CA Paris, Pôle 5 ch. 11, 23 mars 2018, n° 16-12831
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
DBS (Sté)
Défendeur :
Sylma Studio (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Lis Schaal
Conseillers :
Mme Bel, M. Picque
Avocats :
Mes Naboudet-Vogel, Pappas, Happi, Tortigue
Faits, procédure, prétentions et moyens des parties
La société DBS, entreprise de bâtiment, et la société Sylma Studio, société de marketing industriel et audiovisuel, ont signé le 24 janvier 2003 un contrat d'apporteur d'affaires pour une durée d'un an à compter de la signature, avec tacite reconduction à échéance, moyennant une rémunération fixée à 10 % du montant des travaux HT sur la prise de commandes directes ou indirectes sur la clientèle apportée.
Le contrat, exécuté entre 2003 et 2007, a donné lieu au paiement de commissions par la société DBS à la société Sylma Studio d'un montant de 41 982,97 HT.
Après plusieurs années, la société Sylma Studio a revendiqué des commissions auprès de la société DBS pour deux marchés réalisés en 2009 et en 2012 et a adressé de vaines relances.
Par acte du 18 avril 2013, la société Sylma Studio a assigné la société DBS en paiement de la somme de 1 101 443,60 TTC devant le Tribunal de commerce de Bayonne, lequel s'est déclaré incompétent au profit du Tribunal de commerce de Créteil par jugement du 12 mai 2014.
La société Sylma Studio exposait que :
- la société DBS avait l'obligation de faire parvenir les bons de commande et tout document permettant à la société Sylma Studio d'établir la facturation. La société Sylma Studio a demandé sous astreinte la communication de l'ensemble des marchés passés avec les clients qu'elle avait apportés.
- en application de l'article L. 134-11 du Code de commerce, un contrat d'agence à durée déterminée qui continue d'être exécuté par les deux parties après son terme, est réputé transformé en un contrat à durée indéterminée. DBS n'a jamais renoncé à ce contrat.
- c'est grâce à sa seule intervention que la société DBS a pu se rapprocher de la RATP et obtenir les marchés attribués par cette dernière le 8 avril 2009 et le 3 juillet 2009 ; elle a sollicité la condamnation au paiement de 480 810 TTC au titre des commissions contractuelles (article 5 du contrat), des dommages et intérêts à hauteur de 480 810 TTC et la condamnation sur le fondement du droit de suite convenu (article 9 du contrat) pour un montant de 480 810 .
S'y opposant, la société DBS répliquait que :
- La société DBS a réglé 9 factures émises par Sylma Studio pour la période 2004-2007 alors que les activités de cette dernière s'étaient arrêtées depuis 2005. Ce contrat d'apporteur d'affaire était un contrat léonin dépourvu de cause et affecté d'un vice de perpétuité du fait qu'il prévoyait le droit de suite sur les clients apportés sans limitation dans le temps est nul.
- En application de l'article L. 442-6 I alinéa 1 du Code de commerce, la réclamation de commissions portant sur des marchés de 2009 et de 2012 par la société Sylma Studio au titre de son droit de suite après sa cessation d'activité de 2005, représentant une rémunération disproportionnée et sans contrepartie réelle, crée un déséquilibre significatif entre les parties. Le contrat d'apporteur d'affaires est nul en l'absence de cause réelle.
Par jugement contradictoire rendu le 3 mai 2016, assorti de l'exécution provisoire, le Tribunal de commerce de Créteil a :
- condamné la société DBS à régler à la société Sylma Studio la somme de 168 230 euros HT et la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 de Code de procédure civile, débouté l'ensemble de ses demandes de voir prononcer la nullité du contrat ;
- débouté la société Sylma Studio de l'ensemble de ses demandes au titre des dommages et intérêts et le surplus de ses demandes ;
- dit qu'il n'y a plus lieu de statuer sur la demande de communication des pièces sous astreinte.
Aux motifs que :
- la société Sylma Studio a renoncé à sa demande de communication des documents sous astreinte, le tribunal n'a plus lieu de statuer.
