CA Douai, 2e ch. sect. 2, 5 juillet 2018, n° 15-03397
DOUAI
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Genfit (SA), Finorpa SCR (Sasu), CIC Investissement Nord (Sté) ; CM-CIC Investissement (SAS) (ès qual.), CM-CIC Capital Privé (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Dallery
Conseillers :
Mmes Cordier, Roques
La société Genfit est une société biopharmaceutique créée en 1999, par M. M. et M. F., cotée en bourse depuis 2006, dont la vocation est de découvrir et/ou de développer, très majoritairement en " propre " et, historiquement en collaboration avec des partenaires de l'industrie pharmaceutique, des solutions thérapeutiques (candidats médicaments) et diagnostiques (candidats-biomarqueurs) innovantes dans le domaine des maladies métaboliques, inflammatoires, auto-immunes ou fibrotiques affectant notamment le foie et plus largement la sphère gastroentérologique.
A été développée une molécule GFT 505, objet de nombreux brevets ou demandes de brevets, pour le traitement des maladies d'origine métabolique et en particulier la prise en charge du patient prédiabétique et diabétique.
Le capital de la société Genfit est détenu, outre par des actionnaires au porteur, d'actionnaires inscrits au nominatif, dont, à l'époque des faits, la société Biotech avenir, holding crée par les fondateurs de Genfit, des institutions de recherches (université Lille II, Institut Pasteur de Lille), des laboratoires pharmaceutiques (les sociétés Merck santé, Sanofi Aventis R&D), des fonds de capital d'investissement parmi lesquels figurent les actionnaires.
Les actionnaires de Genfit sont la société Finorpa, spécialisée dans l'accompagnement des entreprises de la région Nord Pas de calais, la société CIC-IN, filiale de la société CM-CIC Capital finance, société Mère de la société CM-CIC, la société CM-CIC, société de gestion agréée par l'autorité de Marché financier, agissant pour le compte de plusieurs fonds d'investissement de proximité et de fonds communs de placement dans l'innovation.
Finorpa et CIC - IN sont membres du conseil de Surveillance, pour la première sur la période de 1999 à 2014, pour la seconde de 2009 à 2015.
La société Biotech Avenir détient 31 % du capital de Genfit, M M. disposant de 17 % des parts de Biotech et assurant la présidence du comité de direction depuis 2001, outre ses fonctions de président du directoire de Genfit, Mme F. détenant 20 % des parts de Biotech, M. F. étant quant à lui membre du comité de direction et président du conseil de surveillance de Genfit jusqu'en avril 2008.
En mars 2008 M. F., alors président du conseil de surveillance, a porté à la connaissance de ce conseil un certain nombre de décisions du directoire, un comité d'arbitrage créé pour l'occasion concluant le 5 avril 2008 à l'absence d'éléments pertinents susceptibles de remettre en cause la gestion de la société par le Directoire.
M. F. a quitté ses fonctions de président du conseil de surveillance et diverses instances judiciaires ont été diligentées, dont des plaintes contre X, des procédures aboutissant aux reports des assemblées, aux re convocations des associés, à la communication de communiqués de presse.
Des articles de journaux ont relayé, tant les plaintes que les difficultés de fonctionnement de la société, ou des éléments relatifs à la molécule GFT 505.
Estimant avoir subi un préjudice, les principaux actionnaires ont saisi la juridiction commerciale en réparation de l'atteinte à leur image et réputation ainsi qu'en réparation des préjudices moraux et matériels allégués par assignation du 26 février 2009, la société Genfit intervenant volontairement à l'instance le 14 janvier 2010.
Par jugement contradictoire en premier ressort en date du 23 avril 2015, le Tribunal de commerce de Lille Métropole :
- a dit les demandes des fonds et de Genfit à l'encontre de Mme Jamila F. recevables,
- s'est déclaré compétent rationae matériae et rationae loci,
- a débouté les époux F. de leur demande de sursis à statuer,
- a dit que les Fonds ont intérêt à agir,
- a dit les demandes de Genfit recevables,
- a dit l'intervention volontaire de Genfit recevable,
- a débouté les sociétés Finorpa, CM-CIC Capital privé, CIC Investissement Nord et Genfit de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
- a condamné solidairement les sociétés Finorpa, CM-CIC Capital privé, CIC Investissement Nord et Genfit à payer aux époux F. la somme de 30 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
- a condamné solidairement les sociétés Finorpa, CM-CIC Capital privé, CIC Investissement Nord et Genfit aux entiers frais et dépens.
Par déclaration en date du 4 juin 2015, les sociétés Finorpa, CM-CIC Capital privé, CIC Investissement Nord et Genfit ont interjeté appel total de la décision.
MOYENS ET PRETENTIONS
Par conclusions signifiées par voie électronique en date du 17 octobre 2017, Finorpa, CM-CIC Capital privé, CIC Investissement Nord et Genfit demandent à la cour, au visa des dispositions des articles 7, 16 et 32-1 du Code de procédure civile, des articles 1382 et suivants du Code civil, dans sa version antérieure à l'Ordonnance 2016-131 du 10 février 2016, des articles L. 225-92 et R. 225-50 du Code de commerce, de :
- déclarer les sociétés Genfit, Finorpa, CM-CIC Capital Prive et CM-CIC Investissement recevables et bien fondées en leur appel ;
- y faisant droit,
- à titre principal,
- constater que le jugement rendu le 23 avril 2015 par le Tribunal de Commerce de Lille est fondé sur des éléments de fait résultant d'investigations personnelles du juge, non soumis au débat contradictoire des parties ;
- dire et juger, en conséquence, que le jugement rendu le 23 avril 2015 par le Tribunal de Commerce de Lille est frappé de nullité pour violation des principes directeurs du procès.
- à titre subsidiaire,
- sur l'appel incident,
- dire et juger que les sociétés Genfit, Finorpa, CM-CIC Capital Privé et CM-CIC Investissement ont valablement signifié à Mme F. l'assignation à comparaître en date du 26 février 2009, dans les formes et conditions requises par la Convention d'aide mutuelle judiciaire, d'exéquatur des jugements et d'extradition entre la France et le Maroc ;
- se déclarer compétent pour statuer sur les demandes concernant Mme F. ;
- dire et juger que les sociétés Genfit, Finorpa, CM-CIC Capital Privé et CM-CIC Investissement poursuivant la réparation d'un préjudice propre, distinct de celui de la société Genfit, ont intérêt et qualité à agir à l'encontre de M. et de Mme F. ;
- dire et juger que (i) la société Genfit a qualité et intérêt à agir à l'encontre de M.et de Mme F., que (ii) ses demandes ont un lien suffisant avec celles formées par les sociétés Finorpa, CM- CIC Capital Privé et CIC Investissement Nord et que (iii) elle dispose d'un intérêt né et actuel ;
- dire et juger la société Genfit recevable en son intervention volontaire à titre principal ;
- dire et juger qu'il n'y a pas identité de cause et d'objet entre les demandes formées aux termes de la présente instance et celles ayant donné lieu aux décisions rendues par le Président du Tribunal de commerce de Lille et la Cour d'appel de Douai, statuant en référé ;
- rejeter la fin de non-recevoir élevée par et Mme F. ;
- débouter, en conséquence, M.et Mme F. de leur appel incident ;
- Sur le fond
- infirmer le Jugement rendu par le Tribunal de Commerce de Lille en ce qu'il a :
- (I) débouté les sociétés Finorpa, CM-CIC Capital Privé, CM-CIC Investissement Nord et Genfit, de l'ensemble de leurs demandes ;
- (II) condamné solidairement les mêmes à payer à M. et Mme F. la somme de 30 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; et
- (III) condamné solidairement les mêmes aux entiers frais et dépens de première instance.
