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Décisions

Cass. com., 27 juin 2018, n° 16-27.856

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Goyard St-Honoré (SA)

Défendeur :

Fauré Le Page Paris (SAS), Fauré Le Page maroquinier (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Rapporteur :

M. Sémériva

Avocats :

SCP Hémery, Thomas-Raquin, Le Guerer, Me Bertrand

TGI Paris, 3e ch. 3e sect., du 30 janv. …

30 janvier 2015

LA COUR : - Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société Goyard St-Honoré que sur le pourvoi incident relevé par les sociétés Fauré Le Page Paris et Fauré Le Page maroquinier ; - Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, sur le fondement, notamment, de marques françaises et de l'Union européenne déclinant un motif dit " goyardine ", la société Goyard St-Honoré a agi en contrefaçon, ainsi qu'en concurrence déloyale, contre la société Fauré Le Page Paris et la société Fauré Le Page maroquinier (les sociétés Fauré Le Page) ; que celles-ci ont formé des demandes reconventionnelles en annulation et déchéance des droits attachés à ces marques ;

Sur le deuxième moyen du pourvoi principal, pris en ses cinquième, sixième, septième et huitième branches : - Attendu que la société Goyard St-Honoré fait grief à l'arrêt de prononcer la déchéance de ses droits sur la marque n° 3 365 528, à compter du 18 novembre 2010, pour les produits suivants : sacs de plage, cartables, étuis pour clés (maroquinerie) ; papier, carton ; produits de l'imprimerie, à savoir livres, imprimés, journaux, périodiques, magazines, affiches, photographies ; instruments à écrire, savons de toilette ; parfums ; huiles essentielles à usage personnel ; cosmétiques, métaux précieux et leurs alliages, chaînes de montres, écrins en métaux précieux, coffrets à bijoux en métaux précieux ; joaillerie, bijouterie, pierres précieuses ; horlogerie et instruments chronométriques ; montres, bracelets de montres, montres-bracelets ; vêtements (habillement) pour femmes, hommes et enfants à savoir chemises, fourrures, foulards, gants, cravates, ceintures (habillement), chaussettes, sous-vêtements ; chaussures (à l'exception des chaussures orthopédiques), chaussons ; tissus à usage textile et produits textiles à savoir linge de bain [à l'exception de l'habillement], linge de maison, linge de lit, linge de table [en matières textiles], alors, selon le moyen : 1°) que dans ses conclusions d'appel, pour justifier de l'usage des marques n° 3 365 528 et n° 004 748 729 pour les " sacs de plage ", elle faisait valoir qu'elle exploitait cette marque pour un modèle de sac de plage dénommé " Méditerranée " et se référait à ses pièces n° 102 et 105 ; qu'en se bornant à affirmer qu'il ne serait pas justifié d'une exploitation sérieuse des marques n° 3 365 528 et 004 748 729 pour des "sacs de plage" et qu'il ne serait pas possible d'arguer d'un usage de la marque pour des produits similaires tels que les "sacs et trousses de voyage", sans analyser, même sommairement, ces pièces n° 102 et 105, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ; 2°) que dans ses conclusions d'appel, pour justifier de l'usage des marques n° 3 365 528 et n° 004 748 729 pour les "étuis pour clés (maroquinerie)", elle se référait à sa pièce n° 90 comportant notamment vingt factures de ventes à des clients entre 2009 et 2013 ; qu'en se bornant à affirmer qu'il ne serait pas justifié d'une exploitation sérieuse des marques n° 3 365 528 et 004 748 729 pour des "étuis pour clés (maroquinerie)" et qu'il ne serait pas possible d'arguer d'un usage de la marque pour des produits similaires tels que les "sacs et trousses de voyage", sans analyser, même sommairement, cette pièce n° 90, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ; 3°) que dans ses conclusions d'appel, afin de justifier de l'usage de la marque n° 3 365 528 pour les produits de la classe 16, elle n'indiquait pas seulement qu'elle utilisait cette marque sur des couvertures pour bloc-notes et agenda ainsi que des carnets d'adresses ; qu'elle faisait également valoir, en se référant à ses pièces n° 65-1, 65-2, 66-1 et 66-2, qu'elle a publié un numéro spécial en série limitée du magazine " Art Travel " dont la couverture reproduit ses marques, et qu'elle reproduit également ses marques sur la couverture de petits livrets diffusés auprès de ses clients ; qu'en relevant qu'en ce qui concerne les " papier ; carton ; produits de l'imprimerie, à savoir livres, imprimés, journaux, périodiques, magazines, affiches, photographies ; instruments à écrire ", il ne serait " fait état par la société Goyard St-Honoré que de la commercialisation de couvertures pour bloc-notes et agenda et de carnets d'adresses avec ces marques en filigrane ", la cour d'appel a dénaturé ses conclusions, en violation de l'article 4 du Code de procédure civile ; 4°) qu'en retenant une absence d'usage sérieux de la marque n° 3 365 528 pour les " papier ; carton ; produits de l'imprimerie, à savoir livres, imprimés, journaux, périodiques, magazines, affiches, photographies ; instruments à écrire ", sans analyser, même sommairement, les pièces n° 65-1, 65-2, 66-1 et 66-2 régulièrement communiquées par la société Goyard St-Honoré, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;

