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Décisions

CA Versailles, 12e ch. sect. 2, 16 janvier 2018, n° 16-01300

VERSAILLES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Défendeur :

Ada France (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Meslin

Conseillers :

Mme Guillou, M. Ardisson

Avocats :

Mes Rol, Benoit, Thréard, Dupuis, Bartfeld, Ricard

T. com. Nanterre, du 21 janv. 2016

21 janvier 2016

Vu l'appel déclaré le 19 février 2016 par M. X contre le jugement prononcé le 21 janvier 2016 par le Tribunal de commerce de Nanterre dans l'affaire qui l'oppose à la société anonyme Ada France (société Ada) ;

Vu le jugement entrepris ;

Vu, enregistrées par ordre chronologique, les ultimes écritures notifiées par le réseau privé virtuel des avocats et présentées le :

- 23 novembre 2016 par la société Ada, intimée,

- 24 janvier 2017 par M. X, appelant ;

Vu l'ensemble des actes de procédure ainsi que les éléments et pièces transmises par chacune des parties.

Sur ce,

LA COUR se réfère au jugement entrepris pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions initiales de chaque partie. Il suffit, en synthèse, de rappeler les éléments constants suivants tirés des écritures d'appel.

1. Données analytiques, factuelles et procédurales du litige

M. X qui souhaitait ouvrir une agence de location de véhicules en franchise dans l'Ouest parisien, est en 2011 ainsi entré en contact avec la société Ada se trouvant à la tête des principaux réseaux de location de véhicules low-cost français. Cette société exerce ainsi, en France et à l'étranger, grâce à un réseau de commerçants indépendants bénéficiaires d'un contrat de franchise, une activité de location de véhicules automobiles utilitaires et de tourisme. Son réseau est ouvert à toutes personnes souhaitant exercer une activité de location de véhicules sous enseigne Ada à condition d'une part, d'avoir suivi une formation théorique et pratique spécifique et d'autre part, d'avoir reçu son agrément de franchiseur.

La société Ada lui a remis le 30 août 2011, lors de leur première rencontre et en exécution des articles L. 330-3 et R. 330-1 du Code de commerce, un document d'information pré-contractuelle ou DIP donnant une présentation de, son entreprise, son concept, son réseau ainsi que du marché national de la location de véhicules. Un projet de contrat de franchise de la société Ada était par ailleurs joint à ce document.

La société Maya Location, franchisé exploitant l'agence Ada de Courbevoie, lui ayant alors indiqué qu'il souhaiter vendre ce fonds de commerce pour recentrer ses activités sur l'agence sise à Asnières sur Seine, la société Ada a proposé à M. X de reprendre cette agence et lui a le 10 novembre 2011, adressé à cette fin, une étude du marché local existant sur la zone de Courbevoie ainsi qu'un prévisionnel d'investissement, un plan de financement et encore, un prévisionnel de résultat mensuel. Le 14 novembre 2011, la société Ada a enfin transmis à M. X, le bail commercial signé par la société Maya Location avec la ville de Courbevoie.

Selon lettre du 28 novembre 2011, la société Ada a adressé à M. X une lettre d'intention, énumérant l'ensemble des coûts d'intégration au réseau Ada et d'acquisition de l'agence de Courbevoie. M. X a signé cette lettre d'intention, en y apposant la mention " Lu et approuvé, Bon pour accord " puis le 30 novembre suivant, deux conventions visant à lui permettre de recevoir les formations théoriques et pratiques correspondantes en contrepartie du versement de 9 568 € et 7 176 € toutes taxes comprises. Il joignait à cette occasion deux chèques correspondant à ces montants.

Le 20 janvier 2012, M. X a décidé d'interrompre la formation pratique qu'il avait entamée et a adressé le 13 février suivant à la société Ada, une lettre dans laquelle il faisait part devant l'irréalisme du business plan présenté, de sa volonté de mettre fin au projet de franchise en cours en précisant avoir été trompé. Il demandait en conséquence la restitution des chèques remis en contrepartie des formations prévues ainsi que la réparation de son préjudice. Il a immédiatement fait opposition à ces deux chèques.

