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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 24 janvier 2018, n° 15-15812

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Picard , Tupinier

Défendeur :

Crédit Lyonnais (SA) , Jouve (ès qual.) , Fonds Commun de Titrisation Hugo Creances II (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Luc

Conseillers :

Mmes Mouthon Vidilles, Comte

Avocats :

Mes Teytaud, Courrège, Dutreuilh, Lounana, Chardin

T. com. Paris, du 20 mai 2015

20 mai 2015

FAITS ET PROCÉDURE

En mars 2008, lors du salon de la franchise, M. Samuel Picard et son épouse, Mme Anne Tupinier, qui souhaitaient changer d'orientation professionnelle après avoir géré un fonds de commerce à usage de Tabac-Presse pendant 10 ans, se sont rapprochés de la société Via Gio Développement, créée le 18 novembre 2004 et qui exploite, dans le cadre d'un réseau de franchise, un concept de restauration rapide à base de pâtes à consommer sur place et à emporter et par livraisons à domicile, sous l'enseigne " Via Gio ".

La société Via Gio Développement a orienté les époux Picard vers un local pour lequel elle avait signé un bail en 2006 situé dans le nouveau centre commercial dénommé " L'Heure Tranquille " à Tours.

Le 22 mai 2008, la société Via Gio Développement a remis aux époux Picard un document d'information précontractuelle et le 30 juillet 2008, les parties ont régularisé un contrat de franchise d'une durée de 7 ans. A cet effet, le 9 janvier 2009, les époux Picard ont créé la société Caloma. Le 25 mars 2009, la société Le Crédit Lyonnais (LCL) a consenti à la société Caloma un prêt d'un montant de 276 000 euros, portant intérêts au taux de 4,95 %, d'une durée de 78 mois et destiné à financer les travaux d'aménagement du restaurant de Tours. En garantie du prêt consenti, Le Crédit Lyonnais bénéficiait notamment d'un nantissement sur le fonds de commerce de la société Caloma, ainsi que des engagements de M. Samuel Picard, d'une part, de caution souscrite à hauteur de la somme de 317 400 euros avec le consentement exprès de Mme Picard, et d'autre part, de maintenir son compte-courant d'associé à hauteur de 110 000 euros.

Le restaurant a ouvert ses portes en mai 2009 mais rapidement la société Caloma a rencontré des difficultés financières et a été placée en redressement judiciaire par jugement du 4 mai 2010, converti en liquidation judiciaire par jugement du 13 septembre 2011.

La société Le Crédit Lyonnais a déclaré sa créance au passif de la société Caloma laquelle a été admise à hauteur de 251 990,24 euros au titre du capital à échoir au 13 avril 2010, outre les intérêts postérieurs au taux contractuel de 4,95 %.

Le 11 juin 2010, compte tenu de la défaillance de la société Caloma, Le Crédit Lyonnais a mis en demeure M. Samuel Picard de procéder au remboursement des sommes dues en vertu de son engagement de caution.

Le 6 décembre 2012, Maître Hubert Lavallart, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Caloma et M. et Mme Picard ont fait assigner la société Le Crédit Lyonnais et la société Via Gio Développement devant le Tribunal de commerce de Paris.

Par jugement en date du 29 mai 2013, le Tribunal de commerce de Paris a prononcé l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société Via Gio Développement. Ce même jugement a désigné la Selafa MJA, en la personne de Maître Lucile Jouve, en qualité de liquidateur judiciaire.

Par jugement du 20 mai 2015, le Tribunal de commerce de Paris a :

- pris acte de l'intervention volontaire du Fonds Commun de Titrisation Hugo Créances II, représenté par sa société de gestion GTI Asset Management (anciennement dénommée Gestion et Titrisation Internationales) venant aux droits du Crédit Lyonnais,

- joint les instances enrôlées sous les n° RG 2013-001347 et 2014-015209,

- débouté Maître Hubert Lavallart, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Caloma, M. Samuel Picard et Madame Anne Picard de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

- condamné M. Samuel Picard, pris en sa qualité de caution solidaire de la société Caloma, au paiement au FCT Hugo Créances II de la somme de 324 691,98 euros, arrêtée au 2 septembre 2013 outre intérêts postérieurs de 7,95 % à compter du 3 septembre 2013, avec anatocisme,

- condamné solidairement M. Samuel Picard, Madame Anne Picard et Maître Hubert Lavallart, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Caloma, à payer à la société Selafa MJA, ès qualités, la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, dont distraction au profit de Maître Valérie Dutreuilh conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile,

- condamné M. Picard à payer au FCT Hugo Créances II la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement,

- débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,

- condamné Maître Hubert Lavallart, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Caloma aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 176,04 euros dont 29,12 euros de TVA.

