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Décisions

CA Lyon, 1re ch. civ. A, 1 février 2018, n° 15-00497

LYON

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Floradis (SARL)

Défendeur :

Compagnie Générale de Vidéotechnique (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bernaud

Conseillers :

Mme Clément, M. Nicolas

Avocats :

Mes Pohu, Weyl, Selarl Laffly & Associés

T. com. Lyon, du 18 déc. 2014

18 décembre 2014

La société Compagnie Générale de Vidéotechnique (CGV), qui exerce en Alsace une activité d'ingénierie et de commercialisation de solutions et produits de vidéosurveillance et de sonorisation, a conclu le 7 juin 2005 avec la société Floradis en cours de constitution, représentée par Monsieur Laurent F., un contrat d'agent commercial sur un secteur géographique composé de 15 départements de la région Rhône Alpes, portés à 17 par un premier avenant du 21 mai 2007.

Le contrat a été conclu pour une durée de 12 mois à compter du 1er septembre 2005 renouvelable annuellement par tacite reconduction.

Le contrat stipule notamment :

contrepartie de ses prestations de représentation commerciale la société Floradis perçoit une commission de 35 % sur la marge brute hors taxes réalisée par la société CGV, portée à 40 % en cas de chiffre d'affaires hors taxes dépassant 700 000 € au titre d'une année calendaire,

que les commissions ne sont dues qu'après encaissement des factures par la société mandante,

que les commissions sont réglées mensuellement sur la base des relevés établis par la société CGV à défaut de contestation dans le délai de 8 jours de la réception de ces relevés,

que le contrat peut être résilié à tout moment 8 jours après l'envoi d'une mise en demeure infructueuse par l'une ou l'autre des parties en cas de manquement de l'agent à son obligation de moyens et réciproquement en cas de non-paiement des commissions,

que l'agent commercial est soumis à une obligation de non-concurrence pendant la durée du contrat et postérieurement à sa résiliation pendant une durée de six mois sur le secteur géographique concédé,

que tout litige relatif à la conclusion, l'exécution et la cessation du contrat relève de la compétence exclusive des tribunaux de Strasbourg.

Par un second avenant du 10 septembre 2007 les conditions d'intervention et de rémunération de l'agent commercial ont été précisées en fonction de la nature des produits et services vendus, qui ont été classés en trois catégories selon leur complexité et le travail d'ingénierie réalisé par le siège (vente classique pour laquelle l'agent a droit à l'intégralité de la rémunération prévue au contrat, vente d'un système technique pour laquelle la commission est calculée sur la moitié de la marge réalisée et prestation complexe dénommée " affaire " pour laquelle l'agent ne perçoit aucune rémunération).

À partir de l'année 2009 les relations entre les parties se sont dégradées.

La société Floradis a, en effet, reproché à la société CGV de faire obstacle à la bonne exécution de sa mission en ne lui transmettant pas ses nouveaux tarifs, en ne lui fournissant pas les matériels de démonstration, en la payant avec retard, en refusant de la commissionner sur certains clients et en tentant de lui imposer des objectifs commerciaux non prévus au contrat.

Pour sa part la société CGV a déploré une baisse constante du chiffre d'affaires réalisé par la société Floradis malgré la bonne santé du marché dans un secteur géographique privilégié, a reproché à l'agent de limiter son action commerciale à la région lyonnaise et lui a fait grief de ne pas participer à d'importantes réunions commerciales et de formation.

C'est dans ce contexte que la SARL Floradis a fait assigner la SAS CGV devant le Tribunal de commerce de Lyon à l'effet d'entendre prononcer la résiliation du contrat d'agent commercial aux torts exclusifs de la société CGV et condamner cette dernière à lui payer les sommes de 350 078 € à titre d'indemnité de rupture et de 810 915 € à titre de rappel de commissions sur les ventes réalisées auprès de 4 grands clients nationaux.

La société CGV a soulevé l'incompétence du Tribunal de commerce de Lyon au profit du Tribunal de grande instance de Strasbourg statuant en matière commerciale, a demandé au tribunal de surseoir à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure pénale relative à la production de la pièce portant le n° 48, s'est opposée sur le fond à l'ensemble des demandes formées par la société Floradis et reconventionnellement a demandé qu'il soit fait injonction sous astreinte à cette dernière de produire ses autres contrats d'agent commercial, de ne pas utiliser les bons de commande falsifiés, d'établir d'un commun accord des objectifs annuels pour chacun des produits, de communiquer ses comptes rendus d'activité, de participer aux réunions commerciales et d'organiser des visites de la clientèle.

Par jugement du 18 décembre 2014 le Tribunal de commerce de Lyon :

s'est déclaré territorialement compétent en relevant que la clause attributive de juridiction était réputée non écrite en présence d'un contrat de nature civile conclu avec le futur dirigeant de la société Floradis qui n'avait pas le statut de commerçant,

a pris acte du retrait par la société Floradis de sa pièce n° 48,

a prononcé la résiliation du contrat d'agent commercial aux torts exclusifs de la société CGV,

a condamné la société CGV à payer à la société Floradis la somme de 73 675 € à titre d'indemnité de rupture,

a débouté la société Floradis de sa demande en paiement d'un rappel de commissions au titre des ventes réalisées auprès des clients du groupe " affaire ",

a débouté la société CGV de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles,

a condamné la société CGV à payer à la société Floradis une indemnité de procédure de 3 000 €,

a ordonné l'exécution provisoire.

