CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 4 juillet 2018, n° 17-10361
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
NVY Distribution (SARL)
Défendeur :
BigBen Connected (Sasu)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Luc
Conseillers :
Mmes Mouthon Vidilles, Comte
FAITS ET PROCÉDURE
La société NVY Distribution (ci-après dénommée NVY) est une société spécialisée dans le domaine de la conception, la fabrication et la distribution de matériels hi-tech.
La société BigBen Connected (ci-après dénommée BBC) est une société spécialisée dans le secteur d'activité du commerce de gros de composants et d'équipements électroniques et de télécommunication.
Le 26 mars 2015, un accord de distribution exclusive a été signé entre la société NVY et la société BBC pour une durée de 3 ans, renouvelable par périodes successives d'un an sauf dénonciation par une partie avec un préavis de six mois avant chaque terme. Selon ce contrat, la société BBC devenait le distributeur exclusif de 85 produits de la société NVY sur les territoires de la France, l'Espagne, la Belgique, du Luxembourg, de l'Allemagne, l'Autriche, la Suisse, l'Italie et du Portugal.
Aux termes de l'article 1.4 de ce contrat : " BigBen Connected est le distributeur exclusif des produits dans les territoires. Par conséquent, NVY ne doit pas vendre, acheter ou permettre activement la vente de produits à des tiers dans le territoire et s'engage à ne pas vendre à des concurrents de BigBen Connected sur le territoire pendant la durée de l'accord ".
Selon l'article 1.6 du contrat, intitulé " minimum achat " : " En contrepartie de l'exclusivité accordée par NVY à BigBen Connected aux termes des présentes, BigBen Connected s'engage à avoir toujours 2 mois de stocks disponible sur les produits à rotation. Outre cet engagement la société BigBen Connected prend l'engagement d'acquérir annuellement un assortiment minimum de produits contractuels dont les conditions sont définies à l'annexe 2 des présentes ". L'annexe 2, intitulé " achat minimum annuel ", dispose que " (...) la société BigBen Connected s'engage à acheter des quantités de produits à NVY dans un montant global de valeurs annuelles correspondant aux sommes indiquées ci-dessous :
a) Première année du 1/04/2015 au 31/03/2016 (référence de l'année = N) contractuelle : 4 000 000 EUR (4 millions d'euros).
b) L'année deux du 1/04/2016 au 31/03/2017 (référence de l'année =N1) sera calculé sur la base de progression ou régression du marché de l'année N sur la base du montant réalisé en année N. Taux entre 10 à 30 %
c) L'année trois du 1/04/2017 au 31/03/2018 (référence de l'année =N2) sera calculé de progression ou régression du marché de l'année N1. La base de calcul sera : N1 * 10 à 30 % = N2'".
L'article 1.8, intitulé " non-concurrence " prévoit : " NVY et BigBen Connected s'engagent à ne pas entrer en concurrence pendant toute la durée du contrat. NVY s'engage à ne jamais démarcher ou entrer en négociation avec une marque que BigBen serait déjà en pourparlers. Avant toute négociation, NVY s'engage à demander à l'ensemble de ces contacts, marques, usines si elles ont des contacts avec la société BigBen Connnected. BigBen Connected s'engage à en faire de même ".
Au 31 mars 2016, le montant total des commandes passées auprès de la société NVY ne s'est établi qu'à 411 816,54 euros soit un différentiel de 3 588 183,86 euros avec la somme de 4 000 000 d'euros prévue à l'annexe 2 de l'article 1.6.
Le 3 mai 2016, la société NVY a envoyé une mise en demeure par la voix de ses conseils à la société BBC afin qu'elle l'indemnise de sa perte de marge évaluée à 1 432 044 euros sur le différentiel ci-dessus et qu'elle respecte, d'une part, son engagement contractuel d'avoir toujours deux mois de stocks disponibles sur les produits en rotation et, d'autre part, son obligation de non-concurrence envers la société NVY. Cette mise en demeure visait les dispositions de l'article 5.1 du contrat de distribution et avertissait que " passé un délai de 30 jours après cette mise en demeure restée sans effet, l'accord de distribution exclusive serait résilié de plein droit aux torts exclusifs de BigBen Connected ".
Le 17 juin 2016, la société NVY a engagé une action judiciaire à bref délai afin de voir la société BBC condamnée à l'indemniser à hauteur d'une somme totale de 5 129 728,02 euros.