La société Ada lui a selon lettre recommandée du 10 mars 2012, opposé une fin de non-recevoir, l'a vainement mis en demeure de régler sous 8 jours 16 736 € en contrepartie de ses formations puis, l'a assigné en référé devant le président Tribunal de grande instance de Nanterre en paiement de ce montant. Le juge des référés saisi a fait droit à cette demande par ordonnance du 24 août 2012. N'ayant formé aucun recours contre cette ordonnance, M. X a réglé cette somme puis a, selon acte d'huissier du 16 juillet 2014, fait assigner la société Ada au fond devant le Tribunal de commerce de Nanterre en contestation de la validité des conventions de formation précitées.

Dans le dernier état de ses écritures, M. X a demandé aux premiers juges de :

- vu les articles 1100, 1116 et 1382 du Code civil,

- dire que la cause de l'engagement de M. X à suivre les formations qui lui ont été fournies par la société Ada réside dans la conclusion d'un contrat de franchise pour exploiter une agence de location de véhicule sous l'enseigne Ada dans le local <adresse>,

- dire que la société Ada a été déloyale et de mauvaise foi lors de la conclusion de la convention de formation théorique et la convention de formation pratique signées entre les parties le 30 novembre 2011,

- dire que le consentement de M. X a été vicié lors de la signature des dites conventions,

- par conséquent,

- dire que lesdites conventions de formation sont nulles et de nul effet,

- condamner la société Ada à rembourser à M. X 17 669,78 € qu'il a été contraint de verser à la société Ada en exécution desdites conventions,

- condamner la société Ada à rembourser à M. X 5 980 € qu'il a dépensé en pure perte pour la négociation et la rédaction du compromis de vente de l'agence de Courbevoie,

- condamner la société Ada à lui verser la somme de 120 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,

- condamner la société Ada à payer à M. X la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens,

- ordonner l'exécution provisoire.

Par jugement contradictoire du 21 janvier 2016, le Tribunal de commerce de Nanterre a tranché le litige selon ce dispositif suivant :

- dit que les conventions de formation entre M. X et la société anonyme Ada sont valables et déboute M. X de sa demande de nullité de ces conventions,

- déboute M. X de sa demande de remboursement de frais,

- déboute M. X de sa demande de dommages-intérêts,

- dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire,

- condamne M. X à payer à la société anonyme Ada la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamne M. X aux entiers dépens.

- liquide les dépens du Greffe à la somme de 82, 44 € dont TVA 1334 €.

Les points essentiels de cette décision sont les suivants :

1) sur la nullité des conventions : - M. X a le 30 novembre 2011, signé en tant que candidat franchisé, deux conventions avec la société Ada, se rapportant à la formation théorique et à la formation pratique ; - selon les termes de la première, la signature du contrat de franchise ne saurait intervenir que dans l'hypothèse où le candidat franchisé a reçu ces deux formations à la satisfaction de la société Ada et selon l'article 2 de cette convention, aucun remboursement au titre des formations ne sera effectué par la société Ada ; - loin d'être un accessoire au contrat de franchise qui avait été envisagé, ces conventions constituent des contrats préalables et autonomes, conditionnant la signature éventuelle du dit contrat de franchise ; - M. X a en janvier 2012, écourté sa présence au stage de formation pratique et décidé de mettre fin au projet de reprise de l'agence de Courbevoie ; - il a, de sa seule initiative, refusé de signer le contrat de franchise convenu avec la société Ada et n'apporte pas la preuve que son consentement à suivre les formations ait été obtenu par des manœuvres frauduleuses de la société Ada ni qu'il pouvait ignorer, en signant les deux conventions, qu'elles ne seraient pas remboursées s'il ne donnait pas suite au contrat de franchise ; - les conventions de formation dont la validité ne saurait ainsi être remise en cause, peuvent donc donner lieu à l'établissement d'une facturation au profit de la société Ada.

