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Décisions

Cass. com., 5 avril 2018, n° 16-27.901

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Iso Dumont (SAS)

Défendeur :

Chridami Médias (SARL) , Chridami Communication (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Riffault-Silk

Rapporteur :

Mme Tréard

Avocat général :

M. Debacq

Avocats :

SCP Foussard, Froger, SCP Lyon-Caen, Thiriez

Paris, pôle 5 ch. 11, du 16 sept. 2016

16 septembre 2016

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 16 septembre 2016), que les sociétés Chridami communication et Gulliv'r, aux droits desquelles viennent les sociétés Chridami médias et Chridami communication (les sociétés Chridami), sont des régisseurs publicitaires qui prennent en charge les frais d'impression des brochures qu'elles éditent, ainsi que l'achat du papier et ses frais de transport ; qu'entre 2002 et 2008, ces sociétés ont commandé du papier à la société Iso Dumont ; qu'à l'occasion d'un litige portant sur le montant des stocks de papier qui auraient été conservés par la société Iso Dumont, les sociétés Chridami ont assigné en paiement cette dernière, qui a saisi le tribunal d'une demande reconventionnelle, reprochant aux deux sociétés la rupture brutale d'une relation commerciale établie et réclamant, à chacune d'elles, le paiement de dommages-intérêts ;

Sur le premier moyen : - Attendu que la société Iso Dumont fait grief à l'arrêt du rejet de sa demande formée contre la société Chridami médias alors, selon le moyen : 1°) que les juges du fond devaient rechercher si une relation commerciale établie ne résultait pas de ce que les chiffres d'affaires de 70 079,55 euros et 119 926,57 euros avaient été réalisés entre le 1er juillet 2002 et le 30 juin 2004, puis de 199 924,70 euros, 113 456,58 euros, 40 213,59 euros avaient été réalisés entre le 1er juillet 2006 et le 7 octobre 2008 ; que faute de s'expliquer sur ce point, l'arrêt souffre d'un défaut de base légale au regard de l'article L. 442-6 I-5° du Code de commerce ; 2°) que la circonstance que des commandes se soient interrompues pendant un certain temps n'exclut pas la relation commerciale établie ; qu'en opposant l'absence de commande entre le 1er juillet 2004 et le 30 juin 2006, les juges du fond, qui ont retenu une circonstance inopérante, ont violé l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce ; 3°) qu'à supposer par impossible que les juges aient pu opposer l'absence de commande entre le 1er juillet 2004 et le 30 juin 2006, de toute façon ils devaient rechercher si le chiffre d'affaires réalisé entre le 1er juillet 2006 et le 27 octobre 2008 (199 924,70 euros, 113 456,58 euros et 40 123,59 euros) ne révélait pas à lui seul une relation commerciale établie ; que de ce point de vue, l'arrêt souffre d'un défaut de base légale au regard de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce ; 4°) que la baisse de chiffre d'affaires, au cours d'un exercice, n'est pas de nature à exclure l'existence d'une relation commerciale établie ; qu'à cet égard, l'arrêt attaqué a été rendu en violation de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce ; 5°) qu'il importe peu qu'il y ait eu entre les parties ni accord cadre, ni garantie de chiffre d'affaires ; que de ce point de vue, l'arrêt attaqué a été rendu en violation de l'article L. 442-6 I-5° du Code de commerce ;