Par jugement du 18 octobre 2016, le Tribunal de commerce de Lille Métropole a :
- débouté la société NVY Distribution de l'ensemble de ses demandes,
- condamné la société NVY Distribution à payer à la société BigBen Connected la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamné la société NVY Distribution aux dépens, taxés et liquidés à la somme de 81,12 euros en ce qui concerne les frais de Greffe.
La société NVY a interjeté appel de ce jugement le 7 novembre 2016 devant la Cour d'appel de Douai, qui, par un arrêt du 29 juin 2017, a déclaré cet appel irrecevable, du fait de demandes formées sur le fondement de l'article L. 442-6 du Code de commerce et de débouter la société BBC de ses demandes de condamnation au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Le 23 mai 2017, la Cour d'appel de Paris a été saisie de l'appel interjeté par la société NVY du jugement déféré.
Vu les dernières conclusions de la société NVY Distribution, appelante, déposées et notifiées le 23 mars 2018, par lesquelles il est demandé à la cour de :
- infirmer totalement le jugement entrepris,
et statuant à nouveau,
- condamner la société BigBen Connected à verser à la société NVY Distribution la somme totale de 5 129 728,02 euros en réparation des fautes contractuelles commises se décomposant comme il suit :
* 1 432 044,02 euros pour la perte de chiffre d'affaires au titre de la première année contractuelle,
* 3 687 684 euros pour la perte de chance de réaliser le chiffre d'affaires au titre des deux années contractuelles restantes,
* 10 000 euros pour le préjudice moral subi,
- débouter la société Big Ben Connected de l'ensemble de ses demandes plus amples et contraires,
- condamner la société BigBen Connected à verser à la société NVY Distribution la somme de 15 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction, pour ceux-là concernant, au profit de Maître X - Selarl 2H Avocats et ce, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile ;
Vu les dernières conclusions de la société BBC, intimée, déposées et notifiées le 11 mai 2018, par lesquelles il est demandé à la cour de :
vu les articles L. 330-3 et L. 442-6 du Code de commerce, 1231-5, 1603 et 1615 du Code civil,
- dire recevable mais mal fondé l'appel formé par la société NVY Distribution à l'encontre du jugement déféré,
- confirmer ce jugement en ce qu'il a débouté la société NVY Distribution de ses prétentions et l'a condamnée à payer à la société BigBen Connected la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- dire qu'il y a lieu de déclarer nul l'article 1.6 de l'accord de distribution signé le 26 mars 2015 renvoyant à l'annexe 2 dudit contrat et, à défaut de dire qu'il s'analyse en une obligation de moyens à charge de la société BigBen Connected et non en une obligation de résultat,
- dire que par son comportement fautif dans la conclusion et l'exécution de l'accord de distribution exclusive du 26 mars 2015, la société NVY Distribution n'a pas permis à la société BigBen Connected de respecter ses engagements contractuels celle-ci n'ayant commis aucune faute grave et se trouvant en conséquence exonérée des fautes qui lui sont reprochées et qu'elle conteste,
- dire que l'accord de distribution signé le 26 mars 2015 est à l'origine d'un déséquilibre significatif engageant la responsabilité de la société NVY Distribution,
- dire que la résiliation de l'accord n'est pas imputable à la société BigBen Connected mais à la société NVY Distribution, qui doit seule en supporter les conséquences, compte tenu de son manque de loyauté, des manquements à ses obligations d'information, de délivrance et des fautes qu'elle a commises dans la conclusion comme dans l'exécution de l'accord de distribution,
- dire mal fondés les arguments avancés en appel par la société NVY Distribution et la débouter de l'ensemble de ses prétentions,
à défaut, à titre subsidiaire,
- dire que dans la mesure où la société NVY Distribution n'a pas respecté ses propres obligations contractuelles, elle est en partie responsable de la non-atteinte par la société BigBen Connected du chiffre d'affaires de 4 000 000 euros HT pour la première année d'exécution de l'accord ; en conséquence, que la faute de la société NVY Distribution justifie la réduction du montant de la réparation de son préjudice à de plus justes proportions,
- dire que l'article 1.6 et l'annexe 2 de l'accord de distribution exclusive constituent une clause pénale autorisant la cour à modérer la pénalité convenue manifestement excessive ;
- dire qu'il y a lieu également de réduire le montant de l'indemnisation réclamée par la société NVY Distribution au titre du préjudice lié à la perte de marge pour les années 2016/2017 et 2017/2018 et dire qu'il ne pourra être supérieur respectivement à 180 791,57 euros pour l'année N+1 et 198 870,71 euros pour l'année N+2,