2) Sur les frais de négociation engagés par M. X : - le fait pour ce dernier d'avoir engagé ces frais, ne résulte pas d'une attitude fautive de la société Ada dès lors qu'il a en réalité, de son plein gré, pris contact avec elle pour devenir l'un de ses franchisés et a signé une lettre d'intention, pour intégrer son réseau de franchise et acquérir l'agence de Courbevoie; - il a de lui-même, décidé de ne pas rejoindre ce réseau et en a avisé la société Ada selon lettre recommandée du 13 février 2012 ;

3) Sur la demande de dommages-intérêts, M. X n'apporte aucune justification à sa demande, ni dans son principe, ni dans son quantum ; - il ne démontre pas que son adversaire a eu envers lui, un comportement dolosif et reconnaît lui-même que c'est, au vu des documents fournis par la société Ada le 13 janvier 2012, qu'il a finalement décidé de décliner l'offre de reprise de l'agence de Courbevoie et ainsi pu, selon ses propres dires, éviter un désastre financier ; - le fait de ne pas avoir mené à bien le rachat du magasin de Courbevoie fait partie de l'incertitude normale des affaires sans qu'aucune faute soit imputable à la société Ada.

M. X a déclaré appel de cette décision. La clôture de l'instruction, a été ordonnée le 7 février 2017 et l'affaire, a été renvoyée à l'audience du 7 novembre suivant tenue en formation de juge rapporteur pour y être plaidée. A cette date, les débats ont été ouverts et l'affaire a été renvoyée à l'audience de ce jour pour plus ample délibéré.

2. Dispositifs des conclusions des parties

Vu les articles 455 et 954 du Code de procédure civile ;

M. X demande à la cour de :

- vu les articles 1100, 1116 et 1382 du Code civil,

- vu les articles 74 et 565 du Code de procédure civile,

- vu les articles L. 6311-1 et suivants du Code du travail,

- infirmer le jugement du 21 janvier 2016 en totalité,

- et, statuant à nouveau,

- dire et juger les demandes de M. X recevables en appel,

- se déclarer compétente pour statuer sur la demande d'annulation des conventions de formation pour non-respect de la législation en la matière,

- dire et juger que la cause de l'engagement de M. X à suivre les formations qui lui ont été fournies par la société Ada réside dans la conclusion d'un contrat de franchise pour exploiter une agence de location de véhicule sous l'enseigne Ada dans le local <adresse>

- dire et juger que la société Ada a été déloyale et de mauvaise foi lors de la conclusion de la convention de formation théorique et la convention de formation pratique signées entre les parties le 30 novembre 2011,

- dire et juger que le consentement de M. X a été vicié lors de la signature des dites conventions,

- dire et juger qu'Ada n'a pas respecté la législation sur la formation professionnelle continue,

- par conséquent,

- dire et juger que lesdites conventions de formation sont nulles et de nul effet,

- en tout état de cause,

- débouter la société Ada de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

- condamner la société Ada à rembourser à M. X 17 669,78 € qu'il a été contraint de verser à la société Ada en exécution des dites conventions,

- condamner la société Ada à rembourser à M. X la somme de 5 980 € qu'il a dépensée en pure perte pour la négociation et la rédaction du compromis de vente de l'agence de Courbevoie,

- condamner la société Ada à lui verser la somme de 120 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,

- condamner la société Ada à payer à M. X la somme de 6 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, dont distraction pour ceux le concernant au profit de Maître Bertrand Rol, Aarpi-JRF Avocats, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

La société Ada prie la cour de :

- vu l'article 564 du Code de procédure civile,

- vu l'article 1116 du Code civil,

- vu les pièces versées aux débats,

- dire et juger la société Ada recevable et bien fondée en l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- déclarer irrecevable la demande de M. X de voir déclarer les conventions de formation nulles en raison du prétendu non-respect de la législation applicable en matière de formation pour être nouvelle en cause d'appel,

- se déclarer matériellement incompétente au profit du Tribunal de grande instance de Nanterre,

- à titre subsidiaire,

- dire et juger que la société Ada respecte la législation applicable en matière de formation,

- en tout état de cause,

- dire et juger que la société Ada ne s'est nullement rendue coupable de manœuvres dolosives,

- en conséquence,

- confirmer purement et simplement le jugement rendu le 21 janvier 2016 par le Tribunal de commerce de Paris,

- débouter M. X de son appel,

- condamner M. X à payer à la société Ada la somme de 4 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner M. X aux entiers dépens,

- dire que les dépens pourront être directement recouvrés par la Selarl Lexavoue Paris-Versailles, conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.