Mais attendu que par motifs propres et adoptés, l'arrêt relève que la société Iso Dumont et les sociétés Chridami n'étaient liées par aucun contrat et n'avaient convenu d'aucun chiffre d'affaires ni exclusivité, et que la première a entretenu, à compter de 2002, une relation qui n'a pas été identique avec les deux sociétés ; qu'il constate que la relation avec la société Chridami médias a été totalement interrompue pendant deux ans, en 2005 et 2006, période au cours de laquelle aucune commande n'a été passée, puis a repris au cours de l'exercice 2006-2007, pour un montant important, mais qu'au cours de l'exercice 2007-2008 le chiffre d'affaires réalisé entre elles était déjà réduit à près de la moitié ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, dont elle a pu déduire, peu important le chiffre d'affaires réalisé sur l'ensemble de la période alléguée, que la relation entretenue entre la société Iso Dumont et la société Chridami médias ne revêtait pas le caractère de stabilité, régularité et continuité exigé par l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à d'autres recherches, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen : - Attendu que la société Iso Dumont fait grief à l'arrêt du rejet de sa demande dirigée contre la société Chridami communication alors, selon le moyen : 1°) qu'indépendamment du nombre de commandes, les juges du fond devaient rechercher si, eu égard aux chiffres réalisés chaque année, entre 2002 et 2008 la société Iso Dumont pouvait croire à une relation stable ; qu'en refusant de se prononcer sur ce point, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce ; 2°) que l'absence de garantie de chiffre d'affaires était un élément indifférent ; qu'à cet égard, les juges du fond ont violé l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce ; 3°) que la circonstance qu'un chiffre d'affaires ait pu baisser lors d'un certain exercice ne fait pas obstacle à la nécessité d'un préavis dès lors qu'il y a relation commerciale établie ; qu'à cet égard, les juges du fond ont violé l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce ; 4°) que la circonstance que, postérieurement à la réduction du chiffre d'affaires, l'entreprise victime de la rupture a conservé le silence ou s'est abstenue de demander des explications était un élément indifférent ; qu'à cet égard, les juges du fond ont encore violé l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce ;

Mais attendu que, par motifs propres et adoptés, l'arrêt relève que la société Iso Dumont et les sociétés Chridami n'étaient liées par aucun contrat et n'avaient convenu d'aucun chiffre d'affaires ni exclusivité, et que la première a entretenu, à compter de 2002, une relation qui n'a pas été identique avec les deux sociétés ; qu'il constate que la société Chridami communication n'a adressé que des commandes ponctuelles à la société Iso Dumont, soit une seule commande en novembre 2002, trois commandes en 2003, une commande en 2004, trois commandes en 2005 et six commandes en 2006 ; qu'il ajoute, par motifs adoptés, et après avoir rappelé le chiffre d'affaires réalisé au cours des exercices 2003 à 2008, que ce chiffre, qui a diminué de manière significative de juillet 2007 à juin 2008, n'a connu aucune régularité ; que de ces seules constatations et appréciations, faisant ressortir que la relation entretenue entre les deux sociétés n'était pas de nature à autoriser la société Iso Dumont à anticiper raisonnablement, pour l'avenir, une certaine continuité de flux d'affaires avec son partenaire commercial, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à d'autres recherches, a pu déduire que cette relation ne revêtait pas le caractère de stabilité, régularité et continuité requis par l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce ; que le moyen, inopérant en sa quatrième branche qui critique des motifs surabondants, n'est pas fondé pour le surplus ;

Et sur le troisième moyen : - Attendu que la société Iso Dumont fait grief à l'arrêt de dire irrecevable, comme formée pour la première fois en cause d'appel, sa demande tendant à ce qu'une condamnation solidaire soit prononcée à l'encontre des sociétés Chridami alors, selon le moyen, qu'en cas de demande de dommages et intérêts formée en première instance contre deux sociétés, la demande formulée pour la première fois en cause d'appel, et tendant à ce que les condamnations à réparer soient solidaires, constitue l'accessoire, la conséquence ou en tout cas le complément des demandes formées en première instance ; que tel était le cas en l'espèce ; que l'arrêt attaqué a été rendu en violation de l'article 566 du Code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d'appel ayant, par des motifs vainement critiqués par les premier et deuxième moyens, écarté l'existence d'une relation commerciale établie entre la société Iso Dumont et les sociétés Chridami, le moyen est inopérant ;

Par ces motifs : Rejette le pourvoi.