Le tribunal a considéré en substance que la société Floradis ne bénéficiait d'aucune exclusivité sur le secteur concédé, mais qu'aucun objectif commercial ne lui était imposé, que la société CGV a fait obstacle à l'exécution du contrat en excluant du commissionnement l'ensemble des commandes liées au marché autoroutier, en supprimant la société Floradis de son organigramme et de son site Internet, en prenant des commandes directes sur le secteur de l'agent et en payant avec retard les commissions, ce qui justifiait le prononcé de la résiliation du contrat aux torts exclusifs de la société mandante et le paiement d'une indemnité de rupture équivalente à un an de commissions moyennes.

Pour rejeter la demande en paiement d'un arriéré de commissions le tribunal a retenu que les ventes réalisées auprès des clients relevant du groupe " affaire " n'ouvraient pas droit à commissions depuis l'avenant du 10 septembre 2007.

La SARL Floradis a relevé appel de cette décision selon déclaration reçue le 16 janvier 2015.

Par ordonnance de référé du 16 mars 2015 le premier président de la Cour d'appel de Lyon, relevant l'existence d'un risque de non-restitution en cas de réformation de la décision, a arrêté l'exécution provisoire attachée au jugement s'agissant de la condamnation au paiement de la somme de 73 675 € à titre d'indemnité de rupture.

Par ordonnance du 17 novembre 2015 le conseiller de la mise en état a condamné la société CGV à payer à la société Floradis la somme provisionnelle de 4 973,53 € à valoir sur les commissions dues pour les années 2014-2015, mais a rejeté la demande de la société CGV en restitution d'un matériel de démonstration, ainsi que la demande de la société Floradis de production sous astreinte des factures d'achat des matériels vendus au cours des mois de septembre à décembre 2014.

Enfin par ordonnance du 5 juillet 2016 le conseiller de la mise en état a débouté la société CGV de sa demande de communication sous astreinte du bilan clos le 30 septembre 2015 et du grand livre comptable de la société Floradis.

Vu les dernières conclusions signifiées et déposées le 8 février 2016 par la SARL Floradis qui demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la résiliation du contrat d'agent commercial aux torts exclusifs de la société CGV et débouté celle-ci de ses demandes reconventionnelles, mais de l'infirmer pour le surplus et de condamner la société CGV à lui payer les sommes de 350 078 €, ou à défaut de 147 350 €, à titre d'indemnité de rupture, de 962 963 €, ou à défaut de 709 551 € ou plus subsidiairement de 228 070 €, à titre de rappel de commissions concernant les clients SNEF, Spie SE, ETDE/Bouygues et Eiffage Energie, de 6 616,81 € au titre de frais de déplacement de service après-vente ne lui incombant pas et de restitution d'un avoir déduit deux fois et enfin de 5 000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions signifiées et déposées le 6 avril 2016 par la SAS CGV qui demande à la cour :

Avant dire droit :

de surseoir à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure pénale engagée au titre de la production de la pièce portant le n° 48,

de constater en toute hypothèse le retrait de cette pièce,

de condamner la société Floradis sous astreinte de 500 € par jour de retard à justifier des revenus complémentaires qu'elle a perçus depuis l'année 2009 en sus de sa rémunération d'agent commercial par la production de son grand livre comptable,

Sur l'appel principal :

de débouter la société Floradis de l'ensemble de ses demandes,

de confirmer le jugement en ce qu'il a refusé de reconnaître une exclusivité territoriale au bénéfice de la société Floradis et de lui allouer un commissionnement indirect,

Sur l'appel incident :

de prononcer la résiliation du contrat d'agent commercial aux torts exclusifs de la société Floradis et de dire n'y avoir lieu à paiement d'une indemnité de rupture eu égard à la gravité des fautes commises,

très subsidiairement d'allouer à la société Floradis une indemnité de rupture de 37 000 €,

de condamner la société Floradis à lui payer une somme de 11 762,40 € au titre du matériel non restitué,

de condamner la société Floradis à lui payer une indemnité de procédure de 5 000 €.

MOTIFS DE L'ARRET

Sur la demande de sursis à statuer :

Il est soutenu par la société CGV que la société Floradis a versé aux débats un document confidentiel (écran informatique relatif au suivi commercial et comptable de la société Eiffage) qui était irrégulièrement en sa possession, ce qui a justifié une plainte pénale, qui sera prochainement suivie d'une plainte avec constitution de partie civile.

La société Floradis réplique que le document litigieux, qui était régulièrement en sa possession dans le cadre de l'exécution du mandat d'intérêt commun, a été retiré des débats en première instance et n'est pas produit en cause d'appel, ce qui rend la demande de sursis à statuer totalement infondée.

Sur ce

Le tribunal a pris acte du retrait par la société Floradis de sa pièce n° 48, qui n'a pas fait l'objet d'une nouvelle communication en appel, et il n'est justifié ni du sort réservé à la plainte pénale de la société CGV ni du dépôt effectif d'une plainte avec constitution de partie civile.

L'issue de cette plainte, à supposer qu'elle soit toujours en cours d'examen, n'est donc pas de nature à exercer une influence quelconque sur la présente procédure civile.

La demande de sursis à statuer sera par conséquent rejetée.

Sur la demande de production sous astreinte des justificatifs de l'activité professionnelle complémentaire de la société Floradis depuis l'année 2009 :

Soutenant que la société Floradis a exercé pendant l'exécution du contrat d'agent commercial une activité de représentation commerciale au profit d'autres mandants susceptibles de la concurrencer en violation de la clause de non-concurrence contenue dans le contrat du 7 juin 2005, la société CGV sollicite la production sous astreinte des autres contrats d'agent commercial et de tout justificatif de cette activité complémentaire.

Pour exiger cette production, dont notamment le grand livre comptable de l'agent commercial, elle se fonde notamment sur l'existence d'un excédent de chiffre d 'affaires par rapport au commissionnement dû en exécution du contrat d'agent commercial, sur les comptes rendus de gérance de la société Floradis, ainsi que sur le fait que celle-ci aurait continué à travailler avec ses anciens clients.

