AB.
En conséquence, la société Forankra ABT AB ne démontre pas que la société Build Quality aurait commis des fautes suffisamment graves justifiant la rupture immédiate des relations commerciales établies sans préavis.
Dans ces conditions, il convient de déterminer de quelle durée de préavis aurait dû bénéficier la société Build Quality pour réorganiser son activité.
Il est de principe que l'évaluation de la durée du préavis à accorder est fonction de toutes les circonstances de nature à influer son appréciation au moment de la notification de la rupture, notamment de l'ancienneté des relations, du volume d'affaires réalisé avec l'auteur de la rupture, du secteur concerné, de l'état de dépendance économique de la victime, des dépenses non récupérables dédiées à la relation et du temps nécessaire pour retrouver un partenaire sur le marché de rang équivalent.
L'état de dépendance économique se définit comme l'impossibilité pour une entreprise de disposer d'une solution techniquement et économiquement équivalente aux relations contractuelles qu'elle a nouées avec une autre entreprise.
Il est constant que les relations contractuelles établies entre les parties ont duré plus de 8 années. Les chiffres comptables communiqués par la société Build Quality, et attestés par son expert-comptable, démontrent que le pourcentage de chiffre d'affaires réalisé par la société Build Quality avec la société Forankra est de 51,25 % en 2009, 52 % en 2010, 70 % en 2011 et 43 % en 2012.
Or, ces chiffres établissent que les clauses contractuelles liant les parties n'ont pas empêché la société Build Quality d'avoir d'autres clients correspondant à la moitié de son chiffre d'affaires. En outre, la société Build Quality ne justifie pas de quels débouchés et partenaires elle aurait été privée par les dispositions contractuelles précitées. Elle ne démontre pas non plus en quoi le secteur d'activité concerné l'aurait empêchée de disposer d'une solution techniquement et économiquement équivalente aux relations contractuelles qu'elle a nouées avec la société Forankra ABT AB. Il n'y a donc pas lieu de considérer que la société Build Quality était en état de dépendance économique à l'égard de la société Forankra ABT AB.
Dès lors, au regard des pièces du dossier, de la durée des relations commerciales établies, du secteur d'activité, il y a lieu de fixer la durée du préavis dont aurait dû bénéficier la société Build Quality pour se réorganiser à 6 mois.
En conséquence, la rupture des relations commerciales établies par la société Forankra avec la société Build Quality a été brutale, un préavis insuffisant pour réorganiser son activité lui ayant été accordé.
Le jugement doit donc être confirmé sur ce point sauf en ce qu'il a retenu une durée de préavis de 9 mois.
Sur le préjudice lié à la brutalité de la rupture
La société Build Quality soutient que les 3 mois de préavis que lui a accordés la société Forankra n'ont pas été effectifs, ce que conteste cette dernière. Par ailleurs, la société Build Quality sollicite la réparation de son préjudice au regard de la perte de sa marge brute, alors que la société Forankra soutient que l'appelante ne démontre pas son taux de marge, que le taux de 30 % est bien supérieur aux usages du secteur dont le taux de marge s'élève en général entre 2 et 5 %.
Il est constant que le préjudice résultant du caractère brutal de la rupture est constitué par la perte de la marge dont la victime pouvait escompter bénéficier pendant la durée du préavis qui aurait dû lui être accordé. La référence à retenir est la marge sur coûts variables, définie comme la différence entre le chiffre d'affaires dont la victime a été privée sous déduction des charges qui n'ont pas été supportées du fait de la baisse d'activité résultant de la rupture.
Il ressort des éléments du dossier que la société Forankra a commandé entre le 2 juillet et le 24 septembre 2012 pour 30 232,83 euros d'équipements à la société Build Quality, correspondant à une moyenne mensuelle de 10 077,61 euros, alors qu'au premier semestre 2012 la moyenne mensuelle de commande est de 28 872,19 euros. Il apparaît donc qu'un seul mois de préavis a été effectivement accordé à la société Build Quality.
Ainsi, elle a été privée de 5 mois de préavis.
Il n'est pas contesté que le chiffre d'affaires moyen HT entre 2009 et 2011 réalisé par la société Build Quality avec la société Forankra est de 469 441 euros. La société Build Quality indique qu'elle a réalisé sur la même période avec l'intimé 135 073,08 euros de marge brute, correspondant à la différence entre le prix d'achat et le prix de revente. Toutefois, au regard du secteur d'activité, des coûts économisés pendant le préavis et des éléments communiqués par les parties, il y a lieu de fixer le taux de marge à 15 %. Ainsi, le chiffre d'affaires mensuel moyen est de 39 120 euros et la marge moyenne mensuelle réalisée est de 5 868 euros.
