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Décisions

Cass. 1re civ., 31 janvier 2018, n° 15-28.352

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Culturespaces (SA)

Défendeur :

Polad-Spadoni, Cobb, Cathédrale d'images (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Batut

Rapporteur :

M. Girardet

Avocat général :

M. Ride

Avocats :

SCP Hémery, Thomas-Raquin, SCP Waquet, Farge, Hazan

Paris, pôle 5, ch. 1, du 1 déc. 2015

1 décembre 2015

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'en 1975, Albert Plécy, auteur notamment de l'ouvrage " La grammaire élémentaire de l'image " publié en 1962, a découvert les Carrières des Bringasses et des Grands Fonts, anciennes carrières d'extraction de pierres désaffectées, propriété de la commune des Baux-de-Provence (la commune), et décidé d'y réaliser son projet " L'Image totale ", consistant à intégrer le spectateur au sein d'images projetées sur des sols et des parois naturels ; qu'après avoir consenti un droit d'occupation à l'association présidée par Albert Plécy, la commune a autorisé la société Cathédrale d'images, que celui-ci a ensuite créée, à organiser des spectacles audiovisuels sur ce site et lui a consenti un bail commercial ; qu'au décès d'Albert Plécy, survenu en 1977, son activité a été reprise par son épouse, Anne Plécy, qui a dirigé la société Cathédrale d'images jusqu'à son décès en 2002, puis par son petit-fils, M. Timothée Polad-Spadoni ; qu'après avoir signifié à la société Cathédrale d'images un congé avec refus de renouvellement du bail pour motif grave et légitime, la commune a attribué l'exploitation artistique des carrières à la société Culturespaces, à l'issue d'une procédure d'appel d'offres de délégation de service public portant sur la mise en valeur du site ; que la société Cathédrale d'images, Mme Cobb, MM. Timothée et Grégoire Polad-Spadoni, en leur qualité d'ayants droit d'Anne et Albert Plécy, et à titre personnel s'agissant de Mme Cobb et de M. Timothée Polad-Spadoni, ont assigné la société Culturespaces en contrefaçon de droit d'auteur et parasitisme ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident, qui est préalable : - Attendu que la société Cathédrale d'images, Mme Cobb, et MM. Timothée et Grégoire Polad-Spadoni font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes, alors, selon le moyen : 1°) qu'est éligible à la protection des droits d'auteur l'œuvre dont les éléments qui la constituent présentent, pris dans leur combinaison, une originalité ; qu'en retenant que les décisions prises, s'agissant du cheminement des spectateurs à l'intérieur, de l'emplacement du matériel et des zones de projection, étaient des choix contraints par la technique et la nature du site qui ne reflétaient dès lors pas une démarche artistique révélatrice de la personnalité des intéressés, sans examiner le caractère original du projet dans son ensemble, résultant de la combinaison d'éléments caractéristiques à savoir le détournement par Albert Plécy, puis par M. Polad-Spadoni d'une ancienne carrière désaffectée pour en faire une scénographie audiovisuelle dans laquelle le spectateur chemine en immersion totale dans l'image, la cour d'appel a violé les articles L. 111-1 et L. 112-1 du Code de la propriété intellectuelle ; 2°) qu'à tout le moins, en ne répondant pas au moyen des conclusions invoquant la combinaison de ces différents éléments comme constitutive d'une œuvre originale et caractéristique, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ; 3°) qu'est éligible à la protection des droits d'auteur l'œuvre dont les éléments qui la constituent présentent, pris dans leur combinaison, une originalité ; que, parmi les éléments qui, pris dans leur ensemble, présentaient l'originalité revendiquée par les appelants, était invoqué, notamment, le choix par Albert Plécy de carrières désaffectées pour y créer un spectacle total sur le thème en 1977 de la passion du Christ ; que la cour d'appel, en écartant la demande de protection de l'œuvre d'Albert Plécy, puis de M. Polad-Spadoni, sans examiner ces éléments pourtant invoqués, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 111-1 et L. 112-1 du Code de la propriété intellectuelle ; 4°) que n'est pas exclusive d'une démarche originale donnant lieu à une création éligible à la protection des droits d'auteur la nécessité de respecter certaines contraintes techniques ou naturelles pour réaliser l'œuvre imaginée ; qu'en affirmant que l'apport créatif et original d'Albert Plécy puis de M. Spolad-Spadoni ne pouvait être retenu dès lors qu'il n'était pas établi que leurs décisions ont traduit une démarche artistique révélatrice de leur personnalité puisque les choix opérés ont été plus contraints par la technique et la nature des lieux qu'arbitraires, la cour d'appel a violé les articles L. 111-1 et L. 112-1 du Code de la propriété intellectuelle ; 5 / que la circonstance o que l'œuvre audio-visuelle formelle n'ait pas été modifiée, malgré les changements de spectacles, n'exclut pas le caractère original de cette œuvre ; qu'en fondant son refus de reconnaître l'existence d'une œuvre protégeable au motif inopérant que les choix opérés par Albert Plécy n'ont pas été remis en question au fil des années alors que les spectacles donnés dans les carrières étaient chaque année différents, la cour d'appel a violé les articles L. 111-1 et L. 112-1 du Code de la propriété intellectuelle ; 6°) qu'à supposer adoptés les motifs du jugement relatifs à la caractérisation de la scénographie invoquée, les juges ne peuvent rejeter une demande sans examiner tous les éléments de preuve fournis par les parties ; que les appelants produisaient la description du cheminement du premier spectacle, donné en 1977, dans un compte rendu de ce spectacle, ainsi qu'un plan mentionnant le découpage en dix parties, représentant des chapitres, des images projetées pour ce même spectacle, ainsi qu'un plan indiquant que les projections avaient lieu aux murs, plafonds et sols ; qu'en rejetant leur demande faute de caractérisation du parcours des visiteurs ou du défilement des images ou de la puissance des projecteurs, sans examiner les éléments de preuve fournis en ce sens par les appelants, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ; 7°) qu'à supposer adoptés les motifs du jugement relatifs à la caractérisation de la scénographie invoquée, les appelants faisaient valoir, plan d'Albert Plécy à l'appui, que le spectacle donné en 1977 était découpé en plusieurs chapitres repris de la passion du Christ ; qu'en rejetant leur demande faute de caractérisation des éléments définissant l'œuvre sans répondre à ce moyen des conclusions, la cour d'appel a de nouveau violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

