CA Paris, Pôle 5 ch. 5, 15 mars 2018, n° 15-19370
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Parafe (SA), Louis (ès qual.)
Défendeur :
Minelli (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Birolleau
Conseillers :
Mme Schaller, du Besset
Avocats :
Mes Hardouin, Andjerakian-Notari, Santonja
Faits et procédure
Dans le cadre de l'ouverture ou de la réfection de ses magasins, la société Minelli, fabricant et distributeur de chaussures, a commandé la fourniture et la pose des enseignes à la société Parafe SA, de la fin de l'année 2010 jusqu'à la fin de l'année 2012.
Les commandes de la société Minelli ont fortement diminué à partir de la fin de l'année 2012 et ont cessé au cours de l'année 2013.
La société Parafe a pris acte de la rupture des relations commerciales par courrier en date du 4 avril 2014 et, s'estimant victime d'une rupture brutale de la relation commerciale établie, a saisi le Tribunal de commerce de Marseille pour en obtenir réparation sur le fondement de l'article 442-6 I 5° du Code de commerce.
Par jugement en date du 1er septembre 2015, le Tribunal de commerce de Marseille a :
- dit que les relations commerciales entre les sociétés Parafe et la société Minelli avaient un caractère stable, habituel et suivi et constituaient une relation commerciale suivie établie au sens de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce ;
- rejeté les demandes de la société Minelli tendant à dire que la rupture des relations commerciales serait due à des fautes graves et aux manquements de la société Parafe à ses obligations ;
- constaté la brutalité de la rupture des relations commerciales entre les sociétés Parafe et Minelli imputable à la société Minelli ;
- débouté la société Parafe de sa demande concernant le règlement d'un stock à hauteur de 6 400 euros ;
- condamné Minelli au paiement de la somme de 1 913,60 euros au titre de la facture impayée, avec intérêts au taux légal à compter du 1er décembre 2012 ;
- dit que, conformément aux dispositions de l'article 1154 ancien du Code civil, les intérêts au taux légal portant sur la somme de 1 913,60 euros se capitaliseront par périodes annuelles et porteront intérêts au même taux ;
- condamné Minelli à payer à la société Parafe les sommes de 3 538 euros en principal au titre de l'article L. 442-6 I 5° et de 1 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- rejeté les demandes reconventionnelles de la société Minelli.
La société Parafe a régulièrement interjeté appel de ce jugement le 30 septembre 2015.
Par jugement du Tribunal de commerce de Marseille en date du 31 août 2016, la société Parafe a été placée en liquidation judiciaire, la SCP JP. Louis & A. Lageat étant nommée liquidateur judiciaire.
Le liquidateur de la société est intervenu volontairement à la procédure par conclusions en date du 20 décembre 2017.
