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Décisions

CA Saint-Denis de la Reunion, ch. com., 18 avril 2018, n° 16-01971

SAINT-DENIS DE LA RÉUNION

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Maurefilms (SARL), Mascareignes Kino (SARL)

Défendeur :

Investissement et Commerce Cinéma (SAS), Investissement et Commerce (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Karrouz

Conseillers :

M. Ozoux, Mme Rouge

T. com. Saint-Denis, du 05 oct. 2016

5 octobre 2016

Exposé du litige

La société Mascareignes KINO (Mascareignes) qui a notamment pour activité l'exploitation de salles de cinéma et la société MAUREFILMS qui a notamment pour activité la location la distribution de droits cinématographiques sont gérées par M. Yves E..

Elles ont pour concurrentes sur l'île de la Réunion la société investissement et commerce (IC) qui a pour activité l'exploitation de salles de cinéma et la société Investissement et Commerce Cinéma (ICC) qui a pour activité la location et la distribution des droits cinématographiques, les dites sociétés étant dirigées par les membres de la famille D..

Reprochant aux sociétés Investissement Commerce et Investissement et Commerce Cinéma des actes de concurrence déloyale prenant la forme d'actes de dénigrement les sociétés Mascareignes et Maurefilms ont saisi le Tribunal mixte de commerce de Saint-Denis pour obtenir l'octroi de dommages et intérêts.

Par jugement du 05 octobre 2016 le tribunal a :

- rejeté l'exception de procédure ainsi que la fin de non recevoir fondée sur les dispositions de l'article L. 213-1 du Code du cinéma soulevées par les sociétés IC et ICC ;

- déclaré la société Maurefilms irrecevable en ses demandes de réparation au titre des courriers électroniques émis entre les 2 et 4 octobre 2013 au décours de l'exploitation du film " TURBO " ;

- rejeté les demandes en réparation formées par les sociétés Maurefilms et Mascareignes ;

- rejeté les demandes reconventionnelles en réparation ;

- rejeté les demandes sur les dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et laissé à la charge de chaque partie ses dépens.

Par déclaration au Greffe de la Cour d'Appel de Saint-Denis formulée par voie électronique le 15 novembre 2016 les sociétés Maurefilms et Mascareignes ont relevé appel de cette décision.

MOYENS ET PRETENTIONS

Dans leurs dernières conclusions notifiées et déposées par voie électronique le 24 mai 2017, les sociétés Maurefilms et Mascareignes demandent à la Cour au visa des articles 1382 et suivants du Code civil de :

- infirmer le jugement entrepris ;

Et statuant à nouveau

- dire et juger que les société ICC et IC se sont rendues coupables de dénigrement ;

En conséquence

- condamner solidairement les sociétés ICC et IC à leur payer à chacune la somme de 25 000,00 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi et 4500,00 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

A l'appui de leurs prétentions les sociétés Maurefilms et Mascareignes font essentiellement valoir :

- que la pièce n° 3 produite par les intimées doit être écartée des débats s'agissant d'un compte rendu établi par un médiateur en matière de cinéma, que seul ce dernier peut rendre public en application des dispositions des articles L. 213-1 et R. 213-1 du Code du cinéma;

- qu'elles fondent leur action sur les dispositions des articles 1382 et 1383 du Code civil et qu'elles rapportent la preuve par les pièces produites d'actes imputables aux sociétés ICC et IC constitutifs de dénigrement qui est une modalité de la concurrence déloyale,

- qu'elles ont été victimes de dénigrement auprès de leurs partenaires à l'occasion de la diffusion du film " Fast & Furious 7 " , M. D. représentant les sociétés intimées ayant contacté leurs partenaires commerciaux dans une manifestation événementielle en indiquant que leurs agissements, s'agissant de l'utilisation du visuel du film, étaient illégaux, tentant également de détourner les dits partenaires à leur profit et de porter atteinte à l'organisation de l'événement aux fins de détourner la clientèle vers ses propres cinémas,

- qu'elles ont été victimes de dénigrement auprès des majors,

- qu'auprès de la société FOX la société Maurefilms a été accusée d'éditer des factures non conformes et mise en cause comme étant impliquée dans une affaire de blanchiment d'argent sur la distribution de films à l'île Maurice, ces accusations jetant le discrédit sur l'entreprise ou la personnalité du concurrent et sont constitutives de faits de dénigrement,

- que la société Maurefilms a été auprès du même major accusée mensongèrement d'imposer des conditions inacceptables aux sociétés intimées, de violer ses obligations, de refuser de les laisser exploiter plusieurs films en faisant obstruction,