La société Floradis réplique qu'elle n'a conclu aucun autre contrat d'agent commercial, qu'aucun élément ne permet de suspecter qu'elle aurait assuré la commercialisation de produits concurrents, que si elle a pris contact avec cinq de ses clients historiques après le prononcé de la rupture du contrat d'agent commercial par le jugement déféré, c'est dans le cadre de sa nouvelle activité d'apporteur d'affaires en systèmes de détection incendie et que son obligation de non-concurrence est expirée depuis le mois d'octobre 2015.

Sur ce

Le rapprochement entre les comptes de résultat de l'agent commercial et le tableau récapitulatif des commissions payées en exécution du contrat liant les parties, mais aussi les comptes rendus annuels de gestion de la gérance font, certes, apparaître qu'à compter de l'exercice 2009 la société Floradis a réalisé un chiffre d'affaires supérieur aux commissions perçues en relation avec une activité de négoce de matériel électrique et électronique développée à compter de l'exercice 2008.

À défaut de tout élément de preuve contraire cette activité accessoire, dont la réalité est également attestée par l'expert-comptable de l'entreprise qui a confirmé le 16 octobre 2015 que sa cliente avait étendu son objet social en décembre 2007 à des opérations de négoce dans le domaine de l'éclairage architectural à led, n'entre pas cependant en concurrence avec la commercialisation de solutions et de produits de vidéosurveillance et de sonorisation, objet du contrat litigieux du 7 juin 2005, qui n'interdit nullement à l'agent d'exercer pendant la durée du contrat une activité complémentaire non concurrentielle.

De la même façon, s'il résulte du rapport d'enquête privée commandé par la société CGV qu'au cours du mois d'octobre 2015 le dirigeant de la société Floradis a eu des contacts commerciaux avec cinq de ses anciens clients historiques, plusieurs d'entre eux ont attesté qu'ils avaient cessé de passer commande à la société CGV en raison de divers manquements exclusivement imputables à la venderesse (absence de suivi technique, livraisons défectueuses, incompétence du service après-vente, dysfonctionnements du matériel) et qu'ils s'adressaient désormais à d'autres fournisseurs, dont ils n'indiquent nullement qu'ils auraient été représentés par la société Floradis.

Enfin, il ne résulte d'aucun élément tangible que l'offre de prix adressée 1er juillet 2014 à la société Aviglion pour le compte de la société CGV aurait été émise pour les besoins de la cause sur du papier à entête falsifié, la preuve d'une fraude ne pouvant à l'évidence résulter de la simple absence de commande après l'émission de ce devis.

La prétendue violation par la société Floradis de son obligation de non-concurrence ne repose donc que sur des suppositions insuffisamment étayées, ce qui doit conduire au rejet de la demande de production sous astreinte des éléments contractuels et comptables, de nature, selon la société CGV, à apporter la preuve d'une activité concurrentielle.

Sur l'imputabilité de la rupture du contrat d'agent commercial :

À l'appui de sa demande principale de résiliation judiciaire du contrat aux torts de la société mandante la société Floradis fait valoir que la société CGV :

ne lui a pas fourni régulièrement les informations et les tarifs relatifs aux produits commercialisés,

lui a remis avec un important retard le matériel de démonstration dont elle a besoin,

a eu un temps de réaction trop long, notamment quant à la validation technique des produits, par rapport aux attentes des clients qui ont préféré souvent s'adresser à la concurrence,

a pratiqué des prix trop élevés par rapport à la concurrence,

n'a pas suivi l'approvisionnement de ses produits et s'est trouvée régulièrement en rupture de stock,

a été défaillante dans le service après-vente,

a payé avec retard les commissions et n'a pas transmis les éléments nécessaires à leur facturation, ce qui a donné lieu à des procédures judiciaires,

ne l'a pas commissionnée depuis de nombreuses années au titre des ventes réalisées auprès de quatre clients importants,

l'a évincée de son site Internet et a contacté directement la clientèle relevant de son secteur ou n'a pas répondu aux commandes.

Sur sa demande reconventionnelle en prononcé de la résiliation judiciaire du contrat aux torts de la société Floradis la société CGV reproche pour sa part en substance à l'agent commercial :

d'avoir violé son obligation de non-concurrence,

d'avoir cessé progressivement son activité,

de ne pas avoir prospecté ni démarché son secteur,

d'avoir entravé l'action commerciale,

d'avoir manqué à son obligation d'information

d'avoir fait preuve de malveillance, voire de malhonnêteté.

Sur ce

(1) Le tribunal a prononcé avec exécution provisoire la résiliation judiciaire du contrat d'agent commercial aux torts exclusifs de la société CGV.

Il est constant que depuis le prononcé du jugement les relations contractuelles ont cessé entre les parties.

Prenant acte de cette résiliation, la société CGV, qui s'était seulement opposée en première instance aux demandes de la société Floradis, forme désormais elle-même en cause d'appel une demande reconventionnelle en résiliation judiciaire du contrat d'agent commercial aux torts de l'agent, dont elle soutient qu'il aurait gravement manqué à ses obligations.

Dès lors qu'il est ainsi désormais admis de part et d'autre que l'exécution du mandat d'intérêt commun ne peut se poursuivre en raison de l'existence de manquements réciproques, le principe de la cessation du contrat d'agent commercial est donc acquis, chacune des parties reconnaissant que la relation contractuelle a définitivement pris fin et entendant en faire supporter la responsabilité à l'autre.

Aux termes des articles L. 134-12 et L. 134-13 du Code de commerce en cas de cessation de ses relations avec le mandant l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi, sauf si la cessation du contrat est provoquée par sa faute grave ou si la rupture résulte de son initiative, à moins que dans ce dernier cas cette cessation ne soit justifiée par des circonstances imputables au mandant.