Mais attendu, d'abord, que l'arrêt retient, à bon droit, que le détournement des Carrières des Bringasses et des Grands Fonts des Baux-de-Provence pour y projeter des reproductions d'œuvres artistiques afin d'immerger le spectateur dans des images, n'est l'expression que d'une idée qui, comme telle, ne peut être éligible à la protection conférée par le droit d'auteur ;

Attendu, ensuite, qu'appréciant souverainement la portée des éléments de preuve mis aux débats, parmi lesquels les comptes-rendus de réunion, les notes et les plans établis en 1976, la cour d'appel a, par motifs propres et adoptés, constaté, d'une part, que ceux-ci n'étaient pas de nature à caractériser l'apport créatif initial d'Albert Plécy, d'autre part, qu'aucune mention ne permettait d'appréhender précisément les caractéristiques postérieures invoquées, tenant au parcours des visiteurs, au défilement des images, au choix des emplacements du matériel technique et des surfaces sur lesquelles sont projetées les images ;

Attendu, enfin, qu'elle a estimé, dans l'exercice de son pouvoir souverain, que les caractéristiques revendiquées, prises en combinaison, si elles étaient le reflet du travail de transformation des anciennes carrières pour en faire un lieu de spectacles audiovisuels et donner ainsi corps à l'idée d'Albert Plécy, demeuraient cependant insuffisantes à établir que la scénographie invoquée traduisait une démarche artistique révélatrice de la personnalité des auteurs ; d'où il suit que le moyen, qui critique des motifs surabondants en ses quatrième et cinquième branches, et qui manque en fait en ses sixième et septième branches, n'est pas fondé pour le surplus ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal : - Délibéré par la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation après débats à l'audience publique du 25 avril 2017, où étaient présents : Mme Mouillard, président, Mme Tréard, conseiller référendaire rapporteur, Mme Riffault-Silk, conseiller doyen, M. Graveline, greffier de chambre ; - Attendu que la société Culturespaces fait grief à l'arrêt de dire qu'elle a commis des actes de parasitisme, alors, selon le moyen : 1°) qu'en l'absence de toute protection par des droits privatifs, la reprise d'un concept de spectacles n'est pas, en elle-même, fautive, à moins qu'elle n'intervienne dans des circonstances particulières, contraires aux usages loyaux du commerce ; que la recherche d'une économie au détriment d'un concurrent n'est pas en tant que telle fautive, mais procède de la liberté du commerce et de la concurrence, sous réserve de respecter les usages loyaux du commerce ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu qu'en proposant un spectacle dans la continuité de celui exploité auparavant par la société Cathédrale d'images dans le même lieu, la société Culturespaces aurait profité des efforts déployés par cette société pendant plus de trente ans, qu'elle aurait économisé des frais de conception, de mise au point et de promotion pour l'exploitation de ses spectacles, qu'elle aurait " limité la prise de risque quant au succès commercial d'une valeur économique qui avait fait ses preuves " et qu'elle aurait ainsi fait une " utilisation indue " du travail et des investissements de la société Cathédrale d'images ; qu'en statuant ainsi, tout en constatant que la société Culturespaces avait créé ses propres spectacles et consacré d'importants investissements pour les mettre en place, la cour d'appel s'est déterminée par des motifs impropres à justifier en quoi le fait, pour la société Culturespaces, d'exploiter, dans le lieu qui lui a été concédé par la commune dans le cadre d'une délégation de service public, le même concept de spectacles que son prédécesseur, qui n'avait lui-même pas répondu à l'appel d'offres de la commune, serait constitutif d'un comportement déloyal et partant fautif, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ; 2°) qu'en l'absence de toute protection par des droits privatifs, la reprise d'un concept de spectacles n'est pas, en elle-même, fautive, à moins qu'elle n'intervienne dans des circonstances particulières, contraires aux usages loyaux du commerce ; qu'un savoir-faire ne peut faire l'objet d'une appropriation déloyale s'il ne présente pas un caractère confidentiel et s'il n'est pas propre à une entreprise ; qu'en affirmant qu'en proposant le même concept de spectacles, la société Culturespaces aurait fait une utilisation indue du savoir-faire de la société Cathédrale d'images et qu'elle aurait ainsi " commis des actes de parasitisme en profitant du savoir-faire " de cette société, sans relever aucune circonstance propre à caractériser l'existence d'une appropriation déloyale, par la société Culturespaces, d'un savoir-faire qui aurait été confidentiel et propre à la société Cathédrale d'images, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ; 3°) que le parasitisme suppose la démonstration d'actes contraires aux usages loyaux du commerce ; que la création d'un risque de confusion ne peut être constitutive d'une faute de concurrence déloyale qu'à la condition d'être