ADLC, 24 juillet 2018, n° 18-D-14
AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE
Décision
relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la commercialisation des décodeurs de signaux de télévision par satellite
L'Autorité de la concurrence,
Vu la lettre en date du 25 septembre 2014, enregistrée sous les numéros 14/0074 F et 14/0075 M, par laquelle la société Aston France a saisi l'Autorité de la concurrence de pratiques mises en œuvre par la société Groupe Canal Plus dans le secteur de la commercialisation de décodeurs de signaux de télévision par satellite et a sollicité, en outre, le prononcé de mesures conservatoires ;Vu la décision n° 15-C-01 du 21 janvier 2015 par laquelle le président de l'Autorité de la concurrence a donné acte du désistement de la société Aston France de sa demande de mesures conservatoires ; Vu l'article 102 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;Vu le livre IV du Code de commerce ;Vu l'avis n° 2017-12 du Conseil supérieur de l'audiovisuel du 18 octobre 2017 ;Vu l'évaluation préliminaire transmise aux sociétés Aston France, Groupe Canal Plus et au commissaire du Gouvernement le 19 mars 2018 ;Vu la proposition d'engagements de la société Groupe Canal Plus du 4 avril 2018, mise en ligne le 5 avril 2018 sur le site internet de l'Autorité de la concurrence pour un test de marché, et les modifications proposées le 27 juin 2018 ;Vu les décisions de secret des affaires n° 17-DSA-008 et n° 17-DSA-011 du 10 janvier 2017, n° 17-DSA-045 du 27 janvier 2017, n° 17-DSA-243 du 2 juin 2017, n° 17-DSA-368 du 6 septembre 2017, n° 18-DSA-008 du 4 janvier 2018, et de déclassement n° 17-DEC-509 du 27 novembre 2017, n° 17-DECR-523 du 30 novembre 2017, n° 17-DECR-525 et n° 17-DECR-526 du 1er décembre 2017 ;Vu les observations présentées par la société Groupe Canal Plus et le commissaire du Gouvernement ;Vu les autres pièces du dossier ;Le rapporteur, la rapporteure générale adjointe, le commissaire du Gouvernement et les représentants de la société Groupe Canal Plus, entendus lors de la séance de l'Autorité de la concurrence du 27 juin 2018, la société Aston France ayant été régulièrement convoquée ; Adopte la décision suivante :
I. Constatations
A. LA SAISINE ET LA PROCÉDURE
1. Par lettre du 25 septembre 2014, enregistrée sous le numéro 14/0074 F, la société Aston France a saisi l'Autorité de la concurrence, sur le fondement de l'article L. 420-2 du code de commerce, de pratiques mises en œuvre par la société Groupe Canal Plus (ci-après "GCP ")dans le secteur de la commercialisation des décodeurs de signaux de télévision par satellite, visant à faire cesser la réception des offres de GCP par les décodeurs satellitaires alternatifs à ceux proposés par GCP.
2. Cette saisine était assortie d'une demande de mesures conservatoires sur le fondement de l'article L. 464-1 du Code de commerce, introduite le même jour par document distinct, enregistrée sous le numéro 14/0075M.
3. Par décision n° 15-C-01 du 21 janvier 2015, le président de l'Autorité a donné acte du désistement de la société Aston France de sa demande de mesures conservatoires.
4. Consulté dans le cadre de la présente affaire sur le fondement des dispositions de l'article R. 463-9 du Code de commerce, le Conseil supérieur de l'audiovisuel (ci-après dénommé "CSA") a rendu, le 3 décembre 2014 et le 18 octobre 2017, les avis n° 2014-17 et n° 2017-12.
5. Par courrier du 19 mars 2018, le rapporteur a fait connaître à GCP l'évaluation préliminaire de la pratique en cause, réalisée sur le fondement de l'article L464-2 du Code de commerce.
6. Le 4 avril 2018, GCP a transmis à l'Autorité une proposition d'engagements visant à répondre aux préoccupations de concurrence exprimées.
