Cass. com., 10 janvier 2018, n° 15-25.287
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Demandeur :
Financière H1 (Sté) ; Julien (ès qual.), Mattei
Défendeur :
Ingérence et Connivence (Sté) ; Selarl Malmezat-Prat (ès qual.), Phénix Holding Présidence (Sté), Lyonnaise de Banque (SA), Carga (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Rapporteur :
M. Guérin
Avocats :
Mes Rémy-Corlay, Le Prado
LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Mattei, agissant pour le compte de la société Financière H1 en formation, a souscrit, le 19 septembre 2008, un contrat de franchise auprès de la société Ingérence et Connivence ; que, le 30 octobre 2008, la société Financière H1 a obtenu un prêt de la société Lyonnaise de banque, dont M. Mattei s'est rendu caution ; que la gestion du référencement a été confiée par le franchiseur à la société Carga, filiale de la société Phenix Holding Présidence ; que la société Financière H1 a assigné les sociétés Ingérence et Connivence, Phenix Holding Présidence et Carga en annulation du contrat de franchise pour dol, puis la société Lyonnaise de banque en annulation du contrat de prêt ; que les instances ont été jointes ; que, le 24 septembre 2010, la société Financière H1 a été mise en liquidation judiciaire, M. Julien étant désigné liquidateur ; que, le 28 juillet 2010, les sociétés Ingérence et Connivence, Phenix Holding Présidence et Carga ont été mises en liquidation judiciaire, la Selarl Malmezat-Prat étant désignée liquidateur des trois sociétés ;
Sur le second moyen, pris en sa première branche, adopté par la chambre commerciale à l'audience publique du 10 mai 2017 où étaient présentes : Mme Mouillard, président, Mme Poillot-Peruzzetto, conseiller rapporteur, Mme Riffault-Silk, conseiller doyen, Mme Arnoux, greffier de chambre : - Attendu que M. Julien, ès qualités, et M. Mattei font grief à l'arrêt du rejet de leur demande en nullité du contrat de prêt alors, selon le moyen, que la cassation à intervenir sur le premier moyen emportera cassation également du chef du dispositif critiqué en application de l'article 624 du Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'en l'absence d'indivisibilité entre les contrats de franchise et de prêt, le grief de la première branche est inopérant ;
Sur le même moyen, pris en sa seconde branche : - Attendu que M. Julien, ès qualités, et M. Mattei font grief à l'arrêt du rejet de leur demande en nullité du contrat de prêt alors, selon le moyen, que manque à son obligation d'information et de conseil le banquier qui disposait d'informations sur les perspectives et la viabilité de l'opération de franchise, ignorées du franchisé-emprunteur, sans en informer celui-ci ; que M. Mattei et M. Julien, ès qualités, faisaient valoir, dans leurs conclusions d'appel, que la SA Lyonnaise de banque CIC était parfaitement informée de la situation dégradée du franchiseur, ainsi qu'elle l'avait elle-même reconnu, dans la mesure où le groupe CIC avait pour client, par l'intermédiaire de la société Bordelaise de CIC, la société Ingérence et Connivence dont le dossier avait été transféré au service contentieux ; que la cour d'appel a cependant rejeté toute responsabilité de la SA Lyonnaise de banque CIC à l'égard du franchisé-emprunteur au motif pris de l'absence de dol ou de manœuvre imputable à la banque, sans avoir recherché si la banque ne détenait pas d'informations lui permettant d'alerter le franchisé-emprunteur sur les risques de l'opération ; qu'en statuant ainsi au motif inopérant que le débat sur l'éventuelle responsabilité de la banque était déjà pendant devant une autre juridiction cependant que le seul débat existant parallèlement portait sur le cautionnement de M. Mattei et n'était pas exclusif de la responsabilité de la banque au titre de la nullité du contrat de prêt, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 330-3 et R. 330-1 du Code de commerce, ensemble des articles L. 313-12 du Code monétaire et financier et 1147 du Code civil ;
Mais attendu que le moyen, qui reproche à la cour d'appel de n'avoir pas recherché si la responsabilité de la banque pouvait être engagée, n'est pas de nature à entraîner la cassation du chef de dispositif par lequel elle a rejeté l'action en annulation du contrat de prêt ; que le moyen est inopérant ;
Mais sur le premier moyen, pris en sa seconde branche, adopté par la chambre commerciale à l'audience publique du 10 mai 2017 où étaient présentes : Mme Mouillard, président, Mme Poillot-Peruzzetto, conseiller rapporteur, Mme Riffault-Silk, conseiller doyen, Mme Arnoux, greffier de chambre : - Vu les articles L. 330-3 et R. 330-1 du Code de commerce ; - Attendu que pour confirmer le jugement et rejeter la demande de la société Financière H1 et de M. Julien, ès qualités, en annulation du contrat de franchise, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que M. Mattei a attesté que le document d'information précontractuelle reprenait les éléments définis par l'article L. 330-3 du Code de commerce, qu'il connaissait le concept de la franchise et son fonctionnement et que, dans plusieurs courriels échangés, il en a reconnu les mérites ;
Qu'en se déterminant par de tels motifs, sans vérifier par elle-même que le document d'information précontractuelle comportait les informations conformes aux exigences de l'article L. 330-3 susvisé, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Par ces motifs : casse et annule, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de M. Julien, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Financière H1, et de M. Mattei tendant à l'annulation du contrat de franchise signé le 19 septembre 2008 et en ce qu'il statue sur les dépens et l'article 700 du Code de procédure civile, l'arrêt rendu le 16 juillet 2015, entre les parties, par la Cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel d'Agen.