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Décisions

CA Angers, ch. civ. A, 16 janvier 2018, n° 15-03709

ANGERS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Laval Diffusion Auto (SAS)

Défendeur :

Compagnie Financière et d'Investissement de Laval (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Roehrich

Conseillers :

Mmes Portmann, Le Bras

TI Laval, du 17 nov. 2015

17 novembre 2015

Exposé du litige

Par acte sous-seing-privé du 26 décembre 2012, la SAS Compagnie Financière et d'investissement de Laval, ci-après désignée la SAS CFID, a acheté auprès du concessionnaire Laval Diffusion Auto exerçant sous l'enseigne LDA Citroën ci-après désignée la SAS LDA, une camionnette Citroën neuve de type Jumpy, immatriculée CP-080-FL, au prix de 29 492,19 euros TTC. Ce véhicule a été muni à la demande de l'acquéreur de quatre roues motrices par la société D., équipementier sous-traitant du groupe PSA.

Détectant un mauvais fonctionnement du pont arrière, l'acquéreur a profité de la première révision du véhicule chez le concessionnaire pour demander un diagnostic. Le 19 février 2014, le garagiste a confirmé l'existence d'une avarie mais refusé la prise en charge des réparations d'un montant de 3667,60 euros au titre de la garantie constructeur de 24 mois au motif que l'acquéreur n'avait pas fait procéder à la vidange de cet équipement par un garage agréé entre 1500 et 2500 km, malgré les prescriptions du constructeur, cette carence étant à l'origine du dysfonctionnement des quatre roues motrices.

Face à ce refus, la SAS CFID a finalement réglé la facture le 10 juin 2014 pour mettre fin à l'immobilisation de son véhicule.

Par acte du 12 Août 2014, la SAS CFID, arguant d'un manquement de la SAS LDA à son obligation d'information et de conseil, l'a fait assigner devant le tribunal d'instance de Laval afin d'obtenir au principal le paiement des sommes suivantes :

- 3 667,60 euros au titre des frais de remise en état d'un véhicule,

- 1 500 euros pour trouble de jouissance.

La SAS LDA s'est opposée à la demande et a sollicité à titre reconventionnel la somme de 5 000 euros de dommages et intérêts pour abus de droit sur le fondement de l'ancien article 1382 du Code civil.

Par jugement en date du 17 novembre 2015, le tribunal d'instance de Laval a :

- constaté que la SAS LDA a manqué à son devoir de conseil et d'information,

- condamné en conséquence la SAS LDA à verser à la SAS CFID la somme de 3 667,60 euros au titre des frais de remise en état du véhicule en réparation de son préjudice matériel et la somme de 150 euros en réparation du trouble de jouissance subi,

- mis les dépens à la charge de la SAS LDA,

- condamné la SAS LDA à verser à la SAS CFID une indemnité de 800 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire.

Par déclaration de son conseil au greffe de la cour d'appel d'Angers en date du 21 décembre 2015, la SAS LDA a interjeté appel total de la décision.

Aux termes de ses dernières conclusions du 17 mars 2016, la SAS LDA conclut à l'infirmation du jugement déféré et demande à la cour de :

- dire et juger qu'elle a parfaitement satisfait à son obligation d'information,

- débouter la SAS CFID de ses demandes,

- condamner la SAS CFID aux dépens et à lui payer une somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

La SAS CFID a constitué avocat le 1er février 2016 mais n'a pas conclu.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 5 octobre 2017.

Il sera référé aux dernières écritures de l'appelante pour l'exposé de ses moyens et arguments.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'exécution par la SAS LDA de son obligation d'information et de conseil :

Pour conclure à l'infirmation du jugement et au débouté des demandes de la SAS CFID, l'appelante affirme avoir satisfait à son obligation d'information concernant le véhicule qui a été vendu à l'intimée le 26 février 2014. Elle prétend également qu'il appartenait à cette dernière d'agir contre la société D. pour mettre en jeu la garantie relative aux quatre roues motrices.

Ce dernier moyen sera toutefois dès à présent écarté, la mise en cause éventuelle du fabricant et installateur ne dispensant pas le vendeur professionnel de son devoir de conseil et d'information à l'égard de l'acquéreur.