- l'existence d'une clause au caractère léonin dans un contrat ne le rend pas nul, la clause étant seulement réputée non écrite; la durée de 5 ans n'est pas excessive dans le cadre du contrat dans la mesure où DBS bénéficie d'une réelle contrepartie du fait du chiffre d'affaires réalisé; L'article 442-6 du Code de commerce n'a été utilisé comme moyen de défense que de manière accessoire, l'exception d'incompétence n'ayant pas été soulevée et DBS ne s'appuyant essentiellement que sur l'article 1131 du Code civil,
- un préavis de 4 mois est prévu alors qu'aucune des parties n'a dénoncé le contrat, la demande de nullité du contrat pour absence de durée déterminée n'est pas fondée.
- le contrat a prévu que la mission de la société Sylma Studio avait pour but de promouvoir les prestations de la société DBS sans obligation de résultat. Par conséquence, le contrat est causé et n'est pas illicite.
- la société Sylma Studio a mis en demeure la société DBS date du 19 février 2013 soit plus de 5 ans après sa mise en demeure précédente qui remontait au 27 juin 2007, le droit de suite de 5 ans n'était pas excessif dans la mesure où DBS bénéficiait d'une réelle contrepartie. La société Sylma Studio est en droit de revendiquer ses commissions pour les deux marchés de 2009 et 2012. En analysant les factures de 6 marchés émises par la société Sylma Studio et réglées par la société DBS sur la période de novembre 2004 à juillet 2007, le taux de commission moyen est de 3,15 % et non de 10 %. L'application du taux de 3,15 % aux deux marchés donne un droit à commission de 126 213 HT.
- le quantum des demandes en dommages et intérêts et au titre du droit de suite, du manquement de loyauté et pour résistance abusive n'est pas justifié.
La société DBS a interjeté appel par acte du 10 juin 2016.
Vu les dernières conclusions notifiées et signifiées par la société DBS le 24 janvier 2018, aux fins de voir la cour :
Vu notamment les articles 6, 1108 ancien, 1131 ancien, 1133 ancien, 1134 ancien et 1780 du Code civil,
Vu les articles L. 442-6 I 1°, L. 134-1 et suivant du Code de commerce,
Vu l'Ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 et ses décrets d'application,
Vu les articles 5 et 564 du Code de procédure civile,
Vu la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008,
Vu les pièces versées aux débats ;
Infirmer en toutes ses dispositions le jugement du Tribunal de commerce de Créteil en date du 3 mai 2016 ;
Statuant à nouveau :
Dire et juger nul et nul effet le contrat d'apporteur d'affaires conclu entre les parties le 24 janvier 2003.
Donner acte subsidiairement à la société SBS, à défaut de nullité du contrat, de ce que cette dernière dénonce et résilie en tant que de besoin ledit contrat par le présent acte ;
Dire et juger ce contrat en toute hypothèse léonine en considération notamment des dispositions du contrat et de la disproportion manifeste entre le mode de rémunération revendiqué et le service prétendument rendu ;
Dire et juger en toute hypothèse sans cause réelle et/ou à tout le moins licite l'obligation prétendue de la société DBS d'avoir à payer à la société Sylma Studio une commission au titre des marchés RATP et Radio France invoquées ;
Dire et juger la société Sylma Studio en toute hypothèse tant irrecevable que mal fondée en l'ensemble de ses demandes et en son appel incident ;
Débouter en conséquence, et en tout état de cause, la société Sylma Studio de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;
Condamner la société Sylma Studio à rembourser à la société les commissions déjà réglées et en toute hypothèse à ce titre la somme de 60 757 ;
Condamner la société Sylma Studio à payer à la société DBS une somme de 50 000 à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive ;
En toute hypothèse :
Condamner la société Sylma Studio à payer la société DBS une somme de 40 000 en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Condamner la société Sylma Studio aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Maître Hatet-Sauval, avocat aux offres de droit, dans les termes et conditions de l'article 699 du Code de procédure civile.
L'appelant fait valoir :
Sur la nullité du contrat du fait de son caractère léonin, la société DBS soutient que le contrat est nul du fait qu'il soit dépourvu de cause réelle et affecté d'un vice de perpétuité.