- en ce qui concerne les demandes des sociétés Finorpa, CM-CIC Capital Privé et CM-CIC Investissement Nord,
- que M.et Mme F. ont commis une faute de nature délictuelle en diffusant des informations graves et mensongères sur l'appréciation, par les actionnaires de la société Genfit, de la gestion de ladite société ;
- dire et juger que les sociétés Finorpa, CM-CIC Capital Privé et CM-CIC Investissement Nord ont subi un préjudice d'image et de réputation du fait desdites allégations graves diffusées par M.et Mme F. ;
- condamner, en conséquence, M et Mme F. au paiement de dommages et intérêts d'un montant de 250 000 euros respectivement à chacune des sociétés Finorpa, CM-CIC Capital Privé, CM-CIC Investissement en réparation de leur préjudice d'image et de réputation ;
- dire et juger que du fait des agissements de M.et de Mme F., les sociétés Finorpa, CM-CIC Capital Privé, CM-CIC Investissement ont subi une perte de chance d'effectuer des arbitrages éclairés ;
- condamner solidairement, en conséquence, M. et Mme F. au paiement de dommages et intérêts d'un montant de 750 000 euros respectivement à chacune des sociétés Finorpa, CM-CIC Capital Privé, CM-CIC Investissement en réparation de la perte de chance qu'elles ont subie ;
- dire et juger que M. F. a commis des fautes vis-à-vis des sociétés Finorpa et CM-CIC Investissement, en leur qualité de membres du Conseil de Surveillance de la société Genfit, en diffusant des informations et des documents internes, confidentiels, obtenus en sa qualité de membre et de président du Conseil de Surveillance de la société Genfit, en refusant de signer le procès-verbal de la réunion dudit Conseil de Surveillance prenant acte de sa démission et en diffusant des informations graves et mensongères sur le fonctionnement de ce même organe ;
- dire et juger que les sociétés Finorpa et CM-CIC Investissement ont subi un préjudice d'image et de réputation du fait des violations et fautes commises par M. F. en sa qualité de membre et de Président du Conseil de Surveillance de la société Genfit ;
- condamner, en conséquence, M. F. au paiement de dommages et intérêts d'un montant de 250 000 euros respectivement à chacune des sociétés Finorpa et CM-CIC Investissement en réparation de leur préjudice d'image et de réputation ;
- en ce qui concerne les demandes de la société Genfit
- sur le dénigrement du GFT 505
- dire et juger que M. Et Mme F. ont usé de procédés déloyaux dans le cadre de l'élaboration et de la diffusion du " communiqué de presse du 9 décembre 2009 " et de l'email du 14 décembre 2009 ;
- dire et juger que le " communiqué de presse " du 9 décembre 2009 et l'email du 14 décembre 2009 constituent des actes de dénigrement, engageant la responsabilité de M. Et Mme F. ;
- dire et juger que la société Genfit a subi un préjudice d'image du fait du dénigrement opéré par M. Et Mme F. ;
- condamner solidairement, en conséquence, M. et Mme F. à payer à la société Genfit la somme de 1 000 000 euros à titre de dommages et intérêts au titre d'atteinte à son image ;
- sur l'abus du droit d'ester en justice
- dire et juger que M. et Mme F. ont abusé de leur droit à ester en justice ;
- dire et juger que la société Genfit a subi, du fait de la faute ainsi réalisée par M. Et Mme F. un préjudice matériel correspondant au solde des honoraires des conseils et autres prestataires extérieurs demeurant à la charge de la société Genfit après déduction des indemnités qui lui ont été judiciairement allouées ;
- condamner solidairement, en conséquence, M.et Mme F. à payer à la société Genfit la somme de 591 416,45 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice matériel ;
- condamner solidairement, en conséquence, M.et Mme F. à payer à la société Genfit la somme de 1 000 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral ;
- en tout état de cause,
- débouter M. et Mme F. de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions ;
- condamner solidairement M. Et Mme F. à payer respectivement aux sociétés Finorpa, CM-CIC Capital Privé, CM-CIC Investissement et à la société Genfit la somme de 10 000 euros chacune au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de la présente instance ;
- condamner solidairement M. Et Mme F. au paiement d'une amende civile de 3 000 euros au titre de l'article 32-1 du Code de procédure civile ;
Elles sollicitent :
- l'annulation du jugement, rendu à la lumière d'éléments postérieurs et étrangers aux débats tenus en février 2015 (articles de presse du 23 au 27 mars 2015,
(cotation boursière de mars et avril 2015),
- la recevabilité des demandes à l'encontre de Mme F., estimant que l'ensemble des conditions de l'article 688 du Code de procédure civile sont réunies et les dispositions de la convention d'entraide mutuelle avec le Maroc respectées,
- la confirmation du jugement qui a déclaré recevable l'intervention volontaire de Genfit, les actionnaires et la société Genfit ayant développé chacun une argumentation relative à un préjudice distinct, issu des mêmes faits, disposant d'un lien suffisant,
- la recevabilité de l'action des actionnaires, disposant d'un intérêt et de la qualité à agir, aux motifs qu'ils sollicitent la réparation de leur préjudice propre indépendant de celui de la société,
- le rejet de l'irrecevabilité sollicitée sur le fondement de l'autorité de la chose jugée, ce principe ne pouvant s'appliquer, l'ordonnance de référé n'ayant pas au principal l'autorité de la chose jugée (art 488CPC), aucune identité de cause et d'objet n'étant en outres réunies.
S'agissant de la responsabilité des époux F. à l'égard des actionnaires, elles font valoir que :
- la faute des époux F. à leur égard est caractérisée et est de deux natures :
- la diffusion d'informations graves et mensongères relatives à la gestion de la Société et le discrédit ainsi porté sur le parfait exercice, par les membres du Conseil de Surveillance, de leurs prérogatives à ce titre,
- la diffusion d'informations graves et mensongères laissant entendre que les actionnaires aient pu faire une mauvaise appréciation de la gestion de la Société,
' plus spécifiquement, s'agissant de la faute de M. F. en sa qualité de membre du conseil de surveillance vis à vis de Finorpa et de CIC IN, la faute est constituée :
- en raison de la violation des dispositions de l'article L. 225-92 du Code de commerce, par la diffusion d'informations et de documents internes et confidentiels obtenus en cette qualité,
- en raison de son refus de signer le procès-verbal de la réunion du conseil de surveillance prenant acte de sa démission en violation avec la loi et le règlement intérieur de Genfit,
- en raison du discrédit jeté sur le fonctionnement du conseil de surveillance, en le qualifiant de " chambre d'enregistrement ",
- ces fautes ont engendré pour Finorpa et CM-CIC, en leur qualité de Membres du conseil de surveillance un surcroît d'activité en ce domaine et ont porté atteinte grave à la réputation des membres du conseil de surveillance,
' concernant les autres actionnaires, si les époux F. en leur qualité d'actionnaire pouvaient émettre des critiques, cette liberté trouvait une limite dans l'usage abusif qui peut en être fait,
- le préjudice subi est un préjudice d'image et de réputation du fait des allégations diffusées,
-les actionnaires peuvent obtenir réparation du préjudice personnel subi du fait de la diffusion d'informations trompeuses, correspondant à la perte de chance d'effectuer des arbitrages éclairés et de mieux investir leur argent, voire de pouvoir avoir un emploi dynamique de ces titres,
- le préjudice de la société CM-CIC est plus prégnant, puisqu'elle devait clôturer plusieurs de ses positions dans Genfit au moment le moins favorable de l'histoire de la société, M. F., en tant qu'ancien président du conseil de surveillance, ne pouvant ignorer ses contraintes inhérentes à ce type d'investisseur ; elle n'a depuis la liquidation de ses fonds, plus investi dans Genfit,
- les fluctuations postérieures du cours des actions de la société ne peuvent pas affecter la perte de chance subie par les actionnaires sur la période 2008-2011, le manque à gagner, né de cette paralysie de gestion, n'ayant pas depuis lors été réparé et demeurant à ce titre actuel.