LA COUR

Vu la déclaration d'appel et les dernières conclusions de M. Samuel Picard et de Mme Anne Tupinier anciennement Picard, appelants, déposées et notifiées le 17 novembre 2017 par lesquelles il est demandé à la cour de :

vu les articles 1108, 1109, 1110, 1116 du Code civil (dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016), vu les articles 1131, 1134, 1147, 1149 et 1184 du Code civil (dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016),

vu les articles 1240 et 1241 du Code civil (anc. art. 1382 et 1383 Code civil), vu l'article 2290 du Code civil, vu les articles L. 330-3 et R. 330-1 du Code de commerce, vu l'article L. 341-4 du Code de la consommation, devenu l'article L. 343-4 du même code,

- déclarer recevables l'appel et les demandes des concluants,

- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

statuant à nouveau :

I- à l'égard du franchiseur Via Gio Développement :

- dire que le consentement de M. et Madame Picard a été vicié aux motifs que :

* la société Via Gio Développement n'a pas fourni de renseignements loyaux sur la pérennité et la rentabilité de son réseau,

* la société Via Gio Développement n'a pas communiqué les perspectives de développement sur toute la durée du contrat,

* la société Via Gio Développement a communiqué des chiffres prévisionnels totalement irréalistes qui n'étaient pas adaptés au Centre commercial de l'Heure Tranquille à Tours,

- dire que M. et Madame Picard ont été victimes d'une erreur provoquée par le dol et d'une erreur sur la rentabilité de leur entreprise,

- dire que la société Via Gio Développement a manqué à son obligation de bonne foi,

- dire que la société Via Gio Développement a gravement manqué à son obligation d'assistance, en conséquence,

- fixer au passif de la société Via Gio Développement, représentée par la Selafa MJA, prise en la personne de Maître Lucile Jouve, en sa qualité de mandataire chargée de poursuivre les instances en cours, les créances de réparation de M. et Madame Picard à hauteur de :

* 69 000 euros au titre du manque à gagner en termes de rémunération,

* 120 000 euros correspondant à la perte de chance de mieux investir leurs capitaux, subsidiairement,

- condamner la société Via Gio Développement, représentée par la Selafa MJA, prise en la personne de Maître Lucile Jouve, en sa qualité de Mandataire chargée de poursuivre les instances en cours, à leur payer ces mêmes sommes à titre de dommages-intérêts à la suite de la clôture de la liquidation pour insuffisance d'actifs,

II- à l'égard du Crédit Lyonnais et du Fonds commun de titrisation Hugo Créances II :

- dire que l'engagement de caution souscrit le 25 mars 2009 à hauteur de la somme de 317 400 euros par M. Picard au profit du Crédit Lyonnais était, à cette même date, manifestement disproportionné à ses revenus et à ses biens propres et communs,

- dire que M. Picard ne dispose pas aujourd'hui des biens et revenus lui permettant de faire face aux demandes que le Fonds commun de titrisation Hugo Créances II dirige à son encontre en sa qualité de caution des engagements de la société Caloma,

- dire que le Crédit Lyonnais a gravement manqué à ses obligations d'information, de mise en garde et de loyauté à l'égard de M. et de Madame Picard,

en conséquence,

à titre principal :

- prononcer la déchéance de l'engagement de caution souscrit par M. Picard au profit du Crédit Lyonnais le 25 mars 2009, tant sur le fondement de l'article L. 341-4 du Code de la consommation, devenu l'article L. 343-4 du même code, que sur celui de l'article 1147 du Code civil, et ce tant à l'égard du Crédit Lyonnais que du Fonds commun de titrisation Hugo Créances II,

- condamner le Crédit Lyonnais à payer à M. Picard la somme de 132 000 euros de dommages-intérêts au titre de la perte de chance de ne pas investir en pure perte ses deniers personnels dans un projet voué à l'échec,

- condamner le Crédit Lyonnais à payer à M. et à Madame Picard la somme de 32 000 euros de dommages-intérêts chacun au titre de la perte de chance de ne pas subir de manque à gagner en termes de rémunération,

- dire que les sommes allouées seront assorties des intérêts au taux légal à compter de la délivrance de l'assignation,

à titre subsidiaire, pour la cas où la cour ne prononcerait pas la décharge de l'engagement de caution de M. Picard :

- condamner le Crédit Lyonnais à payer à M. Picard la somme de 132 000 euros de dommages-intérêts au titre de la perte de chance de ne pas investir en pure perte ses deniers personnels dans un projet voué à l'échec,

- condamner le Crédit Lyonnais à payer à M. et à Madame Picard la somme de 32 000 euros de dommages-intérêts chacun au titre de la perte de chance de ne pas subir de manque à gagner en termes de rémunération,

- dire que les sommes allouées seront assorties des intérêts au taux légal à compter de la délivrance de l'assignation,

- limiter le montant de la condamnation qui serait éventuellement mise à la charge de M. Picard en sa qualité de caution au profit du Fonds commun de titrisation Hugo Créances II à la somme de 251 990,24 €, et en conséquence rejeter la demande du dit Fonds tendant à obtenir de M. Picard la somme de 324 691,98 €, outre des intérêts contractuels au taux de 7,95 % à compter du 3 septembre 2013,

- condamner le Crédit Lyonnais à relever et garantir M. Picard de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre, en sa qualité de caution du prêt consenti à la société Caloma, au profit du Fonds commun de titrisation Hugo Créances II,

en toute hypothèse :