le résultat d'agissements déloyaux ; que le fait, pour celui qui reprend l'exploitation artistique d'un lieu public, dans le cadre d'une délégation de service public, de se placer dans la continuité de son prédécesseur et de faire référence, dans la communication au public, aux spectacles auparavant exploités par ce dernier dans les mêmes lieux, n'est pas en soi constitutif d'un agissement déloyal ; qu'en l'espèce, après avoir relevé que la société Culturespaces a délibérément cherché à se placer dans la continuité de la société Cathédrale d'images et l'a même revendiqué, la cour d'appel a retenu qu'" un risque de confusion a par suite été créé dans l'esprit du public " et que la société Culturespaces aurait ainsi commis des actes de parasitisme en profitant indûment de la notoriété de la société Cathédrale d'images ; qu'en statuant ainsi, sans prendre en considération le fait que la société Culturespaces reprenait l'exploitation artistique de lieux connus du public sous le nom de " Cathédrale d'image ", à la suite d'un appel d'offres pour une délégation de service public auquel la société éponyme n'avait pas daigné répondre, et sans caractériser en quoi, dans ce contexte, le risque de confusion qui aurait été créé dans l'esprit du public entre les spectacles de la société Cathédrale d'images et ceux de la société Culturespaces aurait été le résultat d'agissements déloyaux de cette dernière, dont elle relève elle-même qu'elle était en droit d'évoquer son prédécesseur, et qu'elle avait procédé à d'importantes modifications et créé ses propres spectacles, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ; 4°) que l'usage d'un signe devenu, dans l'esprit du public, la désignation usuelle d'un lieu, ne constitue pas en soi une faute de concurrence déloyale ; qu'en reprochant à la société Culturespaces d'avoir fait référence au signe " Cathédrale d'images " dans sa communication et d'avoir ainsi créé un lien et un risque de confusion avec la société Cathédrale d'images et commis des actes de parasitisme en profitant de la notoriété de cette société, sans rechercher, comme elle y était invitée, si cette expression n'était pas devenue, du fait de son exploitation par la société éponyme jusqu'en 2008, la désignation usuelle, pour le public, du lieu dont la commune a ensuite confié la gestion à la société Culturespaces par contrat de délégation de service public, la cour d'appel a entaché sa décision d'une insuffisance de motivation, en violation de l'article 455 du Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'après avoir relevé que l'objet de l'appel d'offres de délégation de service public réalisé par la commune était très général et permettait aux candidats de présenter d'autres projets dans le domaine artistique que la reprise du concept de spectacle précédemment mis en œuvre par la société Cathédrale d'images, l'arrêt constate que l'offre de la société Culturespaces a été présentée à la commune comme étant en continuité totale avec la programmation passée, reprenant le concept de projection des images sur les parois des carrières en y immergeant le spectateur, et que la société Culturespaces a communiqué abondamment en utilisant le vocable " Cathédrale d'images ", en établissant un lien entre les spectacles et le public des deux sociétés et en laissant entendre au public qu'il s'agissait de la reprise de l'œuvre antérieure simplement rebaptisée ; qu'il ajoute que cette ambiguïté, encore entretenue par les déclarations du directeur des Carrières de Lumière et les légendes accompagnant les photographies publiées sur certains sites, a créé une confusion dans l'esprit du public, comme l'illustrent le référencement des " Carrières de lumières " sous l'adresse URL qui était dévolue à " Cathédrale d'images " par les offices de tourisme d'Avignon-Provence et des Baux-de-Provence, et les commentaires d'une internaute et de sites Internet tiers évoquant la réouverture du site et un simple changement de nom ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, faisant ressortir qu'indépendamment des modifications apportées au concept d'origine, la société Culturespaces s'était volontairement placée dans le sillage de la société Cathédrale d'images en entretenant une confusion sur son statut de repreneur et de nouvel exploitant des spectacles de la société Cathédrale d'images, en vue de tirer profit du succès et de la notoriété de ses spectacles, la cour d'appel, qui s'est déterminée au regard d'un ensemble d'éléments appréhendés dans leur globalité et n'était pas tenue de procéder à la recherche invoquée par la quatrième branche que ses constatations et appréciations souveraines rendaient inopérante, a pu retenir que la société Culturespaces avait indûment tiré profit des efforts déployés pendant plus de trente ans par la société Cathédrale d'images, économisant des frais de promotion pour ses spectacles et limitant sa prise de risque quant au succès commercial d'une valeur économique qui avait fait ses preuves ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le deuxième moyen du même pourvoi : - Délibéré par