Bien que la société Floradis ait engagé la procédure aux fins de résiliation judiciaire du contrat, elle ne peut être considérée comme ayant pris l'initiative de la rupture au sens de l'article L. 143-13 2°, puisque la relation contractuelle s'est poursuivie durant l'instance et que la cessation du contrat n'est intervenue que sur décision du tribunal.

Il n'est ainsi pas nécessaire de rechercher l'existence d'éventuelles circonstances imputables à la société CGV, alors qu'en présence de demandes réciproques en résiliation judiciaire du contrat d'agent commercial seule une faute grave de l'agent pourrait être de nature à le priver d'une indemnité de rupture.

(2) La société CGV reproche tout d'abord à la société Floradis d'avoir manqué à son obligation de non-concurrence en exerçant une activité complémentaire de représentation commerciale dans le même domaine de la vidéosurveillance et de la sonorisation.

Il résulte cependant des développements précédents afférents à la demande de production de pièces sous astreinte que les simples soupçons de la société CGV ne sont étayés par aucun élément objectif et qu'il est au contraire démontré que le complément de chiffre d'affaires réalisé par la société Floradis provenait d'une activité accessoire non concurrentielle de négoce de matériel électrique et électronique, de sorte que ce grief doit être écarté.

(3) La société CGV se plaint ensuite de ce que la société Floradis aurait organisé sa cessation progressive d'activité et manqué à son obligation de démarchage et de prospection, ce qui résulterait de l'effondrement de ses résultats commerciaux malgré le caractère très porteur du marché de la télésurveillance, de la réalisation de l'essentiel de son activité dans le département du Rhône au détriment de la quasi-totalité des autres départements de son secteur, de l'établissement de rapports d'activités laconiques et de l'absence de diligences en vue de l'obtention de l'important marché du nouveau stade des lumières de la ville de Lyon.

Mais il résulte des pièces du dossier :

Qu'aucune liste de clients à visiter ne figure en annexe au contrat d'agent commercial,

qu'un chiffre d'affaires a été réalisé avec les trois clients (Vigilec, Avantage video et ATIFT) avec lesquels la société CGV avait spécialement demandé à la société Floradis de prendre contact,

que selon l'historique du chiffre d'affaires par département des commandes ont été obtenues dans 15 départements sur les 17 composant le secteur géographique de l'agent, ce qui atteste de l'existence d'un travail de prospection commerciale sur l'ensemble du secteur concédé, dont la réalité résulte en outre des rapports de visite établis par l'agent, étant observé que si l'essentiel du chiffre d'affaires a été réalisé dans le département du Rhône, connaissant une forte activité économique du fait de l'attractivité de la métropole lyonnaise, cette circonstance ne constitue pas une preuve du délaissement prétendu des autres départements,

que les rapports de visite rédigés par la société Floradis contiennent les informations exigées par l'article 4.2 du contrat, puisqu'y figure systématiquement un commentaire qualifiant les diligences accomplies et les éventuelles remarques de la clientèle,

que si le chiffre d'affaires réalisé par la société Floradis sur son secteur a connu une baisse constante et importante entre les années 2006 et 2013, cette diminution d'activité, également préjudiciable à l'agent qui a subi dans le même temps une baisse proportionnelle de ses commissions très partiellement compensée par son activité accessoire de négoce de matériel électrique et électronique, ne peut être imputée à une passivité commerciale fautive de l'agent alors qu'il est établi par de très nombreux échanges de courriels, attestations et comparatifs de prix que la clientèle s'est progressivement détournée des produits de la société CGV en raison notamment de difficultés de livraison et de service après-vente, de dysfonctionnements et d'un manque de compétitivité tarifaire,

qu'aucun objectif commercial chiffré n'a été contractuellement assigné à la société Floradis, qui n'a été solennellement mise en garde relativement à la baisse de son chiffre d'affaires qu'à compter de la fin de l'année 2013 à une époque où la rupture était consommée, ainsi que cela ressort des divers comptes rendus de réunions et des courriers émanant de la société CGV, qui avait manifestement toléré antérieurement cette situation,

que la société CGV ne peut enfin sérieusement affirmer sans aucune offre de preuve que la société Floradis n'aurait accompli aucune diligence en vue de l'obtention de l'important marché du stade des lumières de Lyon, la perte de ce marché, dont on ignore s'il a été attribué sur appel d'offres ou de gré à gré, ne constituant pas à l'évidence une preuve de la carence prétendue de l'agent, qui affirme au contraire avoir eu des contacts concernant ce projet.

En considération de l'ensemble de ces éléments la cour estime par conséquent qu'il n'est pas établi que la société Floradis a sciemment fait le choix d'organiser la cessation programmée de son activité de représentation commerciale en négligeant de faire les efforts nécessaires de démarchage et de prospection de la clientèle.

(4) Il est encore reproché à la société Floradis une entrave à l'action commerciale qui serait caractérisée par son refus de développer la commercialisation de produits de détection périmétrique de la marque Optex, de participer aux réunions commerciales au siège de la société mandante et de rencontrer la clientèle en présence de l'un de ses représentants, Monsieur B.

Le contrat d'agent commercial qui a été régularisé entre les parties le 7 juin 2005 en vue de la commercialisation de solutions et produits de vidéosurveillance et sonorisation professionnels n'impose cependant nullement à la société Floradis d'accepter une extension d'activité à de nouveaux produits. La proposition qui lui a été faite le 16 mai 2013 concernant une nouvelle " typologie " de produits de détection périmétrique démontre d'ailleurs que selon la société CGV elle-même l'extension envisagée ne présentait aucun caractère obligatoire (il est mentionné " si vous souhaitez bénéficier de cet enrichissement... dans les mêmes conditions - que - le contrat ") et nécessitait la régularisation d'un véritable avenant formalisé par un retour du courrier revêtu de la signature de l'agent sous la mention " bon pour adjoindre à la vidéosurveillance et sonorisation professionnelle des détecteurs périmétriques ".