- débouter l'ensemble des intimés de leurs demandes, moyens, fins et conclusions,

- fixer au passif de la société Via Gio Développement, représentée par la Selafa MJA., prise en la personne de Maître Lucile Jouve, en sa qualité de Mandataire chargée de poursuivre les instances en cours, la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, et solidairement,

- condamner le Crédit Lyonnais et le Fonds commun de titrisation Hugo Créances II à payer à M. et Madame Picard la somme de 10 000 euros sur le même fondement,

- condamner la société Via Gio Développement, le Crédit Lyonnais et le Fonds commun de titrisation Hugo Créances II aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction pour ces derniers au profit de Maître Teytaud, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile ;

Vu les dernières conclusions de la société Selafa MJA prise en la personne de Maître Lucile Jouve, ès qualités de mandataire pour poursuivre les instances en cours à l'égard de la société Via Gio Développement, intimée, déposées et notifiées le 18 décembre 2015 par lesquelles il est demandé à la cour de :

vu les articles L. 622-22, L. 641-3, L. 641-4 du Code de commerce, vu les articles L. 622-7 et L. 622-24 du Code de commerce, vu les articles 1108, 1109, 1110, 1116 du Code civil, vu les articles 11131, 1134, 1147, 1149, et 1184 du Code civil, vu les articles 1382 et 1383 du Code civil, vu les articles L. 330-3 et R. 330-1 du Code de commerce, vu les moyens soulevés et les pièces à l'appui,

- recevoir la Selafa MJA ès qualités en ses conclusions,

- confirmer le jugement entrepris du Tribunal de commerce de Paris en date du 20 mai 2015 en l'ensemble de ses dispositions,

- constater que la société Via Gio Développement a communiqué durant la phase précontractuelle, des renseignements loyaux, en fournissant un dossier d'informations précontractuelles, complété d'une étude de marché complète,

- constater que les comptes prévisionnels qui ne peuvent être qualifiés d'irréalistes, ont été établis par référence au restaurant pilote de La Défense et adaptés au concept, objet du contrat de franchise signé par les consorts Picard,

- constater que M. et Madame Picard, représentants légaux de la société Caloma ont, en préambule du contrat de franchise, déclarés être conscients et avertis du caractère innovant du concept du restaurant Via Gio Développement au sein du centre commercial L'Heure Tranquille à Tours, et de son peu de notoriété,

- constater que M. et Madame Picard, représentants légaux de la Société Caloma ont déclaré, en préambule du contrat de franchise, s'engager en qualités d'entrepreneurs capables d'assumer le risques éventuels, inhérents à un concept nouvellement formé,

- dire que la société Via Gio Développement a respecté ses obligations précontractuelles d'informations conformément aux dispositions des articles L. 330-3 et R. 330-1 du Code de commerce, en fournissant une information complète et sincère,

- dire que le consentement des consorts Picard n'a pas été vicié,

- constater que la crise économique et le développement du centre commercial constituent des causes extérieures et non imputables à la société Via Gio Développement qui ont impacté sur les chiffres d'affaires réalisés par la société Caloma,

- dire que la Société Via Gio Développement a respecté ses obligations contractuelles et exécuté de bonne foi le contrat de franchise en portant assistance, en conseillant, et en alertant la Société Caloma, afin de lui permettre d'améliorer ses résultats,

- dire que les nombreuses fautes de gestion, et le non-respect des recommandations de la société Via Gio Développement, par la société Caloma, ont causé l'échec du restaurant Viagio exploité en franchise, puis la liquidation judiciaire de la société Caloma,

en conséquence,

à titre principal,

- débouter M. Samuel Picard et Madame Anne Picard de l'ensemble de leurs demandes à l'égard de la Selafa MJA ès qualités, et notamment de leur demande en fixation au passif de la liquidation judiciaire de la Société Via Gio Développement,

à titre subsidiaire, si par extraordinaire, le tribunal de céans venait à retenir une part de responsabilité de la Société Via Gio Développement dans l'échec du restaurant exploité par la société Caloma et la cessation de paiements de cette dernière :

- constater que les résultats de la société Caloma ont été impactés par des causes extérieures et non imputables à la société Via Gio Développement, à savoir la crise économique et le développement ralenti du centre commercial,

- constater que les fautes de gestion commises la société Caloma ont fortement contribué à l'échec de l'entreprise,

en tout état de cause,

- débouter M. Samuel Picard et Madame Anne Picard de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

- condamner solidairement M. Samuel Picard, Madame Anne Picard à payer à la Selafa MJA ès qualités la somme de 8 000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure civile, dont distraction au profit de Maître Valérie Dutreuilh, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile,

- condamner solidairement M. Samuel Picard, Madame Anne Picard aux entiers dépens ; Vu les dernières conclusions déposées et notifiées le 24 novembre 2017 par lesquelles la société Le Crédit Lyonnais, intimée, demande à la cour, au visa des articles L. 341-4 du Code de la consommation et L. 110-4 du Code de commerce, de :