la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation dans les mêmes conditions que le premier moyen ; - Attendu que la société Culturespaces fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société Cathédrale d'images la somme de 300 000 euros en réparation du préjudice subi par celle-ci du fait du parasitisme, de lui faire interdiction de procéder à toute référence à l'activité et à la dénomination sociale de la société Cathédrale d'images dans ses supports de publicité, promotion et communication, et de dire que le dispositif de son arrêt sera publié sur la page d'accueil des sites Internet www.culturespaces.com et www.carriere-lumiere.com ainsi que dans deux organes de presse aux choix des appelants, aux frais de la société Culturespaces, alors, selon le moyen : 1°) que, dans ses conclusions d'appel, la société Cathédrale d'images n'a jamais prétendu que les agissements parasitaires imputés à la société Culturespaces auraient restreint la possibilité pour elle d'exploiter son concept de spectacles dans d'autres lieux ; qu'en relevant que le comportement parasitaire de la société Culturespaces aurait restreint la possibilité pour la société Cathédrale d'images d'exploiter son concept de spectacles dans d'autres lieux, la cour d'appel a méconnu les termes du litige, tels que définis par les conclusions des parties, en violation de l'article 4 du Code de procédure civile ; 2°) qu'en retenant ainsi d'office, sans inviter les parties à s'en expliquer, que le comportement parasitaire de la société Culturespaces aurait restreint la possibilité pour la société Cathédrale d'images d'exploiter son concept de spectacles dans d'autres lieux, la cour d'appel a méconnu le principe de la contradiction, en violation de l'article 16 du Code de procédure civile ; 3°) qu'en se bornant ainsi à affirmer que le comportement parasitaire de la société Culturespaces aurait restreint la possibilité pour la société Cathédrale d'images d'exploiter son concept de spectacles dans d'autres lieux, sans préciser sur quels éléments de preuve elle fondait une telle constatation, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ; 4°) qu'en cas de non-renouvellement du bail, l'indemnisation éventuelle du préjudice lié aux investissements engagés par le locataire pour l'aménagement des lieux se règle, le cas échéant, par l'octroi d'une indemnité d'éviction mise à la charge du bailleur ; que l'indemnisation d'un tel préjudice ne peut, en revanche, être mise à la charge du repreneur qui poursuit l'exploitation des lieux ; qu'en condamnant la société Culturespaces à payer à la société Cathédrale d'images le préjudice résultant de " l'utilisation indue de son savoir-faire, de son travail et de ses investissements " sans justifier, comme elle y était invitée, en quoi un tel préjudice se distinguerait de celui qu'une indemnité d'éviction a pour vocation d'indemniser, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ; 5°) que la réparation doit correspondre au préjudice et ne saurait être appréciée de manière forfaitaire ou arbitraire ; que le préjudice subi du fait d'actes de concurrence déloyale et de parasitisme ne s'identifie ni à l'économie effectuée par l'auteur de ces actes ni aux bénéfices qu'il a réalisés ; qu'en se contentant d'affirmer, à propos du " préjudice lié à l'utilisation de la notoriété de la société Cathédrale d'images ", que la société Culturespaces jouit elle-même d'une notoriété certaine dans le domaine de la mise en valeur du patrimoine, que cette société justifie avoir demandé à son agence de communication, en juillet 2012, de modifier les articles litigieux et avoir fait procéder, en septembre 2012, au retrait du lien de son site Internet vers l'article publié dans le magazine " Connaissance des Arts ", que la société Culturespaces a annoncé un chiffre d'affaires de 1 471 062 euros au titre de sa première année d'exploitation des carrières et a réalisé au cours de l'exercice 2011, un bénéfice de 904 720 euros sans qu'il soit établi que son activité ait été entravée ou retardée par l'attitude fautive de la société Cathédrale d'images, pour en déduire qu'elle " dispose des éléments suffisants pour évaluer à 300 000 euros la somme globale qui réparera l'intégralité du préjudice subi par la société Cathédrale d'images du fait du parasitisme, toutes causes confondues ", la cour d'appel, qui s'est ainsi déterminée par des motifs ne permettant pas de caractériser la perte ou le manque à gagner qui aurait été subi par la société Cathédrale d'images du fait des agissements litigieux et qui a ainsi évalué le préjudice de cette société sur des bases arbitraires, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, que la société Culturespaces s'étant prévalue dans ses conclusions d'appel, pour contester l'étendue de l'indemnisation revendiquée, du fait que, s'agissant d'un concept, la société Cathédrale d'images pouvait exploiter le spectacle dans d'autres lieux, c'est sans encourir les griefs des trois premières branches que la cour d'appel, appréciant souverainement les éléments mis aux débats, a écarté ce postulat ;