S'agissant de la responsabilité des époux F. vis à vis de la société Genfit, les fautes consistent :
* dans le dénigrement déloyal du candidat Médicament GFT 505, aux motifs que :
- un communiqué occulte, diffusé par la société Teletch international, mandatée par la société Terra Firma elle-même ayant reçue mandat de M. F., critiquait le choix du médicament candidat par des résultats issus d'une consultation informatique de scientifiques ayant répondu à un QCM fermé, sans communication d'étude clinique,
- les deux communications litigieuses émanent bien des époux F. et le fait que le communiqué ait été avalisé par des scientifiques ne peut infléchir le caractère dénigrant du communiqué,
- en remettant en cause la qualité des informations fournies par Genfit sur le résultat d'une étude clinique il a été porté atteinte à la totalité de la politique de communication de la société, ce qui a eu des effets dévastateurs sur la valorisation et l'attractivité de nouveau investisseurs,
S'agissant de la responsabilité pour abus de droit d'ester en justice, elles précisent que :
- les 25 instances diligentées, outre les plaintes pénales démontrent la poursuite d'une vindicte personnelle étrangère à l'intérêt social, les attaques visant soit la société directement, soit son principal actionnaire Biotech et trouvant sa cause dans l'opposition des époux à M. M.,
- aucune des différentes actions n'est directement relative à la gestion de la société,
- le préjudice matériel subi est établi, au regard des coûts et ressources internes et financières qui ont dû être consacré à assurer la défense dans le cadre des différentes procédures,
- un préjudice d'image est aussi à déplorer, les 25 procédures ayant été autant d'occasion pour communiquer sur la situation et le conflit, préjudiciant à l'image de la société.
Par conclusions signifiées par voie électronique en date du 23 novembre 2016, M. et Mme F. demandent à la cour de :
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a considéré que le Tribunal pouvait statuer au fond à l'égard de Mme F. et en ce qu'il a déclaré les sociétés Genfit, Finorpa SCR, CM-CIC Investissement SCR et CM-CIC Capital Privé recevables en leurs demandes ;
- statuant à nouveau,
- déclarer les sociétés Genfit, Finorpa SCR, CM-CIC Investissement et CM-CIC Capital Privé irrecevables en toutes leurs demandes.
- subsidiairement,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté les sociétés Genfit, Finorpa SCR, CM-CIC Investissement et CM-CIC Capital Privé de toutes leurs demandes, fins et conclusions.
- débouter les sociétés Genfit, Finorpa SCR, CM-CIC Investissement et CM-CIC Capital Privé de toutes leurs demandes, fins et conclusions.
- condamner les sociétés Genfit, Finorpa SCR, CM-CIC Investissement SCR, CM-CIC Capital Privé à payer chacune à M. F. la somme de 50 000 euros au titre de l'article 700 du CPC, outre les entiers dépens qui seront recouvrés par Me L., conformément à l'article 699 du CPC.
Les époux F. reviennent :
- sur le rôle de M. M., Mme S., la situation des sociétés Biotech et Naturalph en liquidation judiciaire depuis le 22 février 2016,
- sur les causes de la dissension entre M. M. et Mme S., et la majorité des actionnaires de Biotech Avenir,
- sur l'existence d'un comité d'arbitrage, mais également d'un comité d'audit et les conditions dans lesquelles les missions de ces deux comités ont pu être exécutées
- sur les différentes procédures relatives à la vie des deux sociétés et les moyens utilisés par M. M. et Mme S. pour se maintenir à la tête des sociétés,
- sur la situation préoccupante de la société Genfit, à raison du non-renouvellement des contrats conclus avec les laboratoires, qui assuraient l'essentiel des ressources de la société, de son résultat net négatif de 17 135 000 euros, de l'absence de partenariat pour assurer la pérennité de Genfit.
Les époux contestent que les communications sur le GFT 505 s'inscrivent dans le cadre des obligations classiques de communication aux marchés incombant à Genfit mais sont des communications volontaires mais également tronquées et trompeuses.
Ils soulignent que :
- la critique des résultats communiqués par Genfit n'est pas une communication qui met en cause Genfit ou son président mais une communication à caractère purement scientifique
-le communiqué émane d'experts scientifiques, consultés par le biais d'un questionnaire,
- pour éluder le débat scientifique, Genfit a tenté de réduire le débat à un problème de personne.
Les époux F. soutiennent l'irrecevabilité des demandes contre Mme F., aux motifs qu'il n'est pas possible de rendre la procédure contradictoire à l'égard de cette dernière, alors même que les formalités pour l'assigner régulièrement n'ont pas été complètement remplies.
Ils s'opposent à la demande de nullité du jugement aux motifs que le rejet des demandes n'est pas fondé sur les prétendus " faits " provenant des investigations personnelles du juge.
Ils estiment les demandes des Fonds irrecevables, puisque :
- l'ensemble des demandes concerne lors de l'introduction de la demande des griefs de la société et non des actionnaires, lesquels n'agissaient pas dans le cadre de l'action ut singuli :
- la faute d'ailleurs vise M. F. en sa qualité de membre du conseil de directoire, lequel est organe social, fonctionnant de surcroît de manière collégiale, seule la société, agissant par le biais de ses organes pouvant agir en justice pour sanctionner le prétendu non-respect par l'un de ses membres d'une obligation légale ou contractuelle,
- aucune pièce ne vient démontrer le préjudice personnel des trois sociétés actionnaires,
- l'intérêt à agir n'est pas légitime, les griefs des fonds étant antérieurs au mois de juillet mais l'action n'ayant été engagée qu'à la fin du mois de février 2009, seulement pour faire pression sur les époux et éviter la divulgation d'éléments,
- les fonds n'ont pas qualité à agir.
Quant à l'action de Genfit, ils soutiennent qu'elle est irrecevable :
- à raison de l'irrecevabilité de la demande principale, seule l'intervention à titre accessoire étant recevable et les demandes saisissant la cour concernant seulement Genfit,
- à raison de l'absence de préjudice né, lequel n'est aucunement justifié par des pièces probantes,
- dans sa demande pour abus d'ester en justice, la société Genfit ne pouvant l'invoquer au nom de la société Biotech Avenir et la demande se heurtant à l'autorité de la chose jugée, puisque dans toutes les procédures l'abus d'ester en justice n'a pas été reconnu.
Subsidiairement, les époux concluent que les fonds et la société Genfit ne justifient pas de l'existence de fautes, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre la faute et le préjudice, estimant que :
- ils ont le droit de contester la gestion de Genfit par le directoire, ainsi que les conclusions erronées du comité d'arbitrage,
- ils disposent du droit de contester le contenu du procès-verbal concernant la mise en disponibilité de M. F.,
- M. F. n'a exercé aucune pression sur les salariés de Genfit,
- il n'est pas justifié que M. F. aurait discrédité Genfit via les médias locaux,
- l'analyse de la cour d'appel dans son arrêt du 27 janvier 2011 relatif aux communiqués publiés demeure pertinente, étant précisé qu'il n'est pas rapporté la preuve que M. F. était l'instigateur du communiqué, de la mauvaise foi ou de l'intérêt de M. F. dans le produit générique cité, de l'intention de nuire de M. F.,
- ces communiqués émanent de scientifiques, et sont la manifestation de la liberté d'expression et du droit à la critique,
- la société Genfit n'a ni assigné aucun autre participant, ni publié un communiqué pour dénoncer l'utilisation d'une méthodologie invalide.
