Livv
Décisions

Cass. 3e civ., 22 mars 2018, n° 17-15.830

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Vengeance (SCI)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Chauvin

Rapporteur :

Mme Corbel

Avocats :

SCP Alain Bénabent, SCP Ohl, Vexliard

Pau, 2e ch. sect 1, du 10 janv. 2017

10 janvier 2017

LA COUR : - Sur le moyen unique : - Vu les articles L. 144-3 et L. 144-10 du Code de commerce ; - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Pau, 10 janvier 2017), que Mme X qui avait pris à bail, à compter du 1er avril 2004, un local commercial appartenant à la société Vengeance, a donné, le 20 mars 2006, le fonds de commerce en location-gérance ; que, les 7 et 22 mai 2012, la société Vengeance lui a délivré deux congés avec refus de renouvellement de bail commercial sans indemnité d'éviction en invoquant l'absence d'exploitation du fonds de commerce mis en gérance pendant deux années au moins ; que la locataire a assigné la bailleresse en contestation des congés ;

Attendu que, pour dire que les motifs des congés portant refus de renouvellement sans indemnité d'éviction ne sont pas justifiés et que le bailleur est tenu au paiement d'une indemnité d'éviction, l'arrêt retient que, si la locataire a donné le fonds de commerce en location-gérance sans l'avoir préalablement exploité pendant deux années au moins, contrevenant ainsi aux dispositions de l'article L. 144-3 du Code de commerce, cette faute, qui existe dans ses rapports contractuels avec le locataire-gérant, peut entraîner la nullité du contrat, mais ne constitue pas un motif grave et légitime privatif d'une indemnité d'éviction dès lors que la bailleresse ne rapporte pas la preuve du préjudice qu'elle lui cause sur le fondement de l'article 1382 ancien du Code civil ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le contrat de location-gérance conclu en violation des conditions exigées du loueur, qui n'ont pas pour finalité la protection des intérêts particuliers des parties, est atteint d'une nullité absolue et que la déchéance du droit à renouvellement du bail, prévue par l'article L. 144-10, est encourue dès lors que le preneur consent un contrat de location-gérance atteint par la nullité prévue à l'alinéa 1 du même texte, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les textes susvisés ;

Par ces motifs : Casse et annule, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 janvier 2017, entre les parties, par la Cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Bordeaux.