LA COUR renvoie, à chacune de ces écritures pour une synthèse argumentative de la position de chaque partie dont l'essentiel, sera développé dans le cadre des motifs de cet arrêt.

Cela étant exposé,

1. Il doit être statué, sur la validité de conventions de formation théorique et pratique conclues dans le cadre d'un projet d'ouverture, sous franchise Ada, d'une agence de location de véhicules <adresse>.

Sur la validité des conventions de formation convenues entre les parties

2. M. X explique au soutien de sa demande de réformation, qu'ayant consenti aux conventions litigieuses sur la base d'informations trompeuses et mensongères caractéristiques d'un dol imputable à son adversaire, ces conventions sont nécessairement nulles et partant, la clause excluant tout remboursement en cas d'absence de signature du contrat de franchise, ne peut lui être opposée.

Il précise à cette fin que :

- son adhésion au réseau de franchise Ada, par le biais du rachat de l'agence Ada de Courbevoie, est la seule cause des conventions de formation litigieuses signées le 30 novembre 2011, ainsi qu'il ressort des termes mêmes de la lettre que la société Ada lui a adressée le 28 novembre 2011 ;

- ces conventions faisaient donc bien partie intégrante du processus d'entrée dans la franchise Ada ;

- le fait que la société Ada n'encaisse pas les chèques correspondant à ces formations au moment de celles-ci mais lors de la signature du contrat de franchise en est une preuve supplémentaire ;

- le caractère secret du savoir-faire du franchiseur, rend par définition sa transmission impossible, sans la ratification d'un contrat de franchise à telle enseigne que le candidat à la franchise Ada ayant suivi ces formations est ensuite tenu à une obligation de non-concurrence lui interdisant " d'exercer directement ou indirectement une activité de location de véhicules de courte durée autrement qu'en qualité de franchisé Ada même en tant que commanditaire pendant un an " ainsi qu'à une obligation de non-affiliation lui interdisant " de s'affilier, sous quelque forme que ce soit à toute autre réseau de distribution concurrent du réseau Ada ou de commercialiser sous forme de franchise une activité de location de véhicule de courte durée " ;

- les premiers juges ont donc considéré à tort que ces conventions de formation ne pouvaient s'analyser que comme des conventions autonomes et quoi qu'il ne soit, peu importe que ces conventions soient ou non accessoires au contrat de franchise envisagé dès lors qu'il ne sollicite pas le remboursement des sommes versées en raison de l'absence de signature de celui-ci mais uniquement, en raison du vice de consentement affectant les conventions de formation qu'il a accepté de signer ;

- ces conventions de formation, poursuivent au demeurant la réalisation d'une opération globale, sous la forme de l'ouverture d'une agence franchisée Ada ;

- le consentement vicié sur l'opportunité d'ouvrir une telle agence vicie nécessairement le consentement à la convention de formation et les sommes versées par le signataire doivent ainsi lui être restituées ;

- les manœuvres frauduleuses de son adversaire pour obtenir la signature des conventions de formation sont exactement les mêmes que pour la signature du contrat de franchise puisque, les conventions de formation n'ont pas lieu d'exister, sans la perspective de la signature de celui-ci.