Ils ajoutent que la preuve de l'existence du préjudice ni la justification du quantum des sommes réclamées ne sont apportées.
MOTIVATION
- sur la demande d'annulation du jugement
Aux termes des dispositions de l'article 542 du Code de procédure civile, l'appel tend à faire réformer ou annuler par la cour d'appel un jugement rendu par une juridiction du premier degré.
L'article 7 du Code de procédure civile dispose que le juge ne peut fonder sa décision sur des faits qui ne sont pas dans les débats. Parmi les éléments du débat, le juge peut prendre en considération même les faits que les parties n'auraient pas spécialement invoqués au soutien de leurs prétentions.
Conformément aux dispositions de l'article 16 du Code de procédure civile, le juge doit en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement. Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations.
Il résulte de ces deux derniers textes que le juge ne peut fonder sa décision sur le résultat d'investigations personnelles ou de connaissances personnelles acquises hors des débats judiciaires.
Les mentions du jugement ainsi que les pièces de procédure issues du dossier de première instance établissent que l'affaire a été mise en délibéré au 23 avril 2015, les débats ayant été clos à la date de plaidoirie le 12 février 2015, sous la seule réserve d'une note en délibéré autorisée sur trois pièces (n° 126, 127 et 128) avec pour date limite de communication au tribunal le 26 février 2015 pour les époux F. et le 12 mars 2015 pour les observations des demanderesses.
Or, il ressort des motifs adoptés par les premiers juges que ces derniers se réfèrent à deux reprises à des éléments de faits qui sont postérieurs à la clôture des débats et n'étaient nullement évoqués par les parties, s'agissant d'articles de presse ou de cours de bourse de mars et avril 2015.
Ils ne peuvent être tirés des dossiers, lesquels ayant été figés à la date des plaidoiries et de clôture des débats, ne pouvaient les contenir.
Ces éléments ne sont pas plus issus des notes en délibéré autorisées par le tribunal ou du courrier non autorisé adressé spontanément le 17 avril par les demanderesses, auquel les époux F. ont répliqué le 20 avril 2015 en soulignant son caractère irrégulier.
Ainsi, il s'agit aucunement de faits expressément invoqués par les parties, ou de faits adventices ou tirés du dossier mais d'éléments recueillis, hors débat, à l'initiative même du juge et non soumis à la contradiction entre les parties, en dehors du cadre procédural strict réglementant les vérifications personnelles du juge (articles 179 à 183 du Code de procédure civile).
L'argumentation des époux F., selon laquelle " l'article 7 alinéa 1 concerne seulement l'hypothèse dans laquelle la décision est directement motivée par un fait non soumis au débat contradictoire, la solution qu'il a donnée découlant directement de ce fait ", ne saurait être accueillie s'agissant d'une condition supplémentaire qui n'est nullement imposée par le texte précité, alors même que, par ces investigations, se trouvent heurtés les principes fondamentaux du procès civil fondés sur le principe dispositif et la contradiction.
Au surplus, il n'apparaît nullement que ce motif ne soit pas décisoire.
Il ne peut donc qu'être fait droit à la demande d'annulation du jugement déféré.
En vertu des dispositions de l'article 562 du Code de procédure civile, l'appel ne défère à la cour que la connaissance des chefs du jugement qu'il critique expressément ou implicitement de ceux qui en dépendent. La dévolution s'opère pour le tout lorsque l'appel n'est pas limité à certains chefs, lorsqu'il tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.
Les dispositions de l'article 954 du Code de procédure civile, dans sa rédaction applicable au litige, rappelle que les conclusions d'appel doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ses prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées... les prétentions sont récapitulées sous forme de dispositif. La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif.
Or, les époux F. se contentent de solliciter l'infirmation du " jugement entrepris en ce qu'il a considéré que le tribunal pouvait statuer au fond à l'égard de Mme Jamila F. " sans saisir la cour aux termes du dispositif de leurs écritures d'une demande de nullité de l'assignation de Mme F. et d'une nullité subséquente du jugement.
Le jugement de première instance étant annulé et en l'absence de demande de nullité expresse reprise aux dispositifs des conclusions, la cour n'est donc pas saisie des développements consacrés par les parties sur ces points et auxquels il n'y a donc pas lieu de répondre.
Et puisque seule la nullité du jugement à raison de la nullité de l'acte introductif d'instance prive l'appel de son effet dévolutif, la nullité de la décision de première instance étant en l'espèce prononcée pour autre cause, l'effet dévolutif s'opère pour le tout et la présente cour est saisie de l'entier litige.
Les demandes formées par les appelantes, contre Mme F., intervenue aux côtés de son époux dans le cadre de la procédure d'appel et régulièrement représentée par son conseil, sont recevables, sans que puisse être opposé un quelconque caractère nouveau, pour avoir été soumises à la juridiction de première instance.
- Sur les fins de non-recevoir soulevées par les époux F.
En vertu des dispositions de l'article 122 du Code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut du droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.
Les fins de non-recevoir doivent être relevées d'office lorsqu'elles ont un caractère d'ordre public. La liste donnée par le Code n'est pas limitative.
1) sur la fin de non-recevoir tiré du défaut d'intérêt à agir et du défaut de qualité de la SAS Finorpa, de la CM-CIC Capital privé et de la SAS CIC Investissement Nord
Aux termes des dispositions de l'article 31 du Code de procédure civile, l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention ou pour défendre un intérêt déterminé.
L'article 32 ajoute qu'est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d'agir.
L'intérêt au succès ou au rejet d'une prétention s'apprécie au jour de l'introduction de la demande en justice, l'intérêt à agir devant être légitime, né et actuel, et avoir un caractère personnel et direct.
Il s'en déduit que l'intérêt à agir n'est pas subordonné à la démonstration préalable du bien-fondé de l'action et que l'existence du préjudice invoqué par le demandeur dans le cadre d'une action en responsabilité n'est pas une condition de recevabilité de son action mais du succès de celle-ci.
Les époux F. sollicitent l'irrecevabilité des demandes de la SAS Finorpa, la CM-CIC Capital privé et la SAS CIC Investissement Nord estimant que :
- les griefs développés concernent uniquement la société Genfit et les actionnaires ne peuvent agir au nom de la société sauf dans le cadre de l'action ut singuli,
- le conseil de surveillance est un organe social et seule la société peut agir en justice pour faire sanctionner une faute d'un de ses membres.
- la preuve d'un préjudice personnel direct et actuel des fonds n'est pas démontrée.
En premier lieu, il ne peut qu'être constaté qu'à aucun moment, les actionnaires n'indiquent agir dans le cadre de l'action ut singuli au profit de la société du fait d'un agissement d'un membre du conseil de surveillance, action qui, contrairement à celles prévues à l'encontre des administrateurs ou du directeur général par l'article L. 225-252 du Code de commerce, ou à l'encontre des membres du directoire par renvoi de l'article L. 225-256 du même Code, n'existe pas, aucun renvoi n'étant effectué aux articles précités par l'article L. 225-257 alinéa 2 du Code de commerce.
Toutefois, les actionnaires d'une société disposent d'un droit d'agir, pour autant qu'ils exercent une action individuelle en réparation d'un préjudice propre, indépendant de celui subi par la société, et ce même contre un membre du conseil de surveillance, organe collectif.
En effet, les termes de l'article L. 225-257 du Code de commerce prévoyant que " les membres du conseil de surveillance sont responsables des fautes personnelles commises dans l'exécution de leur mandat. Ils n'encourent aucune responsabilité, en raison des actes de la gestion et de leur résultat. Ils peuvent être déclarés civilement responsables des délits commis par les membres du directoire ", sont généraux.