La société Sylma Studio ne peut pas prétendre être éligible au statut des agents commerciaux dans les articles L. 134-1 et suivants du Code de commerce dans ses rapports avec la société DBS. La société DBS soutient qu'un agent commercial n'a pas de clientèle qui lui est propre, contrairement à la société Sylma Studio qui dispose d'un portefeuille client qu'elle a pu lui présenter.
La société DBS relève que les marchés publics sont évalués et attribués par des commissions d'appel d'offres selon des procédures d'appel public à la concurrence, en respectant des principes de transparence et d'égalité de traitement des candidats et, dès lors, en aucun cas de gré à gré ou grâce à la faveur d'une présentation organisée par un tiers. L'obtention des deux marchés est donc indépendante de toute intervention de la société Sylma Studio. En effet, la RATP était déjà un client régulier de la société DBS avant le contrat conclu avec la société Sylma Studio en janvier 2003.
Elle rappelle que la société Sylma Studio n'a pas démontré avoir conseillé la société DBS sur le contenu de ses offres pour les marchés attribués avant la cessation de ses prestations en 2005 pour prétendre avoir droit à une rémunération. Le simple fait d'être à l'origine de la mise en relation de deux parties ne peux suffire à constituer une réelle contrepartie. La société Sylma Studio n'a pas justifié le caractère déterminant et utile de son travail. Le contrat organise une rémunération sans contrepartie réelle suffisante ou utile.
La société DBS expose que le contrat conclu comporte un engagement perpétuel. L'article 5 du contrat prévoit le droit pour la société Sylma Studio de continuer à prétendre au paiement de commissions sur tous éventuels autres projets que la société DBS pourrait obtenir, y compris après dénonciation, de personnes présentées par la société Sylma Studio sans limitation dans le temps.
Cette dernière prétend ainsi avoir droit à commissions sur tous marchés conclus et à conclure jusqu'en 2022. Le contrat litigieux prévoit également dans son article 8 le droit à indemnité sur toutes factures émises et réglées dans les 5 ans après leur expiration au titre des marchés antérieurement obtenus. Le droit à l'indemnité est limité dans le temps alors que le droit à commission est perpétuel.
La société DBS rappelle que la jurisprudence constante établit le principe selon lequel les engagements perpétuels sont prohibés. Par conséquent, le contrat est nul.
Sur la demande de paiement de commissions, la société Sylma Studio prétend avoir droit au paiement d'une commission de 480 210 TTC pour les deux marchés conclus avec la RATP les 8 avril 2009 et 3 juillet 2012. En cause d'appel, elle ajoute un droit de commissions de 587 037,22 TTC sur des compléments à ces marchés et de prétendus marchés avec la RATP postérieurement obtenus sur des périodes allant de 2013 à 2016, outre un droit à commission de 35 987,72 HT sur un marché conclu avec Radio France. La société DBS relève que l'utilité de la prestation de la société Sylma Studio pour l'obtention de ces marchés est inexistante du fait que l'attribution des marchés publics est encadrée de mise en concurrence sur publicité préalable et du principe d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures, comme prévu par l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 et ses décrets d'application. La société DBS rappelle que la jurisprudence constante énonce que les contrats ayant pour cause ou pour objet l'exercice d'un trafic d'influence sont considérés comme nuls. Elle soutient qu'en aucun cas ces prises de commandes n'apparaissent comme pouvant donner lieu à commissions faute de cause à tout le moins licite. La demande de paiement de commissions n'est pas justifiée.
La société DBS fait remarquer que le contrat litigieux prévoit que le règlement des commissions est subordonné à la fois au paiement effectif des situations de travaux et à la facturation présentée par la société DBS aux clients présentés par Sylma Studio, et qu'un avenant doit être préalablement établi afin de déterminer les conditions particulières de la rémunération due. Ces conditions ne sont pas réunies.
La société DBS oppose que le tribunal a statué ultra petita. Les 10 factures de commissions émises par la société SLYMA STIDIO pour un montant de 51 990,14 sur la période allant de novembre 2004 à juillet 2007 ont été partiellement réglées par la société DBS, la somme réglée étant de 41 982,97 , le solde est donc de 10 007,17 mais pas la somme de 42 017,97 qui était recalculé d'initiative par le tribunal de commerce , du montant de la commission qui serait réellement due sur ces marchés, au-delà de ce que la société Sylma Studio justifie avoir facturé et donc revendiqué auprès de DBS.