- que la société Maurefilms a été pénalisée à l'égard de la société FOX à la suite de ces manœuvres puisqu'elle s'est vu retirer le territoire de l'île Maurice

- que les sociétés intimées ont pris directement contact avec la major PATHE pour se plaindre d'un retard qui n'était pas imputable à la société Maurefilms,

- que les sociétés intimées ont dénoncé auprès d'UNIVERSAL l'utilisation des visuels utilisés au cours de l'événement organisé pour la sortie du film " FAST & FURIOUS 7 " obligeant la société Maurefilms à se justifier pendant plusieurs jours d'avoir pris les mesures adéquates ce qui a terni ses relations avec cette major,

- que contrairement à ce qu'a indiqué le tribunal le détournement effectif de la clientèle suite aux actes de dénigrement n'est pas imposé, pour qu'une sanction soit prononcée,

- qu'elles sont, en tout état de cause, en mesure de justifier d'un manque à gagner constitué de la perte d'une partie du marché,

- qu'en outre les sociétés intimées ont le 1er mai 2016 entrepris de saboter leurs pages de promotion Facebook, en lançant un jeu concours ayant pour objet de gratifier les internautes qui posteraient sur les pages Facebook des cinémas qu'elles exploitent : " I like Cinepalmes je veux un mois de cinoche ", le cinéma Cinépalmes étant exploité par les intimées,

- qu'il est inscrit sur la page Facebook du cinéma Cinépalmes exploité par IC " tentez de gagner un mois de ciné pour deux personnes en allant mettre un commentaire sur le dernier post de la page Facebook de notre concurrente (...) en supplément partager ce présent statut et tentez de gagner deux places pour " Captain América " ;

- qu'ainsi les pages Facebook des sociétés Maurefilms et Mascareignes se sont retrouvées avec une multitude de post " I like cinépalmes ",

- que l'ensemble de ces comportements a terni et détérioré leurs relations avec leurs partenaires et les majors,

- que l'usage fautif d'une liberté d'expression dans le respect des dispositions de la convention européenne des droits de l'homme doit être sanctionné,

- que le dénigrement doit être considéré comme un des abus spécifiques de la liberté d'expression constituant une limite à cette liberté.

Dans leurs dernières conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 29 mars 2017, les sociétés IC et ICC demandent à la Cour de :

- dire que les faits imputés par les sociétés appelantes ne sont pas constitutifs d'un usage abusif de la liberté d'expression consacrée par l'article 10 de la CEDH ;

- débouter en conséquence les appelantes de leurs demandes ;

Subsidiairement

- déclarer les sociétés appelantes irrecevables au titre des courriers électroniques émis entre le 02 et 04 octobre 2013 à propos de l'exploitation du film " Turbo " ;

- voir dire que les autres faits imputés ne sont pas constitutifs d'actes de dénigrement ;

- débouter les appelantes de toutes leurs demandes ;

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté les demandes d'indemnisation des sociétés appelantes ;

- condamner les sociétés Maurefilms et Mascareignes à payer à ICC la somme de 5000,00 € au titre des frais irrépétibles et aux dépens de première instance et d'appel.

Les sociétés IC et ICC société SRR répliquent et soutiennent essentiellement pour leur part :

- que le litige porte en droit sur l'appréciation de la liberté d'expression de ICC à l'occasion des échanges de mails tant avec Maurefilms qu'avec les majors, alors que la société ICC tentait de trouver une solution amiable aux incidents causés par Maurefilms ;

- que l'article 10 de la convention EDH conditionne toute restriction ou sanction à l'occasion de l'exercice de la liberté d'expression à une précision de la loi ;

- que si les faits relèvent des dispositions de la loi du 29 juillet 1881 ce sont ces dispositions qui doivent fonder l'action et non l'article 1382 du Code civil ;

- que dans un premier temps la société Maurefilms s'est conformée à ces principes à propos des mails adressés à la FOX les 02 et 04 octobre 2013 en les assignant devant le tribunal de grande instance de Paris mais qu'elle a été déboutée et qu'elle tente une nouvelle action reposant sur les même faits ;

- que pour accueillir une action en dénigrement il convient de caractériser la volonté de détourner la clientèle, des propos diffusés ou émis de manière à toucher les clients, un abus dans l'expression, une volonté de nuire ;

- qu'en l'espèce dans les faits reprochés ICC n'a en réalité cherché qu'à obtenir de Maurefilms le respect de ses obligations légales et contractuelles ;

- que s'agissant de l'événement organisé à l'occasion de la diffusion du film " Fast & Furious 7 ", le contrat de location ne concédait aucun autre droit à Maurefilms que celui de diffuser le film dans deux salles du réseau et surtout pas de droits de propriété intellectuelle détenus par Universal, concédés dans le cadre strict du contrat de concession ;