7. La proposition d'engagements de GCP a été mise en ligne le 5 avril 2018, afin de recueillir les observations éventuelles des parties intéressées.
B. LE SECTEUR ET LES PRODUITS CONCERNÉS
8. Les contenus télévisuels gratuits ou payants sont accessibles via différentes plateformes et nécessitent l'installation d'équipements de réception, notamment un décodeur, dont la fonction principale est d'assurer la diffusion de contenus aux personnes autorisées à y accéder. Le secteur concerné est celui de la commercialisation des décodeurs satellitaires permettant la réception d'offres de télévision.
1. LES PLATEFORMES DE DIFFUSION TÉLÉVISUELLE
a) Présentation des plateformes
9. Les services de télévision, gratuite ou payante, destinés aux téléspectateurs français empruntent principalement les réseaux hertziens terrestres et satellitaires et les réseaux filaires (câble, ADSL, fibre). Un même foyer peut avoir accès à plusieurs réseaux de manière simultanée et peut, selon ses besoins ou le nombre de téléviseurs dont il dispose, en utiliser un seul ou plusieurs pour recevoir les services télévisuels auxquels il souhaite accéder.
10. Ces plateformes présentent des caractéristiques différentes en termes de couverture et de pénétration :
- Les réseaux hertziens terrestres couvrent environ 95% de la population française (métropole et outremer). En 2017, environ 56 % des foyers équipés d'au moins un téléviseur déclarait recevoir la télévision par voie hertzienne terrestre.
- Les réseaux hertziens satellitaires couvrent près de 100 % du territoire métropolitain. Au deuxième trimestre 2017, 23 % environ des foyers équipés au moins d'un téléviseur recevaient la télévision par satellite.
- Pour les réseaux ADSL et fibre, à la fin de l'année 2014, le taux de couverture de la population par l'ADSL était de 72% pour les foyers équipés d'un seul téléviseur et de 15% s'agissant de la fibre optique. Au second semestre 2017, environ 54% des foyers équipés d'au moins un téléviseur déclarait recevoir la télévision par ADSL ou fibre optique2.
- S'agissant des réseaux câblés, selon le CSA, en 2017 Numericable desservait 33 % des foyers équipés d'au moins un téléviseur. Environ 8% des foyers équipés d'au moins un téléviseur recevait la télévision par câble.
b) Les différentes modalités de réception d'offres de télévision
11. Sur les plateformes filaires, les opérateurs mettent eux-mêmes à disposition les décodeurs spécifiquement développés pour leurs offres. Sur les plateformes satellitaire et hertzienne, le consommateur peut ou doit (dans le cas où il est situé dans une zone blanche non desservie par le réseau filaire) acheter dans le commerce le décodeur de son choix.
12. Les chaînes de la télévision gratuite sont disponibles sur l'ensemble des plateformes précitées. Sur la plateforme satellitaire, deux offres (TNT SAT et Fransat) permettent d'accéder aux chaînes de la TNT gratuite.
13. L'accès à ces offres ne nécessite ni de souscrire un abonnement ni de louer un terminal, mais de s'équiper d'une parabole, d'un décodeur et d'une carte d'accès conditionnel. L'orientation de la parabole, le décodeur et la carte d'accès conditionnel sont spécifiques à l'offre souscrite par le consommateur3.
14. Les contenus accessibles via l'une ou l'autre de ces offres sont cryptés afin de permettre aux seuls foyers de France métropolitaine d'y accéder, dans le respect des principes de protection des détenteurs de droits sur les programmes.
15. Les packs TNT SAT et Fransat comprenant une parabole, un décodeur et une carte, ou seulement un décodeur et une carte, sont vendus par les différents distributeurs. Les prix des packs varient entre environ 70 et 400 euros selon les fonctionnalités disponibles.