Mais attendu, en premier lieu, que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation ni de s'expliquer sur des pièces inopérantes, pour être postérieures à la présentation de la demande de déchéance, a statué par une décision motivée en retenant qu'il n'était pas justifié d'une exploitation sérieuse de la marque pour les produits considérés ;

Et attendu, en second lieu, que la cour d'appel n'était pas tenue de répondre à des conclusions inopérantes en ce que, soutenant qu'il aurait été fait usage de cette marque dans un numéro spécial en série limitée d'un magazine dont la couverture reproduisait ses marques afin de mettre en avant un article consacré à son entreprise et à son savoir-faire, et que ses marques figuraient sur la couverture de livrets diffusés auprès de ses clients, la société Goyard St-Honoré prétendait ainsi en faire usage pour désigner non des produits de l'imprimerie, mais ceux présentés dans ces publications ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen de ce pourvoi, pris en ses troisième, cinquième et sixième branches : - Attendu que la société Goyard St-Honoré fait grief à l'arrêt de prononcer la déchéance de ses droits sur la marque de l'Union européenne n° 004 748 729 à compter du 11 juin 2014 pour les sacs de plage, cartables, étuis pour clés (maroquinerie), savons de toilette ; parfums ; huiles essentielles à usage personnel ; cosmétiques, alors, selon le moyen : 1°) que la déchéance des droits sur une marque communautaire ne peut être prononcée que si celle-ci n'a pas fait l'objet d'un usage sérieux pendant une période ininterrompue de cinq ans ; que l'usage sérieux doit ainsi nécessairement être apprécié sur l'ensemble de la période de cinq ans précédant la date de prononcé de la déchéance ; qu'en l'espèce, la cour d'appel ne pouvait donc prononcer la déchéance de ses droits sur cette marque à compter du 11 juin 2014, correspondant à l'expiration du délai de cinq ans suivant la date de publication de l'enregistrement de cette marque, sans prendre en considération l'ensemble des faits d'exploitation invoqués qui étaient compris dans la période allant du 11 juin 2009 au 11 juin 2014 ; qu'en refusant, pour apprécier l'usage sérieux de la marque communautaire n° 004 748 729, de prendre en considération les preuves d'usage datant de 2012 et 2013, la cour d'appel a violé les articles 15, 51 et 55 du règlement (CE) n° 207/2009 du 26 février 2009 sur la marque communautaire ; 2°) dans ses conclusions d'appel, pour justifier de l'usage des marques n° 3 365 528 et n° 004 748 729 pour les "sacs de plage", elle faisait valoir qu'elle exploitait cette marque pour un modèle de sac de plage dénommé " Méditerranée " et se référait à ses pièces n° 102 et 105 ; qu'en se bornant à affirmer qu'il ne serait pas justifié d'une exploitation sérieuse des marques n° 3 365 528 et 004 748 729 pour des " sacs de plage, cartables, étuis pour clés (maroquinerie) " et qu'il ne serait pas possible d'arguer d'un usage de la marque pour des produits similaires tels que les " sacs et trousses de voyage ", sans analyser, même sommairement, ces pièces n° 102 et 105, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ; 3°) que dans ses conclusions d'appel, pour justifier de l'usage des marques n° 3 365 528 et n° 004 748 729 pour les " étuis pour clés (maroquinerie) ", elle se référait à sa pièce n° 90 comportant notamment vingt factures de ventes à des clients entre 2009 et 2013 ; qu'en se bornant à affirmer qu'il ne serait pas justifié d'une exploitation sérieuse des marques n° 3 365 528 et 004 748 729 pour des " sacs de plage, cartables, étuis pour clés (maroquinerie) " et qu'il ne serait pas possible d'arguer d'un usage de la marque pour des produits similaires tels que les " sacs et trousses de voyage ", sans analyser, même sommairement, cette pièce n° 90, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;