- qu'à ce titre ICC était tenue de veiller au respect des droits de la propriété intellectuelle de Universal films et que c'est dans ce cadre qu'elle a mis en garde Maurefilms et les partenaires, première étape nécessaire à une éventuelle action en justice en contrefaçon ;

- que les sociétés ICC et Maurefilms sont toutes deux en leur qualité de distributeurs de film à la Réunion liées à la FOX par un accord cadre de distribution, ce qui entraîne des relations tripartites et qu'il est donc normal que les échanges de mails soient adressés en copie à la FOX ;

- qu'en tout état de cause s'agissant des mails des 02 et 04 octobre 2013, le tribunal de grande instance de Paris ayant d'ores et déjà statué, la demande se heurte à l'autorité de la chose jugée et se trouve irrecevable ;

- que s'agissant de Pathé cette major concède les droits d'exploitation des films de son catalogue en les partageant entre ICC et Maurefilms, les trois sociétés étant liées par une communauté d'intérêt ;

- qu'il est normal qu'en cas de litige des discussions collectives soient menées pour tenter de trouver une solution amiable.

Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées figurant au dossier de la procédure.

MOTIFS DE LA DÉCISION

En application des articles 1382 et 1383 du Code civil dans leur rédaction applicable au litige tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. Chacun est responsable du dommage qu'il a causé non seulement de son fait mais encore par sa négligence ou son imprudence.

Si en matière commerciale la liberté du commerce et la libre concurrence sont des principes fondamentaux, la concurrence doit s'exercer dans le respect des usages loyaux du commerce. L'emploi de tout procédé déloyal constitue une faute qui expose son auteur à une action en responsabilité et à l'octroi de dommages et intérêts.

Les sociétés Maurefilms et Mascareignes KINO d'une part et les sociétés ICC et IC d'autre part sont des sociétés en situation de concurrence, qui acquièrent des droits d'exploitation exclusifs sur certains films auprès de sociétés de distribution. Elles exploitent les films qu'elles ont obtenus dans les salles de cinéma qu'elles détiennent.

Les sociétés Maurefilms et ICC sont en relations d'affaires contraintes puisqu'elles doivent se louer réciproquement les films dont elles ont acquis les droits d'exploitation auprès des sociétés de distribution.

Sur les agissements reprochés aux sociétés ICC et IC à l'égard des partenaires de Maurefilms à l'occasion de la diffusion du film FAST & FURIOUS 7

Les sociétés Maurefilms et Mascareignes reprochent aux sociétés ICC et IC d'avoir pris contact directement avec leurs partenaires dans le cadre de la diffusion du film FAST & FURIOUS 7 dans le dessein de les discréditer auprès d'eux et de les pousser in fine, afin de ne pas avoir de contentieux, à ne plus traiter avec elles.

Il ressort des pièces produites qu'à l'occasion de la diffusion du film " FAST & FURIOUS 7 " la société Mascareignes a organisé les 05 et 06 avril 2015 un événement intitulé " deux journées spéciales FAST & FURIOUS 7 " sur le parking du multiplex Cambaie à Saint-Paul.

La promotion de cet événement a été faite au moyen d'un visuel constitué d'une affiche reproduisant l'affiche du film sur laquelle étaient apposés les logos des partenaires participants (Cocacola, CFG, NRJ, Renault, Simrace, Speedy).

Or la société ICC était le concessionnaire exclusif du film et à ce titre avait la qualité de mandataire de la société de distribution UNIVERSAL PICTURES.

Il ressort des mails produits que M. Frédéric D. représentant la société ICC a le 30 mars 2015 pris attache avec la société Maurefilms pour lui indiquer qu'elle n'était pas autorisée à commercialiser l'image du film à un tiers en demandant le retrait immédiat de toute communication illicite associant à ce film un partenaire non autorisé.

La société ICC a également envoyé des mails directement auprès des partenaires commerciaux. La teneur des mails envoyés ne ressort pas des pièces produites à l'exception du mail envoyé à M. A. (NRJ) et M. Felix G. lesquels ont été envoyés que le 31 mars 2015.

Il ressort du contrat cadre liant la société ICC et la société UNIVERSAL PICTURES (article 9), que le concessionnaire (ICC) avait mandat du concédant (UNIVERSAL) pour assurer la protection légale des droits du concédant sur les films concédés et était tenu à ce titre, de prendre toutes actions qu'il jugerait nécessaire pour empêcher toute violation de ces droits, pour poursuivre devant les tribunaux tous tiers pour l'utilisation, la reproduction, sans autorisation de l'un quelconque des films ou de toute version de ceux-ci.