Le refus de la société Floradis de consentir à cette extension contractuelle, qui a été acté au compte rendu de la réunion du 16 septembre 2013, n'est donc pas en soi fautif, sauf abus dûment caractérisé.

Or, outre le fait que cette proposition est intervenue à un moment où les relations entre les parties étaient déjà fortement dégradées (l'assignation introductive d'instance est en date du 20 août 2013), la société Floradis affirme, sans être contredite sur ce point précis, qu'elle ne disposait pas d'informations techniques suffisantes sur les produits de la marque Optex, qui étaient déjà distribués en région Rhône Alpes par plus de 10 concurrents, ce qui constitue un motif de refus objectif exclusif de tout abus.

De la même façon le contrat ne faisait pas obligation à l'agent commercial de participer à des réunions périodiques au siège de la société mandante, et il est seulement établi que la société Floradis a refusé de se rendre à l'ensemble des réunions organisées à Strasbourg à la fin de l'année 2013, dont la société CGV avait décidé unilatéralement qu'elles se tiendraient désormais tous les mois, et non plus deux fois par an comme auparavant.

Dès lors qu'il n'est pas établi que la présence à ces réunions de la société Floradis, qui restait en contact électronique et téléphonique permanent avec la société CGV, était indispensable à la bonne exécution du mandat, aucun comportement gravement fautif de l'agent ne saurait donc être retenu de ce chef, étant observé qu'il est établi que celui-ci a participé aux dernières réunions des 25 novembre 2013 et 31 mars 2014, ce qui démontre l'absence de toute obstruction systématique.

Enfin la société Floradis démontre, messages électroniques à l'appui, qu'elle n'a pas délibérément fait obstacle à la visite de certains clients en présence du représentant de la société mandante, mais qu'elle a seulement sollicité en vain des précisions sur la liste des clients à traiter, ce qui ne saurait être qualifié d'entrave à l'action commerciale.

(5) Il est également reproché à la société Floradis un manquement à son obligation d'information, qui serait caractérisée par un défaut de communication relativement aux attentes de la clientèle, à la particularité du secteur géographique ou aux actions menées par la concurrence d'une part, et par un refus de transmission des devis et des objectifs fixés d'autre part.

Aux termes de l'article 4 du contrat il est stipulé que les rapports entre les parties sont régis par une obligation de loyauté et un devoir réciproque d'information et que les sociétés Floradis et CGV se tiendront régulièrement informées de la situation du marché, des souhaits de la clientèle, des actions de la concurrence et des modifications de leur politique commerciale respective. Il est également prévu que l'agent adressera au mandant des rapports de visite écrits comportant notamment les éventuelles remarques de la clientèle nécessaires à une bonne compréhension de ses besoins et de l'évolution du marché.

La société Floradis justifie par la production de divers courriels qu'elle a tenu informée la société CGV des tarifs des concurrents, de ses difficultés de commercialisation compte tenu des prix pratiqués par la concurrence et des contacts obtenus hors secteur.

Elle démontre ainsi avoir satisfait à son obligation d'information, qui ne comprenait pas celle de communiquer les devis établis ni ses propres objectifs, le contrat prévoyant seulement que la rémunération de l'agent est acquise après encaissement par le mandant des factures sur la base d'un relevé mensuel de commissions établi par celui-ci.

Il sera au demeurant observé que le contrat, reprenant sur ce point les dispositions de l'article L. 134-4 du Code de commerce, prévoit que l'obligation d'information est réciproque, mais que la société CGV n'établit pas avoir elle-même informé régulièrement son agent de la situation du marché et de l'état de la concurrence.

Le grief inconsistant de défaut d'information ne saurait donc être retenu.

(6) Il est reproché enfin à la société Floradis une malveillance, voire une malhonnêteté, qui serait caractérisée par le fait qu'elle a utilisé irrégulièrement, à partir de matrices internes modifiées, des documents commerciaux à l'en tête de la société CGV sans que son nom ni sa forme sociale n'apparaissent, ce qui a eu pour effet de créer une apparence d'offres directes et de priver ainsi la société mandante de sa faculté de refuser les commandes, mais aussi de créer une confusion dans l'esprit de la clientèle amenée à croire que la société CGV disposait d'un établissement secondaire à Lyon en méconnaissance totale de l'essence même du contrat d'agent commercial en vertu duquel l'agent agit en toute indépendance.

Il est cependant formellement établi par le courriel de la société CGV du 20 novembre 2012, par les trames de devis et par les captures du site Internet de la mandante que la société Floradis a utilisé les matrices de documents commerciaux établies et communiquées par la société CGV elle-même et directement accessibles à partir de son site Internet.

Or sur ces documents, qui n'ont été modifiés que postérieurement à l'introduction de l'instance, il est mentionné que la société CGV dispose d'une agence Rhône Alpes Provence, que Monsieur Laurent F. est responsable de ce secteur, mais il n'est à aucun moment indiqué que la venderesse est représentée par la société Floradis, dont les éléments d'identification ne sont donc pas fournis.

La preuve est ainsi rapportée de ce que la société Floradis a utilisé en toute transparence, sans les falsifier, les modèles de documents commerciaux rédigés par la société CGV, qui n'a d'ailleurs à aucun moment protesté avant l'introduction de l'instance et qui ne peut donc s'en prendre qu'à elle même s'il en est résulté un risque de confusion.