16. S'agissant des offres payantes, GCP est le seul distributeur de télévision payante actif sur la TNT. Étaient disponibles en 2014 sur cette plateforme, les chaînes Canal+, Canal+ Sport et Canal+ Family et le "Minipack " intégrant quatre chaînes thématiques payantes de l'offre "CanalSat " (Eurosport, Paris Première, LCI et Planète+). Depuis mai 2014, GCP propose un décodeur TNT dénommé "G5 R7 " qui, connecté à internet, permet de recevoir viainternet, en complément de la réception hertzienne des trois chaînes précitées, les chaînes Canal+ Cinéma, Canal+ Séries et Canal+ Décalé. L'abonné qui utilise ce décodeur reçoit ainsi l'intégralité de l'offre "Les Chaînes Canal+".
17. Sur l'ADSL et la fibre, les fournisseurs d'accès à internet (FAI) proposent, dans le cadre de leurs offres " triple play ", à côté des services d'accès à internet et de téléphonie, des offres de télévision dite de "premier niveau " qui contiennent les chaînes gratuites de la TNT ainsi que certaines chaînes thématiques et des offres de " second niveau " pour lesquelles un abonnement spécifique doit être souscrit. Tous les FAI proposent l'accès aux offres payantes de GCP par ADSL (et/ou fibre).
18. Sur le câble, outre les offres agrégées par Numericable et comprises ou non dans une offre multiservices, les consommateurs peuvent notamment s'abonner à l'offre "Les Chaînes Canal+".
19. Sur le satellite, des offres de télévision payante sont proposées par GCP, ABSat, BeIN Sports dans le cadre d'offres de télévision pures et par Orange et SFR en complément de leurs offres multiservices, pour les abonnés non éligibles à la télévision par ADSL. Les offres de GCP sont accessibles soit directement auprès de GCP, soit en sus des offres multiservices proposées par Orange et SFR. Des offres payantes sont également disponibles via les décodeurs Fransat sans avoir à changer de carte à puce, cette dernière étant dotée de plusieurs zones de services distinctes permettant d'accéder à des offres payantes en complément de l'offre gratuite.
20. De nombreux contenus télévisuels sont également disponibles sur internet. Ainsi, Molotov TV est un distributeur de télévision payante exclusivement présent via la distribution OTT. GCP utilise également ce canal grâce à ses décodeurs hybrides OTT/TNT et OTT/satellite et son application "MyCanal ".
2. L'ÉQUIPEMENT DE RÉCEPTION SATELLITAIRE DES OFFRES DE TÉLÉVISION
a) Les différentes fonctions des décodeurs
21. Les signaux télévisuels émis sont encodés, compressés et éventuellement cryptés avant d'être envoyés vers les téléspectateurs qui doivent alors s'équiper d'un récepteur spécifique pour les visionner. Il peut s'agir d'offres de services de télévision cryptées ou non cryptées, gratuites ou payantes, quelle que soit la plateforme de diffusion concernée.
22. Dans son avis n° 2014-17 précité, le CSA indique que les décodeurs de télévision par voie hertzienne terrestre, satellite ou par câble effectuent principalement les trois opérations suivantes :
- " ils démodulent le signal reçu, la démodulation dépendant généralement du mode de distribution, et produisent ainsi un flux binaire qui est soit chiffré (notamment dans le cas des offres de télévision payante ou des offres gratuites de télévision par satellite) soit clair (cas de la TNT gratuite métropolitaine ou du service antenne numérique du câble) ;
- le cas échéant, avec l'aide d'une carte à puce, ils vérifient les droits des abonnés, qui sont transmis avec le signal audio et vidéo, et déchiffrent le flux binaire chiffré à l'aide d'un algorithme standardisé et d'une clé secrète, elle-même transmise sous forme chiffrée. Les algorithmes non standardisés de chiffrement et de déchiffrement de cette clé régulièrement changée et la gestion des clés sont fournis par des fournisseurs de systèmes d'accès conditionnel [...] ; les décodeurs mettent donc en œuvre le système d'accès conditionnel choisi par le distributeur ;
- le flux binaire clair [...], qui représente une suite d'images et de sons compressés, est décodé (décompressé) par le décodeur MPEG intégré dans l'équipement et renvoyé sous forme de signal analogique ou numérique au téléviseur pour une restitution visuelle et sonore. "
23. Outre ces fonctionnalités, les décodeurs doivent pouvoir gérer les signaux d'une télécommande, voire exécuter des applications logicielles comme le guide électronique des programmes ou encore, pour les décodeurs connectés à internet, envoyer des données, ce qui permet au téléspectateur d'accéder à des services interactifs.