Dès lors, le préjudice subi par la société Build Quality, en raison de la rupture brutale des relations commerciales établies, s'élève à la somme de 29 340 euros (5 868 x 5).
Il y a donc lieu d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Forankra ABT AB à payer à la société Build Quality la somme de 68 529 euros au titre de l'insuffisance de préavis, majorée des intérêts au taux légal à compter du 30 septembre 2012.
La société Forankra ABT AB doit donc être condamnée à payer à la société Build Quality la somme de 29 340 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture brutale des relations commerciales établies, avec intérêts au taux légal à compter du 8 février 2013, date de la mise en demeure.
Sur la rupture abusive et déloyale des relations commerciales établies entre les parties
La société Build Quality reproche à la société Forankra d'avoir manqué de loyauté et d'avoir eu un comportement vexatoire à son égard à l'occasion de la rupture des relations commerciales, en ce que les motifs donnés pour justifier la rupture sont erronés.
La société Forankra relève qu'elle n'a commis aucune faute et que les griefs allégués ne sont pas justifiés, ayant au contraire respecté ses engagements à l'égard de la société Build Quality.
Aux termes de l'ancien article 1134 du Code civil, applicable aux faits de l'espèce, " les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi. "
Il doit être relevé à titre liminaire que la société Forankra était libre de rompre les relations commerciales qu'elle entretenait avec la société Build Quality et de choisir d'autres fournisseurs plus compétitifs notamment, à la condition de ne commettre aucune faute à son égard dans le cadre de la rupture.
En l'espèce, il ressort d'un courriel d'un représentant du groupe Top Sun que la société Forankra n'a pas eu de relations commerciales directes avec elle avant le mois d'août 2013. Si une rencontre a pu avoir lieu entre eux au cours de l'année 2012, une telle rencontre ne peut caractériser une faute. Par ailleurs, les griefs formulés par la société Build Quality, antérieurs à la rupture, n'ont pas à être pris en compte, la réparation de l'abus et de la brutalité de la rupture constituant le fondement de cette demande. Enfin, la société Forankra n'a pas à justifier que les explications données dans la lettre de rupture sont réelles et que les projets invoqués ont été mis en œuvre.
C'est donc vainement que la société Build Quality soutient que la société Forankra a commis des fautes à son égard. La demande de réparation au titre d'une rupture abusive et déloyale des relations commerciales doit donc être rejetée.
Le jugement doit être confirmé sur ce point.
Sur la demande de dommages et intérêts pour tromperie formulée par la société Forankra
La société Forankra reproche à la société Build Quality de lui avoir caché qu'elle n'était pas représentant des produits Top Sun en Europe et de ne pas avoir pratiqué à son égard les meilleurs prix, ce que conteste l'appelante.
Pour les motifs évoqués ci-dessus, la société Forankra n'établit pas de faute de la société Build Quality à ce titre.
La demande doit donc être rejetée et le jugement confirmé sur ce point.
Sur les dépens et l'application de l'article 700 du Code de procédure civile
Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement sur les dépens et l'application qui y a été faite des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
La société Build Quality, partie perdante en cause d'appel, doit être condamnée aux dépens d'appel, ainsi qu'à payer à la société Forankra la somme supplémentaire de 10 000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel.
Le sens du présent arrêt conduit à rejeter la demande par application de l'article 700 du Code de procédure civile formulée par la société Build Quality.
Par ces motifs, LA COUR, Confirme le jugement sauf en ce qu'il a condamné la société Forankra ABT AB à payer à la société Build Quality la somme de 68 529 euros au titre de l'insuffisance de préavis, majorée des intérêts au taux légal à compter du 30 septembre 2012, L'infirmant sur ce point, Statuant à nouveau, Condamne la société Forankra ABT AB à payer à la société Build Quality la somme de 29 340 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture brutale des relations commerciales établies, intérêts au taux légal à compter du 8 février 2013, date de la mise en demeure, Y ajoutant, Condamne la société Build Quality aux dépens d'appel, ainsi qu'à payer à la société Forankra la somme supplémentaire de 10 000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel. Rejette toute autre demande.