Il ajoute que :

- alors que la rentabilité est au cœur de la franchise, les comptes d'exploitation prévisionnels qui lui ont été présentés se sont avérés être trompeurs et non pas basées sur des informations sincères et vérifiées et exagérément optimistes assorties d'une étude du marché local réalisée par le franchiseur promettant un potentiel de chiffre d'affaires de 592 163 € ;

- le réseau Ada comptant plus de 400 agences, il n'avait aucune raison de douter du sérieux de ces prévisions ;

- son adversaire ne pouvait en l'espèce ignorer les difficultés de l'agence de Courbevoie qu'il était sur le point de racheter, réalité qu'il n'a pu découvrir, que postérieurement à la signature des conventions de formation litigieuses ;

- il est en réalité établi que le très faible chiffre d'affaires de l'agence de Courbevoie n'est pas dû à la défaillance de la société qui devait lui céder cette agence mais à l'impossibilité d'exploiter pleinement le concept Ada dans le local concerné du fait de contraintes en termes de limitation d'activité et de stationnement (location des véhicules utilitaires uniquement à titre accessoire, interdiction de stationner les véhicules quels qu'ils soient sur la voie publique et uniquement 10 places de parking à louer) ;

- la société Ada a tenté de masquer cette réalité le plus longtemps possible, en usant de manœuvres dolosives.

3. La société Ada, dément avoir usé de manœuvres dolosives et relève que M. X a signé sans aucune réserve, après trois mois de réflexion, la lettre d'intention du 28 novembre 2011 ainsi que le 30 novembre suivant, les conventions de formation théorique et pratique qui y étaient associées après avoir reçu toutes les informations nécessaires se rapportant aux conditions d'exploitation de l'agence de Courbevoie.

Elle souligne que :

- les motifs allégués dans la lettre de retrait du 13 février 2012 sont parfaitement fallacieux ;

- les conventions de formation alléguées sont des conventions autonomes dont la signature n'entraînait pas ipso facto, la signature du contrat de franchise, le franchiseur conservant en effet, le droit d'agréer ou non le candidat à la franchise ;

- le suivi des formations Ada est certes une condition essentielle à la signature du contrat de franchise sans être une condition suffisante et X ne rapporte pas la preuve de quelque manœuvre dolosive que ce soit se bornant à soutenir sans le démontrer qu'elle l'aurait poussé à signer les conventions de formation en lui présentant des comptes d'exploitation prévisionnels fantaisistes d'un fonds qu'il aurait pu acquérir et en lui dissimulant les véritables conditions d'exploitation de l'agence concernée ;

- il ressort ainsi des termes mêmes des conventions de formation litigieuses que rien ne leur permet de croire à l'assurance de la signature du contrat d'agence après le suivi des formations, ce qui établit l'autonomie de ces conventions par rapport au contrat d'agence ;

- au demeurant, M. X était assisté d'un avocat tout au long des négociations litigieuses ;

- il a en tout état de cause, toujours connu les conditions d'exploitation de l'agence de Courbevoie à telle enseigne que le bail lui a été transmis dès le 14 novembre 2011 ;

- les prévisionnels qui lui avaient été transmis étaient par ailleurs, parfaitement réalistes d'autant qu'elle a pris soin d'indiquer qu'elle avait été extrêmement prudente sur tous les gros postes de charges ainsi que sur le développement du chiffre d'affaires ;

- si aux termes du prévisionnel dont s'agit, la location de véhicules utilitaires tient une place importante, la question du stationnement ne pouvait pas être un frein au développement de cette activité dès lors qu'il lui a été expliqué que des places de parking étaient disponibles dans l'immeuble où se trouve le local de l'agence concernée ;

- la question des emplacements reste au demeurant un faux problème, les dix places de stationnement disponibles dans le parking voisin à l'agence et prises en location près de la mairie de Courbevoie, permettant de stationner l'ensemble de la flotte de véhicules que l'agence devait gérer (8 à 9 véhicules utilitaires contre 14 à 22 véhicules particuliers.) dès lors que la totalité de la flotte n'est jamais intégralement présente sur le parc de l'agence ;

- M. X pouvait donc voir l'agence de Courbevoie atteindre son seuil de rentabilité avec le nombre de véhicules prévu dans les comptes d'exploitation prévisionnels ;