Mais attendu, en premier lieu, que les dispositions de l'article 55 du règlement (CE) n° 207/2009, qui autorisent à prononcer la déchéance des droits attachés à la marque à compter d'une date antérieure à celle de la demande, sont sans application en l'espèce, la cour d'appel ayant donné effet à cette déchéance à une date postérieure à la demande ;

Et attendu, en second lieu, que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation ni de s'expliquer sur des pièces inopérantes, pour être postérieures à la présentation de la demande de déchéance, a statué par une décision motivée en retenant qu'il n'était pas justifié d'une exploitation sérieuse de la marque pour les produits considérés ; d'où il suit qu'inopérant en sa première branche, le moyen n'est pas fondé pour le surplus ;

Sur le cinquième moyen de ce pourvoi, pris en sa neuvième branche : - Attendu que la société Goyard St-Honoré fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes fondées sur la concurrence déloyale et le parasitisme, alors, selon le moyen, que le parasitisme, qui consiste, pour un opérateur économique, à se placer dans le sillage d'une entreprise en profitant indûment des investissements consentis ou de sa notoriété, résulte d'un ensemble d'éléments appréhendés dans leur globalité ; qu'en l'espèce, elle faisait valoir, au soutien de ses demandes au titre de la concurrence déloyale, que les sociétés Fauré Le Page avaient adopté une démarche globale et systématique visant à parasiter ses propres investissements ; qu'en écartant son action en concurrence déloyale, sans rechercher, au terme d'une appréciation globale des différents éléments qu'elle invoquait, si, en commercialisant, à des prix inférieurs, des produits évoquant, dans l'esprit du public, ceux de cette société, en s'installant à proximité immédiate du comptoir de vente historique de la Maison Goyard de la rue St-Honoré, en adoptant les codes identitaires de ce comptoir de vente historique dans son " corner " des Galeries Lafayette Haussmann, en reprenant la couleur jaune " Pantone 1235 c " utilisée par cette Maison, en réalisant, elle aussi, un an après la société Goyard St-Honoré, une malle spéciale pour accueillir une pièce d'un kilogramme en or réalisée par la Monnaie de Paris, et en communiquant sur la date de " 1717 " pour se créer, de toutes pièces, une ancienneté et un prestige qu'elles n'ont pas, les sociétés Fauré Le Page ne s'étaient pas ainsi systématiquement et fautivement placées dans le sillage de la société Goyard St-Honoré, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382, devenu 1240, du Code civil ;

Mais attendu que, n'ayant saisi la cour d'appel d'aucune demande fondée sur le parasitisme, la société Goyard St-Honoré ne saurait lui faire grief de n'avoir pas recherché si les conditions d'une telle demande étaient réunies ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le moyen unique du pourvoi incident : - Attendu que les sociétés Fauré Le Page font grief à l'arrêt d'infirmer le jugement les déclarant irrecevables en leur demande en déchéance des droits de la société Goyard St-Honoré sur les marques n° 1 633 326 et 3 365 528, mais seulement en ce que ces marques désignent les articles pour fumeurs (marque 1 633 326) et les articles pour fumeurs non en métaux précieux, à savoir cendriers, briquets, porte-cigares, porte-cigarettes (marque 3 365 528) et de les déclarer irrecevables en leur demande de déchéance des droits attachés à la marque n° 004 748 729 pour divers produits alors, selon le moyen, que la déchéance peut être demandée en justice par toute personne intéressée, ce qui s'entend, au sens de l'article 31 du Code de procédure civile, de tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention ; que le demandeur en déchéance de droits de marque justifie d'un intérêt à agir lorsque la demande tend à lever une entrave à l'utilisation du signe dans le cadre de son activité économique ; que la cour d'appel, qui a considéré que les sociétés Fauré Le Page n'étaient recevables à agir en déchéance que pour les produits qui leur étaient opposés dans le cadre de l'action principale en contrefaçon et qui n'a pas recherché comme elle y était invitée, si les sociétés Fauré Le Page ne justifiaient pas d'une entrave à leur activité économique en raison de l'identité des parties et de l'appartenance des produits visés par les marques à des domaines regroupant le cœur de l'activité de toute maison de luxe, a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 714-5 du Code de la propriété intellectuelle, 31 et 70 du Code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d'appel n'a pas retenu que les sociétés Fauré Le Page ne disposaient pas d'un intérêt à agir, mais souverainement exclu l'existence d'un lien suffisant entre leur demande incidente et la demande principale ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en sa troisième branche : - Vu l'article 455 du Code de procédure civile ; - Attendu que pour prononcer la déchéance partielle des droits de la société Goyard St-Honoré sur la marque n° 1 633 326 pour désigner des savons, parfumerie, huiles essentielles, cosmétiques, lotions pour les cheveux ; dentifrices ; métaux précieux et leurs alliages ; papier et articles en papier, carton, articles de bureau, cuir et imitations du cuir ; malles et valises ; parapluies, parasols et cannes ; sellerie ; tissus ; couvertures de lit et de table ; vêtements, chaussures, chapellerie ; colliers pour animaux, l'arrêt retient qu'il est constant que la marque représentant le motif de toile " goyardine " n'est pas exploitée en tant que telle pour les produits concernés ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans répondre aux conclusions de la société Goyard St-Honoré qui, se prévalant de la règle dégagée par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE, 11 mars 2003, C-40/01, Ansul), soutenait qu'elle avait fourni à sa clientèle des services de réparation des malles et sacs vendus sous la marque n° 1 633 326 dans les conditions retenues par cet arrêt, la cour d'appel a méconnu les exigences du texte susvisé ;