Au demeurant le contrat prévoit que la société Floradis a pour mission de négocier la vente des solutions et produits, qu'elle vendra les produits au nom et pour le compte de la société CGV, que les ordres de la clientèle seront transmis directement à cette dernière et que ce n'est que dans le cas où l'agent recueillerait les ordres de commande que ceux-ci ne seraient considérés comme définitivement acceptés qu'après confirmation écrite du mandant, ce dont il résulte que sous réserve du respect de ses tarifs et de ses conditions générales de vente la société CGV était immédiatement engagée par les commandes passées en son nom sur son papier à entête.

Ce dernier grief ne saurait donc pas davantage être retenu.

La cour observe enfin que la société CGV s'est opposée dans un premier temps à la résiliation judiciaire du contrat demandée par la société Floradis, ce qui implique que malgré les manquements qu'elle invoque aujourd'hui elle considérait elle même que la relation contractuelle pouvait se poursuivre.

Cela confirme que les griefs faits à l'agent commercial ne sont pas constitutifs de la faute grave visée à l'article L. 134-13 du Code de commerce, laquelle doit rendre impossible le maintien du lien contractuel.

La preuve de la faute grave de la société Floradis n'étant pas rapportée, la cessation du contrat d'agent commercial ouvre par conséquent droit au profit de cette dernière à l'indemnité compensatrice prévue par l'article L. 134-12 du Code de commerce.

Sur la demande en paiement des commissions au titre des ventes réalisées auprès des clients du groupe " affaire "

La société Floradis soutient que le contrat d'agent commercial du 7 juin 2005 n'exclut aucun client, que l'avenant du 10 septembre 2007, auquel elle n'a pas consenti de façon libre et éclairée, ne définit nullement les termes " affaire " et " technique ", qu'elle a régulièrement visité les clients dits " autoroutiers " sans opposition de la part de la société mandante et que l'esprit du contrat était manifestement de conférer une exclusivité à l'agent commercial.

S'agissant du montant de sa réclamation la société Floradis calcule les commissions perdues à partir des éléments qu'elle détient, ce qui représenterait un total de chiffre d'affaires de 15 285 120 € sur les 9,5 années de la relation contractuelle et une marge brute de 2 751 322 €, sur laquelle elle applique le taux de commissionnement contractuel de 35 %.

Contestant la prescription invoquée par la société CGV, elle fait valoir qu'elle n'a commencé à courir qu'en 2012, époque à laquelle elle a eu connaissance du chiffre d'affaires litigieux qui lui avait été dissimulé.

La société CGV réplique :

que l'avenant du 17 novembre 2007, qui a été longuement négocié entre les parties et librement accepté en toute connaissance de cause par la société Floradis, avait pour seul objet de préciser les modalités financières de la rémunération, et non pas d'exclure l'agent de certains marchés qualifiés " affaire ",

que la société Floradis aurait en effet été commissionnée sur de tels marchés si des commandes avaient été obtenues par son intermédiaire,

que la société Floradis ne bénéficiait d'aucune exclusivité de vente sur le secteur géographique concédé,

qu'en toute hypothèse le chiffrage opéré par l'appelante est purement théorique et fantaisiste.

Sur ce

Aux termes de l'article L. 134-6 alinéa 2 du Code de commerce " lorsqu'il est chargé d'un secteur géographique ou d'un groupe de personnes déterminé, l'agent commercial a également droit à la commission pour toute opération conclue pendant la durée du contrat d'agence avec une personne appartenant à ce secteur où à ce groupe ".

Au sens de ce texte l'agent commercial qui exerce son activité dans un secteur géographique déterminé a droit à la commission afférente aux opérations conclues avec des clients relevant de ce secteur, même si elles l'ont été sans son intervention.

Ce droit à un commissionnement indirect n'est toutefois pas d'ordre public, puisque l'article L. 134-6 ne relève pas du champ d'application de l'article L. 134-16, qui répute non écrite toute clause ou convention contraire à plusieurs dispositions limitativement énumérées du statut d'agent commercial, au nombre desquelles ne figure pas l'article L. 134-6.

Par une clause expresse les parties peuvent donc décider que l'agent chargé d'un secteur géographique déterminé n'aura pas droit à un commissionnement indirect.

Tel est le cas en l'espèce alors que par avenant du 10 septembre 2007, revêtu de la signature du dirigeant de la société Floradis sous la mention manuscrite " bon pour accord " il a été décidé que pour les marchés dits " techniques " nécessitant un travail du siège le commissionnement sera assis sur la moitié de la marge réalisée et que lorsqu'un marché sera déclaré " affaire " " le commissionnement sera attribué au commercial étant à l'origine du dossier et ayant obtenu la commande ".

Si cet avenant ne définit pas le marché " affaire ", il résulte en substance des courriers préparatoires de la société CGV des 21 mai 2007 et 15 juin 2007 que ce type de marché est celui qui est traité directement par le siège de la venderesse auprès de clients d'importance nationale, étant observé que par un courrier du 1er août 2012 la société CGV a déclaré que l'ensemble des commandes liées au marché autoroutier relevaient des marchés " affaire ", avec pour conséquence que le commissionnement sera attribué au commercial étant à l'origine du dossier et ayant obtenu la commande.

La société Floradis ne peut tout d'abord sérieusement soutenir qu'elle n'aurait pas consenti de façon libre et éclairée à l'avenant du 10 septembre 2007, dont les termes ont été négociés pendant plusieurs mois.

Elle ne sollicite pas, en effet, la nullité de cet acte pour vice du consentement et n'apporte aucun élément à l'appui de son affirmation selon laquelle son accord aurait été obtenu sous la " contrainte ".

Ainsi, elle ne peut demander que l'avenant litigieux lui soit déclaré inopposable au seul motif qu'elle n'en aurait pas mesuré la véritable portée, alors qu'il lui appartenait en qualité de professionnelle avisée d'obtenir les informations et éclaircissements nécessaires avant de s'engager.