- confirmer le jugement entrepris prononcé par le Tribunal de commerce de Paris le 20 mai 2015 en ce qu'il a écarté toutes les demandes et prétentions présentées à l'encontre du Crédit Lyonnais,

- dire irrecevables et subsidiairement mal fondés M. Samuel Picard et Madame Anne Tupinier épouse Picard en leur demande de dommages et intérêts à l'encontre du Crédit Lyonnais, et les en débouter,

- les dire également mal fondés en leurs autres demandes, contestations, fins et conclusions à l'encontre du Crédit Lyonnais,

ajoutant au jugement et en toute hypothèse,

- condamner solidairement M. Samuel Picard et Madame Anne Tupinier épouse Picard à payer au Crédit Lyonnais la somme de 9 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- les condamner également solidairement aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Gachucha Courrégé dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile ;

Vu les dernières conclusions déposées et notifiées le 24 novembre 2017 par lesquelles la société Fonds commun de titrisation Hugo Créances II, intimée, demande à la cour, au visa des articles L. 214-168 et suivants du Code monétaire et financier, 328 et suivants du Code de procédure civile, L. 341-4 ancien du Code de la consommation et 1134 ancien, 2288 et suivants du Code civil, de :

- dire le Fonds commun de titrisation Hugo Créances II recevable et bien fondé en ses prétentions,

- dire que l'engagement de caution souscrit par M. Samuel Picard ne revêtait aucun caractère disproportionné au regard du patrimoine déclaré par ses soins au Crédit Lyonnais,

- dire que, du fait du consentement exprès de l'épouse de M. Samuel Picard à la souscription de l'engagement de caution par ses soins, la totalité du patrimoine commun des époux Picard doit être prise en compte pour apprécier du caractère disproportionné ou non de l'engagement de caution souscrit,

- dire que les déclarations de M. Samuel Picard quant à la teneur et la composition de son patrimoine soulignaient d'une absence de disproportion de l'engagement de caution souscrit,

en conséquence,

- débouter M. Samuel Picard, pris en sa qualité de caution solidaire de la société Caloma, de l'ensemble de ses moyens tels que dirigés à l'encontre du Fonds commun de titrisation Hugo Créances II,

- confirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Paris le 20 mai 2015 en ce qu'il a débouté M. Samuel Picard de l'ensemble de ses moyens de contestation à l'encontre du Fonds commun de titrisation Hugo Créances II, représenté par sa société de gestion, GTI Asset Management,

- condamner M. Samuel Picard, pris en sa qualité de caution solidaire de la société Caloma au paiement de la somme de 294 923,02 € arrêtée au 2 septembre 2013, outre intérêts au taux contractuel de 4,95 %,

- dire que les intérêts porteront eux-mêmes intérêts, conformément aux dispositions de l'article 1154 du Code civil,

- condamner in solidum M. Samuel Picard et Madame Anne Tupinier, épouse Picard, à payer au Fonds commun de titrisation Hugo Créances II la somme de 2 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

- les condamner in solidum aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Sylvie Chardin, avocat au Barreau de Paris, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile ;

SUR CE

Sur la demande principale en annulation du contrat de franchise pour vice du consentement et les demandes subséquentes M. Picard et Mme Tupinier soutiennent, en substance, qu'ils ont été clairement victimes d'une erreur substantielle déterminante de leur engagement sur la rentabilité du concept Via Gio. Ils font grief à la société Via Gio Développement de ne pas leur avoir fourni des renseignements loyaux sur la pérennité et la rentabilité du réseau, de ne pas avoir communiqué les perspectives de développement sur toute la durée du contrat et de leur avoir fourni des chiffres prévisionnels irréalistes et inadaptés au centre commercial dans lequel ils ont exploité la franchise. Ils sollicitent donc l'infirmation du jugement en ce qu'il les a déboutés de leur demande d'annulation du contrat.

La Selafa MJA, ès qualités de liquidateur de la société Via Gio Développement, estime que leurs reproches sont infondés. Elle soutient que la société Via Gio Développement a parfaitement respecté ses obligations pré-contractuelles en fournissant aux franchisés une information complète et sérieuse, plusieurs mois avant la signature du contrat de franchise, de sorte que leur consentement n'a pu être vicié. Par ailleurs, elle souligne que M. et Mme Picard étaient des entrepreneurs avertis et capables d'assumer les risques éventuels de leur activité.

En application des dispositions des articles 1108 et 1109 du Code civil dans leur rédaction applicable, le consentement de la partie qui s'oblige est une condition essentielle de la validité d'une convention et il n'y a point de consentement valable si ce consentement n'a été donné que par erreur ou surpris par dol. L'article 1110 ancien du même code dispose que l'erreur n'est une cause de nullité que si elle porte sur la substance même de la chose qui en est l'objet et l'article 1116 ancien précise que le dol est une cause de nullité lorsque les manœuvres pratiquées par l'une des parties sont telles qu'il est évident que, sans ces manœuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté, qu'il ne se présume pas et qu'il doit être prouvé.