Prétentions des parties
La SCP JP. Louis & A. Lageat ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Parafe, par dernières conclusions signifiées le 11 janviers 2018, demande à la cour, au visa des articles L. 442-6 I 5° du Code de commerce, 1153-1, 1154 et 1382 anciens du Code civil, de :
- déclarer recevable l'intervention volontaire à la procédure de la SCP JP. Louis & A. Lageat ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Parafe et la reprise d'instance à son profit ;
- dire recevable et bien fondé l'appel formé par la société Parafe à l'encontre du jugement rendu le 29 septembre 2015 par le Tribunal de commerce de Marseille ;
- confirmer ledit jugement en ce qu'il a dit que les sociétés Parafe et Minelli entretenaient de relations commerciales suivies au sens de l'article L. 442-6 I 5° et qu'il y eu rupture brutale de celles-ci imputable à la société Minelli ;
- confirmer le jugement donc appel en ce qu'il a rejeté la demande de Minelli tendant à voir déclarer imputable à des fautes graves et manquement à ses obligations commis par la SA Parafe la rupture brutale des relations commerciales suivies ;
- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a condamné la société Minelli à payer à la SA Parafe la somme de 1 913,60 euros au titre de la facture impayée FC 12/0558 avec intérêts au taux légal à compter du 1er décembre 2012 et dit que, conformément aux dispositions de l'article 1154 ancien du Code civil, les intérêts se capitaliseront par périodes annuelles et porteront intérêt au même taux ;
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Minelli à payer à la SA Parafe la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- réformer le jugement dont appel quant au quantum des condamnations prononcées au préjudice de Minelli et allouées en indemnisation à la SA Parafe du fait de la rupture brutale des relations commerciales suivies ;
- réformer ledit jugement en ce qu'il rejette la demande en paiement du stock de la société Parafe par la société Minelli à hauteur de 6 400 euros ;
- dire que ces condamnations seront au bénéfice du liquidateur judiciaire Maître Louis ;
Et statuant à nouveau,
- dire que la société Parafe et la société Minelli sont en relation commerciale établie depuis le mois de septembre 2009 ;
- dire que la société Minelli a rompu unilatéralement, brutalement et sans préavis, lesdites relations de fait en décembre 2012 et officiellement le 29 juillet 2013 ;
- dire que compte tenu de la durée des relations commerciales ainsi que de la part engendrée par ces dernières dans le chiffre d'affaire de la société Parafe, le préavis doit être fixé à six mois à compter de la rupture officielle soit le 29 juillet 2013.
- dire qu'outre la faute découlant de la rupture des relations sans préavis, la société Minelli s'est rendue coupable d'une faute distincte en ce qu'elle a entretenu sa co contractante durant les huit mois précédent la rupture officielle, dans la plus totale incertitude quant au futur de leur relation commerciale ;
- constater que la marge brute mensuelle réalisée par la société Parafe sur les commandes de la société Minelli, s'évalue à 65 % ;
- condamner en conséquence, la société minelli à payer à Maître Louis ès qualités la somme de 37 301,29 euros au titre de l'indemnisation du préjudice subi du fait de la brutalité de la rupture ;
- condamner la société Minelli à payer à payer à Maître Louis ès qualités la somme de 49 735,05 euros au titre de l'indemnisation du préjudice subi du fait de son attitude antérieure à la rupture officielle des relations commerciales ;
- condamner la société Minelli à payer à payer à Maître Louis la somme de 6 400 euros au titre des enseignes fabriquées en stock ;
- dire que les condamnations porteront intérêts au taux légal à compter du 1er décembre 2012, date de la rupture effective des relations ;
- ordonner la capitalisation des intérêts au visa de l'article 1154 ancien du Code civil ;
En tout état de cause,
- rejeter l'ensemble des demandes formées par Minelli à l'encontre de la SCP Louis & A Lageat en la personne de Maître Louis ès qualités ;
- condamner la société Minelli à payer à Maître Louis ès qualités la somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Elle estime qu'il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a reconnu une rupture d'une relation commerciale suivie établie, entre elle et la société Minelli. Cependant, contrairement au tribunal, elle estime que cette relation est caractérisée depuis 2009 et non depuis 2011. La société Parafe SA fait valoir que des contrats successifs caractérisent une relation commerciale suivie établie au sens de L. 442-6 I 5° sans requérir de contrat d'exclusivité.
Elle considère que cette rupture a été brutale en raison de l'absence de respect d'un préavis d'une durée tenant compte notamment de celle de ladite relation commerciale. Elle argue que le caractère brutal de la rupture n'est pas contesté par la société Minelli. Celle-ci la justifie par des fautes (problèmes de qualité sur chantiers et non-respect des délais) que la société Parafe SA conteste d'autant plus qu'elles ne sont pas prouvées par la société Minelli. La société Parafe SA prétend que la plupart des éléments de preuve de la société Minelli à ce sujet, émanent essentiellement de celle-ci.
