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Décisions

CA Lyon, 1re ch. civ. B, 20 février 2018, n° 16-05862

LYON

Arrêt

PARTIES

Défendeur :

BMW AG (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Carrier

Conseillers :

Mme Papin, M. Ficagna

TGI Lyon, du 13 juill. 2016

13 juillet 2016

EXPOSÉ DE L'AFFAIRE

Monsieur X a acquis le 27 mai 2009 un véhicule d'occasion de marque BMW avec un kilométrage de 99 876 unités pour un montant TTC de 13 100 euros auprès du garage Arno.

Le 11 avril 2010, Monsieur X a amené le véhicule aux fins de réparation au garage Verne suite à un problème de " démarrage à froid " et à un " trou à la décélération ".

Le 15 avril 2010, le garage Verne, réparateur agréé BMW, diagnostiquait une déficience des bougies de préchauffage.

Le 28 août 2010, le véhicule de Monsieur X a subi une panne.

Le 9 septembre 2010, le garage Alex Auto rédige une facture pour la somme de 83,72 euros (kilométrage noté : 115 000 unités) pour :

- fumée noire et moteur qui tourne mal,

- dépose tubulure admission pour papillon cassé,

- non réparation à la demande du client,

- véhicule sorti sans remorque.

Le 9 septembre 2010, Monsieur X sollicite, par lettre recommandée avec accusé de réception, la prise en charge de l'intégralité des travaux par les garages Arno et Verne.

Le 9 février 2011, une réunion d'expertise amiable contradictoire a été réalisée par Monsieur Z en présence du garage Verne à la demande de Monsieur X

Par acte d'huissier en date du 6 février 2012, Monsieur X a sollicité la désignation d'un expert judiciaire afin que celui-ci se prononce sur les désordres allégués et par ordonnance en date du 19 mars 2012, Monsieur Z a été désigné en qualité d'expert judiciaire par le Tribunal de grande instance de Lyon.

Par ordonnance de référé du 14 janvier 2013, à la demande de la SAS Arno qui a fait délivrer assignation à la société BMW, les opérations d'expertise ont été étendues à cette dernière.

Le 24 juin 2013, Monsieur Z a rendu son rapport aux termes duquel l'existence d'un vice de conception, en germe lors de la vente et non décelable par un acheteur non professionnel, a été confirmée.

Suite à une assignation en date du 15 mai 2014, par jugement en date du 13 juillet 2016, le Tribunal de grande instance de Lyon a déclaré les demandes de Monsieur X irrecevables, faute d'avoir satisfait à l'obligation d'assigner à court délai édictée par l'article 1648 du Code civil, dans sa rédaction en vigueur et applicable aux faits de l'espèce et l'a condamné à verser à la société BMW la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 26 juillet 2016, Monsieur X a interjeté appel total.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 1er septembre 2017, il demande à la cour de :

- Infirmer dans toutes ses dispositions le jugement rendu par le Tribunal de grande instance de Lyon le 13 juillet 2016,

Et par conséquent :

- Dire et juger recevable l'action engagée par Monsieur X,

- Prononcer la résiliation de la vente du 27 mai 2009,

- Condamner la société BMW AG à payer à Monsieur X la somme de 13 100 euros en remboursement du prix de la voiture,

- Condamner la société BMW AG à payer à Monsieur X la somme de 7 700 euros au titre de son préjudice de jouissance,

- Condamner la société BMW AG à payer à Monsieur X la somme 350,50 euros au titre du remboursement du certificat d'immatriculation,

- Condamner la société BMW AG à payer à Monsieur X la somme de 662,58 euros à titre de remboursement des factures émises par les garages Arno et Verne,

- Condamner la société BMW AG à payer à Monsieur X la somme de 2 900,78 euros à titre de remboursement des frais d'expertise,

- Rejeter toutes demandes, conclusions et fins contraires.