Sur le deuxième moyen de ce pourvoi, pris en sa première branche : - Vu l'article L. 714-5 du Code de la propriété intellectuelle ; - Attendu que pour prononcer la déchéance partielle des droits de la société Goyard St-Honoré sur la marque française n° 3 365 528, à compter du 18 novembre 2010, pour désigner des parapluies, parasols et cannes, l'arrêt retient qu'il n'est produit que neuf tickets d'achat dont six datent de 2012 et 2013, postérieurement à la genèse du présent litige, la première mise en demeure datant du 21 mars 2012, à une période où le propriétaire de la marque a pu avoir connaissance de l'éventualité d'une demande de déchéance, et que les seules preuves d'achat de trois parapluies sur la seule année 2011 sont insuffisantes, même pour des produits de luxe, à rapporter la preuve d'un usage sérieux pour ces produits ;

Qu'en se déterminant ainsi, alors que la déchéance des droits de marque n'est pas encourue si son usage sérieux a commencé ou a repris plus de trois mois avant la demande en déchéance, à moins que son titulaire ait eu connaissance de l'éventualité de cette demande, la cour d'appel, qui a écarté, non seulement les preuves d'usage postérieures à la " genèse " du litige, mais également celles remontant à plus de trois mois auparavant, sans expliciter les motifs de sa décision sur ce point ni préciser la date de formation de la demande en déchéance, n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Sur le troisième moyen de ce pourvoi, pris en sa première branche : - Vu l'article 51 du règlement (CE) n° 207/2009 du 26 février 2009 sur la marque de l'Union européenne ; - Attendu que pour prononcer la déchéance des droits de la société Goyard St-Honoré sur la marque de l'Union européenne n° 004 748 729 à compter du 11 juin 2014 pour les produits parapluies, parasols et cannes, l'arrêt se prononce par les motifs identiques à ceux cités au deuxième moyen ;

Qu'en se déterminant ainsi, alors que la déchéance des droits de marque n'est pas encourue si son usage sérieux a commencé ou a repris plus de trois mois avant la demande en déchéance, à moins que son titulaire ait eu connaissance de l'éventualité de cette demande, la cour d'appel, qui a écarté, non seulement les preuves d'usage postérieures à la " genèse " du litige, mais également celles remontant à plus de trois mois auparavant, sans expliciter les motifs de sa décision sur ce point ni préciser la date de formation de la demande en déchéance, n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Sur le quatrième moyen de ce pourvoi, pris en sa première branche : - Vu l'article L. 711-3 c) du Code de la propriété intellectuelle ; - Attendu que pour rejeter les demandes d'annulation des marques des sociétés Fauré Le Page, pour déceptivité, l'arrêt constate que la Maison Fauré Le Page a été créée en 1716 et dissoute le 27 novembre 1992, son patrimoine ayant alors fait l'objet d'un transfert universel à son associé unique, la société Saillard, qui a déposé le 5 juin 1989 la marque " Fauré Le Page " n° 1 534 660, puis, mettant fin à ses activités, l'a cédée, le 28 octobre 2009, à la société Fauré Le Page Paris, créée le 20 octobre de cette même année ; qu'il en déduit que la société Fauré Le Page peut légitimement apparaître comme le successeur de la Maison Fauré Le Page, que la mention " 1717 " ne sera pas nécessairement interprétée par le public pertinent comme une référence à la date de création de la société Fauré Le Page, mais plus certainement comme se référant à l'époque de la création de la maison éponyme dont elle est le successeur, et qu'il n'est donc démontré aucune tromperie effective du consommateur, ni même un risque suffisamment grave de tromperie ;