Pour l'évaluation du préjudice qu'elle prétend avoir subi, la société Parafe SA dit qu'il faut prendre en compte la perte de la marge brute que la victime pouvait escompter, son manque à gagner pendant la période de préavis et les frais engagés. Elle considère qu'elle doit être indemnisée non seulement du préjudice lié à la brutalité de la rupture, mais aussi de celui résultant de l'attitude de la société Minelli qui a entretenu avant la rupture officielle, son partenaire dans une incertitude l'empêchant de se réorganiser. Sur le préjudice lié à la rupture, elle estime que la durée du préavis doit être fixée au jour où la rupture a été officialisée, et non à celui de la dernière facture. Elle évalue le montant des échanges commerciaux générés par la relation commerciale rompue à 5% de son chiffre d'affaires, et la durée du préavis dont elle aurait dû bénéficier à six mois. Cela représente une somme de 37 301,29 euros. Concernant le préjudice résultant de l'attitude de la société Minelli, elle fait valoir que celle-ci ne passait plus commande avant rupture officielle des relations commerciales. Elle évalue ce préjudice à 49 735,05 euros. En ce qui concerne les stocks et factures impayés, elle évalue respectivement ces sommes à 6 400 euros et 1 913,60 euros.
La société Minelli SA, par conclusions signifiées le 10 janvier 2018, demande à la cour, au visa des articles L 442-6 I 5° du Code de commerce et 9 du Code de procédure civile, de :
A titre principal,
- infirmer le jugement en ce qu'il a dit que les sociétés Parafe et Minelli entretenaient des relations commerciales établies au sens de l'article L 442-6 I 5° du Code de commerce ;
Et statuant à nouveau,
- débouter la société Parafe prise en la personne de son liquidateur la SCP JP Louis & A. Lageat en la personne de Maître J.P Louis de l'entier de ses demandes formées sur le fondement de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce, car mal fondées, en raison de l'absence de caractère établi attaché aux relations entre la société Parafe et la société Minelli ;
A titre subsidiaire,
- infirmer le jugement en ce qu'il a qualifié la rupture de brutale au sens de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce ;
Et statuant à nouveau,
- débouter la société Parafe prise en la personne de son liquidateur la SCP JP Louis & A. Lageat en la personne de Maître J.P Louis de l'entier de ses demandes formées sur le fondement de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce, car mal fondées, en raison de l'absence de brutalité de la rupture alléguée ;
A titre très subsidiaire,
- infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes de la société Minelli tendant à indiquer que la rupture des relations commerciales entre les deux sociétés serait due à des fautes graves et des manquements à ses obligations commis par la société Parafe ;
Et statuant à nouveau,
- débouter la société Parafe prise en la personne de son liquidateur la SCP JP Louis & A. Lageat en la personne de Maître J.P Louis de l'entier de ses demandes formées sur le fondement de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce en raison des graves fautes commises par la société Parafe dans l'exercice de ses prestations, constitutives de fautes contractuelles excluant l'application de l'article L. 442-6 I 5° ;
A titre infiniment subsidiaire,
- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société Parafe de ses demandes tendant à obtenir le paiement de dommages intérêts au titre d'une prétendue attitude antérieure à la rupture officielle des relations commerciales
- infirmer le jugement en ce qu'il a partiellement fait droit aux demandes de la société Parafe et condamné la société Minelli à payer à la société Parafe la somme de 3 538 euros en principal, au titre des dispositions de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
- débouter la société Parafe prise en la personne de son liquidateur la SCP JP Louis & A. Lageat en la personne de Maître J.P Louis de l'entier de ses demandes en raison de l'absence de détermination des préjudices dont elle fait état, de sa carence dans l'administration de la preuve ;
En tout état de cause,
- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté de la société Parafe de ses demandes fondées sur des stocks prétendument restants
- confirmer le jugement en ce qu'il a constaté l'absence de la société Cosmoparis à la présente instance ;
- infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Minelli à payer à la société Parafe la somme de 1 913,60 euros au titre de la facture prétendument impayée ;
- infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Minelli à payer à la société Parafe la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- infirmer le jugement en ce qu'il a mis à la charge de la société Minelli les dépens de l'instance ;
Et statuant à nouveau et y ajoutant
- condamner la SCP JP. Louis & A. Lageat en la personne de Maître J.P Louis ès qualités de liquidateur de la société Parafe à payer à la société Minelli la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.