- il ne rapporte par ailleurs nullement la preuve qu'il aurait découvert fin janvier 2012 que la mairie de Courbevoie s'apprêtait à verbaliser le dernier franchisé au motif que trop de véhicules utilitaires se trouvaient garés sur son parking ;

- les chiffres présentés pour la ville de Courbevoie sont au demeurant parfaitement conformes aux chiffres réalisés par les franchisés de son réseau sur des villes de même taille et de composition équivalente ;

- M. X a donc été parfaitement et loyalement informé des perspectives de développement qu'il s'apprêtait à reprendre dès lors notamment, que selon la lettre d'intention du 28 novembre 2011, elle a pris soin de lui rappeler les coûts d'intégration au réseau Ada ainsi que le prix d'acquisition du fonds de commerce de Courbevoie ;

- la partie adverse a au demeurant elle-même reconnu en signant " Lu et approuvé - bon pour accord " être parfaitement informé des conditions d'exploitation et de cession du fonds de commerce litigieux.

4. Vu les anciens articles 1110 et 1116 du Code civil dans leur rédaction antérieure au 1er octobre 2016 dont il ressort notamment que le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manœuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté avec cette précision que le dol ne se présume pas et doit être prouvé par celui qui s'en prévaut ;

5. S'il est de principe en droit français qu'un contrat est valable dès lors que les parties ont consenti, un simple accord suffisant pour lier les contractants sans qu'il soit nécessaire d'accomplir aucune formalité, un contrat soulevant des enjeux importants comme le contrat litigieux est nécessairement le point d'aboutissement d'une période préparatoire de négociations. L'évolution progressive de la formation d'un contrat relativement complexe comporte ainsi généralement plusieurs phases : l'invitation à entrer en pourparlers ouvre une période d'exploration se prolongeant généralement par celle des pourparlers proprement dits, lesquels permettent aux partenaires, d'élaborer les éléments du contrat sur lesquels l'un d'entre eux après avoir fixé sa volonté, émettra à un moment précis une offre suffisamment ferme et précise pour garantir, en cas d'acceptation par l'autre partie, la formation du contrat ainsi négocié

6. M. X rappelle ainsi dans ses écritures, le déroulement de ses contacts avec la société Ada ayant donné lieu le 28 novembre 2011 à la signature d'une lettre d'intention entre eux, libellée en ces termes : " Nous vous confirmons les termes des différents échanges que vous avez eus avec notre Directeur de Comptes (...) concernant votre intégration au sein du réseau de franchise Ada dans le but d'acquérir notre agence de Courbevoie <adresse> (...)./Nous vous rappelons ci-dessous les coûts d'intégration au réseau d'Ada : - Territoire de Courbevoie = 30 000 € HT; - droit d'accès = 10 000 € HT ; - frais de gestion = 1 500 € HT ; - frais de formation théorique = 8 000 € HT ; - frais de formation pratique = 6 000 € HT ; - informatique Unipro/Lea pour 5 ans = 11 500 € HT, au total 67 000 € HT soit 80 132 € TTC./Ces sommes devront être réglées au plus tard à la signature du contrat de franchise./En contrepartie de la mise à disposition des véhicules, Ada demande un dépôt de garantie (ou une caution bancaire.) dont le montant est calculé par rapport au nombre et la catégorie des véhicules en parc./Pour le cas de l'agence de Courbevoie, le montant s'élève à 20 000 €. Cette somme doit être réglée au plus tard à la signature du contrat de franchise. / Nous vous remercions de bien vouloir contre-signer le double de la présente lettre, en la datant et en y faisant figurer la mention manuscrite " lu et approuvé, bon pour accord ", et nous la retourner ".

7. Ce document effectivement contresigné par M. X ayant été suivi deux jours plus tard, de la signature des conventions de formation théorique et pratique qui y étaient rappelées, s'analyse techniquement dans les circonstances de cette espèce, comme un accord de principe récapitulant les seules conditions financières présidant à la négociation du contrat de franchise en discussion, sous condition d'agrément définitif de la société Ada à l'issue des formations suivies.