La société DBS indique qu'une nouvelle demande de la société Sylma Studio tendant à faire communiquer tous éventuels marchés qui pourraient être passés avec l'un des clients apportés dans un délai d'un mois suivant leur conclusion jusqu'au 9 janvier 2022 en cause d'appel n'est pas recevable. La société DBS n'a commis aucune faute délictuelle. La demande de dommages-intérêts de la société Sylma Studio n'est pas justifiée.
Vu les dernières conclusions notifiées et signifiées par la société Sylma Studio le 31 janvier 2018 tendant à voir la cour :
Débouter l'appelante de l'intégralité de ses demandes,
Faire droits aux demandes de la société Sylma Studio.
A titre principal :
Vu les articles 1134 et suivants du Code civil,
Vu le contrat d'apporteur d'affaires,
Condamner la société DBS en application de l'article 5 du contrat à payer un rappel de commission de :
889 873,12 HT + 42 017,31 HT + 35 987,72 HT = 967 878,15 HT,
soit 1 161 453,70 TTC
A titre subsidiaire :
Condamner la société DBS à payer la somme de 1 161 453,70 à titre de dommages intérêts,
A titre infiniment subsidiaire :
Condamner la société DBS à payer la somme de 1 161 453,70 TTC au titre du droit de suite prévu à l'article 8,
A titre infiniment subsidiaire :
Vu l'article 1382 du Code civil,
Condamner la société DBS à payer à la société Sylma Studio la somme de 1 161 453,70 à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de loyauté et d'information,
Donner acte à la société Sylma Studio qu'elle est susceptible de revoir le montant de l'indemnisation sollicité compte tenu de nouveau éléments qui pourraient se révéler,
Dire que la société DBS sera tenue de communiquer à la société Sylma Studio tous les marchés passés avec les clients apportés, jusqu'au 9 janvier 2022, et ce dans un délai d'un mois à compter de leur signature,
Dire que la société Sylma Studio bénéficiera d'un droit de suite sur ses commissions jusqu'au 9 janvier 2022, si la Cour estimait que le contrat a été résilié suite aux conclusions de la société SBS en date du 9 septembre 2016,
Condamner la société DBS à payer à la société Sylma Studio la somme de 50 000 à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,
Condamner la société DBS à payer à la société Sylma Studio la somme de 30 000 sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
L'intimée réplique :
Les payements sont demandés en exécution du contrat : elle a permis par son intervention à DBS de se rapprocher de la RATP. Un droit à commission à hauteur de 10 % du montant des travaux HT est prévu dans l'article 5 du contrat litigieux, sauf accord particulier entre les parties. Si aucun avenant n'a été établi pour fixer les situations particulières, le taux appliqué est de 10 %.
Le tribunal applique inexactement un taux de 3,15 % alors que la moyenne pondérée est de 6,3 % sur les précédentes facturations. En l'absence d'accord sur une moyenne pondérée, seul le taux de 10 % prévu au contrat doit s'appliquer.
La société Sylma Studio rappelle que son objet social est " intermédiaire de courtage, agent commercial ". Le débat sur la propriété des clients est inopérant du fait que le droit à commissions est prévu dans le contrat. Son intervention ne se limite pas à une simple mise en relation, les échanges commerciaux entre la société Sylma Studio et la société DBS justifient la contrepartie, de sorte que le contrat soit causé.
La société Sylma Studio indique que le contrat est réputé à durée indéterminée, cependant une clause de dénonciation avec respect d'un préavis de 4 mois est prévue à l'article 8, la société DBS n'est donc pas engagée de manière perpétuelle. Le droit à commission prévu à l'article 5 est sans limitation de temps, signifiant que quelle que soit la date de terme du contrat, le droit de suite de 5 ans prévu à l'article 8 aura vocation à s'appliquer.
La demande amiable de la société Sylma Studio pour obtenir l'ensemble des documents sur les marchés régularisés par la RATP avec la société DBS et ses filiales étant demeurée vaine, la société Sylma Studio a assigné la société DBS devant le juge de référés du Tribunal de commerce de Paris. Tous les contrats passés ont été versés aux débats par la RATP et c'est pourquoi la société Sylma Studio a modifié le chiffrage de ses demandes. La société Sylma Studio a reproché à la société DBS d'être de mauvaise foi.