Par ailleurs, l'article L. 330-3 du Code commerce dispose que " toute personne qui met à la disposition d'une autre personne un nom commercial, une marque ou une enseigne, en exigeant d'elle un engagement d'exclusivité ou de quasi-exclusivité pour l'exercice de son activité, est tenue, préalablement à la signature de tout contrat conclu dans l'intérêt commun des deux parties, de fournir à l'autre partie un document donnant des informations sincères, qui lui permette de s'engager en connaissance de cause ". Ce document d'information précontractuelle, " dont le contenu est fixé par décret, précise notamment, l'ancienneté et l'expérience de l'entreprise, l'état et les perspectives de développement du marché concerné, l'importance du réseau d'exploitants, la durée, les conditions de renouvellement, de résiliation et de cession du contrat ainsi que le champ des exclusivités ". Selon l'article R.330-1 du Code commerce, le DIP doit contenir :

" (....) 4° La date de la création de l'entreprise avec un rappel des principales étapes de son évolution, y compris celle du réseau d'exploitants, s'il y a lieu, ainsi que toutes indications permettant d'apprécier l'expérience professionnelle acquise par l'exploitant ou par les dirigeants. Les informations mentionnées à l'alinéa précédent peuvent ne porter que sur les cinq dernières années qui précèdent celle de la remise du document. Elles doivent être complétées par une présentation de l'état général et local du marché des produits ou services devant faire l'objet du contrat et des perspectives de développement de ce marché. Doivent être annexés à cette partie du document les comptes annuels des deux derniers exercices ou, pour les sociétés dont les titres financiers sont admis aux négociations sur un marché réglementé, les rapports établis au titre des deux derniers exercices en application du III de l'article L. 451-1-2 du Code monétaire et financier ;

5° Une présentation du réseau d'exploitants qui comporte : a) La liste des entreprises qui en font partie avec l'indication pour chacune d'elles du mode d'exploitation convenu ; b) L'adresse des entreprises établies en France avec lesquelles la personne qui propose le contrat est liée par des contrats de même nature que celui dont la conclusion est envisagée ; la date de conclusion ou de renouvellement de ces contrats est précisée ; Lorsque le réseau compte plus de cinquante exploitants, les informations mentionnées à l'alinéa précédent ne sont exigées que pour les cinquante entreprises les plus proches du lieu de l'exploitation envisagée ; c) Le nombre d'entreprises qui, étant liées au réseau par des contrats de même nature que celui dont la conclusion est envisagée, ont cessé de faire partie du réseau au cours de l'année précédant celle de la délivrance du document. Le document précise si le contrat est venu à expiration ou s'il a été résilié ou annulé ; d) S'il y a lieu, la présence, dans la zone d'activité de l'implantation prévue par le contrat proposé, de tout établissement dans lequel sont offerts, avec l'accord exprès de la personne qui propose le contrat, les produits ou services faisant l'objet de celui-ci ;

6° L'indication de la durée du contrat proposé, des conditions de renouvellement, de résiliation et de cession, ainsi que le champ des exclusivités. Le document précise, en outre, la nature et le montant des dépenses et investissements spécifiques à l'enseigne ou à la marque que la personne destinataire du projet de contrat engage avant de commencer l'exploitation ".

Il résulte de la combinaison des articles sus visés qu'un manquement à l'obligation d'information précontractuelle prévue à l'article L. 330-3 du Code de commerce n'entraîne la nullité du contrat de franchise que s'il a eu pour effet de vicier le consentement du franchisé.

Sur l'état du marché local

L'article L. 330-3 du Code de commerce met à la charge du franchiseur l'obligation de présenter un " état et les perspectives de développement du marché concerné " et l'article R. 330-1 l'oblige notamment à " une présentation de l'état général et local du marché des produits ou services devant faire l'objet du contrat et des perspectives de développement de ce marché ". La présentation de l'état local du marché comporte, comme pour son état national, la définition du marché et la description de son état de manière à permettre au futur franchisé éventuel de s'engager en connaissance de cause. La présentation sincère du marché local constitue une obligation déterminante et essentielle du franchiseur.

En l'espèce, le franchiseur a fait établir une étude de marché par la société MC2 Etude et Conseils (annexe 6 du DIP) présentant notamment toutes les caractéristiques de la zone de chalandise ainsi que les atouts et les inconvénients de l'implantation au sein du Pôle commercial et de loisirs " L'Heure tranquille ", mentionnant notamment l'inconvénient d' " une offre en restauration commerciale étoffée au sud de l'agglomération tourangelle ". La cour constate que les appelants se contentent de faire état de généralités sur les obligations du franchiseur en la matière et de se référer à des décisions de diverses juridictions et qu'ils s'abstiennent de préciser quel élément de l'état du marché local, déterminant de leur consentement, le franchiseur se serait sciemment abstenu de leur communiquer de sorte qu'ils auraient été induits en erreur. Ils ne caractérisent pas plus l'information sur les perspectives de développement du marché qui aurait été omise de sorte qu'ils auraient été trompés. Par suite, ils ne justifient d'aucun vice du consentement à ce titre et ce moyen sera rejeté.