8. C'est par conséquent à tort, que les premiers juges ont retenu que les conventions de formation devaient être considérées comme étant des conventions autonomes de cette lettre d'intention et ainsi, du projet de contrat de franchise qui y est annoncé dès lors que ces conventions ont été suivies par M. X dans le but d'obtenir l'agrément nécessaire à une intégration du réseau Ada, par le biais de l'acquisition du fonds de commerce exploité à Courbevoie.

9. La société Ada peine quoi qu'il en soit à démontrer que cette agence pouvait être exploitée sans contrainte réelle pour son activité et pour le stationnement des véhicules composant sa flotte et en avoir loyalement informé son partenaire qui produit notamment aux débats en cote 5 de son dossier, la copie d'un courriel qu'il lui a adressé le 15 novembre 2011 soit 15 jours avant la signature des conventions de formation litigieuses, pour l'interroger non seulement sur les erreurs que comporte le prévisionnel d'activité communiqué mais également, sur les termes du bail du dernier franchisé paraissant limiter la location de véhicules utilitaires dès lors que la réponse apportée se borne aux termes plus ou moins évasifs suivants : " Les clauses du bail indiquent en effet que l'activité utilitaire ne doit être qu'accessoire et que l'activité HB étant l'activité principale. C'est la raison pour laquelle nous avons fait des enseignes aux couleurs HB 2/3-1/3. Je vous précise qu'ils n'ont pas à connaître nos CA. Cependant la mairie est très pointilleuse sur le fait qu'aucun véhicule utilitaire ne doit être garé dans la rue. C'est la raison pour laquelle nous louons des places de parking à côté de l'agence. Il n'y a pas de contrat particulier signé avec la société exploitant les parkings de la mairie. Ce sont des cartes de stationnement " achetées " au mois le mois en fonction des besoins de l'agence. Il n'y a aucun risque que la mairie et en particulier l'exploitant nous refuse l'accès au parking tant que les règles de stationnement seront bien respectées. /Ada a informé la mairie du rachat du fonds de commerce de Maya par une société filiale du groupe Ada. Aucune opposition ne nous a été signifiée ".

10. Alors que les contraintes liées au stationnement des véhicules étaient d'évidence en rapport direct avec le potentiel de chiffre d'affaires de l'agence litigieuse, la réponse apportée à M. X peu précise et totalement insuffisante au regard de la réalité découverte a posteriori par ce candidat qui, contrairement aux allégations de son adversaire, démontre par la pièce communiquée en cote 20, que la mairie de Courbevoie avait mis la société Ada en demeure d'enlever les véhicules ne respectant pas les dimensions autorisées et que, quoi qu'il en soit, le nombre de places autorisées ne pouvait être supérieur à 10 à telle enseigne que " la ville a résilié un certain nombre de contrats passés avec des entreprises ".

11. La présentation grossière et approximative des conditions d'exploitation de l'agence susceptible d'être exploitée sous franchise, pourtant essentielles à sa rentabilité, à laquelle la société Ada apparaît s'être nécessairement et délibérément livrée pour obtenir la signature des conventions litigieuses puisqu'elle ne dément qu'elle avait par ailleurs connaissance du fait que son interlocuteur était au même moment en cours de pourparlers avec un concurrent (société Ucar), était donc à l'évidence, contraire à la réalité et pouvait, en raison de la puissance de marché de l'enseigne, passer pour crédible aux yeux de M. X. Cette présentation caractérise ainsi une manœuvre ayant eu pour objet et pour effet de provoquer l'erreur du partenaire et partant, constitutive d'un dol au sens des dispositions légales précitées frappant de nullité le consentement exprimé par l'appelant, candidat à l'intégration au réseau de franchise litigieux, qui pour cette raison, a le 30 novembre 2011, consenti à signer les conventions de formation litigieuses avec d'autant plus de facilité qu'il lui était dit que le coût de ces formations n'était pas immédiatement encaissé.

12. Sur ces constatations et pour ces raisons, le jugement entrepris sera infirmé en toutes ses dispositions.

13. La demande d'annulation des conventions litigieuses pour non-respect de la législation en matière de formation continue est donc sans objet, tout comme les exceptions de nouveauté et d'incompétence soulevées de ce chef.