- Condamner la société BMW AG à payer à Monsieur X la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Condamner la même aux entiers dépens distraits au profit de Me Céline M., avocat, sur son affirmation de droit en application des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Aux termes de ses conclusions récapitulatives notifiées le 4 septembre 2017, la société BMW demande à la cour de :

Vu l'article L. 110-4 du Code de commerce,

Vu les articles 1641 et suivants du Code civil,

- Confirmer le jugement rendu par le Tribunal de grande instance de Lyon le 13 juillet 2016, en ce qu'il a déclaré Monsieur X irrecevable en ses demandes dirigées à l'encontre de BMW AG et fondées sur les dispositions des articles 1641 et suivants du Code civil, faute pour ce dernier d'avoir engagé son action à bref délai,

Et, statuant à nouveau,

- Dire et juger que BMW AG est constructeur/fabricant de véhicules neufs et pièces détachées de marque BMW,

- Dire et juger que BMW AG a vendu le véhicule litigieux le 20 avril 2004,

- Dire et juger que l'action de Monsieur X est prescrite en ce qu'elle est dirigée à l'encontre de BMW AG, faute d'avoir été intentée dans le délai prévu par l'article L. 110-4 du Code de commerce tel qu'applicable aux faits de l'espèce,

- Dire et juger que le délai aujourd'hui de 2 ans de l'action en garantie légale des vices cachés ne peut être invoqué qu'à l'intérieur du délai de prescription de droit commun relevant de l'article L. 110-4 du Code précité,

En conséquence,

- Déclarer irrecevable l'action de Monsieur X dirigée à l'encontre de BMW AG,

- Prononcer la mise hors de cause de BMW AG,

- Considérer que le rapport de Monsieur Z ne tire pas les conséquences de ses propres constatations et des éléments objectifs de cette affaire,

- Considérer que la panne précédée de l'utilisation inadaptée du véhicule conjuguée à l'absence d'entretien conformément aux prescriptions du constructeur,

- Considérer que Monsieur X s'abstient de rapporter la preuve, incontestable, de l'existence d'un vice caché précis et déterminé antérieur à la première mise en circulation du véhicule,

- Considérer que les extraits de blogs internet dont Monsieur X entend se prévaloir ne sauraient valoir à titre de preuve judiciaire,

En conséquence,

- Débouter Monsieur X de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions dirigées à l'encontre de BMW AG,

A titre infiniment subsidiaire,

- Considérer qu'il devra être tenu compte du fait que Monsieur X a parcouru avec le véhicule litigieux plus de 16 000 kms et l'a utilisé durant plus d'un an, et que ledit véhicule est âgé, au jour de la rédaction des présentes écritures de plus de 13 ans et a parcouru plus de 116 000 kms,

- Considérer, compte tenu de ce qui précède, qu'il conviendra de déduire du prix de vente dont se serait acquitté Monsieur X auprès du Garage Arno (13 100 euros), la somme de 7 000 euros,

- Considérer que les demandes de Monsieur X ne sont justifiées ni dans leur principe ni dans leur montant,

- Considérer que Monsieur X bénéficie dans le cadre de la présente procédure d'un contrat de Protection Juridique souscrit auprès de la société ACM,

- Considérer que la société ACM a, à ce titre, financièrement assumé l'ensemble des frais et dépens inhérents à la présente affaire,

- Considérer que Monsieur X ne saurait solliciter le remboursement de frais qu'il n'a pas eu à engager,

En conséquence,

- Débouter Monsieur X de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions dirigées à l'encontre de BMW AG,

En toute hypothèse,

- Condamner Monsieur X à payer à BMW AG la somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Condamner Monsieur X aux entiers dépens.

En application des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile il est expressément renvoyé pour les faits, prétentions et arguments des parties aux conclusions récapitulatives déposées.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 21 septembre 2017.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'étendue de la saisine :

Attendu qu'en application de l'article 954 du Code de procédure civile, la cour ne doit statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif ;

Attendu que ne constituent pas des prétentions au sens de l'article 4 du Code de procédure civile les demandes des parties tendant à voir " constater " ou " donner acte ", qu'il n'y sera, par conséquent, pas répondu par la cour,

Attendu que l'appelant remet en cause toutes les dispositions de la décision déférée

Sur la recevabilité de l'action :

Attendu que l'appelant fait valoir que :