b) Les décodeurs permettant d'accéder aux offres payantes de GCP
Les décodeurs mis à disposition de l'abonné par l'opérateur
24. Sur les réseaux filaires, seuls les décodeurs développés par ou pour les opérateurs permettent de recevoir les offres de GCP. Les décodeurs sont mis à disposition des abonnés par les FAI.
25. Sur la TNT, les décodeurs sont mis à disposition des abonnés par GCP.
26. Sur le satellite, plus de 90 % des abonnés de GCP louent un décodeur auprès de ce dernier au prix de 6 euros par mois4. L'abonné doit également payer un dépôt de garantie de 75 euros. La version la plus répandue du décodeur loué par GCP est "Le Cube " 5ème génération ou "G5 "5.
Les décodeurs " carte seule " et les contrats de partenariat Canal Ready
27. Dans certains cas, les abonnés achètent dans le commerce un décodeur où ils insèrent une carte à puce délivrée par GCP. Ces cartes sont dites "cartes seules " et les décodeurs concernés "décodeurs carte seule ".
28. Ce choix leur est présenté, sur le site internet de GCP, au moment de la souscription à l'offre payante. Ils peuvent donc choisir entre la souscription d'un abonnement de télévision payante accompagnée de la location d'un décodeur fourni par GCP ou la seule souscription à l'abonnement. Les décodeurs carte seule ne permettent cependant que d'accéder à l'offre linéaire de GCP.
29. En 2009, GCP a conclu des accords dénommés "Partenariat CANAL READY Décodeurs Satellite " avec 24 fournisseurs de décodeurs. Ces accords définissaient les conditions de conception, fabrication et commercialisation de décodeurs "permettant de recevoir les Offres Payantes de CANAL+ [...] "6. Une liste des décodeurs compatibles avec l'offre de GCP était disponible sur son site internet.
30. La mise en place du label impliquait un plan de migration des décodeurs TNTSAT vers des décodeurs permettant, à la guise du consommateur, de souscrire à un abonnement payant en sus des chaines gratuites de la TNT. L'objectif était ainsi d'étendre la base d'abonnés de GCP en s'appuyant sur le parc de terminaux TNTSAT.
31. Depuis cette date, seuls les décodeurs respectant le cahier des charges établi par GCP et ayant fait l'objet d'une certification permettent d'accéder à l'offre payante de GCP. L'apposition de la marque Canal Ready sur les décodeurs fabriqués dans le cadre de ce partenariat permet aux consommateurs d'identifier, dans le commerce, les décodeurs compatibles avec les offres payantes de GCP.
32. Par ailleurs, outre l'acquisition d'un décodeur compatible, le consommateur doit également se procurer une carte seule délivrée par GCP qu'il insère dans le décodeur.
33. Pour GCP, le label Canal Ready renforce aussi la sécurité du système carte seule, et permet de lutter contre le piratage, en soumettant les fabricants de décodeurs " à un certain nombre d'exigences techniques destinées à progressivement combler les failles inhérentes à l'utilisation des cartes seules "7.