Qu'en se déterminant ainsi, en retenant que la société Fauré Le Page Paris était le " successeur " de la Maison Fauré Le Page, sans préciser la signification de cette qualification, ni constater que cette société aurait continué ou repris les activités de la société Saillard ou qu'elle serait aux droits de cette dernière, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé en quoi cette société était en droit, du seul fait de la cession de la marque " Fauré Le Page ", de se prévaloir, auprès du public concerné, de l'ancienneté de la Maison Fauré Le Page, n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Et sur le cinquième moyen de ce pourvoi, pris en sa deuxième branche : - Vu les articles L. 120-1 et L. 121-1 du Code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 ; - Attendu que pour rejeter l'action en concurrence déloyale de la société Goyard St-Honoré, l'arrêt énonce que le fait pour les sociétés Fauré Le Page de communiquer sur l'ancienneté de la maison éponyme dont elles ont repris la marque, même en l'absence de cession de fonds, n'est pas en soi illégitime et ne saurait caractériser une pratique trompeuse ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le seul fait d'acquérir la propriété d'une marque n'autorise pas le cessionnaire à se prévaloir de l'ancienneté de l'entreprise dont cette marque reprend la dénomination, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi principal : Rejette le pourvoi incident ; Casse et annule, mais seulement en ce qu'il prononce la déchéance des droits de la société Goyard St-Honoré sur la marque n° 1 633 326, à compter du 28 décembre 1996, pour les savons ; parfumerie, huiles essentielles, cosmétiques, lotions pour les cheveux ; dentifrices : métaux précieux et leurs alliages : papier et articles en papier, carton,articles de bureau ; cuir et imitations du cuir ; malles et valises ; parapluies, parasols et cannes ; sellerie ; tissus ; couvertures de lit et de table ;vêtements, chaussures, chapellerie ; colliers pour animaux, en ce qu'il prononce la déchéance des droits de la société Goyard St-Honoré sur la marque n° 3 365 528, à compter du 18 novembre 2010, pour les sacs de plage, cartables, étuis pour clés (maroquinerie), parapluies, parasols, cannes, papier ; carton ; produits de l'imprimerie, à savoir livres, imprimés, journaux, périodiques, magazines, affiches, photographies ; instruments à écrire, savons de toilette ; parfums ; huiles essentielles à usage personnel ; cosmétiques, métaux précieux et leurs alliages, chaînes de montres, écrins en métaux précieux, coffrets à bijoux en métaux précieux ; joaillerie, bijouterie, pierres précieuses ; horlogerie et instruments chronométriques ; montres, bracelets de montres, montres-bracelets ; vêtements (habillement) pour femmes, hommes et enfants à savoir chemises, fourrures, foulards, gants, cravates, ceintures (habillement), chaussettes, sous-vêtements ; chaussures (à l'exception des chaussures orthopédiques), chaussons ; tissus à usage textile et produits textiles à savoir linge de bain (à l'exception de l'habillement), linge de maison, linge de lit, linge de table (en matières textiles), en ce qu'il prononce la déchéance des droits de la société Goyard St-Honoré sur la marque n° 004 748 729 à compter du 11 juin 2014, pour les sacs de plage, cartables, étuis pour clés (maroquinerie), parapluies, parasols, cannes, savons de toilette ; parfums ; huiles essentielles à usage personnel ; cosmétiques, en ce qu'il rejette les demandes de la société Goyard St-Honoré tendant à l'annulation des marques de la société Fauré Le Page Paris, pour déceptivité, et en ce qu'il rejette les demandes de la société Goyard St-Honoré, en tant que fondées sur la concurrence déloyale, et en ce qu'il statue sur les dépens et fait application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 4 octobre 2016, entre les parties, par la Cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Paris, autrement composée.