Sur le préjudice d'ores et déjà subi, la société Sylma Studio réclame la somme de 931 890,42 HT concernant le client RATP et un montant de 35 987,72 HT pour le client Radio France, soit un total de 1 161 453,70 TTC pour la clientèle apportée.
La société Sylma Studio indique que le client RATP n'a pas fait l'objet d'un appel d'offre pour la majorité des travaux conclus et indiqués, du fait que la RATP échappe au Code des marchés publics et aux règles qui le composent y compris en matière de procédure d'appel d'offre. La société Sylma Studio a une obligation de moyens mais pas de résultats, elle ne peut avoir aucune incidence dans le choix des candidats finalement retenus par la RATP. Elle relève que le mode de passation du marché ne saurait avoir une quelconque incidence sur sa rémunération du fait qu'elle est rémunérée par la présentation de clients potentiels à la société DBS ainsi que par le fait de fournir des conseils et des corrections pour une offre en la rendant plus proche des besoins de la RATP.
La société Sylma Studio expose que son intervention ne permet pas à la société DBS de bénéficier d'un traitement plus favorable que celui des autres candidats à l'attribution des marchés, alors que cette dernière n'a jamais contesté le rapprochement qui avait été mis en place entre elle et la RATP, la demande de nullité de contrat pour cause illicite n'est pas justifiée.
Le préjudice subi par la société Sylma Studio est constitué par la perte de chance de percevoir le montant des commissions, à hauteur de 1 161 453,70 TTC.
Le contrat a été dénoncé pour la première fois par la société DBS par la conclusion en date du 9 septembre 2016, le droit à commissions serait dû en application du droit de suite prévu à l'article 8 du contrat. Par conséquent, la société DBS sera tenue de communiquer tous les marchés passés avec les clients apportés par la société Sylma Studio jusqu'au 9 janvier 2022.
Enfin, la société Sylma Studio soutient que ses demandes de commissions à hauteur de 42 017,31 HT pour les marchés non réglés en totalité ainsi que celles pour le client Radio France d'un montant de 35 987,72 , ne sont pas de nouvelles demandes dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge. Néanmoins, la demande de remboursement du trop-perçu de commissions par la société DBS est une nouvelle demande en cause d'appel qui est irrecevable, prescrite et infondée.
Sur la demande de révocation de l'ordonnance de clôture :
L'ordonnance de clôture ne pouvant être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue conformément à l'article 784 du Code de procédure civile, et l'appelant ne justifiant pas d'une telle cause, et ne formulant pas quels sont les éléments des conclusions de l'intimé qui nécessitent une réponse pour le respect des droits de la défense, alors qu'il a conclu après un an depuis ses dernières conclusions, le 24 janvier 2018 et communiqué ses pièces selon bordereau le 31 janvier 2018, la demande de révocation de l'ordonnance de clôture fixée au 1er février 2018 est rejetée.
MOTIFS
LA COUR renvoie, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, à leurs écritures précitées.
1. Sur le moyen du contrat d'agent commercial :
Aux termes de l'article L. 134-l alinéa 1er du Code de commerce : " L'agent commercial est un mandataire qui, à titre de profession indépendante, sans être lié par un contrat de louage de services, est chargé, de façon permanente, de négocier et, éventuellement, de conclure des contrats de vente, d'achat, de location ou de prestations de services, au nom et pour le compte de producteurs, (...) Il peut être une personne physique ou une personne morale. "
La preuve incombe à celui qui se prétend agent commercial.
Selon le paragraphe 2 du contrat, la mission consiste à " faire connaître (...) à prendre tous contacts utiles et recueillir toutes informations auprès de sociétés (...), autorités qualifiées, pour assurer les contacts et la présentation de la société, la discussion et le soutien complet des projets (...) que nous estimerions devoir présenter d'un commun accord (...) "
En l'espèce s'il est justifié par des productions de l'intimé de la présentation de la société DBS à des entités, en revanche Sylma n'établit pas exercer en qualité de mandataire de DBS une activité civile de négociation et de conclusion de contrat de sorte que le moyen tenant au statut d'agent commercial est rejeté.