Elle conteste, à titre principal, l'existence d'une relation commerciale établie entre elle et la société Parafe, en soulignant le caractère précaire de cette relation, notamment au regard de la nature de sa clientèle et du mode de sélection des prestataires en vigueur dans le cadre des chantiers de la société Minelli. Parafe était en effet systématiquement informée de la mise en concurrence sur chaque projet d'ouverture ou réfection de boutique ; elle ne pouvait donc légitimement s'attendre à une stabilité de la relation, la grande variabilité du chiffre d'affaires illustrant cette instabilité.
A titre subsidiaire, la société Minelli argue que le caractère brutal de la rupture n'est pas démontré par la société Parafe SA. En effet, comme énoncé plus haut, la société Parafe SA ne pouvait légitimement s'attendre à une stabilité de la relation. La rupture n'était donc ni soudaine, ni imprévisible.
A titre très subsidiaire, sur la rupture aux torts exclusifs de la société Parafe, la société Minelli prétend que les travaux réalisés par la société Parafe étaient de mauvaise qualité, par exemple un défaut de colle.
A titre infiniment subsidiaire, sur le préjudice allégué du fait de la rupture, la société Minelli fait valoir que les demandes de la société Parafe ne sont pas étayées et les préjudices non caractérisés.
Tout d'abord, la société Minelli considère que, relativement à la durée de sa relation commerciale avec la société Minelli, la société Parafe fait montre d'une grande confusion ; au soutien de cette allégation, la société Minelli s'appuie sur l'exploit introductif d'instance de la société Parafe, sur lequel fait état d'une relation de septembre 2013 à septembre 2013. La société Minelli ajoute que la rupture de ses relations avec la société Parafe, est bien antérieure à la date de la confirmation écrite pour faute le 29 juillet 2013. Au soutien de cette allégation, la société Minelli invoque un courriel du 30 octobre 2012, émanant de Monsieur Joël Boyer. Ce dont il résulte, selon elle, que la société Parafe avait connaissance de la décision de la société Minelli de ne plus lui attribuer de nouveau marché jusqu'à nouvel ordre.
En outre, il appartient à la société Parafe, demanderesse, de prouver son préjudice ; or, elle ne démontre par aucune pièce comptable la réalité du chiffre d'affaires allégué, ne fournit que des courriers émanant d'elle-même. La société Minelli relève que les comptes annuels de la société Parafe, de 2010 à 2013, font état d'une grande constance ; elle en infère l'absence d'impact de la fin de ses relations commerciales avec la société Parafe. Elle ajoute que les éléments sur lesquels se fonde l'expert-comptable pour fixer la marge brute à 65 % de la société Parafe ne sont pas précisés, tandis qu'une marge brute de 10 % est retenue dans des domaines d'activités similaires.
En tout état de cause, sur les stocks et les factures dont il est question, la société Minelli fait valoir la carence de la société Parafe dans l'administration de la preuve. Sur la mise hors de cause de la société Cosmoparis, la société Minelli estime qu'il y a lieu de constater qu'elle n'a pas été appelée à la cause.
Il est expressément référé aux écritures des parties pour un plus ample exposé des faits, de leur argumentation et de leurs moyens.