Ainsi, l'action en responsabilité intentée en vertu de ces dispositions ou des dispositions du droit commun appartient à la personne qui se dit lésée.
Et au vu de la généralité, il peut s'agir tant d'un actionnaire que d'un membre du conseil de surveillance, sous réserve dans les deux cas d'évoquer un préjudice personnel.
Or, force est de constater qu'aux termes de leurs écritures, de première instance comme d'appel, les sociétés précitées allèguent, certes du fait des agissements de M. F. en lien avec le fonctionnement et la direction de la société Genfit, un préjudice personnel et distinct de celui de la société Genfit et en demandent réparation.
Ainsi, les actionnaires précités invoquent un préjudice constitué par une atteinte à leur réputation et leur image, à raison du discrédit jeté par les époux F. sur les diligences réalisées par leur soin dans le cadre du conseil de surveillance et le comité d'arbitrage.
Est également allégué un préjudice né d'une perte de rémunération, compte tenu de la gestion statique et de la privation d'arbitrage sur d'autres actifs dans le cadre de la gestion de portefeuille que leur a imposé le comportement fautif de M. F..
Il s'agit bien de l'allégation de préjudices personnels à chaque actionnaire susceptible d'être distincts de celui de la société Genfit, rendant le moyen opposé par les époux F. inopérant.
Les époux F. ne peuvent pas plus leur opposer l'absence de preuve de la réalité de ce préjudice comme fin de non-recevoir, alors qu'il s'agit d'une condition de succès de l'action et non de recevabilité de l'action en responsabilité.
La fin de non-recevoir tirée du défaut de la qualité à agir et du défaut d'intérêt à agir opposée à l'action de la SA Finorpa, la CM-CIC capital privé et la CIC Investissement ne peut qu'être rejetée.
2) sur l'irrecevabilité de l'intervention à titre principal de la société Genfit
En vertu des dispositions de l'article 329 du Code de procédure civile, l'intervention est principale lorsqu'elle élève une prétention au profit de celui qui la forme. Elle n'est recevable que si son auteur a le droit d'agir relativement à cette prétention.
L'intervention étant une demande en justice, elle est soumise aux conditions de recevabilité de droit commun requises à ce titre et n'est recevable que si elle se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant.
L'intervention principale est exclue dans une instance mettant en œuvre une action strictement personnelle au demandeur d'origine, seule une intervention accessoire étant alors envisageable.
Dans la mesure où l'intervenant principal exerce un droit qui lui est propre, sa demande est autonome et doit survivre à la disparition de la demande initiale.
Aucune irrecevabilité de l'action principale n'ayant prospéré, l'objection élevée par les époux F. selon laquelle l'irrecevabilité de la demande principale a pour conséquence l'irrecevabilité de l'intervention à titre principal de Genfit est sans objet et heurte le principe ci-dessus rappelé.
Contrairement à ce qu'allèguent les époux F., l'action des actionnaires ne ressort pas de la catégorie des actions strictement personnelles, ces dernières ayant trait par exemple à des actions liées à l'état civil ou l'état des personnes, et n'interdit donc pas de facto une intervention volontaire à titre principal.
Les époux F. reconnaissent d'ailleurs que la société Genfit évoque un droit qui lui est propre et distinct des demandes formées par les actionnaires, critiquant le fait uniquement que ses demandes n'aient pas été formées en premier lieu par voie d'assignation par la société, sans se greffer sur l'action des actionnaires, ce qui est pourtant le propre d'une intervention volontaire à titre principal.
Il n'est critiqué par les époux F. ni la capacité, ni la qualité à agir de la société Genfit dans ce cadre.
De même n'est pas discuté le lien unissant cette demande à la demande principale, étant observé que ce sont les implications d'un même comportement et leurs conséquences, qui sont critiquées par les différentes parties appelantes dans le cadre de leur demande en réparation de leur préjudice personnel.
S'agissant de l'intérêt à agir de la société Genfit, les époux F. critiquent l'existence d'un préjudice né et actuel, essentiellement en opposant l'absence de preuve de la réalité du préjudice invoqué et l'absence de lien entre ce préjudice et les fautes reprochées.
Toutefois, il ressort de leurs propres énonciations que la société Genfit allègue bien un préjudice, qui lui est personnel, en lien avec des interventions et de coûts supplémentaires qu'elle impute aux comportements de M. F., la critique de l'existence et de la réalité de ce préjudice étant une condition de succès de l'action et non de recevabilité de l'action en responsabilité.
En conséquence, l'irrecevabilité opposée par les époux F. à l'intervention volontaire à titre principal de la société Genfit ne peut qu'être écartée de ce chef.
3) sur l'irrecevabilité de la demande de Genfit au titre du prétendu abus d'ester en justice
En vertu des dispositions des articles 6 et 9 du Code de procédure civile, à l'appui de leurs prétentions, les parties ont la charge d'alléguer les faits propres à les fonder et il leur incombe de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de ses prétentions.
En l'espèce, les développements ne comportent aucune allégation de frais précis permettant de caractériser un motif déterminé d'irrecevabilité.
Ainsi, ils soulignent le caractère tardif de la demande en première instance, tout en reconnaissant que cette demande a bien été évoquée devant les premiers juges, aucun caractère nouveau de la demande ne pouvant être opposé en cause d'appel.
Le fait que les 25 procédures dont se prévaut l'appelante concernent Biotech est souligné, ainsi que l'absence de qualité de Genfit pour invoquer un abus d'ester en justice au nom de la société Biotech, alors même que le rappel de ces procédures n'est évoqué par la société Genfit que pour contextualiser le comportement vindicatif des époux F..
Enfin, l'autorité de la chose jugée est invoquée, sans qu'il soit possible de déterminer la décision qui serait susceptible d'avoir déjà tranchée cette question, et donc de vérifier si les conditions d'application de l'article 1351 du Code civil sont réunies.
En conséquence, ce moyen ne peut qu'être rejeté faute d'allégation de faits concluants.
- Sur la responsabilité à l'égard des actionnaires
Aux termes des dispositions de l'article 1382 du Code civil, tout fait quelconque de l'homme qui cause un dommage à autrui oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer.
Le préjudice doit être direct, certain et présent. La réparation du préjudice doit être intégrale.
Il appartient dès lors à celui qui s'en prévaut d'apporter la preuve d'un préjudice, d'une faute et d'un lien de causalité.
En vertu des dispositions des articles 6 et 9 du Code de procédure civile, à l'appui de leurs prétentions, les parties ont la charge d'alléguer les faits propres à les fonder et il leur incombe de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de leurs prétentions.
1) sur la responsabilité de M. F., en sa qualité de membre du conseil de surveillance vis à vis des actionnaires, Finorpa et CIC IN
Seule est envisagée la responsabilité de M. F., en sa qualité de membre du conseil de surveillance, dont il a été le président jusqu'en avril 2008, à l'égard des sociétés Finorpa et CIC IN qui sont elles-mêmes membres dudit conseil.
Sont évoquées trois séries de faits qualifiés de fautifs par les actionnaires membres du conseil de surveillance, qui seraient à l'origine d'un préjudice d'image et de réputation, outre un surcroît de travail dont il est demandé réparation à hauteur de 250 000 euros pour chacune des sociétés.
- sur la transmission d'informations confidentielles à l'extérieur du conseil de surveillance
Les actionnaires reprochent à M. F. d'avoir diffusé des informations confidentielles recueillies dans le cadre de ses fonctions de président et de membre de ladite instance, en contrariété avec les dispositions de l'article L. 225-92 du Code de commerce qui impose à tout membre du conseil de surveillance une obligation de discrétion à l'égard de toute information confidentielle examinée par ses soins et la déclinaison de ce principe dans les dispositions statutaires à l'article 24 et les dispositions du règlement intérieur du conseil de surveillance (article12).
