Livv
Décisions

Cass. com., 13 juin 2018, n° 16-27.209

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Flora Nova (SAS)

Défendeur :

Financière Postulka (SARL), Les Jardins de Chloé et Clémentine (Sté), Selarl Aurélie Lecaudey (ès qual.)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Riffault-Silk

Rapporteur :

Mme Poillot-Peruzzetto

Avocats :

SCP Gadiou, Chevallier, SCP Alain Bénabent

T. com. Bordeaux, 6e ch., du 21 nov. 201…

21 novembre 2013

LA COUR : - Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société Flora Nova que sur le pourvoi incident relevé par la société Aurélie Lecaudey, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Les Jardins de Chloé et Clémentine ; - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 10 octobre 2016), que le 7 novembre 2005, la société Flora Partner, qui animait un réseau de franchise fondé sur un concept de magasins de vente en libre-service de fleurs coupées sous l'enseigne "les jardins de fleurs", a conclu un contrat de franchise avec la société Les Jardins de Chloé et Clémentine (la société Les Jardins) ; que le 28 février 2011, la société Flora Partner, devenue la société Financière Postulka, a cédé à la société Flora Nova son fonds de commerce ainsi que les contrats de franchise la liant aux membres du réseau ; que la société Les Jardins ayant cessé de régler ses factures de redevances en avril 2012, la société Flora Nova l'a assignée en paiement et en réparation de ses préjudices ; que la société Les Jardins a appelé en la cause la société Financière Postulka et a demandé la condamnation solidaire de cette dernière, avec la société Flora Nova, au paiement de l'indemnisation résultant de la rupture fautive des contrats et en restitution des redevances de communication versées et non utilisées ; qu'en cours d'instance, la société Les Jardins a été mise en liquidation judiciaire, la société Aurélie Lecaudey étant nommée liquidateur ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal : - Attendu que la société Flora Nova fait grief à l'arrêt de sa condamnation à payer à la société Les Jardins une certaine somme au titre des redevances de communication alors, selon le moyen : 1°) que dans ses conclusions d'appel, la société Flora Nova faisait valoir qu'après restitution par la société Financière Postulka des sommes prélevées au titre de la redevance de communication et qui n'avaient pas été utilisées, elle avait géré, avec l'agence de publicité 31e arrondissement le plan de communication nationale du réseau Le Jardin des Fleurs, ainsi que la mise en place du nouveau concept, produisant à cet égard le plan de communication nationale et le document de présentation du nouveau concept au réseau, ce qui démontrait que dès 2011, à la satisfaction de l'intégralité des membres du réseau, le plan de communication avait été intégralement repris, la charte graphique ayant été réécrite par l'agence de publicité, et que, pour redynamiser les magasins, un nouveau concept avait été mis en place qui avait permis le " relookage " des magasins, le franchiseur ayant financé la totalité de la création du nouveau concept ; qu'en affirmant dès lors que la société Flora Nova ne fournissait aucune explication sur l'affectation des sommes restituées, la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation de l'article 4 du Code de procédure civile ; 2°) que dans ses conclusions d'appel, la société Flora Nova faisait valoir qu'après restitution par la société Financiere Postulka des sommes prélevées au titre de la redevance de communication et qui n'avaient pas été utilisées, elle avait géré, avec l'agence de publicité 31e arrondissement le plan de communication nationale du réseau Le Jardin des Fleurs, ainsi que la mise en place du nouveau concept, produisant à cet égard le plan de communication nationale et le document de présentation du nouveau concept au réseau, ce qui démontrait que dès 2011, à la satisfaction de l'intégralité des membres du réseau, le plan de communication avait été intégralement repris, la charte graphique ayant été réécrite par l'agence de publicité, et que, pour redynamiser les magasins, un nouveau concept avait été mis en place qui avait permis le " relookage " des magasins, le franchiseur ayant financé la totalité de la création du nouveau concept ; qu'en ne répondant pas à ce chef des conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

Mais attendu que sous le couvert des griefs infondés de méconnaissance des termes du litige et de défaut de réponse à conclusions, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion, devant la Cour de cassation, l'appréciation souveraine, par la cour d'appel, des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis et dont elle a déduit que la société Flora Nova ne justifiait pas que les redevances de communication versées par la société Les Jardins avaient été affectées, en tout ou partie, à la communication ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen du même pourvoi : - Attendu que la société Flora Nova fait grief à l'arrêt du rejet de ses demandes en paiement de redevances alors, selon le moyen : 1°) qu'en affirmant qu'il ressort des justificatifs versés aux débats que dès le premier rejet de prélèvement franchiseur, la société Flora Nova avait adressé de nombreux mails et messages à la société Les Jardins, mais dans des termes visant exclusivement à recouvrer des arriérés, sans identifier ces justificatifs, ni même les analyser, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ; 2°) que la cour d'appel a constaté que les défauts d'assistance invoqués par la société Les Jardins faisaient suite au premier rejet de prélèvement franchiseur ; qu'en décidant néanmoins que cette dernière société était fondée à invoquer l'exception d'inexécution pour laisser les sommes dues à la société Flora Nova à la charge du franchiseur, quand l'inexécution première incombait au franchisé, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1184 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ; 3°) que la société Flora Nova faisait valoir, dans ses conclusions d'appel, que M. Devoise, dirigeant de la société Les Jardins, l'avait fait patienter quant aux paiement des sommes dues en lui faisant croire qu'il était sur le point de céder ses deux magasins, bien qu'il n'ait pas eu l'intention de vendre et qu'elle avait toujours indiqué à M. Devoise être favorable à cette vente, qui lui aurait permis d'obtenir le paiement des sommes dues ; qu'en se bornant à allèguer d'un manquement de la société Flora Nova aux exigences de l'article 17 du contrat, sans préciser en quoi le comportement du franchiseur aurait participé à l'échec de la vente prétendument projetée par le franchisé, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1184 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'en retenant qu'il ressortait des justificatifs versés aux débats que dès le premier rejet de prélèvement, la société Flora Nova avait adressé de nombreux courriels et messages à la société Les Jardins, mais dans des termes visant exclusivement à recouvrer les arriérés, la cour d'appel a nécessairement analysé ces pièces ;