S'agissant du respect de son obligation d'information, la SAS LDA expose avoir donné à l'acheteur lors de la prise en main du véhicule toutes les informations utiles sur le fonctionnement de la transmission 4x4 de la camionnette, notamment les notices d'utilisation et d'entretien fournies par la société D. qui informent précisément l'utilisateur du véhicule que la garantie des éléments 4X4 est conditionnée à la réalisation d'une vidange entre 1500 et 2500 km.

La SAS LDA fait également grief au jugement de lui avoir reproché, sans base légale, l'absence de mention sur la facture de vente du véhicule des conditions de mise en jeu de la garantie pour les quatre roues motrices.

Enfin, la SAS LDA affirme, en produisant une attestation de son chef d'atelier et des photographies, qu'une étiquette d'avertissement concernant la vidange est toujours apposée sur le pare-brise des véhicules ayant subi une telle adaptation.

Il est constant qu'il appartient au vendeur professionnel de prouver qu'il a satisfait à son devoir de renseignement et de conseil. Lorsque la vente porte sur un bien d'une certaine technicité, le contenu de cette obligation porte non seulement sur les caractéristiques, mais aussi sur les contraintes techniques de la chose vendue.

En l'espèce, Il est acquis aux débats que la garantie spécifique pour les roues motrices imposait une vidange entre 1500 km et 2500 km alors que la garantie constructeur de base du concessionnaire Citroën ne préconisait qu'une révision du véhicule Jumpy au bout d'une année d'utilisation ou 20 000 à 30 000 km.

Il revenait donc au vendeur d'alerter l'acquéreur des contraintes liées à la vidange du pont arrière suite à l'ajout des quatre roues motrices compte tenu des conditions d'engagement de la garantie les concernant, distinctes de celles de la garantie constructeur.

Le fait qu'aucune disposition légale ne lui imposait de préciser sur la facture d'achat les conditions contractuelles des garanties offertes ne le déchargeait pas de son obligation de communiquer à la SAS CFID, sous quelle que forme que ce soit, les informations relatives à la garantie particulière relative aux roues motrices.

Or, il ne résulte pas des pièces versées aux débats par l'appelante que cette information a été donnée à l'acquéreur du véhicule.

En effet, le carnet habituel d'entretien et de garanties de Citroën n'évoque nullement cette garantie spécifique.

En outre, la production de la notice d'utilisation et d'entretien de la société D. ne prouve pas, en l'absence de mention permettant d'identifier le véhicule de la SAS CFID sur la pièce produite, que ce document, distinct du carnet d'entretien Citroën, est bien celui communiqué à l'acquéreur au jour de la vente et non un exemplaire anonyme, l'appelant procédant par affirmation pour démontrer qu'il a nécessairement été transmis au client.

Il en est de même du document intitulé " plan d'entretien expert/jumpy/Scudo ", le premier juge relevant à juste titre qu'au vu de son contenu très technique, celui-ci était à l'évidence destiné au garagiste et non à l'utilisateur du véhicule.

Par ailleurs, il ne peut se déduire du fait que la SAS CFID ait réussi à faire fonctionner le système de transmission 4X4, qu'il a eu nécessairement communication de la notice D. avec les informations sur la vidange obligatoire après un faible kilométrage et sur les conditions spécifiques de garantie, une simple démonstration lors de la prise en main du véhicule de son mode d'utilisation suffisant à pouvoir l'utiliser.

Enfin, la photographie produite par l'appelante montrant en gros plan une étiquette d'information sur le pare-brise d'un véhicule impossible à identifier sur la pièce, ne peut suffire à prouver qu'il s'agit de la camionnette de la SAS CFID, l'attestation du salarié de la SAS LDA, seule autre pièce produite, ne pouvant être retenue pour corroborer cette image, compte tenu du lien de subordination existant entre l'auteur de l'attestation et l'appelante.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que la SAS LDA n'apporte pas la preuve qu'elle a satisfait à son obligation d'information et de conseil à l'égard de la SAS CFID au moment de la vente, concernant les conditions particulières de mise en œuvre de la garantie des quatre roues motrices.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement en toutes ses dispositions et de débouter la SAS LDA de ses demandes.

Sur les autres demandes de la SAS LDA :

Succombant en ses prétentions principales, l'appelante sera déboutée de sa demande sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et sera condamnée aux dépens d'appel.

Par ces motifs, LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement, Confirme le jugement du Tribunal d'instance de Laval en date du 17 novembre 2015 en toutes ses dispositions ; Déboute la SAS Laval Diffusion Auto de ses demandes ; Condamne la SAS Laval Diffusion Auto aux dépens d'appel.