en toute hypothèse,
- ajouter au jugement la condamnation de la société NVY Distribution au paiement de 15 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux frais et dépens de première instance comme d'appel ;
SUR CE
Sur la résiliation du contrat de distribution exclusive
La société NVY soutient que le contrat conclu avec la société BBC a été précédé de nombreuses négociations pendant plusieurs mois. Par conséquent, la société BBC s'est, selon elle, engagée en toute connaissance de cause. Par ailleurs, la société NVY estime que c'est à juste titre que l'accord a été résilié de plein droit dans la mesure où malgré une mise en demeure envoyée à la société BBC, celle-ci a manqué à ses obligations d'achat minimum, de stock minimum et de non-concurrence. Elle expose en effet en premier lieu que la société BBC a commis une faute en manquant à son obligation de résultat d'achat minimum de produits auprès de la société NVY et que, quand bien même l'obligation d'achat devrait être considérée comme une obligation de moyens, la société BBC n'a fourni aucun effort particulier pour atteindre cet objectif. Elle avance en deuxième lieu que la société BBC a violé son obligation de stock minimum et a manqué à son obligation de rachat de stock. Enfin, elle soutient que la société BBC a violé son obligation de non-concurrence envers elle en commercialisant trois produits sous la marque Thomson entrant en concurrence directe avec ses produits. Par ailleurs, la société NVY estime que les fautes qui lui sont reprochées par la société BBC ne sont ni avérées, ni démontrées, ni d'une gravité suffisante pour écarter totalement sa responsabilité de ne pas avoir respecté ses propres engagements.
La société BBC estime que la société NVY ne saurait exiger d'elle une obligation de résultat quant à son obligation minimum d'achat dans la mesure où l'exécution de cette obligation dépendait également de la société NVY. En outre, selon elle, l'atteinte de l'objectif visé par la clause d'achat minimum ne doit pas être analysée comme une obligation de résultat mais comme une obligation de moyens, de sorte que le défaut d'atteinte de cet objectif n'est pas constitutif de faute à sa charge. En tout état de cause, elle conteste la validité même de la clause, en ce sens que l'objectif visé par celle-ci n'est ni raisonnable, ni fixé de manière objective et s'avère dépourvu de contrepartie. Par ailleurs, elle soutient que la responsabilité de la résiliation de l'accord pèse sur la société NVY qui a rendu impossible la réalisation de l'objectif d'achats. De plus, elle expose que la société NVY a manqué à son obligation d'information précontractuelle. Ainsi, l'absence d'informations déterminantes de son consentement ne lui a pas permis de s'engager en connaissance de cause. Par ailleurs, elle prétend que la société NVY a violé le contrat, en ne respectant pas son obligation d'exclusivité envers elle en offrant ses produits à des concurrents de la société BBC et en accumulant les manquements au contrat. En effet, elle reproche à la société NVY des erreurs d'étiquetage, des retards et défauts de livraison, des livraisons de produits obsolètes ou défectueux et un manque de réactivité. Par ailleurs, la société BBC estime que la société NVY a été défaillante dans l'organisation des sessions de travail prévues tous les quinze jours entre les partenaires et dans son implication dans le cadre de la politique publi-promotionnelle dont elle avait la responsabilité. La société BBC affirme, en outre, que la société NVY a perdu une dizaine de licences de marque parmi les 85 licences prévues en annexe au contrat, la privant, ainsi, d'une ressource qui a fortement restreint son chiffre d'affaires. Par conséquent, les manquements de la société NVY ont eu, selon la société BBC, un impact négatif sur ses ventes auprès de ses clients, ce qui ne lui a pas permis de respecter ses objectifs contractuels.
La société NVY a fait application de la clause résolutoire de plein droit prévue à l'article 5.1 du contrat qui dispose : " l'entente peut être résiliée plus tôt par une partie, dans le cas où l'autre partie ne respecte pas ses obligations matérielles ci-dessous. Dans ce cas, la première partie peut dénoncer le présent accord automatiquement (de plein droit) après une période de validité de 30 (trente) jours après mise en demeure, si ladite violation n'a pas été corrigée de manière adéquate dans ce délai, et sans préjudice des dommages et/ou d'autres remèdes qui peuvent être réclamés par la partie lésée ".
Il y a donc lieu de vérifier si la société NVY démontre que la société BBC a enfreint les trois obligations matérielles visées dans la mise en demeure du 3 mai 2016, dont la violation est alléguée par la société appelante, à savoir les engagements de minimum d'achats, de stock et de non-concurrence.