Attendu, en second lieu, que contrairement à ce que postule le moyen pris en sa deuxième branche, l'arrêt ne constate pas que le défaut d'assistance invoqué par la société Les Jardins faisait suite au premier rejet de prélèvement, mais retient que la société Flora Nova ne justifie de la fourniture d'aucune aide telle que prévue au contrat de franchise, pas plus qu'elle ne justifie avoir réalisé de visites régulières du magasin, faisant ainsi ressortir que les manquements de la société Flora Nova à son obligation d'assistance sont caractérisés tant avant qu'après le premier incident de paiement ; qu'il ajoute qu'alors que la société Les Jardins avait informé le franchiseur de ce qu'elle souhaitait vendre ses magasins et avait trouvé un repreneur dont elle lui avait transmis l'offre, afin de recueillir son agrément ou de lui permettre d'exercer son droit de préemption, conformément à l'article 17 du contrat, la réponse faite par la société Flora Nova ne répondait pas aux exigences de cet article, qui prévoit une procédure particulièrement stricte, et retient que le comportement du franchiseur a contribué à l'échec de la vente des magasins de la société Les Jardins ; qu'en l'état de ces seules constatations et appréciations, dont elle a déduit que cette société était fondée à invoquer l'exception d'inexécution, justifiant que les sommes dues au titre des redevances restent à la charge du franchiseur, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Et sur le moyen unique du pourvoi incident : - Attendu que la société Aurélie Lecaudey, ès qualités, fait grief à l'arrêt du rejet de sa demande tendant à voir condamner la société Flora Nova à lui payer la somme de 300 000 euros à titre de dommages-intérêts alors, selon le moyen : 1°) qu'en l'espèce, la société Aurélie Lecaudey, ès qualités, sollicitait, dans ses conclusions d'appel, de voir " dire et juger que les sociétés Financière Postulka et Flora Nova ont été déloyales dans l'exécution du contrat de franchise du 7 novembre 2005 et ont commis des manquements contractuels au titre : - du non-reversement des remises de fin d'années, - du non-remboursement du budget communication, - de leur devoir d'assistance " et, en conséquence, de les voir condamnées in solidum à lui verser notamment la somme de 300 000 euros à titre de dommages et intérêts ; que la cour d'appel a expressément retenu, concernant le défaut d'assistance et la déloyauté, que " le comportement du franchiseur caractérise un manquement à ses obligations contractuelles qui a participé à la fois à la détérioration de la situation du franchisé et à l'échec de la vente de ses magasins " ; qu'en déboutant la société Aurélie Lecaudey, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Les Jardins, de sa demande tendant à voir condamner la société Flora Nova à lui payer la somme de 300 000 euros à titre de dommages et intérêts, après avoir retenu l'existence d'un manquement de la société Flora Nova à ses obligations contractuelles ayant participé au préjudice subi par la société Les Jardins, dont elle a ainsi constaté l'existence en son principe, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé l'article 4 du Code de procédure civile ; 2°) que le propre de la responsabilité civile est de rétablir aussi exactement que possible l'équilibre détruit par le dommage et de replacer la victime dans la situation où elle se serait trouvée si l'acte dommageable ne s'était pas produit ; qu'en l'espèce, la société Aurélie Lecaudey, ès qualités, sollicitait, dans ses conclusions d'appel, de voir " dire et juger que les sociétés Financière Postulka et Flora Nova ont été déloyales dans l'exécution du contrat de franchise du 7 novembre 2005 et ont commis des manquements contractuels au titre : - du non-reversement des remises de fin d'année, - du non-remboursement du budget communication, - de leur devoir d'assistance " et, en conséquence, de les voir condamnées in solidum à lui verser notamment la somme de 300 000 euros à titre de dommages et intérêts ; que la cour d'appel a expressément retenu, concernant le défaut d'assistance et la déloyauté, que " le comportement du franchiseur caractérise un manquement à ses obligations contractuelles qui a participé à la fois à la détérioration de la situation du franchisé et à l'échec de la vente de ses magasins " ; qu'en déboutant néanmoins la société Aurélie Lecaudey, ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Les Jardins, de sa demande tendant à voir condamner la société Flora Nova à lui payer la somme de 300 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 1134 alinéa 3 et 1147 du Code civil, dans leur rédaction applicable en la cause ;

Mais attendu que la société Les Jardins n'ayant pas demandé la condamnation des sociétés Financière Postulka et Flora Nova à lui payer la somme de 300 000 euros en réparation du préjudice résultant du non-reversement des remises de fin d'année, du non-remboursement du budget communication et des manquements au devoir d'assistance, mais ayant demandé le paiement de cette somme en réparation du préjudice résultant de la privation de son droit de préemption lors de la cession du fonds de commerce de la société Flora Partner à la société Flora Nova, intervenue le 28 février 2011, le moyen, qui postule le contraire, ne peut être accueilli ;

Par ces motifs : Rejette les pourvois principal et incident.