En adressant aux sociétés appelantes et aux partenaires commerciaux participant à l'événement organisé les 05 et 06 avril 2015, un rappel concernant la protection de l'image du film et une mise en demeure d'avoir à cesser toute utilisation illicite, laquelle était caractérisée par l'association à l'image du film de sociétés commerciales non agréées par le concédant, la société ICC n'a commis aucune faute constitutive d'un dénigrement, dans la mesure où sa démarche ne tendait pas à jeter le discrédit sur un concurrent mais à faire respecter la protection légale accordée aux droits de la société UNIVERSAL PICTURES, obligation à laquelle elle était tenue en exécution du contrat la liant à cette dernière.

S'agissant des mails adressés par M. D. à M.A. (NRJ) auxquels étaient joints la copie des échanges de mails avec la société Maurefilms, dont la teneur ne contient aucune volonté de discrédit mais une mise en demeure, il est indiqué que la société Maurefilms a agi " dans la pure illégalité". Ces mails dans lesquels les protagonistes utilisent respectivement leurs prénoms et utilisent le tutoiement, étaient échangés entre personnes se connaissant personnellement et ont un caractère privé. En outre la seule indication dans les mails, privés échangés, que la société Maurefilms a agi dans l'illégalité relativement à un fait précis n'était pas de nature à jeter un discrédit à l'égard de la société Maurefilms constitutif d'un acte de concurrence déloyale.

Par ailleurs la proposition faite d'un possible partenariat dans le futur n'est pas en soit fautive.

S'agissant du mail adressé par la société ICC à M. Félix G., il ne contient qu'une information, à savoir la détention exclusive des droits du film par ICC et une demande de mise en conformité avec un avertissement quant aux conséquences d'un défaut de respect de la demande. Il n'est fait état d'aucune remarque désobligeante à l'égard de la société Maurefilms de nature à jeter le discrédit sur celle-ci.

Enfin l'information donnée par la société ICC à la société UNIVERSAL n'est pas fautive, dans la mesure où le contrat cadre imposait au concessionnaire d'aviser le concédant dans une telle situation.

Par conséquent s'agissant des faits relatifs au film FAST & FURIOUS 7, le dénigrement invoqué n'est pas établi et aucun acte de concurrence déloyale n'est caractérisé.

Sur les agissements reprochés à l'égard des " Majors "

Pour rapporter la preuve d'un comportement fautif constitutif d'un dénigrement auprès des majors imputable aux sociétés intimées, les sociétés appelantes produisent une série de mails.

les mails du 02 et 04 octobre 2013

Les abus de la liberté d'expression prévus et réprimés par la loi du 28 juillet 1881 ne peuvent être réparés sur le fondement de l'article 1382 du Code civil.

Dans un mail du 02 octobre 2013, dont copie a été envoyée à M. F. correspondant de la FOX, par Mme Sylvie S., dont il n'est pas contesté qu'elle est au service des sociétés appelantes, indique : " la société MAUREFILMS Réunion est citée dans une affaire de blanchissement d'argent sur la distribution de film à l'ile Maurice ". Ce premier mail est complété le 04 octobre 2013 par l'envoi de l'extrait d'un journal en ligne faisant état de pots de vin versés lors de travaux de dragage du port indiquant : " le témoin néerlandais a affirmé que Boskalis ( société impliquée dans le versement des pots de vin) a effectué six paiements à Yashraj Film en Inde et à Maurefilms à la Reunion "

S'agissant de ces deux mails, la société MAUREFILMS a saisi le 26 décembre 2013 le tribunal de grande instance de Paris pour obtenir réparation, sur le fondement de la loi du 29 juillet 1881 et a été déboutée.

Les propos litigieux rappelés ci-dessus visaient uniquement la personne morale et non les produits services ou prestations proposées par la société MAUREFILMS. Ils relevaient donc du champ d'application de la loi du 29 juillet 1881 et devaient donc être analysés dans ce cadre. Ils ne peuvent être invoqués sur le fondement du droit commun et de l'article 1382 du Code civil. Le dénigrement ne peut être retenu de ces chefs et aucun acte de concurrence déloyale n'est caractérisé.

les autres mails

Il ressort de la lecture des autres mails produits que tant les sociétés appelantes que les sociétés intimées informent les majors des difficultés qu'elles rencontrent dans leur échanges commerciaux. Elles font ainsi état de leurs désaccords réciproques sur les conditions contractuelles proposées et évoquent de problèmes de livraison.