MOTIFS
Considérant qu'il convient de recevoir la SCP JP Louis & A. Lageat ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Parafe en son intervention volontaire ;
Considérant que l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce dispose qu'" engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers, de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte, notamment, de la durée de la relation commerciale. Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution, par l'autre partie, de ses obligations ou en cas de force majeure. " ;
Considérant que Minelli invoque, pour contester l'existence d'une relation commerciale établie, son caractère précaire en ce que d'une part, l'architecte qu'elle avait sélectionné procédait par voie d'appel d'offres afin d'obtenir des devis de plusieurs prestataires et soumettait Parafe à des consultations d'entreprises, d'autre part, les commandes passées à Parafe étaient de montants variables et ne présentaient aucune régularité ;
Mais considérant que, se bornant à faire référence à un courriel du 23 octobre 2012 de Monsieur Joël Boyer, président directeur général de la société Parafe, lequel ne fait nullement état d'appels d'offres, Minelli ne rapporte pas la preuve du recours à des procédures de consultations d'entreprises ; que, nonobstant le montant variable des commandes passées à Parafe, Minelli ne conteste pas les éléments communiqués par l'appelante relatifs aux chiffres d'affaires réalisés avec Minelli entre 2011 et 2013 (pièce n° 3 Parafe) qui confirment l'existence, sur cette période, d'un flux d'affaires régulier entre Minelli et Parafe ; que les relations entretenues par ces deux sociétés doivent donc être qualifiées d'établies au sens de l'article L. 442-6 I 5° ;
Considérant que Parafe ne justifie pas d'une relation ayant existé à partir de 2009, comme elle le soutient - la correspondance adressée par Parafe à Minelli le 4 avril 2014, faisant état des relations commerciales ayant débuté fin 2009, ne présentant, sur ce point, aucun caractère probant - alors que le récapitulatif de l'activité réalisée avec Minelli ne mentionne que des chiffres d'affaires de 2011 à 2013 (pièce Parafe n° 3) ; qu'il résulte des éléments de la procédure que la relation n'a été entretenue entre Parafe et Minelli qu'à partir de 2011 ;
Considérant que Minelli ne conteste pas sérieusement que plus aucune commande nouvelle n'a été passée à Parafe à partir de décembre 2012, les commandes passées en 2013 n'étant que résiduelles et n'ayant pour objet que de permettre l'écoulement du stock d'enseignes commandées antérieurement (pièce Minelli n° 7 - échange de courriels d'octobre 2013) ; que l'intimée ne conteste d'ailleurs pas une diminution significative de ses chantiers au cours de cette période ; qu'il n'est pas discuté que Minelli a fait connaître, le 29 juillet 2013, sa décision de cesser sa relation avec Parafe et que les relations ont, en tout état de cause, définitivement cessé en septembre 2013 ; qu'il est constant que Minelli s'est abstenue de notifier la durée du préavis qu'elle entendait octroyer - un préavis de quatre mois qui aurait 'de fait' été accordé par Minelli (page 18 des conclusions de Minelli) ne rentrant pas dans les prévisions de l'article L. 442-6 I 5° - mettant ainsi Parafe dans l'impossibilité de disposer de toute la visibilité nécessaire pour rechercher de nouveaux partenaires ;
Considérant que Minelli prétend que les fautes et inexécutions par Parafe de ses obligations contractuelles justifiaient l'absence de préavis ;
Mais considérant que les griefs invoqués au soutien de la dispense de préavis doivent avoir été préalablement notifiés au partenaire délaissé, de façon précise et circonstanciée, et doivent présenter un degré de gravité suffisant pour justifier une absence de préavis de rupture ; que tel n'est pas le cas en l'espèce, dès lors que :
- Minelli ne fait état d'aucune dénonciation précise et préalable à la rupture de juillet 2013, le courrier de Minelli de juillet 2013 ne faisant au surplus référence, en termes très généraux, qu'à "des problèmes de qualité sur nos chantiers et non-respect des délais" ;