Sur les comptes prévisionnels

Les appelants reprochent à la société Via Gio Développement de ne pas leur avoir transmis des chiffres sérieux, prudents, sincères et loyaux. Ils se prévalent longuement de nombreuses décisions rendues par diverses juridictions dont ils communiquent des extraits et de leurs commentaires par des professeurs de droit, pour conclure qu'ils se sont engagés dans la franchise sur la foi des informations communiquées par le franchiseur et en considération d'un certain niveau d'activité qui ne sera jamais atteint de sorte qu'ils ont indubitablement commis une erreur substantielle déterminante de leur consentement sur la rentabilité de l'entreprise.

Les chiffres d'affaires prévisionnels transmis par le franchiseur étaient de :

- 560 000 euros pour la première année,

- 580 000 euros pour la seconde année. La société Via Gio Développement justifie les avoir établis par référence au restaurant du centre commercial La Défense qui avait réalisé un chiffre d'affaires de 636 166 euros la première année puis de 664 050 euros. Il ne ressort d'aucun élément que ces chiffres aient été erronés et il sera observé que le franchiseur les a pondérés afin de prendre notamment en compte les caractéristiques de la zone de chalandise en cause.

Le compte prévisionnel établi à partir de ces chiffres par le propre expert-comptable des époux Picard prévoyait :

- 571 982 euros la première année,

- 600 581 euros la seconde année,

- 618 599 euros la troisième année, soit des chiffres d'affaires sensiblement supérieurs à ceux prévus par le franchiseur.

Il s'est avéré que les époux Picard ont réalisé :

- 395 832 euros de mai 2009 au 31 mars 2010, soit sur 11 mois, la première année,

- 308 878 euros au 31 mars 2011, la seconde année.

Les appelants déduisent de la seule discordance entre les chiffres d'affaires prévisionnels et les chiffre d'affaires qu'ils ont réalisés, une erreur déterminante de leur engagement sur la rentabilité du concept. Or, comme l'ont considéré à juste titre les premiers juges, ils ne démontrent par la production d'aucune pièce que les chiffres prévisionnels fournis par le franchiseur étaient manifestement disproportionnés, irréalistes et non adaptés, les premiers juges relevant notamment qu'il n'était produit aucun élément susceptible, à cette époque, de remettre en cause la pérennité et la rentabilité du réseau de franchisés et que de surcroît, les époux Picard pouvaient être considérés comme suffisamment avertis en raison de leur expérience antérieure en leur qualité d'exploitants d'un fonds de commerce à usage de tabac-presse pendant dix ans.

Par suite, les appelants ne justifient aucunement ni de l'existence de manœuvres dolosives ni d'avoir été induits en erreur par la société Via Gio Développement, sur la rentabilité du concept. Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il les a déboutés de leur demande d'annulation du contrat de franchise et de leurs demandes subséquentes en fixation au passif de la société Via Gio Développement des dommages et intérêts pour manque à gagner en termes de rémunération et perte de chance de mieux investir leurs capitaux.

Sur la demande subsidiaire en résiliation du contrat de franchise aux torts du franchiseur, la société Via Gio Développement

Les appelants font valoir que la société Via Gio Développement aurait violé son obligation d'aide et d'assistance et aurait été déloyale en ne réagissant pas aux difficultés dénoncées par la société Caloma, en n'apportant pas son aide et ne préconisant pas les mesures nécessaires à régler les difficultés rencontrées et en n'effectuant aucune visite ni aucun bilan malgré les chiffres alarmants enregistrés par la société Caloma, ce qui justifierait la résiliation du contrat aux torts exclusifs du franchiseur.

La Selafa MJA, ès qualités, réplique qu'elle a, durant l'exécution du contrat de franchise, apporté l'assistance et l'aide nécessaire aux franchisés, mais les a également alertés sur de nombreux points défaillants.

Il y a lieu de rappeler que si le franchiseur est tenu de procurer une assistance technique et commerciale pendant l'exécution du contrat, ce qui constitue une obligation de moyens, le franchisé est un commerçant indépendant seul responsable de la gestion de son entreprise et que les manquements du franchiseur à son obligation d'assistance ne se déduisent pas du seul fait de l'existence de difficultés financières rencontrées par les franchisés. En effet, l'exploitation d'un fonds de commerce est soumis à de multiples aléas dont notamment ceux liés à la gestion du franchisé et à la situation économique du marché de référence.

En premier lieu, comme le souligne, à raison, le liquidateur de la société Via Gio Développement, et comme les premiers juges l'ont relevé, aucune pièce n'est produite illustrant les " appels à l'aide " invoqués par les appelants. Il apparaît que la seule demande de M. Picard consistant à solliciter une exonération du paiement de la redevance, par courriel du 20 septembre 2009, a été satisfaite comme il le reconnaît lui-même dans ses écritures.