34. L'article 2 de l'accord de partenariat stipule à cet égard que "CANAL+ s'engage à l'égard du Partenaire à :
- Lui fournir les spécifications techniques, sécuritaires et fonctionnelles décrites dans les Annexes [...] et auxquelles devront répondre les Produits pour pouvoir recevoir les Offres Payantes de CANAL+et ainsi bénéficier du label CANAL READY ;
- Mettre en place une procédure de certification assurant au Partenaire la parfaite conformité de ses produits aux spécifications fournies par CANAL+ dans le respect de l'Annexe N°7 "PARCOURS INDUSTRIEL" ;
- L'autoriser à utiliser la Marque CANAL READY pour ses Produits certifiés selon les conditions de la licence de Marques [...]
- [...] "
35. En relation avec les spécifications techniques, il est précisé à l'article 2.3 du contrat notamment que " [...] le Partenaire prend les engagements suivants :
[...]
- "Prendre en compte dans ses procédures de production et de distribution les nouvelles spécifications techniques et/ou annexes que CANAL+ pourra lui adresser [...] et [...] ne plus fabriquer ni distribuer de produits ne répondant pas aux nouvelles spécifications et/ou annexes CANAL READY ".
36. L'article 2.2 intitulé "Droits concédés par CANAL+ au Partenaire " stipule notamment que "CANAL+ concède au Partenaire les droits suivants :
- fabriquer et distribuer des produits certifiés répondant aux spécifications techniques, sécuritaires et fonctionnelles de CANAL+[...]
- Utiliser la marque Canal Ready [...] ". compatibles MEDIAGUARD permettant l'insertion d'une " carte seule " fournie par le Groupe CANAL+ pour la réception des offres CANAL+ et/ou CANALSAT. " (cote F 1078).
37. Selon les stipulations du contrat, les droits de fabrication et de distribution de décodeurs
Canal Ready ne sont concédés que pour la France métropolitaine.
3. LES SYSTÈMES DE PROTECTION DES DROITS AUDIOVISUELS ET LEUR CONTOURNEMENT
a) La protection des contenus de GCP distribués par satellite
38. Les distributeurs de contenus télévisuels procèdent au cryptage des signaux afin derestreindre le cercle des utilisateurs à ceux qui se trouvent dans la zone d'exploitation des droits (TNT gratuite), ou qui paient un abonnement dans le cas d'une offre payante. Les décodeurs vérifient les droits des utilisateurs et déchiffrent le flux chiffré grâce à un algorithme et une clé secrète. La gestion des clés (notamment leur chiffrement et déchiffrement) est assurée par des fournisseurs de systèmes d'accès conditionnels choisis par le distributeur de télévision.
39. GCP a choisi de recourir à plusieurs systèmes de sécurité de manière simultanée sur le parc de décodeurs permettant la réception de ses offres. En effet, il a recours à "Merlin "9 pour son parc locatif permettant d'accéder à ses offres payantes et à "Viaccess " pour le parc TNT SAT (chaînes gratuites) et carte seule (contenu payant). Le recours à des systèmes différents permet en principe de cloisonner une éventuelle faille sur un système afin d'éviter que celle-ci se généralise.
40. Ces solutions de sécurité, dont l'objectif est de limiter l'accès au contenu aux seules personnes autorisées, sont toutefois régulièrement contournées par les manœuvres de pirates.
b) Le piratage des contenus de GCP distribués par satellite
41. Bien que le piratage existe dans des formes variées sur la plupart des plateformes de diffusion, il touche particulièrement la plateforme satellitaire.
42. Sur le satellite, le piratage peut en effet avoir lieu au niveau du signal, du décodeur ou de la carte. Une forme très répandue de piratage propre à cette plateforme consiste ainsi à récupérer, dupliquer et partager les mots de contrôle décryptés ("control word sharing " ou " card sharing "). Les récepteurs pirates, disponibles notamment en ligne, peuvent accéder en clair aux contenus encryptés sans carte à puce. Les FAI, qui utilisent principalement les réseaux filaires fermés, seraient par conséquent moins exposés au piratage que ne l'est GCP.