La société Sylma est rémunérée " par des honoraires calculés en fonction du chiffre d'affaires de prises de commandes directes ou indirectes sur la clientèle apportée par ses soins " alors que le statut d'agent commercial est exclusif de toute clientèle personnelle.
Ainsi elle écrit dans un courrier du 29 mars 2006 à DBS avoir transmis les prix appliqués sur le désamiantage réalisé auprès de " son client Radio France ", confirmant ainsi l'exclusion du statut qu'elle revendique.
La société Sylma exerce cette activité commerciale sous la forme d'une société à responsabilité limitée ce qui est incompatible avec l'exercice civil de l'activité.
Elle ne justifie pas que les relations contractuelles avec la société DBS ont la nature d'un contrat de mandat prévu à l'article L. 134-1 du Code de commerce de sorte que le moyen est rejeté.
2. Sur la nullité du contrat d'apporteur d'affaires :
L'absence de cause :
Il appartient à DBS qui soutient la nullité du contrat de faire la démonstration que la rémunération perçue par Sylma est dépourvue de contrepartie réelle de sa part ou constitue une contrepartie en réalité dérisoire voire illusoire, ou que l'entremise de Sylma n'a pas été déterminante voire même réelle au titre des prises de commandes que la Société DBS emporte en réalité du seul chef de son propre travail et ce, dans l'économie générale du contrat ainsi qu'elle le soutient.
Sylma justifie à l'encontre de la nullité du contrat avoir non seulement présenté DBS à divers opérateurs auxquels elle a remis après élaboration un dossier complet sur la société comprenant diverses références au 31 décembre 2004, mais avoir ainsi facilité la souscription de contrats entre les parties rapprochées, ainsi la RATP et la société Radio France, lesquelles lui ont transmis la liste des commandes passées.
Sylma n'étant pas tenue à une obligation de résultat d'une part, et la cause de la rémunération de cette dernière se trouvant dans la souscription de bons de commandes, preuve s'il en est du succès de la mission, l'existence d'une contrepartie réelle et exempte de caractère dérisoire est dès lors amplement démontrée.
Le caractère prétendument élevé des montants réclamés ne fonde pas davantage l'absence de contrepartie ou le caractère dérisoire de celle-ci, et n'est pas susceptible de constituer une cause de nullité du contrat.
L'appelant soutient que partie de ses clients, si ce n'est exclusivement, sont des entreprises publiques, des personnes publiques voire même des collectivités territoriales, dès lors soumises au droit des marchés publics, à la soumission à appels d'offres, ce qui exclut toute présentation par un tiers.
Elle ne conteste cependant pas que de telles présentations sont intervenues, lesquelles résultent ainsi que le premier juge l'a relevé, de la liste des marchés mentionnée en annexe au contrat et datée du 30 septembre 2003.
La nullité pour cause illicite ne réside pas de la nature juridique de la RATP, cette société pouvant conclure un marché sans que celui-ci soit soumis à la procédure de passation des marchés publics dès lors que son montant ne dépasse pas un certain seuil.
Le décret du 20 octobre 2005 pris en application de l'ordonnance du 6 juin 2005 fixe à 5 270 000 euros HT le seuil au-dessous duquel l'entité adjudicatrice choisit librement les modalités de passation de ses marchés ce dont il suit la licéité de la clause.
L'appelant soutient sans en rapporter la preuve que le marché excède le seuil fixé par voie réglementaire ou le non-respect de procédures réglementaires et que ces violations conféreraient au contrat un caractère illicite.
En effet le contrat avec la RATP est inférieur au seuil du décret.
L'offre qu'elle produit pour un marché de travaux avec la SemParisSeine, supérieure au montant autorisé, n'est dès lors pas probante du bienfondé de la nullité du contrat.
La société Sylma expose et justifie par des productions, avoir collaboré avec DBS pour l'obtention de divers marchés hors appels d'offres. Ainsi il résulte d'une transmission sans date de DBS à Sylma dans le cadre d'une affaire RATP, que l'appelant interroge Sylma pour connaître le positionnement de la société sur les lots 1 et 2, avant de formuler des réponses. Il s'agit là de l'exécution de son obligation de conseil.