Sur la validité de la clause d'engagement d'achat minimum et son application au regard de la bonne foi qui doit présider aux relations contractuelles
Si la société NVY, en prononçant la résiliation du contrat la liant à l'intimée, n'a fait prima facie que mettre en œuvre les stipulations de ce contrat, une telle résiliation peut, néanmoins, revêtir un caractère abusif en raison des circonstances accompagnant la rupture. Selon les dispositions de l'alinéa 3 de l'article 1134 du Code civil, dans sa version alors en vigueur, aux termes desquelles les conventions légalement formées " doivent être exécutées de bonne foi ", la faculté de résiliation d'un contrat ne saurait être exercée dans des conditions exclusives d'une semblable bonne foi.
Or, la société intimée soutient que la société NVY a mis en œuvre de mauvaise foi la clause résolutoire prévue dans le contrat en alléguant la violation d'une clause d'achat minimum irréalisable.
Il est de principe que le défaut de respect d'une clause d'achat minimum, qui oblige le débiteur à acheter auprès de son cocontractant un volume ou une valeur minimum de biens, peut engager la responsabilité du débiteur fautif. Toutefois, l'opposabilité de cette clause est conditionnée à son caractère proportionné et réaliste.
Or, la société NVY ne démontre pas que cet engagement est réaliste et qu'il s'appuie sur des données constatées sur le marché.
En effet, la clause est fixée de façon absolue, avec un taux minimal unique, et n'a pas été établie à l'issue d'une étude concrète du marché, qui aurait permis d'évaluer le potentiel de vente aux clients finals, dans les zones d'exclusivité de la société BBC, sur la base de l'historique des ventes à clients finals de la société NVY les années précédentes. La seule faculté d'ajustement étant annuelle (20 à 30 %), il n'est pas prévu la possibilité d'ajuster le taux plancher, afin de tenir compte de changements significatifs du marché dans les zones d'exclusivité.
S'agissant de la proportionnalité de cet engagement, la liste des clients qui auraient été cédés par la société NVY à la société BBC, et qui, selon NVY, rendrait réaliste et parfaitement atteignable l'engagement de volume, est contenue dans un tableau illisible (pièce 4 de NVY), qui ne figure pas en annexe au contrat précité et dont la communication au moment de la signature du contrat n'est pas démontrée. Le poids économique, en termes de chiffre d'affaires, d'achats de chacun de ces clients n'est pas indiqué et il ressort des constatations opérées par la société intimée que certaines entreprises mentionnées sont même situées en dehors du territoire contractuel de la société BBC.
De plus, l'exclusivité consentie à la société BBC est limitée aux neufs pays cités plus haut (France, Espagne, Belgique, Luxembourg, Allemagne, Autriche, Suisse, Italie et Portugal) et aux produits figurant en annexe au contrat, soit 85 produits, démonstration n'étant pas faite que cette exclusivité porterait, ainsi que le prétend la société NVY, sur l'ensemble de son catalogue.
En outre, la circonstance, alléguée par la société appelante, que la société BBC dispose d'une force commerciale conséquente, ne saurait lui garantir la réalisation d'un chiffre d'affaires que l'économie du contrat, au vu des éléments versés au dossier, rendait inatteignable.
La réalisation, par la société BBC, d'un chiffre d'affaires de 107 483 000 euros sur l'exercice 2015/2016, chiffre d'affaires relatif à des activités sur des marchés différents de celui concerné par les relations avec NVY, ne saurait en effet démontrer la capacité de cette société à atteindre, dans des conditions raisonnables, un minimum d'achat de 4 millions d'euros sur les seuls produits NVY. En outre, il résulte du bilan de la société NVY qu'elle a, avant la signature du contrat, vendu seulement 300 euros de marchandises en 2014 en dehors de la France et n'a jamais justifié du volume de ses ventes à l'exportation dans les années précédant l'accord litigieux.
La société NVY ne justifie donc pas qu'elle pouvait exiger, au regard de l'économie du contrat, la réalisation en douze mois et sur le territoire de neuf États européens, par son partenaire, d'un chiffre d'affaires de 4 000 000 euros (article 1.6 de l'accord - pièce adverse n° 3) alors qu'elle avait elle-même réalisé l'année précédente moins de 900 000 euros sur lesquels 99,9 % avaient été réalisés en France et 300 euros à l'exportation (pièce BBC n° 22).
Les chiffres avancés par la société appelante relatifs au " marché des objets connectés ", trop généraux, sont à cet égard dépourvus de pertinence.