Cependant les sociétés Finorpa et CIC IN échouent à démontrer le caractère confidentiel des informations qui auraient été objet de la divulgation ainsi que leur lien avec la société Genfit et eux-mêmes, mais également leur transmission à l'extérieur du conseil.
En effet, la note Francis L. dont la transmission est déplorée, concerne la société Biotech et son directoire, et non la société Genfit et les actionnaires de cette dernière, membre du conseil de surveillance.
Le fait que M. F. ait reconnu avoir transmis la note émise par le cabinet Françis L. au président de la région Nord Pas de Calais lors du conseil de surveillance, sans que les actionnaires détaillent en quoi cette note concernerait la société Genfit même et ses actionnaires, ne saurait constituer une faute à l'égard des actionnaires membres du conseil de surveillance.
Il n'est pas plus prouvé que cette note ait été établie à partir d'éléments recueillis par M. F. dans le cadre de sa participation au conseil de surveillance de la société Genfit.
Enfin, les actionnaires ne sauraient se prévaloir des courriers de M. Gilles de B., président remplaçant M. F. au conseil de surveillance qui ne font qu'affirmer la diffusion à l'extérieur du conseil de surveillance de cette note ou d'informations de manière plus générale, sans l'établir.
Il ne saurait être tiré de la simple reprise de certaines formules dans la presse, émanant d'un mail communiqué par M. F. aux différents actionnaires en vue de l'assemblée générale, que ce dernier serait l'auteur de cette diffusion.
En conséquence, cette faute n'est pas établie.
- sur le refus de signer le procès-verbal
Les actionnaires, membres du conseil de surveillance, ne peuvent à titre de faute reprocher l'absence de signature du procès-verbal de réunion du conseil de surveillance en date du 17 avril 2018, alors même que M. F. a fait part, et ce très rapidement après la réunion, d'une divergence avec le contenu de ce compte-rendu, notamment quant aux raisons et à la portée de sa mise en disponibilité.
Le seul fait qu'un temps, M.F. ait pu sembler se soumettre à la décision en n'utilisant plus le titre de président du conseil de surveillance, ne saurait être invoqué à son encontre, alors qu'il a toujours contesté le déroulement de cette réunion, tenue dans un climat de tension extrême.
Aucun manquement ne saurait lui être imputé de ce chef.
- sur la diffusion d'informations graves et mensongères sur le fonctionnement du conseil de surveillance
Les actionnaires, membres du conseil, reprochent à M. F. dans plusieurs écrits d'avoir " laiss[é] entendre que ses membres ne remplissaient pas leur mission de surveillance ", en qualifiant le conseil de surveillance de " chambre d'enregistrement " et d'avoir " publiquement accusé les membres du conseil de surveillance de Finorpa d'avoir établi un faux procès-verbal de réunion ".
Toutefois, la lecture des courriels adressés aux actionnaires le 20 mai 2018, le 26 mai 2018 ou encore au conseil de surveillance en date du 10 juin 2018, laissent entrevoir des prises de position nettement plus mesurées de M. F..
Tel est le cas par exemple du mail du 19 mai 2018 dans lequel M. F. fait part des questions qu'il a soulevé et regrette de ne pas avoir été aidé dans la réflexion sur Genfit et son avenir, " déplor[ant] le manque de coopération d'un certain nombre d'acteurs de la société. Je ne conçois pas les fonctions de président du conseil de surveillance de Genfit comme celle d'une chambre d'enregistrement mais comme une sentinelle, attentive à la vie de la société, et comme une vigie capable de maintenir ou de changer le cap selon les situations qui se présentent... je n'ai pas eu de réponse satisfaisante... j'estime le niveau d'information des plus sommaires ".
De même, aucune accusation de faux commis notamment par Finorpa dans la rédaction des procès-verbaux n'émane des écrits produits, M. F. se contentant, notamment dans le mail du 9 avril 2008, de solliciter une modification de la rédaction du procès-verbal et dans le mail du 26 mai 2018, de confirmer son refus de signer le procès-verbal à raison de la stipulation fausse de sa mise en disponibilité à sa demande pour motif personnel.
Les propos de M. F., qui ne sont pas outranciers, ne visent pas nommément les actionnaires et ne portent aucun jugement sur la manière même dont ces derniers exercent spécifiquement leur mission de membre du conseil de surveillance.
Ils ne portent pas sur des informations dont il est démontré qu'elles sont sensibles et mensongères sur le fonctionnement du conseil de surveillance, alors même que comme tout membre du conseil de surveillance, il a pour mission essentielle d'exercer le contrôle permanent de la gestion de la société par le directoire avec un pouvoir d'autorisation pour des opérations importantes, et des attributions spécifiques quant à la nomination des membres du directoire, leur rémunération, la désignation du président du directoire, la convocation de l'assemblée générale, outre qu'il lui appartient de dénoncer les délits commis par les membres du directoire.
Il est, de plus, affirmé, mais non démontré que les éléments repris dans les médias, émanent de M. F., alors même que l'article cité par les appelantes ne fait que reprendre les termes du courrier adressé aux actionnaires, lesquels peuvent avoir spontanément remis ledit document, sans une quelconque intervention de M. F..
En conséquence, ce grief ne peut pas plus prospérer.
Aucune faute de M. F. n'étant retenue à l'encontre des sociétés Finorpa SCR et CM-CIC Investissement SCR, sans qu'il y ait lieu de s'interroger sur l'existence d'un préjudice, la demande des actionnaires en leur qualité de membre du conseil de surveillance ne peut qu'être rejetée.
2) sur la responsabilité des époux F. liée à la diffusion d'informations graves et mensongères sur l'appréciation, par les actionnaires, la gestion de la société
Conformément aux articles 6 et 9 du Code de procédure civile, ci-dessus rappelés, il appartient aux actionnaires, appelantes d'alléguer les faits nécessaires au succès de leur prétention et donc d'invoquer, à tout le moins pour que la responsabilité de Mme F. puisse être retenue, des fautes commises par cette dernière.
Or, l'examen des développements consacrés, en page 34 à 36 inclus des conclusions des appelantes, à la prétention susvisée établit que seuls sont mentionnés le nom de M. F. et des faits attribués à ce dernier.
Aucun fait concluant n'étant allégué à l'encontre de Mme F., les actionnaires ne peuvent qu'être déboutés de l'ensemble de leurs demandes à son encontre.
S'agissant de M. F., les actionnaires reprochent un abus dans le droit de communication et de critique, tant dans le contenu de la communication, que par la fréquence et l'absence de précaution dans leur formulation, à l'encontre de la société et des organes de cette dernière, ce qui aurait porté préjudice aux actionnaires, et ce de deux manières.
- s'agissant d'un préjudice d'image et de réputation subi par les actionnaires du fait des allégations graves diffusées sur la gestion de la société.
Pour décrire leur préjudice les actionnaires multiplient les affirmations générales, soulignant que " de façon plus générale, les allégations des époux F. sont de nature à distiller le doute dans l'esprit des investisseurs qui confient leurs fonds aux actionnaires sur les capacités de celles-ci à apprécier la gestion... des sociétés " ou encore " de nature à discréditer les actionnaires vis à vis d'investisseurs potentiels ou actuels sur leur capacité à sélectionner des cibles performantes " sans la moindre démonstration.
Toutefois, il résulte de l'intitulé même du préjudice invoqué que ce dernier, constitué par l'atteinte à la réputation et au crédit des actionnaires, ne trouve sa source que dans l'atteinte même au sérieux de la société Genfit, ce que confirment les reproches faits aux époux F. par les actionnaires de " faire grand bruit de leurs griefs vis à vis du directoire, sans les précautions qui auraient dû présider à une communication soucieuse des intérêts des actionnaires de la société, surtout s'agissant d'une société de biotechnologie, de surcroît côtée en bourse ".