De même s'agissant de Radio France, il est justifié d'un courrier de transmission de DBS à Sylma de l'accord de cette société pour confier à DBS la réalisation de travaux de désamiantage. Il appartenait à DBS, qui soutient avoir été antérieurement en relations d'affaires avec certaines sociétés, d'exclure cette société du contrat ou encore de notifier à son cocontractant ne pas souhaiter bénéficier des prestations apportées par Sylma ; à défaut, la convention reçoit exécution et la commission est due.
Le contrat énonçant que chacune des parties dispose d'une faculté de résiliation qu'il appartenait à DBS de mettre en œuvre pour se désengager du contrat, sans que l'absence de recours à cette faculté ne constitue une cause de nullité, l'acte n'est entaché d'aucun caractère léonin ou de vice de perpétuité.
Le caractère onéreux de la rémunération ne revêtant pas un caractère illicite ou ne caractérisant pas une absence de cause, la nullité n'est pas encourue de ce chef. Il est ainsi suffisamment établi et n'est pas contesté que le contrat litigieux a été valablement exécuté par les parties jusqu'en 2007, ce qui conduit au rejet de l'exception de nullité du contrat.
Le jugement est confirmé de ce chef.
3. Sur les demandes en payement :
Fondées sur le même contrat et tendant aux mêmes fins, les demandes en payement formées à hauteur d'appel sont recevables.
Ces demandes sont le fruit de la découverte par Sylma, auprès de sociétés tierces qui lui ont fourni la liste des contrats passés avec DBS, et non communiqués par cette société dans le cadre de la présente instance, malgré demandes réitérées devant le premier juge, de sorte que Sylma est d'autant recevable à les formuler.
La société Sylma justifie par des documents de la RATP tiers au contrat litigieux, des marchés supplémentaires réalisés par DBS à compter de l'année 2003 jusqu'en 2015, soit directement pour un montant total de 3 082 000,90 euros HT, soit en recourant à des sociétés de sous-traitance à hauteur de 1 809 976 euros HT.
DBS produit elle-même un projet de décompte définitif d'un marché passé avec la RATP le 8 avril 2009, pour un montant de 2 133 634,27 euros HT comprenant les payements opérés par la société, inférieur au montant du décret.
Elle justifie de l'apport de clients depuis juin 2003 à mars 2004 à la société Maison Leclaire, sous-traitante de DBS.
Elle produit une attestation de Radio France en date du 21 novembre 2017 sur la conclusion des marchés avec Spie Batignole, et en sous-traitance de DBS.
Expressément prévue au contrat la rémunération sur des marchés conclus " directement ou indirectement sur la clientèle apportée par les soins de Sylma ", est due.
A défaut d'accord particulier ou d'avenant, que la société DBS ne peut justifier faute d'avoir informé Sylma des marchés, le taux de 10 % critiqué par DBS, est applicable.
Le jugement est réformé en ce qu'il a appliqué un taux inférieur au taux contractuel.
La société DBS sera condamnée au payement de la somme de 931 890,42 HT concernant le client RATP et un montant de 35 987,72 HT pour le client Radio France, soit un total de 1 161 453,70 TTC.
L'intimée ne justifiant pas que la résistance à payer a dégénéré en abus de droit, la demande en dommages et intérêts pour résistance abusive est rejetée.
L'examen des demandes de remboursement et dommages et intérêts présentées par DBS sont sans objet à raison de la succombance.
Par ces motifs, LA COUR, Rejette la demande de révocation de l'ordonnance de clôture du 1er février 2018 ; Déclare recevables les demandes en payement formées en cause d'appel par la société Sylma Studio ; Confirme le jugement dont appel sauf du chef du montant de la condamnation à payer les commissions ; Statuant à nouveau de ce chef, Condamne la société DBS à payer à la société Sylma Studio la somme de 1 161 453,70 TTC ; Vu l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne la société DBS à payer à la société Sylma Studio la somme de 10 000 euros ; Rejette toute demande autre ou plus ample ; Condamne la société DBS aux entiers dépens.