- au regard de la prescription de l'action tirée de l'article L. 110-4 du Code de commerce, l'assignation en référé concernant le véhicule litigieux délivrée le 29 octobre 2012 à l'intimée soit dans le délai de prescription a interrompu le délai et qu'un nouveau délai de 5 ans a commencé à courir à partir du 24 juin 2013, date à laquelle l'expert a remis son rapport, de sorte que l'action n'est pas prescrite,

- ayant acheté son véhicule en mai 2009, le délai de deux ans instauré par l'ordonnance en date du 17 févier 2005 est applicable,

- c'est à compter du dépôt du rapport d'expertise qu'il a eu une complète connaissance du vice et de la responsabilité de BMW et que par conséquent le délai doit être calculé, et qu'en toutes hypothèses, l'ordonnance de référé a suspendu les délais,

Attendu que l'intimée réplique :

- que le délai de deux ans de l'action en garantie des vices cachés de l'article 1648 du Code civil est enfermé dans le délai de droit commun de 5 ans résultant de l'article L. 110-4 du Code de commerce et ne se substitue pas à lui,

- que la prescription a commencé à courir du jour de la vente et était acquise au 20 juin 2013, qu'il ne saurait se prévaloir de l'assignation délivrée le 29 octobre 2012, celle-ci l'ayant été par le garage Arno,

- que concernant la forclusion de l'action, s'agissant d'une action directe contre le constructeur et non de l'action contre le vendeur, c'est l'article 1648 du Code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance de 2005, qui implique une action à bref délai, qui s'applique, celui-ci ayant été mis en circulation pour la première fois le 11 mai 2004,

Attendu que le délai de l'action en garantie des vices cachés de l'article 1648 du Code civil ne peut être utilement invoqué qu'à l'intérieur de la prescription de l'article L. 110-4 du Code de commerce dont le point de départ se situe au jour de la vente,

Attendu qu'il n'est pas contesté et résulte de la pièce 11 que BMW AG a fabriqué le véhicule litigieux et l'a vendu à la société BMW Iberica le 20 avril 2004,

Attendu que la prescription de l'article L. 110-4 du Code de commerce était en cours au jour de l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008 soit le 20 juin 2008 qui a réduit de 10 à 5 ans le délai, et que la prescription, était normalement acquise 5 ans plus tard soit le 20 juin 2013,

Attendu que les parties s'opposent sur le caractère interruptif ou non de l'assignation du 12 octobre 2012 par laquelle le garage Arno a assigné la société BMW AG en sa qualité de constructeur et sollicité l'extension à son encontre des opérations d'expertise,

Mais attendu que pour interrompre la prescription, une citation même en référé doit être signifiée à celui qu'on veut empêcher de prescrire, et que les ordonnances de référé déclarant commune à d'autres parties une mesure d'expertise précédemment ordonnée n'ont pas d'effet interruptif de prescription à l'égard de ceux qui n'étaient partie qu'à l'ordonnance initiale et non partie aux ordonnances ultérieures,

Attendu qu'en l'espèce, l'assignation en référé expertise délivrée en date du 6 février 2012 par Monsieur X à la société Arno et au garage Verne n'a aucun effet interruptif de prescription vis-à-vis de la société BMW AG à laquelle la mesure d'expertise n'a été ultérieurement étendue que par une ordonnance du 14 janvier 2013 prise suite à une assignation délivrée par la SAS Arno à la société BMW AG, instance à laquelle Monsieur X n'était pas partie,

Attendu que par conséquent l'action intentée par Monsieur X à l'encontre de la société BMW AG le 15 mai 2014 est prescrite,

qu'il y a lieu par conséquent de confirmer la décision déférée qui a déclaré Monsieur X irrecevable en ses demandes fondées sur les dispositions des articles 1641 et suivants du Code civil,

Sur l'article 700 du Code de procédure civile et les dépens :

Attendu que la décision déférée est confirmée en ce qui concerne les dépens,

Attendu que Monsieur X est condamné aux dépens d'appel et à payer à la société BMW AG la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

Par ces motifs, LA COUR, Confirme la décision entreprise, Y ajoutant, Condamne Monsieur X à payer à la société BMW AG la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne Monsieur X aux dépens de l'appel, Déboute les parties de toutes demandes plus amples ou contraires.