Or, l'atteinte reprochée est une atteinte purement indirecte et le préjudice dont il est demandé l'indemnisation n'est pas un préjudice personnel propre, en tant que personne individuelle distinct de celui éventuel de la société.
D'ailleurs, dans leurs propres écritures, les actionnaires illustrent parfaitement ce fait en soulignant que " du fait des coups de théâtres médiatiques opérés par M. F., Genfit a été davantage citée dans la presse pour l'imbroglio actionnarial et judiciaire dans lequel elle s'est trouvée que pour l'excellence de ses résultats scientifiques et ses perspectives de développement ", avant d'en conclure que le préjudice moral consécutif à la publication même minime de propos attentatoires à la réputation d'une personne morale est indemnisable.
Ainsi, le préjudice de réputation invoqué par les actionnaires s'analyse en l'espèce en un préjudice subi en conséquence de celui prétendument subi par la société elle-même, dont les actionnaires ne peuvent obtenir réparation.
- s'agissant du préjudice matériel subi par les actionnaires du fait des allégations graves diffusées sur la gestion de la société :
Se fondant sur la doctrine qui voit dans la privation d'un emploi dynamique des titres et l'obligation faite aux actionnaires d'avoir une simple propriété statique un préjudice personnel et propre des actionnaires, les sociétés Finorpa SCR, CM-CIC Capital Privé et CM-CIC Investissement SCR demandent réparation de la " perte de chance d'effectuer des arbitrages éclairés et de mieux investir leur argent ".
La cour note que les actionnaires consacrent, pour fonder leur demande de réparation du préjudice matériel, l'essentiel de leurs développements sur le cours de la bourse de la société Genfit et les variations de ce dernier, la comparaison avec l'indice Next Biotech sur la même période démontrant selon eux le lien entre le contentieux avec M. F. et la valeur des titres de la société Genfit.
Cependant, pour demander réparation d'un préjudice consécutif à une faute commise par un organe ou membre social, il appartient aux associés et/ou actionnaires de démontrer un préjudice subi à caractère strictement personnel, né d'une faute qui n'a pas eu d'incidence sur le patrimoine social.
Or, les actionnaires décrivent dans leurs conclusions " le climat d'instabilité créé et alimenté par les époux F. depuis 2008 autour de la société [qui] a eu un impact sur le cours boursier des actionnaires de Genfit'estimant que " ces circonstances ont assurément altéré les prises de décisions des actionnaires quant à l'opportunité d'augmenter, de conserver ou de renoncer à leurs investissements " et demandant réparation ainsi du " manque à gagner, né de cette paralysie, qui n'a pas depuis lors été réparé et demeure à ce titre actuel ".
Ainsi, le préjudice invoqué est celui en qualité d'associé ou d'actionnaire, résultant des suites d'une atteinte portée au patrimoine social, et non celui subi par la personne individuelle dans son patrimoine propre.
Il ne peut donc s'agir que d'un préjudice par ricochet, et dès lors indirect, corollaire de l'éventuel préjudice subi par la société, ce dont ils ne peuvent demander réparation.
En conséquence, et au vu de l'absence de préjudice personnel propre, distinct de celui éventuellement subi par la société, sans qu'il y ait lieu d'examiner la faute invoquée de ce chef, la demande des actionnaires ne peut qu'être rejetée.
- Sur la responsabilité des époux F. à l'égard de la société Genfit
1) à raison du dénigrement
La liberté d'expression est un principe à valeur constitutionnelle en droit français, garanti également par l'article 10 de la convention européenne des droits de l'Homme (CEDH).
La liberté de recevoir et communiquer des informations peut être soumise à des restrictions prévues par la loi et nécessaires dans une société démocratique.
Les abus de la liberté d'expression prévus et réprimés par la loi du 29 juillet 1881 ne peuvent être réparés sur le fondement de l'article 1382 du Code civil.
Hors restriction légalement prévue, la liberté d'expression est un droit dont l'exercice, sauf dénigrement de produits ou services, ne peut être contesté sur le fondement de l'article 1382 du Code civil.
La société Genfit fait état de publications reprenant les deux avis qu'elle attribue à M. F., même si la portée de la publicité offerte aux avis litigieux demeurent, au vu des pièces versées, indéterminée.
Il ne peut qu'être constaté qu'aucun cas d'abus envisagé et expressément réprimé par la loi de la presse n'est en l'espèce en cause, l'article 1382 du Code civil pouvant valablement être invoqué.
En effet, il n'est reproché ni injure, ni diffamation mais un dénigrement du produit phare de la société Genfit, louée par cette dernière dans deux communiqués antérieurs du 23 et 26 novembre 2008.
La société Genfit fonde une part essentielle de sa démonstration sur la notion de dénigrement en matière de concurrence déloyale, sans prendre garde qu'il ne s'agit nullement d'avis émanant d'un acteur économique qui cherche à bénéficier d'un avantage concurrentiel en jetant le discrédit sur un produit, mais, à supposer que cet avis puisse être imputé à M. F., d'un scientifique lequel dispose d'un droit de critique de toute découverte, quand bien même elle est l'œuvre d'une société dont il fut le fondateur et dont il demeure actionnaire.
En l'espèce, il convient de rappeler que les deux communiqués dénoncés par la société Genfit font suite à deux communiqués publiés par ses soins sur son site internet, et repris dans la presse, qu'elle décrit elle-même dans ses conclusions, comme " des documents synthétiques de vulgarisation, à vocation informative puisque destinés à l'ensemble des actionnaires de Genfit, en ce compris les actionnaires individuels les moins avertis ", avant de préciser que " compte tenu de la technicité et de l'ampleur des données concernées, il a fallu quasiment deux ans d'études et d'exploration des données aux scientifiques de Genfit et au comité de lecture de la revue pour que le pendant scientifique de cette communication intervienne dans une revue spécialisée de référence en la matière ".
Au vu de ces éléments, il ne saurait être reproché le caractère rapide et succinct de la réponse émanant de scientifiques, et attribuée selon la société Genfit à M. F., cette communauté ayant pu légitimement s'émouvoir d'une communication superficielle et vulgarisée, et n'étant pas d'ailleurs décrite comme telle dans les communiqués, voire prématurée, sur un médicament encore en cours de recherche et mis en place par une société auquel historiquement, le nom de M. F. et sa renommée scientifique sont intimement liés.
Surtout, la société Genfit affirme plutôt qu'elle ne démontre tant la provenance du communiqué émanant selon elle des époux F. que le caractère malveillant de ladite communication.
Si M. F. n'a jamais contesté avoir participé à cette communication en réponse, rien ne permet de lui en attribuer la paternité.
Il ne saurait être déduit du fait que M. F. se soit présenté comme représentant d'un collectif de scientifiques pour commander une diffusion de ces avis, qu'il en soit l'unique auteur et l'instigateur.
Aucun élément probant n'est apporté par la société Genfit, pour venir étayer ces affirmations relatives aux " stratagèmes élaborés par les époux F. " consistant en " l'utilisation de fausses identités et de société écrans afin de masquer l'identité réelle des auteurs du communiqué litigieux ".
Le simple fait d'utiliser d'ailleurs des adresses mails dédiées ou des sociétés de diffusion n'est pas interdit.
La copie écran des propriétés du document informatique English statement final, version anglaise du communiqué du 14 décembre 2009 est insuffisante à établir que Mme F. soit l'auteur même de cette traduction. Elle ne peut très bien avoir été que le relais d'une traduction effectuée par quelqu'un d'autre.