En second lieu, le franchiseur communique aux débats divers comptes-rendus de visites en juin et novembre 2009 et février et novembre 2010 (pièces n° 11, 12, 13 et 14) qui attestent qu'il s'est rendu à plusieurs reprises sur le lieu d'exploitation de la franchise et qu'à l'issue de ses visites, il a effectué des préconisations afin notamment d'augmenter le chiffre d'affaires. Il ressort également de ces pièces que la société Via Gio Développement a constaté des dysfonctionnements imputables aux franchisés (problèmes d'achalandages insuffisants et de vitrines vides, absence de démarchage commercial, absence d'envoi de communiqués de presse, choix de fournisseurs plus coûteux, absence d'utilisation des outils et supports de marketing offerts par le franchiseur...), lesquels ajoutés aux effets de la crise financière survenue fin 2008, expliqueraient en partie l'absence des résultats escomptés.

Dès lors, les appelants ne démontrant pas que le franchiseur aurait failli à ces obligations, leurs affirmations non étayées étant contredites par les pièces produites par l'intimée et la nombreuse énumération de décisions de cours d'appel à laquelle ils se livrent ne pouvant pallier l'absence de tout exemple concret de refus d'assistance du franchiseur, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il les a déboutés de leur demande en résiliation du contrat aux torts du franchiseur et de leurs demandes subséquentes en fixation au passif de la société Via Gio Développement des dommages et intérêts pour manque à gagner en termes de rémunération et perte de chance de mieux investir leurs capitaux.

Sur la demande en déchéance de l'engagement de caution de M. Picard

Se prévalant de l'article L. 341-4 du Code de la consommation, M. Picard affirme qu'il y a une disproportion manifeste entre ses biens et revenus et le montant de son engagement de caution de sorte qu'il doit en être déchargé.

Les sociétés Hugo Créances II et Crédit Lyonnais soutiennent que, du fait du consentement de l'épouse de M. Samuel Picard, c'est la totalité du patrimoine des époux qui devait être prise en considération pour apprécier une éventuelle disproportion. Elles considèrent que l'engagement de caution du 25 mars 2009 n'est pas manifestement disproportionné au regard du patrimoine que M. Picard a déclaré détenir dans un document rempli et signé par lui qui permet de constater que le patrimoine des époux permettait sans difficulté de faire face à l'engagement de caution souscrit. Selon l'article L. 341-4 du Code de la consommation, un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation. Il appartient à la caution qui entend opposer à la banque créancière les dispositions de cet article, de rapporter la preuve du caractère disproportionné de son engagement par rapport à ses biens et revenus au moment de la souscription du contrat.

Mme Tupinier, commune en biens ayant donné son consentement exprès à l'engagement de caution de son époux, M. Picard, le caractère manifestement disproportionné de l'engagement de ce dernier doit s'apprécier au regard non seulement de sa propre situation patrimoniale mais aussi de celle de la communauté.

La fiche de renseignements confidentiels établie par M. Picard et remise à la société LCL le 24 octobre 2008, préalablement à son engagement de caution, mentionne qu'il est marié, qu'il a trois enfants à charge, qu'il doit faire face à des charges annuelles, dont le remboursement d'un emprunt pour l'achat de sa maison, à hauteur de la somme totale de 18 340 euros, qu'il est propriétaire d'une maison située à Bougligny (77) d'une valeur vénale de 260 000 euros pour laquelle il reste dû un capital prêté à hauteur de 150 000 euros, qu'il dispose de liquidités d'un montant de 150 000 euros et qu'ainsi, son patrimoine net après déduction du solde restant dû au titre de l'emprunt, s'élève à 260 000 euros. Il sera ajouté que si M. Picard qui venait de céder son exploitation Tabac-Presse, ne fait état d'aucun revenu à cette date, la disproportion éventuelle doit également s'apprécier en considération des perspectives de ressources liées au développement de la société Caloma qu'il venait de créer à l'effet d'exploiter une activité en franchise.

Il ne ressort aucunement de l'ensemble de ces éléments l'existence, lors de la souscription de l'acte de cautionnement, d'une disproportion manifeste entre les biens et charges de la caution et le montant de son engagement à hauteur de la somme totale maximale de 371 400 euros. Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a débouté M. Picard de sa demande en décharge du cautionnement.

Sur la créance du FCT Hugo Créances II

La société Hugo Créances II indique qu'elle vient aux droits du Crédit Lyonnais qui détient les créances sur la société Caloma et sollicite la condamnation de M. Picard, en sa qualité de caution, à lui verser la somme de 294 923,02 euros arrêtée au 2 septembre 2013 outre les intérêts au taux contractuel de 4,95 %.

En réplique à la demande subsidiaire de M. Samuel Picard qui sollicite que le montant mis à sa charge en qualité de caution soit limité à la somme de 251 990,24 euros correspondant au montant de la créance de la société LCL admise au passif de la société Caloma au motif qu'elle ne peut réclamer à la caution davantage de ce que doit le débiteur principal, la société FCT Hugo Créances II fait valoir, à juste titre, que la créance de société Le Crédit Lyonnais a été admise à hauteur de 251 990,24 euros au titre du capital à échoir au 13 avril 2010 outre les intérêts postérieurs au taux contractuel de 4,95 % (pièce FCT n° 4).