Attendu, en deuxième lieu, qu'ayant évalué le préjudice indemnisable au regard des investissements réalisés par la société Cathédrale d'images pendant plus de trente ans pour assurer le succès et la notoriété de ses spectacles, dont la société Culturespaces avait indûment tiré profit en se plaçant dans son sillage, sans y inclure la perte des investissements engagés en sa qualité de locataire pour l'aménagement des lieux, la cour d'appel n'était pas tenue de procéder à la recherche inopérante invoquée par la quatrième branche ;

Et attendu, en troisième lieu, qu'en sa cinquième branche, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion devant la Cour de cassation l'appréciation souveraine de l'étendue du préjudice par la cour d'appel ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Mais sur le troisième moyen de ce pourvoi, pris en sa première branche : - Délibéré par la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation dans les mêmes conditions que le premier moyen ; - Vu l'article 1382, devenu 1240 du Code civil et le principe de réparation intégrale du préjudice ; - Attendu que l'arrêt ordonne la publication de son dispositif sur la page d'accueil des sites Internet www.culturespaces.com et www-carriere-lumiere.com ;

Qu'en statuant ainsi, sans limiter dans le temps la mesure de publication qu'elle ordonnait, la cour d'appel a violé les texte et principe susvisés ;

Par ces motifs : casse et annule, mais seulement en ce qu'il dit que le dispositif de l'arrêt sera publié sur la page d'accueil des sites Internet www.culturespaces.com et www.carriere-lumière.com, l'arrêt rendu le 1er décembre 2015, entre les parties, par la Cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Paris, autrement composée.