43. Selon GCP, le piratage conduit non seulement à la perte d'abonnés (le téléspectateur qui peut visionner des contenus gratuitement ne s'abonne plus) mais l'expose aussi au risque de perdre la confiance des détenteurs de droits quant à sa capacité à protéger leurs contenus.
44. La lutte contre le piratage conduit les opérateurs à mettre en place des mesures comme l'activation à distance de certaines fonctionnalités des décodeurs, ou la mise à jour logicielle soit sur les décodeurs, soit sur le signal.
45. S'agissant en particulier de la lutte contre le piratage de type "card sharing ", les actions entreprises incluent par exemple la mise en place de contremesures techniques (détection et changement de cartes), l'identification de points d'entrée des pirates et des serveurs alimentant les pirates, mesures auxquelles s'ajoutent la sensibilisation des abonnés et l'introduction d'actions contentieuses.
C. LES PARTIES
a) La société Aston France
46. La société Aston France10 est une PME dont la principale activité est la conception, fabrication et commercialisation de décodeurs et modules PCMCIA permettant la réception d'offres de télévision cryptées haute définition, diffusées par satellite. Elle a réalisé au total 1,6 million d'euros de chiffre d'affaires en 2014 et 2 millions d'euros en 201511.
47. Elle dispose de deux sites de production, en Corée et en France.
b) La société Groupe Canal Plus
48. La société GCP, créée le 24mai 200412, est une filiale à 100% de la société Vivendi SA, elle-même contrôlée par la société Bolloré SA depuis avril 2017.
49. GCP a une activité d'édition de chaînes, via sa filiale la Société d'Edition de Canal Plus et de chaînes thématiques, ainsi qu'une activité d'agrégation et de distribution d'offres de télévision payante.
50. Les principales plateformes de distribution des offres de GCP sont le satellite et les réseaux filaires. Le satellite représente la majorité des abonnés (50% environ de 2014 à 2016), mais le nombre d'abonnés satellite est en diminution (environ - 27 % entre 2009 et 2015), alors que le nombre d'abonnés sur le filaire a considérablement augmenté (+ 94 % environ entre 2009 et 2015).
51. L'ADSL, qui ne représentait qu'environ 30% du parc d'abonnés de GCP en 2014, revêt aujourd'hui une importance significative (plus de 60% des ventes de GCP, via les réseaux d'Orange, de SFR-Numericable, de Bouygues Télécom et de Free).
52. GCP a par ailleurs une activité d'édition de chaînes gratuites (chaînes C8, CNews et CStar), ainsi que des activités dans la télévision à la demande (offre des programmes "Canal Play"), la distribution de la télévision gratuite par satellite (via l'offre "TNT SAT") ou encore la fourniture d'un accès tous écrans et d'une offre OTT (portail "my Canal ").
53. GCP est également présent dans la distribution d'offres de télévision payante en dehors de France métropolitaine, que ce soit en outremer (Canal+ Overseas) ou à l'international (Canal+ Overseas en Afrique, K+ au Vietnam et nc+ en Pologne), ainsi que dans la production, l'acquisition, la distribution et les ventes internationales de films et de séries, par sa filiale Studiocanal.
54. En 2013, GCP a réalisé un chiffre d'affaires mondial consolidé de 5,31 milliards d'euros, en hausse de 5,9% par rapport à 2012. Son chiffre d'affaires a continué de progresser en 2014 et 2015 mais connaît un léger déclin depuis 2016.
D. LE COMPORTEMENT CONSTATÉ
55. Par courriers du 8 juillet 2014, GCP a informé chacun des 24 fournisseurs de décodeurs qui avaient conclu le contrat de partenariat Canal Ready de sa décision "d'arrêter la commercialisation des cartes seules permettant la réception de [ses] offres " sur les terminaux satellite labellisés Canal Ready au premier semestre 2015 ainsi que de sa décision de résilier le contrat de partenariat Canal Ready.