- les courriels versés aux débats ne révèlent que des problèmes d'ajustements et de mises au point propres à tout chantier, ces échanges étant d'ailleurs, pour certains, postérieurs à la rupture de la relation (pièces Minelli 3.1, 3.7, 3.8, 3.9, 3.14), ou, pour d'autres, anciens (pièces Minelli 3.18 à 3.34), et ne pouvant donc être invoqués par Minelli au soutien de la rupture de juillet 2013, et étant, en tout état de cause, dépourvus de gravité suffisante pour justifier une dispense de préavis de rupture ;
Considérant que c'est en conséquence à raison que les premiers juges ont dit que la rupture, par Minelli, de la relation commerciale établie était brutale ;
Considérant, sur le préjudice, que, compte tenu de la durée de la relation (2011 - 2013), le préavis raisonnable qui aurait dû être accordé à Parafe doit être fixé à deux mois ; qu'il est indifférent que Parafe ait, postérieurement à la rupture, retrouvé d'autres clients, le préjudice réparable en application de l'article L. 442-6 I 5° s'appréciant à la date de la rupture ; que la SCP JP. Louis & A. Lageat justifie d'une marge brute moyenne annuelle de 74 602,58 euros, pour un taux de marge de 65 % attesté par l'expert-comptable de Parafe, taux auquel Minelli, qui se borne à affirmer qu''il est fort peu probable qu'une telle marge soit réalisée par Parafe" (page 22 de ses conclusions), n'oppose aucun élément sérieux ; que la cour condamnera Minelli au paiement de la somme de 12 433 euros (74 602,58 /12 x 2) à titre de dommages et intérêts en application de l'article L. 442-6 I 5° et réformera en ce sens la décision déférée ;
Considérant que, sur le stock d'enseignes " Minelli ", que la brutalité de la rupture a constitué un obstacle à l'écoulement du stock ; que Minelli a admis que Parafe détenait des enseignes en stock (pièce Minelli n°7 courriel de Marie-Christine Coquelon à Joël Boyer en date du 1er octobre 2013 et réponse de Monsieur Joël Boyer en date du 31 octobre 2013) ; que la SCP JP. Louis & A. Lageat ès qualités produit un état du stock de Parafe qui n'est pas contesté ; qu'en conséquence, la cour condamnera Minelli au paiement de la somme de 6 400 euros et infirmera le jugement entrepris en ce sens ;
Que, sur la facture FC 12/0558 émise par Parafe, Minelli, qui se contente de soutenir qu' " il n'est pas établi que cette facture serait demeurée impayée " (page 23 de ses conclusions), sans démontrer, ni même soutenir qu'elle aurait été réglée, ne la conteste pas sérieusement ; que le jugement dont appel sera en conséquence confirmé en ce qu'il a condamné Minelli au paiement de la somme de 1 913,60 euros, avec intérêts au taux légal et capitalisation des intérêts en application de l'article 1154 ancien du Code civil ;
Que la décision déférée sera confirmée sur le rejet de la demande de réparation du préjudice subi du fait de l'attitude de Minelli antérieure à la rupture officielle des relations commerciales, la faute invoquée à ce titre - celle d'avoir entretenu sa co-contractante durant les huit mois précédant la rupture officielle dans la plus totale incertitude quant au futur de leur relation commerciale - n'étant pas distincte de la brutalité de la rupture ;
Considérant que l'équité commande de condamner Minelli à payer à la SCP JP. Louis & A. Lageat ès qualités la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel ;
Par ces motifs : LA COUR statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, reçoit la SCP JP. Louis & A. Lageat ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Parafe en son intervention volontaire ; confirme le jugement entrepris, sauf sur la condamnation prononcée en application de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce et sur le stock d'enseignes ; statuant à nouveau des chefs infirmés ; condamne la SA Minelli à payer à la SCP JP. Louis & A. Lageat ès qualités les sommes de 12 433 euros à titre de dommages et intérêts en application de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce et de 6 400 euros au titre du stock d'enseignes " Minelli "; condamne la SA Minelli à payer à la SCP Louis & A Lageat ès qualités la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel ; condamne la SA Minelli aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.