Sur le bien-fondé des demandes financières de M. X

14. Ce dernier retient à bon droit que les clauses alléguées par son adversaire insérées aux conventions litigieuses ne peuvent plus, en raison même de la nullité frappant celles-ci, lui être opposées.

15. La société Ada sera donc condamnée, à lui rembourser les sommes versées aux titre de ces conventions déclarées nulles pour cause de vice de consentement et partant, 17 669,78 €.

16. M. X est également fondé, à obtenir l'indemnisation du préjudice subi par suite des frais de conseil engagés en pure perte à compter de janvier 2012, soit postérieurement à la signature de la lettre d'intention et des conventions de formations litigieuses, pour la négociation et la rédaction du compromis de vente de l'agence litigieuse et ainsi, se voir rembourser 5 980 € dont il justifie le montant, en produisant la facture correspondante - voir cote 28.

17. M. X sollicite enfin la condamnation de la partie adverse à l'indemniser du préjudice corrélatif au comportement dolosif dont il a été victime par le versement de 120 000 € à titre de dommages-intérêts, observant avoir perdu beaucoup de temps au détriment d'une autre activité rémunératrice et avoir également, engagé beaucoup d'argent en pure perte. Il ajoute, avoir au demeurant perdu la chance d'investir ses fonds dans un autre projet, ce qui par surcroît lui occasionne un préjudice moral.

18. La société Ada se borne à répondre que l'appelant instrumentalise la cour pour tenter d'obtenir le remboursement de ce qu'il a été condamné à lui payer aux termes de l'ordonnance de référé précitée et observe doit donc être débouté de ses demandes indemnitaires.

19. M. X justifie par les pièces qu'il soumet à l'appréciation de la cour - voir cote 4, avoir été parallèlement en négociation avec la société Ucar courant octobre 2011 sans que la société Ada démontre que, ainsi qu'il le soutient, il a été éconduit par ce concurrent.

20. Si c'est donc bien en raison de la présentation tronquée de la réalité d'exploitation de l'agence de Courbevoie par la société Ada que M. X a mis fin à ces premiers contacts, force est de lui faire observer qu'il ne justifie pas de la réalité de la perte de fonds dont il se prévaut, et qu'il ne peut donc être accueilli en sa demande indemnitaire qu'au titre de son préjudice moral nécessairement consécutif à cette opération malheureuse, selon le dispositif ci-après.

Sur les autres demandes

21. Vu les articles 696 et 699 du Code de procédure civile ;

22. La société Ada, partie perdante au sens de ces dispositions, sera condamnée aux entiers dépens de première instance et d'appel avec, pour ceux d'appel, faculté de recouvrement direct en faveur de Maître Bertrand Rol, AARPI - JRF Avocats.

Par ces motifs, LA COUR, Statuant en audience publique et par arrêt contradictoire. Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions SAUF, en ce qu'il a débouté M. X de sa demande en paiement de cent vingt mille euros (120 000 €) à titre de dommages et intérêts. Statuant de nouveau du seul chef des dispositions réformées et, Y ajoutant : Dit que les conventions de formation théorique et pratique signées le 30 novembre 2011 entre les parties sont nulles et de nul effet. Condamne la société anonyme Ada à rembourser à M. X la somme de dix-sept mille six cent soixante-neuf euros et soixante-dix-huit centimes (17 669,78 €) outre cinq mille neuf-cent quatre-vingts euros (5 980 €) en remboursement de frais engagés en pure perte. Condamne la société Ada à verser à M. X trois mille euros (3 000 €) à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral. Condamne la société anonyme Ada aux entiers dépens de première instance et d'appel avec, pour ceux d'appel, faculté de recouvrement direct en faveur de Maître Bertrand Rol, AARPI - JRF Avocats conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile. Vu l'article 700 du Code de procédure civile ; Condamne la société Ada à verser à M. X une indemnité de six mille euros (6 000 €) à titre de frais irrépétibles. Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.