56. Aux termes de cette décision, la résiliation des contrats serait devenue effective le 15 octobre 2014, la production de terminaux labellisés Canal Ready étant interdite à compter de cette date. Un délai de six mois supplémentaires, soit jusqu'au 15 avril 2015, était toutefois accordé pour l'écoulement des stocks.
57. Parallèlement, la commercialisation des cartes seules aurait pris fin le 1er juillet 2015, et les droits liés à ces cartes le 1er juillet 2016.
58. GCP justifiait sa décision par le piratage de ses offres par voie de "card sharing ". Il indiquait d'ailleurs avoir déjà envisagé, fin 2007/début 2008 "d'arrêter les cartes seules pour des motifs sécuritaires. La mise en place du label Canal Ready a répondu à cette préoccupation. "13mais "Canal Ready n'a pas fait baisser le taux de piratage "14.
59. Il précisait que l'objectif poursuivi lors de la mise en place du label Canal Ready n'avait pas été atteint15, malgré " les recherches et efforts faits par [GCP] pour mieux sécuriser les cartes seules "16 car les spécifications techniques et sécuritaires mises en place à travers ce label s'étaient " [heurtées] à la diversité et à l'hétérogénéité des décodeurs labellisés Canal Ready "17. GCP indiquait enfin que " la diversité des fabricants de décodeurs est également un obstacle à la mise en place rapide de solutions lorsqu'une faille de sécurité est identifiée "18.
60. Selon ses estimations, sur la période 2012 à 2014, environ 86% des cas de piratage détectés provenaient des décodeurs carte seule et seulement 14 % des décodeurs loués par GCP.
61. La décision de GCP, qui a fait l'objet d'un recours en référé introduit par la société Aston, a néanmoins été suspendue par un arrêt de la Cour d'appel de Paris du 15 janvier 201519 dans l'attente de la présente décision.
II. La mise en œuvre de la procédure d'engagements
A. L'ÉVALUATION PRÉLIMINAIRE
1. L'APPLICABILITÉ DU DROIT DE L'UNION EUROPÉENNE
62. D'après la pratique décisionnelle de l'Autorité, qui se réfère aux lignes directrices20 de la Commission européenne, trois éléments doivent être réunis pour conclure à l'affectation du commerce entre États membres au sens des articles 101 et 102 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (ci-après "TFUE") : l'existence de "commerce entre États membres ", " l'affectation " du commerce et le " caractère sensible " de celle-ci.
63. En l'espèce, GCP offre des produits et services sur l'ensemble du territoire national et est susceptible de détenir une position dominante sur le marché de la distribution de la télévision payante en France métropolitaine (voir infra).
64. Les pratiques constatées couvrent l'ensemble du territoire métropolitain. À partir du 15 octobre 2014, aucun décodeur compatible avec l'offre payante de GCP n'était susceptible d'être fabriqué et à partir du 15 avril 2015, aucun décodeur de ce type n'aurait pu être commercialisé si la décision de GCP n'avait pas été suspendue par l'arrêt précité.
65. La décision prise par GCP d'arrêter la production et la commercialisation du label Canal Ready concerne directement les 24 fournisseurs de décodeurs qui ont conclu un accord de partenariat avec GCP, dont certains sont implantés à l'extérieur du territoire national.
66. S'agissant du caractère sensible de l'affectation du commerce entre États membres, la pratique constatée concerne GCP, acteur majeur du secteur de la télévision payante dont le chiffre d'affaires dépassait les 5milliards d'euros en France métropolitaine en 2014.
67. Ainsi, le commerce entre États membres est susceptible d'être affecté de manière sensible par les pratiques en cause. Ces dernières doivent donc être examinées au regard de l'article 102 du TFUE et de l'article L. 420-2 du Code de commerce.
