Cass. com., 13 septembre 2016, n° 14-26.713
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Demandeur :
Véolia Eau (Sté)
Défendeur :
BNP Paribas Immobilier Promotion Résidentiel (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Avocats :
SCP Célice, Soltner, Texidor, Périer, SCP Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, SCP Thouin-Palat, Boucard, SCP Yves, Blaise Capron
LA COUR : - Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société Véolia eau que sur le pourvoi incident relevé par la société BNP Paribas immobilier promotion résidentiel : - Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Union de gestion et d'investissements fonciers (la société UGIF) est propriétaire, dans un ensemble immobilier soumis au régime de la copropriété, d'un lot donné à bail à la banque Société générale, le paiement de la consommation d'eau étant mis à la charge du preneur ; que pour la fourniture en eau de ce lot, la société UGIF a souscrit un contrat d'abonnement auprès de la Compagnie générale des eaux, aux droits de laquelle vient la société Véolia eau - Compagnie générale des eaux SCOA (la société Véolia) ; qu'aux termes de ce contrat, la société Véolia devait effectuer un relevé de consommation par an, en mai, la facture générale correspondante étant établie en juillet suivant ; qu'en pratique, la facture était envoyée au syndic de la copropriété, la société Meunier Méditerranée, aux droits de laquelle vient la BNP Paribas immobilier promotion résidentiel (la société BNP), à charge pour cette dernière de transmettre la facture à la société UGIF ; qu'à la suite d'une surconsommation d'eau constatée au titre des années 2003 et 2004, la Société générale a refusé de payer à la société UGIF les factures d'eau correspondantes ; que la société UGIF l'a assignée en paiement de ces factures, ainsi que le syndic et la société Véolia, estimant que ceux-ci avaient commis une faute ayant contribué à cette surconsommation ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en sa première branche : - Vu les articles 1134 et 1147 du Code civil ; - Attendu que, pour condamner la société Véolia à payer à la société UGIF la somme de 20 910,80 euros à titre de dommages-intérêts, correspondant à sa part de responsabilité dans le dommage, l'arrêt retient, d'abord, que la société Véolia, seule technicienne de l'eau, des installations d'eau et des consommations, a bénéficié de la fuite en partie privative, facturée sans remise, ensuite, que cette société a soutenu, sans en justifier, avoir émis un avertissement de surconsommation et, enfin, que sa bonne foi dans l'exécution du contrat ne peut être retenue, la seule émission d'une facture d'eau étant insuffisante à attirer l'attention de son abonnée sur l'anomalie de fonctionnement, aux conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'elle avait constatée ; que l'arrêt en déduit que le moyen tiré de l'article 19 du règlement de l'eau applicable est inopérant et que, postérieurement au relevé de compteur effectué au mois de mai 2013, la société Véolia a manqué à son devoir de loyauté dans l'exécution du contrat et à son obligation d'information et de conseil envers son abonnée, participant ainsi à l'aggravation du dommage subi par celle-ci et engageant sa responsabilité contractuelle ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'aucune disposition légale, ni stipulation contractuelle n'imposait au fournisseur d'eau d'informer son abonné de l'existence d'une consommation anormale, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le moyen unique du pourvoi incident, pris en sa seconde branche : - Vu l'article 1147 du Code civil, ensemble l'article 1992 du même Code ; - Attendu que, pour condamner la société BNP à payer à la société UGIF la somme de 2 613,55 euros correspondant à sa part de responsabilité dans le dommage, l'arrêt retient, par motifs adoptés, que les factures d'eau étaient préalablement reçues par la société Meunier Méditerranée qui les répercutait sur la société UGIF, et qu'en procédant de la sorte concernant les factures litigieuses, sans alerter son mandant sur leur caractère inhabituel et inquiétant, cependant qu'elle était informée des niveaux de facturation antérieurs, la société Meunier Méditerranée a commis une faute engageant sa responsabilité à l'égard de la société UGIF, en sa qualité de mandataire ;
Qu'en statuant ainsi, alors que, chargée d'un simple mandat de transmission des factures d'eau qui lui étaient adressées pour le compte de la société UGIF, la société Meunier Méditerranée n'était pas tenue d'alerter sa mandante quant au contenu desdites factures, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Par ces motifs : casse et annule, sauf en ce que, confirmant le jugement entrepris, il condamne la Société générale à payer à la société UGIF les sommes de 26 138,50 et 469,34 euros, condamne la Société générale aux dépens et au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, et dit que ces condamnations porteront intérêt au taux légal à compter du jugement, l'arrêt rendu le 3 juillet 2014, entre les parties, par la Cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Lyon.