La société Floradis n'est pas davantage fondée à soutenir qu'elle bénéficiait d'une exclusivité sur son secteur. Ni le contrat ni aucun de ses deux avenants ne contient, en effet, une clause de représentation exclusive, et si elle en appelle à l'esprit du contrat, il n'existe pas d'indices précis corroborant cette analyse.

Il n'est pas justifié, en outre, d'un engagement hors contrat de la société CGV de rémunérer l'agent pour l'ensemble des ventes intervenues sur son secteur. Les courriers de la société mandante des 1er août 2012 et 16 septembre 2013 précisent seulement, contrairement à ce qui est soutenu, que les commandes liées au marché autoroutier et au marché transport relèvent des marchés " affaire " au sens de l'avenant du 10 septembre 2007, mais ne contiennent aucun engagement de rémunérer les ventes indirectes.

L'avenant du 10 septembre 2007 a donc valablement dérogé aux dispositions de l'article L. 134-6 alinéa 2 du Code de commerce en privant l'agent de son droit à un commissionnement indirect au titre des commandes passées avec des clients relevant de son secteur géographique dans le cadre des marchés du type " affaire ". Il n'a pas, en effet, été porté atteinte à son droit de commissionnement direct, puisqu'il a été stipulé que " le commissionnement sera attribué au commercial étant à l'origine du dossier et ayant obtenu la commande ", ce qui n'excluait pas que la société Floradis pût être rémunérée au titre d'un marché " affaire " s'il avait été négocié et conclu par son intermédiaire.

Il appartient donc à la société Floradis d'établir que les marchés conclus avec les quatre clients d'importance nationale (SNEF, Spie SE, ETDE/Bouygues et Eiffage Energie), au titre desquels elle prétend être commissionnée, l'ont été par son intermédiaire.

Or si elle justifie avoir eu des contacts avec ces clients importants et avoirs émis des devis, elle n'établit pas avoir elle-même négocié ni surtout obtenu des commandes importantes dans le cadre de marchés ayant nécessité l'appui du siège de la société CGV en raison de leur particulière technicité.

Sa demande de rappel de commissions au titre des ventes réalisées auprès des clients du groupe " affaire " a par conséquent justement été rejetée par le tribunal, dont la décision mérite confirmation sur ce point.

Sur la demande en paiement d'une indemnité de rupture :

La société Floradis réclame à ce titre, conformément à une jurisprudence habituelle, une indemnité correspondant à deux années de commissions par référence à sa rémunération moyenne perçue entre 2006 et 2012 (73 675 X 2), mais elle entend inclure en sus dans la base de calcul le montant des commissions dues mais non versées au titre des ventes réalisées auprès des clients du groupe " affaire ", ce qui porte la moyenne annuelle à la somme de 175 039 €, d'où sa réclamation d'un montant de 350 078 €.

La société CGV réplique :

que la société Floradis, qui refuse de produire ses bilans en se prévalant d'une prétendue confidentialité, ne justifie pas avoir subi un préjudice, puisqu'elle a continué à exercer après la rupture du contrat une activité de vente dans le domaine de la télésurveillance auprès de ses anciens clients ou avec d'autres mandants, ce qui résulte du rapport d'enquête privée des 13 et 14 octobre 2015,

que postérieurement à la rupture du contrat son chiffre d'affaires s'est effondré dans le secteur initialement confié à la société Floradis, ce qui démontre que celle-ci a conservé sa clientèle, qui est principalement composée d'amis intimes de son dirigeant,

qu'en toute hypothèse aucune disposition légale ne prévoit que l'agent commercial a droit à deux années de commissions, tandis que toute indemnité éventuelle devra être calculée sur la base du commissionnement des deux dernières années.

Sur ce

Il ne résulte pas du seul rapport d'enquête privée commandé par la société CGV que la société Floradis aurait poursuivi auprès de ses clients historiques après la cessation du contrat une activité de commercialisation de solutions et de produits de vidéosurveillance, la preuve étant seulement rapportée de l'exercice d'une activité de négoce de matériel électrique et électronique.

Le refus de la société Floradis de communiquer ses bilans au-delà du 30 septembre 2014 peut, certes, être interprété comme une volonté de sa part de dissimuler le volume de son activité postérieurement à la rupture du contrat d'agent commercial.

Cependant, à supposer même qu'elle ait été en mesure de reconstituer rapidement son chiffre d'affaires antérieur, cette circonstance ne suffit pas à établir qu'aucun préjudice n'a été subi, puisque la société Floradis aurait été en mesure de développer de la même façon son activité complémentaire de négoce si le contrat d'agent commercial s'était poursuivi, ce qui caractérise l'existence d'un manque à gagner, y compris dans l'hypothèse du maintien du chiffre d'affaires postérieurement à la rupture.

Eu égard à la durée de la relation contractuelle (9,5 ans), l'indemnité compensatrice due à l'agent, en l'absence de faute grave, en application de l'article L. 134-12 du Code de commerce sera par conséquent fixée à deux années de commissions, calculées sur la base de la moyenne des commissions HT perçues au cours des trois derniers exercices complets ayant précédé la rupture, en excluant de la base de calcul la rémunération réclamée au titre des ventes réalisées auprès des clients du groupe " affaire ", dont il a été précédemment jugé qu'elle n'était pas due.

Au vu du relevé récapitulatif des commissions versées il sera par conséquent alloué à la société Floradis une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi d'un montant de 92 933 € [(55 239,86 + 47 751,74 +36 407,22 /3) X2], ce qui conduit à la réformation du jugement sur ce point.

Sur la demande en paiement d'un solde de commissions

La société Floradis prétend qu'un avoir de 616,81 € a été déduit par erreur à deux reprises et que la société CGV est redevable d'une somme de 6 000 € représentant des frais de déplacement afférents au service après-vente n'incombant pas à l'agent commercial.

