Cass. 1re civ., 7 mars 2018, n° 17-10.489
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Défendeur :
Nespresso France (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Batut
Avocats :
SCP Marlange, de La Burgade
LA COUR : - Attendu, selon le jugement attaqué, que, le 2 juin 2015, M. Y... (l'acquéreur) a acheté une machine à café de type Nespresso ; que, l'acquéreur se plaignant de la fourniture d'un café tiède, la machine a été envoyée, le 26 novembre 2015, au service assistance de la société Nespresso France (la société) qui, constatant un dysfonctionnement électrique selon un rapport d'intervention du 2 décembre 2015, a procédé au remplacement d'une pièce ; que, le 24 décembre 2015, l'acquéreur faisant état de la persistance du défaut, la machine a été envoyée une seconde fois en réparation avant de lui être restituée ; que, le 18 mars 2016, l'acquéreur a saisi la juridiction de proximité afin d'obtenir son remboursement ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche : - Vu l'article 455 du Code de procédure civile ; - Attendu que, pour condamner la société à payer à l'acquéreur une certaine somme en remboursement de la machine, le jugement se borne à constater que l'acquéreur l'a rapportée à deux reprises, puis à affirmer que le défaut de température du café, invoqué par celui-ci, est établi ;
Qu'en statuant ainsi, par voie de simple affirmation, la juridiction de proximité n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
Sur la deuxième branche du moyen : - Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; - Attendu que, pour statuer comme il est dit, le jugement retient qu'il résulte des rapports techniques et comptes rendus d'intervention, émis par la société, que la température du café produit par la machine n'était pas conforme à celle attendue ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il ressort de ces documents que, le 24 décembre 2015, la température du café était conforme à celle attendue, la juridiction de proximité a méconnu le principe susvisé ;
Sur la troisième branche du moyen : - Vu l'article 1315, devenu l'article 1353 du Code civil ; - Attendu que, pour statuer comme il le fait, le jugement retient que le rapport du 30 décembre 2015, produit par la société, ne peut être retenu comme la preuve de l'absence de défaut de la machine, dès lors que nul ne peut se constituer de preuve à lui-même ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le principe selon lequel nul ne peut se constituer de preuve à soi-même n'est pas applicable à la preuve d'un fait juridique, la juridiction de proximité a violé le texte susvisé ;
Sur la quatrième branche du moyen : - Vu l'article L. 211-7, devenu L. 217-7 du Code de la consommation ; - Attendu que, pour statuer comme il le fait, le jugement retient, en application du texte précité, que, le défaut de conformité du bien étant apparu dans le délai de vingt-quatre mois de sa délivrance, il y a lieu, faute pour le vendeur de rapporter la preuve contraire, de considérer que la machine livrée n'était pas conforme au contrat ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la présomption édictée par l'article L. 211-7, devenu L. 217-7, du Code de la consommation, porte uniquement sur la date de survenance du défaut de conformité et non sur l'existence du défaut lui-même, la juridiction de proximité a violé le texte susvisé ;
Et sur la cinquième branche du moyen : - Vu l'article 1315, devenu 1353 du Code civil, ensemble l'article 1604 du même Code ; - Attendu que, pour statuer comme il le fait, le jugement retient qu'il incombait au vendeur de rapporter la preuve de l'absence de défaut affectant la machine à café ;
Qu'en statuant ainsi, la juridiction de proximité a inversé la charge de la preuve, violant ainsi les textes susvisés ;
Par ces motifs : casse et annule, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 12 octobre 2016, entre les parties, par la juridiction de proximité de Paris 13ème ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le Tribunal d'instance de Paris 14ème.