Ces échanges de mails qui révèlent une réelle dégradation des rapports entre les sociétés, ne comportent aucune information émanant des sociétés intimées de nature à jeter le discrédit à l'égard des sociétés appelantes et ne sont que le reflet que de leurs désaccords anciens et persistants.

Ils ne sont pas constitutifs d'un dénigrement et aucun acte de concurrence déloyale n'est caractérisé.

Sur la loterie organisée sur la page FACEBOOK de CINEPALMES exploité par la société IC

Il ressort des pièces produites qu'au mois de mai 2016 CINEPALMES exploité par la société IC a organisé sur sa page FACEBOOK une loterie dans les termes suivants : " tentez de gagner un mois de ciné pour deux personnes en allant mettre un commentaire sur le dernier post de la page FACEBOOK de notre concurrent avec le texte I like CINEPALMES je veux un mois de cinoch ".

Les captures d'écran produites font apparaître que le modérateur du site de CINEPALMES rappelait aux internautes que le commentaire devait être posté sur la page du concurrent et que s'il était effacé ils pouvaient le renouveler.

Le concurrent était facilement identifiable puisque les sociétés en présence se partagent à elles seules le marché Reunionnais et les internautes l'ont dans les faits facilement identifié.

Ainsi la page FACEBOOK du Ciné Cambaie exploité par la société Masacraignes Kino a été " polluée " par le commentaire suivant " I like CINEPAMES je veux un mois de cinoch " et ce à plusieurs reprises, de la part d'internautes souhaitant participer à la loterie organisée par Cinépalmes. Le cinéma CINPALMES est le concurrent direct du cinéma Ciné Cambaie.

L'analyse du commentaire posté sur la page FACEBOOK du cinéma Cambaie ne contient cependant aucune critique et ne jette pas le discrédit sur ce cinéma, puisqu'il ne fait que la publicité du concurrent, ainsi le dénigrement n'est pas caractérisé. Cependant le procédé utilisé, consistant à inciter des internautes clients potentiels, à poster sur le site d'un concurrent un commentaire qui peut être lu par les clients du site, faisant la publicité du concurrent s'analyse plus exactement en un détournement de clientèle par l'utilisation d'un procédé déloyal.

La cour étant saisie sur le fondement des articles 1382 et suivants du Code civil, requalifie les faits portés à son appréciation en faits constitutifs d'un détournement de clientèle déloyal imputable à la société IC et dont la société Mascareignes KINO a été victime. Il est donc établi des faits de concurrence déloyale, pour lesquels la responsabilité de la société IC sera retenue.

Sur le préjudice

Les actes déloyaux caractérisés ci-dessus ont entrainé pour la société Mascareignes KINO un trouble commercial dans la mesure où comme cela ressort des pièces produites plusieurs dizaines d'internautes sont allés sur le site de Ciné Cambaie en postant un message le message " I like Cinépalmes ".

La société Mascareignes sollicite la réparation de son préjudice à hauteur de 25 000,00 €.

Compte tenu du nombre de message sur le site internet dont il est justifié et de la circonstance que les faits ont été perduré plusieurs heures, le trouble commercial subi sera évalué et indemnisé à hauteur de 10 000,00 €.

Il résulte de l'ensemble de ces motifs que la décision entreprise doit être partiellement infirmée.

Sur les demandes accessoires

La société IC qui succombe sera tenue aux dépens d'appel.

L'équité commande d'allouer à la société Mascareignes Kino une somme de 3000,00 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile au paiement de laquelle la société IC sera condamnée.

Par ces motifs, LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement , en matière commerciale, en dernier ressort par mise à disposition au Greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du Code de procédure civile, infirme la décision entreprise en ce qu'elle a- déclaré irrecevable la société Maurefilms en ses demandes de réparation au titre des courriers électroniques émis le 02 et 04 octobre 2013; - rejeté les demandes de réparation formées par la société Masacareigne Kino ;Et statuant à nouveau sur les chefs infirmés déboute la société Maurefilms de sa demande d'indemnisation fondée sur l'article 1382 du Code civil s'agissant des courriers électroniques émis les 02 et 04 octobre 2013 ; dit que la société Investissement et Commerce a commis à l'égard de la société Mascareignes Kino des actes de concurrence déloyale ; condamne la société Investissement et Commerce à verser à la société Mascareignes Kino une somme de 10 000,00 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice commercial subi ;confirme la décision entreprise pour le surplus ; condamne la société Investissement et Commerce aux dépens de la procédure d'appel ; condamne la société Investissement et Commerce à verser à la société Mascareignes Kino une somme de 3000,00 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.