Cependant selon le contrat conclu entre les parties le 7 juin 2005 l'agent commercial exerce son activité en toute indépendance et assume l'intégralité des frais inhérents à son activité.

Il s'en déduit que la société Floradis devait obtenir l'accord préalable du mandant avant d'engager des frais lui incombant, de sorte qu'à défaut d'établir qu'elle aurait été contrainte d'effectuer des interventions de service après-vente en raison de la défaillance de la société CGV, elle n'est pas fondée à réclamer le paiement de prétendus frais de déplacement sur la base de sa seule facture non détaillée du 28 novembre 2014.

Il ne résulte pas en outre de la pièce n° 184 produite par l'appelante qu'un avoir de 616,81 € aurait fait l'objet d'une double déduction.

La société Floradis sera par conséquent déboutée de sa demande en paiement de la somme de 6 616,81 € TTC.

Sur la demande reconventionnelle en paiement de la valeur du matériel de démonstration non restitué :

La société CGV fait valoir que selon les termes du contrat le matériel de démonstration doit lui être restitué à son siège social et que la preuve n'est pas rapportée d'une telle restitution.

Elle soutient donc qu'il appartient à la société Floradis de restituer ce matériel en parfait état à son siège social, et non pas de le tenir à disposition, et à défaut de payer la somme de 11 762,40 € correspondant à la valeur de ce matériel.

La société Floradis réplique que la société CGV a refusé toutes ses propositions de restitution, qu'au cours des années précédentes le matériel de démonstration était remis à un transporteur avec enlèvement à Lyon et qu'en toute hypothèse le matériel n'a plus aujourd'hui après utilisation qu'une valeur résiduelle, qui ne peut correspondre au prix public d'un matériel neuf.

Sur ce

Le contrat stipule que les collections et documentations confiées en dépôt à l'agent-commercial demeurent la propriété de la société CGV et devront lui être restituées en bon état en cas de rupture de la relation contractuelle.

Il appartient donc à la société Floradis de restituer à ses frais le matériel de démonstration, et non pas simplement de le tenir à disposition de la société mandante.

Il résulte des correspondances échangées sur ce point entre les parties, dont notamment les courriers de son conseil des 22 mai et 9 juin 2015, que la société Floradis tenait le matériel à disposition et entendait le remettre au représentant de la société CGV à l'occasion de l'un de ses déplacements dans la région lyonnaise.

Il est dès lors prétendu à bon droit que la société Floradis a manqué à son obligation contractuelle de restitution, puisqu'il lui appartenait de faire le déplacement au siège de la société CGV ou de remettre à ses frais le matériel à un transporteur, ce qui n'a pas été fait.

La société Floradis sera par conséquent condamnée à procéder à la restitution de ce matériel dans un délai d'un mois à compter de la signification du présent arrêt, puisque l'obligation de restitution doit d'abord être exécutée en nature.

À défaut elle sera condamnée à une restitution en valeur, qui doit cependant prendre en compte l'usure des matériels de démonstration, dont il résulte de la liste établie par la société CGV et de ses annexes (pièce n° 337) que pour certains d'entre eux ils sont en possession de l'agent depuis le 20 décembre 2006.

Ainsi, au vu des bons de livraison versés au dossier un abattement général de 50 % sera pratiqué sur la valeur initiale des matériels litigieux, de sorte qu'à défaut de restitution en bon état dans le délai imparti la société Floradis sera condamnée au paiement de la somme de 5 881,20 € TTC (11 762,40/2).

Sur l'article 700 du Code de procédure civile :

L'équité commande de faire à nouveau application en cause d'appel de l'article 700 du Code de procédure civile au profit de la société Floradis.

Par ces motifs, LA COUR, statuant contradictoirement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile et après en avoir délibéré conformément à la loi, Dit n'y avoir lieu à sursis à statuer, Rejette la demande de production sous astreinte des justificatifs de l'activité professionnelle complémentaire de la société Floradis depuis l'année 2009, Confirme le jugement déféré en ce qu'il a dit et jugé que la SARL Floradis avait droit à une indemnité compensatrice du préjudice subi ensuite de la cessation du contrat d'agent commercial conclu entre les parties le 7 juin 2005, débouté la SARL Floradis de sa demande en paiement d'un rappel de commissions au titre des ventes réalisées auprès des clients du groupe " affaire " et condamné la SAS CGV au paiement d'une indemnité de procédure de 3 000 €, Réforme le jugement déféré pour le surplus et statuant à nouveau en y ajoutant : Constate au vu des demandes réciproques de résiliation judiciaire que le principe de la résiliation du contrat d'agent commercial conclu entre les parties le 7 juin 2005 est acquis, Dit et juge que la cessation du contrat n'est pas imputable à la faute grave de l'agent commercial, Condamne la SAS CGV à payer à la SARL Floradis la somme de 92 933 € à titre d'indemnité compensatrice du préjudice subi ensuite de la cessation du contrat d'agent commercial, Déboute la SARL Floradis de sa demande en paiement de la somme de 6 616,81 € au titre d'un solde de commissions, Condamne la SARL Floradis à restituer en bon état et à ses frais au siège de la société CGV le matériel de démonstration en sa possession, tel que décrit dans la liste établie le 27 janvier 2015 par cette dernière (pièce n° 337 de l'intimée), et ce dans le délai d'un mois à compter de la signification du présent arrêt, et à défaut la condamne à payer à la société CGV la somme de 5 881,20 € TTC, Condamne la SAS CGV à payer à la SARL Floradis une nouvelle indemnité de 3 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne la SAS CGV aux entiers dépens dont distraction pour ceux d'appel au profit de maître Emmanuelle Pohu, avocat.