Enfin, dès le courrier officiel du 17 décembre 2009 de Me J., la société est informée de ce que cette réponse est une œuvre collective, émanant de plusieurs scientifiques, dont certains noms d'ailleurs sont expressément cités, plusieurs communiqués ou courriels ultérieurs portant en outre les signatures de scientifiques ayant contribué à ces réfutations.
De facto, il ne saurait être déduit du caractère collectif, anonyme de la réponse ou de l'utilisation d'adresses mail dédiées une " manœuvre mise en œuvre par les époux F. ", démontrant " le caractère malveillant du communiqué occulte ", et par là-même l'intention malicieuse des époux F.. Ces affirmations manquent en fait.
De même, la société Genfit ne fait qu'affirmer l'existence d'une critique malveillante, reprochant aux époux F., la divulgation des décisions de justice, obtenues en référé en mars 2010 et janvier 2011 à une période stratégique pour la société, à savoir au moment de l'assemblée générale extraordinaire visant à la mise en place d'un nouveau financement en fonds propres.
Toutefois la simple lecture du communiqué de presse de Genfit relative à ce nouveau financement en fonds propres en date du 24 août 2011 permet de constater que l'assemblée générale extraordinaire, dont il n'est pas démontré qu'elle ait été retardée, se tenait le 28 septembre 2011, alors que la communication reprochée à M. F. date quant à elle d'un communiqué publié le 3 et le 4 octobre 2011, soit postérieurement à l'assemblée, rendant inopérante cette allégation.
L'abus du droit de critique n'étant pas démontré, s'agissant d'une réponse collective dans un domaine scientifique, rédigée en termes certes tranchés mais mesurés, à laquelle M. F. a participé sans qu'il soit établi qu'il en soit l'auteur ni l'instigateur, la demande de la société Genfit ne peut qu'être rejetée.
2) sur l'abus du droit d'ester en justice
' En vertu des dispositions des articles 1382 et 1383 du Code civil, l'exercice d'une action en justice constitue en principe un droit et nécessite que soit caractérisée une faute faisant dégénérer en abus le droit d'agir en justice pour que puissent être octroyés des dommages et intérêts à titre de réparation.
En vertu des dispositions des articles 6 et 9 du Code de procédure civile, à l'appui de leurs prétentions, les parties ont la charge d'alléguer les faits propres à les fonder et il leur incombe de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de leurs prétentions.
L'article 546 du Code de procédure civile dispose que le droit d'appel est un droit qui appartient à toute partie qui y a intérêt, sous réserve toutefois de l'abus.
Le fait d'intenter une action ou d'opposer des moyens de défense à une demande n'est pas en soi générateur de responsabilité et la succombance du plaideur ne caractérise pas sa faute.
En l'espèce, la société Genfit sollicite réparation de son préjudice matériel à hauteur de 591 416,45 euros et de son préjudice d'image évalué à 1 000 000 d'euros, soulignant " la fréquence, la violence des attaques des époux F. " ayant donné lieu à 25 instances concernant Genfit soit directement, soit au travers de son actionnaire principal.
Comme le font justement remarquer les intimés, seules 5 instances concernent directement la société Genfit, dont la présente procédure et la procédure de référé sur le dénigrement, deux procédures à l'initiative des actionnaires ou de la société Genfit elle-même.
Il ne saurait être reproché dans ce cadre aux époux F. qu'ils se soient défendus, ce d'autant qu'ils ont vu leurs demandes accueillies les deux fois.
La lecture des écritures des appelantes démontrent que ces dernières confondent les intérêts de la société Genfit, ceux de Biotech, ceux de M. M. en qualité du président du directoire de Genfit, et ceux de M. M. en qualité du président du comité de direction de Biotech Avenir.
En effet, la faute reprochée consiste " dans la vindicte personnelle menée par les époux F. contre M. M., Président du Directoire de Genfit et Président du comité de direction de Biotech Avenir ", ces actions ayant " toutes en commun de tendre à la prise de contrôle de l'assemblée générale de Genfit, au cours de laquelle le mandat de président du directoire pouvait être remis en cause ".
Cette faute, à la supposer établie, ne serait constituée qu'à l'égard de M. M. et non de la société elle-même, qui ne pourrait s'en plaindre.
Il n'est ainsi nullement allégué et encore moins démontré que les époux F. aient procédé en justice dans le but de nuire à la société Genfit elle-même, pas plus qu'il n'est établi qu'ils aient procédé en justice par une légèreté blâmable, ce d'autant que la présente action est menée par les actionnaires et la société Genfit et que la plupart des actions citées concernent Biotech avenir et M. M..
En conséquence, la demande de dommages et intérêts de ce chef sera rejetée.
- Sur les dépens et accessoires
En application des dispositions de l'article 696 du Code de procédure civile, les sociétés Finorpa SCR, CMC-CIC Capital Privé, CM-CIC Investissement SCR, Genfit succombant en leurs prétentions, il convient de les condamner aux dépens.
Le sens du présent arrêt impose de condamner les sociétés Finorpa SCR, CM-CIC Capital Privé, CM-CIC Investissement SCR, Genfit in solidum à payer 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile à M. F..
Les demandes d'indemnités procédurales des sociétés Finorpa SCR, CM-CIC Capital Privé, CM-CIC Investissement SCR, Genfit ne peuvent qu'être rejetées.
Les sociétés Finorpa SCR, CM-CIC Capital Privé, CM-CIC Investissement SCR, Genfit étant déboutées de l'intégralité de leurs demandes, leur demande de prononcé d'une amende civile, s'agissant d'une prérogative appartenant discrétionnairement à la juridiction est rejetée.
Par ces motifs, LA COUR, Fait droit à la demande d'annulation du jugement présentée par les sociétés Finorpa SCR, CM-CIC Capital Privé, CM-CIC Investissement SCR, Genfit ; en conséquence, Annule le jugement du Tribunal de commerce de Lille Métropole en date du 23 avril 2015 ; Vu l'effet dévolutif de l'appel, Rejette la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir et du défaut d'intérêt à agir opposée à l'action des sociétés Finorpa SCR, CM-CIC Capital Privé, CM-CIC Investissement SCR par les époux F. ; Rejette la fin de non-recevoir opposée à l'intervention principale de la société Genfit par les époux F. ; Rejette la fin de non-recevoir opposée par les époux F. à la demande présentée par la société Genfit au titre de la procédure abusive ; Déboute les sociétés Finorpa SCR, CM-CIC Capital Privé, CM-CIC Investissement SCR, de leur action en responsabilité à l'encontre de M. Jean-Charles F. en sa qualité de membre du conseil de surveillance ; Déboute les sociétés Finorpa SCR, CM-CIC Capital Privé, CM-CIC Investissement SCR, de leur action en responsabilité à l'encontre de M. et Mme F. au titre de la diffusion d'informations graves et mensongères sur l'appréciation de la gestion de la société ; Déboute la société Genfit de son action en responsabilité à l'encontre de M. et Mme F. au titre du dénigrement ; Déboute la société Genfit de sa demande à l'encontre des époux F. au titre de l'abus du droit d'ester en justice ; Condamne in solidum les sociétés Finorpa SCR, CM-CIC Capital Privé, CM-CIC Investissement SCR et Genfit à payer à M. F. et Mme F. la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ; Rejette les demandes d'indemnités procédurales des sociétés Finorpa SCR, CM-CIC Capital Privé, CM-CIC Investissement SCR et Genfit ; Rejette la demande de prononcé d'une amende civile par les sociétés Finorpa SCR, CM-CIC Capital Privé, CM-CIC Investissement SCR et Genfit ; Condamne les sociétés Finorpa SCR, CM-CIC Capital Privé, CM-CIC Investissement SCR, Genfit aux dépens de première instance et d'appel.