Par ailleurs, la société NVY ne démontre pas d'inefficiences dans la gestion de la société BBC, qui seraient de nature à expliquer la grande différence entre l'objectif minimum fixé dans le contrat et le chiffre effectivement réalisé par la société BBC.
Fortement disproportionnée par rapport à ses contreparties en termes d'exclusivité, la clause d'engagement de ventes minimum ne saurait donc être opposable à la société BBC, pour justifier l'application de la clause résolutoire. Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.
Sur l'engagement de stock
La société NVY soutient, sans en rapporter le moindre commencement de preuves, que la société BBC n'aurait pas respecté son engagement contractuel d'avoir toujours deux mois de stocks disponibles sur les produits en rotation. Ainsi que le souligne justement le jugement déféré, la société appelante ne présente aucune analyse des stocks qui ferait ressortir une violation systématique de la durée des deux mois.
Ce grief n'est donc pas davantage établi.
Il y a donc lieu de confirmer le jugement entrepris,
Sur l'engagement de non-concurrence
La société NVY soutient que la société BigBen n'aurait pas respecté son engagement de non-concurrence, en développant des produits concurrents sous sa propre marque, Thomson.
Mais la société appelante ne démontre pas en quoi les produits de la marque Thomson seraient concurrents de ses propres produits.
Il y a donc lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a estimé que cette violation ne peut être retenue à la charge de la société BigBen.
Au final, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a jugé que " la résiliation du contrat par NVY n'engage(ait) pas la responsabilité de (la société) BBC ", les griefs invoqués dans la lettre valant mise en demeure de mai 2016 de la société NVY n'étant pas constitués et la clause résolutoire du contrat ne pouvant produire d'effets à l'égard de la société BBC.
Sur l'existence d'un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties
La société NVY soutient qu'aucun déséquilibre significatif ne saurait être caractérisé concernant le contrat qu'elle a conclu avec la société BBC. En effet, elle estime que la taille respective des deux sociétés, équivalente à moins d'un million d'euros de chiffre d'affaires pour NVY contre plus de 100 millions pour BBC en 2016, suffit à écarter l'existence d'un déséquilibre significatif dans le contrat passé avec elle. En tout état de cause, la société NVY affirme que le contenu de l'accord ne présente aucun déséquilibre.
La société BBC soutient avoir été soumise par la société NVY à des obligations créant un déséquilibre significatif des droits et obligations des parties au sens de l'article L. 442-6, I, 2° du Code de commerce. En effet, elle estime, d'une part, que les objectifs fixés par la société NVY étaient exorbitants et que les moyens de les atteindre n'étaient pas raisonnables et, que d'autre part, la sanction de leur non-respect était disproportionnée. En outre, l'accord ne présentait, selon la société BBC, aucun moyen de rééquilibrage, à son profit. Elle soutient, par ailleurs, que de nombreuses clauses issues de l'accord mettaient des devoirs à la charge du seul distributeur alors que les devoirs auraient dû être réciproques. En tout état de cause, elle estime que la société NVY, en prenant l'initiative de la résiliation, sans même sérieusement chercher une solution amiable au différend naissant, n'a fait que poursuivre sa stratégie visant à faire supporter à la société BBC son incapacité à fournir des produits susceptibles de lui permettre de respecter le montant prévu par la clause d'achat minimum.
Mais sans qu'il soit besoin d'examiner ce moyen au soutien de la demande de la société BBC de confirmation du jugement déféré, dès lors qu'il y a déjà été fait droit, sur le fondement de l'absence de violation de ses obligations contractuelles, il y a lieu de souligner que l'élément de " soumission ou tentative de soumission ", nécessaire pour caractériser la pratique restrictive de déséquilibre significatif, n'est pas établi.
Il n'est pas davantage utile à la résolution du présent litige de statuer sur la demande en nullité de l'article 1.6 de l'accord de distribution signé le 26 mars 2015 renvoyant à l'annexe 2 dudit contrat, ce moyen visant aux mêmes fins de confirmation du jugement entrepris.
Sur les dépens et frais irrépétibles
La société NVY Distribution succombant au principal, sera condamnée à supporter les dépens d'appel, qui seront recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile ainsi qu'à payer à la société BBC la somme de 15 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par ces motifs, LA COUR, confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ; condamne la société NVY Distribution à supporter les dépens d'appel, qui seront recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile ; condamne la société NVY Distribution à payer à la société BigBen Connected la somme de 15 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.