Il résulte des pièces versées aux débats dont notamment l'acte de prêt, l'acte de cautionnement, le décompte, la mise en demeure du 3 octobre 2011, la déclaration de créance et l'ordonnance d'admission au passif reçue le 26 août 2011, que M. Picard, ès qualités de caution de la société Caloma, est redevable envers le FCT Hugo Créances II d'une somme de 251 990,24 euros augmentée des intérêts au taux contractuel de 4,95 % à compter du 13 avril 2010 jusqu'à parfait paiement et avec capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 ancien du Code civil, le tout dans la limite de la somme de 371 400 euros.

Sur la demande en dommages et intérêts formée à l'encontre de la société Le Crédit Lyonnais pour manquements à ses obligations de conseil, d'information, de loyauté et de mise en garde lors de la souscription du prêt M. Samuel Picard soutient qu'il est fondé à engager la responsabilité du Crédit Lyonnais qui se présente comme une spécialiste de la franchise, à raison de ses manquements à ses obligations de conseil, d'information, de loyauté et de mise en garde préalablement à l'octroi du prêt. Il sollicite la somme de 132 000 euros à titre de dommages-intérêts pour perte de chance de ne pas investir en pure perte ses deniers personnels, la chance perdue ne pouvant être évaluée à moins de 80 % (165 000 € x 80 %). Il demande, également, ainsi que son épouse, la condamnation du Crédit Lyonnais à leur payer à chacun la somme de 32 000 euros, à titre de dommages-intérêts pour la perte de chance de ne pas subir un tel manque à gagner en termes de rémunération Le Crédit Lyonnais soutient que ces demandes sont prescrites depuis le 25 mars 2014, soit cinq ans après le jour de l'acte de prêt portant cautionnement.

M. Picard réplique que son action n'est pas prescrite car la matérialisation du risque, qui constitue le moment auquel l'emprunteur et la caution ont effectivement eu connaissance des manquements de la banque et du préjudice subi, est intervenue postérieurement au jour de l'octroi du prêt.

Les parties s'accordent à reconnaître que l'action ressort du régime de la prescription quinquennale instaurée à l'article L. 110-4 du Code de commerce par la loi du 17 juin 2008.

Il est de principe que la prescription d'une action en responsabilité court à compter du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance.

En l'espèce, M. Picard reproche à la société LCL des manquements à ses obligations d'information, de conseil, de loyauté et de mise en garde antérieurs à la signature du contrat de prêt comportant engagement de caution du 25 mars 2009. Or en la matière, les dommages pouvant résulter de tels manquements ne consistant qu'en une perte de chance de ne pas contracter, ils se manifestent dès le stade de la formation des contrats, soit en l'espèce dès le 25 mars 2009, de sorte que l'action engagée sur ces fondements par conclusions du 9 septembre 2014 doit être déclarée irrecevable comme étant prescrite depuis le 25 mars 2014.

Sur les autres demandes

M. Samuel Picard et Mme Anne Tupinier divorcée Picard qui succombent en appel, en supporteront les dépens et devront verser à la Selafa MJA ès qualités de liquidateur de la société Via Gio Développement, la somme de 1 000 euros, à la société Le Crédit Lyonnais celle de 1000 euros et au FCT Hugo Créances II celle de 1 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par ces motifs, LA COUR, Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a condamné M. Samuel Picard pris en sa qualité de caution à payer à la société FCT Hugo Créances II la somme de 324 691,98 euros arrêtée au 2 septembre 2013 outre les intérêts postérieurs de 7,95 % à compter du 3 septembre 2013 et en ce qu'il a débouté M. et Mme Picard de leurs demandes d'indemnisation formées à l'encontre de la société Le Crédit Lyonnais pour manquements à ses obligations de conseil, d'information, de loyauté et de mise en garde ; statuant à nouveau : Condamne M. Samuel Picard à verser la société FCT Hugo Créances II la somme de 251 990,24 euros augmentée des intérêts au taux contractuel de 4,95 % à compter du 13 avril 2010 jusqu'à parfait paiement et avec capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 ancien du Code civil, le tout dans la limite de la somme de 371 400 euros ; Déclare irrecevables comme étant prescrites les demandes d'indemnisation formées à l'encontre de la société Le Crédit Lyonnais pour manquements à ses obligations de conseil, d'information et de mise en garde par M. Samuel Picard et Mme Anne Tupinier divorcée Picard ; y ajoutant, Condamne in solidum M. Samuel Picard et Mme Anne Tupinier divorcée Picard aux dépens d'appel ; Autorise Maître Gachucha Courrège et Maître Sylvie Chardin, avocat, à recouvrer les dépens dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile ; Condamne in solidum M. Samuel Picard et Mme Anne Tupinier divorcée Picard à verser à la Selafa MJA ès qualités de liquidateur de la société Via Gio Développement, la somme de 1 000 euros, à la société Le Crédit Lyonnais celle de 1 000 euros et au FCT Hugo Créances II celle de 1 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.