Livv
Décisions

CA Aix-en-Provence, 2e ch., 17 mai 2018, n° 15-17845

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

Laboratoires d'Anjou (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Aimar

Conseillers :

MM. Fohlen, Prieur

Avocats :

Mes Boulan, Joly, Court Menigoz, Crepeaux

T. com. Antibes, du 11 sept. 2015

11 septembre 2015

Exposé de l'affaire

Par acte sous seing privé du 31 août 2012, la SAS Laboratoires d'Anjou qui fabrique et commercialise des produits cosmétiques, vendus en pharmacie et parapharmacie, a conclu avec Mme X un contrat d'agent commercial à compter du 3 septembre 2012, visant à effectuer la promotion médicale et la vente de produits de la gamme Cebelia et Idunes dans les départements 06, 13, 83, 11, 66, 30, 34, ainsi que dans la principauté de Monaco.

La SAS Laboratoires d'Anjou soutenant l'absence de résultat de Mme X, par courrier du 25 juin 2013, a rompu le contrat avant le terme probatoire de sa première année d'exercice, ce dont l'agent a pris acte le 8 août 2013.

La SAS Laboratoires d'Anjou refusant de régler l'indemnité légale de cessation de fin de mandat prévue par l'article L. 134-12 du Code de commerce, Mme Xl 'a fait assigner devant le Tribunal de commerce d'Antibes, qui par décision du 11 septembre 2015 a rejeté les demandes présentées.

Mme X a relevé appel de cette décision et expose :

- qu'aucune période d'essai n'avait été prévue dans le contrat,

- que le dernier paragraphe de l'article 7 du contrat fixant par avance le montant de l'indemnité légale de cessation de mandat est nul,

- qu'aucune faute grave ne peut lui être imputée,

- qu'aucune disposition ne lui imposait d'envoyer périodiquement à son mandant des rapports écrits d'activité.

Elle demande la réformation du jugement et la condamnation de la société Laboratoires d'Anjou à lui verser la somme de 23 845,09 euros au titre de l'indemnité légale de cessation de mandat, outre intérêts de droit à compter de la mise en demeure du 8 novembre 2013.

La société Laboratoires d'Anjou rétorque :

- que la rupture est intervenue durant la période probatoire ainsi que cela ressort des clauses contractuelles, et qu'aucune indemnité n'est due,

- que cette stipulation contractuelle est valable,

- que la rupture est intervenue pour faute grave de l'agent qui non seulement n'a pas atteint le seuil minimal de 74 000 euros de CA HT, objectif dont les parties avaient fait une des conditions substantielles du contrat, mais elle a laissé dépérir la clientèle existante,

- qu'en outre elle ne justifie pas d'un préjudice pour 11 mois d'activité alors qu'elle n'a rien développé, et qu'elle ne saurait prétendre à une somme de plus de 5 961,24 euros.

La société intimée conclut à la confirmation du jugement.

LA COUR renvoie, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties à leurs écritures précitées.

MOTIFS DE LA DECISION

L'article 7 du contrat conclu entre les parties précise : " Le présent contrat qui prend effet à compter du 3 septembre 2012 est conclu pour une durée indéterminée. En conséquence chaque partie pourra y mettre fin à tout moment par LRAR moyennant le respect d'un préavis de 1 mois pour la première année d'exécution du contrat, de 2 mois pour la deuxième année commencée et de 3 mois pour la troisième armée commencée et les suivantes ".

Faute de stipulation contractuelle, la société Laboratoires d'Anjou ne peut se prévaloir d'une période d'essai.

La clause insérée au dernier paragraphe de l'article 7 fixant par avance le montant de l'indemnité légale de cessation de mandat a été, à juste raison déclarée nulle, au regard des dispositions d'ordre public de l'article L. 134-12 du Code de commerce.

Celui-ci prévoit le versement de diverses indemnités à l'agent en cas de cessation de ses relations avec le mandant sauf, comme le précise l'article L. 134-13 du Code de commerce, en cas de faute grave de l'agent.

La faute justifiant la cessation du contrat d'agent commercial est celle qui porte atteinte à la finalité du mandat d'intérêt commun et rend impossible le maintien du lien contractuel.

L'absence de réalisation du chiffre d'affaires ne constitue pas en soit une faute grave de l'agent sauf si son comportement est à l'origine de cette baisse, ce que doit établir le mandant.

Or la société Laboratoires d'Anjou ne produit pas la moindre pièce établissant l'existence d'une faute de l'agent dans la réalisation des objectifs fixés contractuellement.

Il n'est pas inutile de relever que cette société, postérieurement à la lettre de rupture a adressé un courrier électronique à X en lui proposant la poursuite de son mandat d'agent commercial mais à condition qu'elle accepte de voir réduit son taux de commissions de 20 à 15 %, ce qui laisse présumer que l'activité de l'agent était suffisante.

De même, invoquant l'article R. 134-1 du Code de commerce, la société intimée ne précise pas l'information que devait lui fournir l'agent autre que les états et factures qu'elle communique aux débats.

Madame X est donc fondée à percevoir l'indemnité prévue par l'article L. 134-12 du Code de commerce.

Dans ses écritures elle détaille ainsi le montant de l'indemnité demandée d'un montant de 23 845,09 euros :

- 9 734 euros au titre de la gamme Cebelia ;

- 1 195 euros au titre de la gamme Idunes soit un total de 10 929 euros sur 11 mois d'exécution du mandat, soit une moyenne mensuelle de 993,54 euros ce qui donne une indemnité de (993,54 € x 24 mois =) 23 845,09 euros.

Madame X remet une unique pièce à l'appui de cette demande, un tableau édité par Cebelia intitulé " répartition de la CA Cebelia par région " sans que soit mentionné le bénéficiaire concerné ou la région.

Ce document abscons ne permet pas de calculer le montant de l'indemnité réclamée par Madame X.

La société intimée dans son subsidiaire indique que Madame P. ne saurait donc prétendre à une somme de plus de 5 961,24 euros (993,54 x 6), correspondant à 6 mois de commissions brutes.

L'indemnité de rupture est donc fixée à cette somme.

La société Laboratoires d'Anjou est déboutée de ses demandes.

Il convient de condamner la société Laboratoires d'Anjou à payer à Madame X une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par ces motifs, LA COUR, Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a considéré qu'il n'y avait pas de période d'essai et en ce qu'il a déclaré non écrit l'article 7 "in fine " du contrat subordonnant le droit à indemnité à la réalisation d'un objectif contractuel de 74 000 euros, L'infirmant pour le surplus et statuant à nouveau, Statuant à nouveau, Condamne la société Laboratoires d'Anjou à payer à Madame X une indemnité de 5 961,24 euros au titre de l'article L. 134-12 du Code de commerce, Condamne la société Laboratoires d'Anjou à payer à Madame X une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, Déboute les parties de leurs demandes autres ou plus amples, Condamne la société Laboratoires d'Anjou aux dépens de première instance et d'appel, recouvrés conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.