2. LES MARCHÉS PERTINENTS ET LA POSITION DE GCP
a) Les marchés pertinents
Le marché des services de distribution de la télévision payante linéaire et de rattrapage
68. Comme l'indique la pratique décisionnelle de l'Autorité, ce marché est constitué des " lieux où se rencontrent la demande des abonnés, consommateurs de services télévisuels, et l'offre des distributeurs de télévision à accès payant. "
69. S'agissant du marché de produits, la pratique décisionnelle "distingue le marché de la télévision payante de celui de la télévision gratuite compte tenu, notamment, du mode de financement différent de ces deux types de télévision. En effet, la télévision payante établit une relation commerciale entre le distributeur de télévision et le téléspectateur, alors que la télévision gratuite n'établit une telle relation qu'entre le distributeur de télévision et les annonceurs publicitaires. Ces offres ne sont donc pas substituables aux yeux des consommateurs. "22. Elle n'établit pas de distinction entre les services de télévision selon la plateforme technique de distribution (satellite, hertzien, filaire), à l'exception de la télévision payante sur plateforme mobile.
70. Par ailleurs, l'Autorité considère que les services de télévision de rattrapage, qui sont associés à la télévision linéaire, ne font pas partie d'un marché distinct23.
71. En outre, au sein du marché de la télévision payante, la pratique décisionnelle de l'Autorité opère une distinction entre les offres des fournisseurs d'accès à internet dites "basiques " ou de "premier niveau " d'une part, disponibles sans coût supplémentaire pour les abonnés, et les offres dites de " second niveau " d'autre part, disponibles aux abonnés en contrepartie d'un abonnement supplémentaire.
72. Cette analyse a été reprise par l'Autorité dans sa décision n° 17-DCC-92 du 23 juillet 2017, relative au réexamen des injonctions de la décision n° 12-DCC-10024.
73. S'agissant du marché géographique, la pratique décisionnelle des autorités de concurrence considère que les marchés sont de dimension nationale, à l'exception pour la France des départements d'outre-mer25, approche également retenue par l'Autorité dans sa décision n° 17-DCC-92 précitée26.
Les marchés des décodeurs
Marché amont de la fourniture de décodeurs
74. Comme indiqué plus haut, une fois fabriqués, les décodeurs empruntent deux canaux de distribution distincts. Ils sont soit achetés aux fournisseurs par les distributeurs de télévision, qui les mettent ensuite à disposition de leurs abonnés, soit écoulés via les réseaux de distribution classiques et les réseaux spécialisés, qui les vendent directement aux consommateurs.
75. Dans son avis n° 06-A-13, le Conseil de la concurrence avait identifié un marché "de la vente des terminaux par les producteurs aux distributeurs de télévision payante. Ces derniers, à l'issue d'un appel d'offres, sélectionnent l'entreprise qui leur fournira ces décodeurs. "27.
76. Les éléments recueillis au cours de l'instruction confirment l'existence d'un marché pertinent de la vente de terminaux aux distributeurs de télévision payante. En effet, aujourd'hui encore, la quasi-totalité des distributeurs de télévision payante font fabriquer, par un ou plusieurs fabricant(s) sélectionné(s) à la suite d'une procédure d'appel d'offres, les décodeurs qu'ils mettent à disposition, à titre gratuit ou non, de leurs abonnés.
77. Ce marché peut être distingué du marché de la vente de décodeurs aux distributeurs généralistes ou spécialisés. En effet, chacun des marchés met en relation les fournisseurs de décodeurs avec des catégories de demandeurs distincts (distributeurs de télévision d'une part et distributeurs généralistes ou spécialisés d'autre part).
Marché aval de la commercialisation de décodeurs
78. Un décodeur est un équipement à la fois indispensable pour accéder au contenu proposé par les distributeurs de télévision (le consommateur ne peut recevoir le contenu sans décodeur) et dépendant de l'offre (sans contenu, le décodeur est inutile).
79. Tous les décodeurs ne permettent pas d'accéder à toutes les offres de télévision sur toutes les plateformes de diffusion. Le consommateur doit ainsi se procurer un décodeur compatible non seulement avec la plateforme de diffusion du signal mais aussi avec l'offre de contenu à laquelle il souhaite accéder.
80. S'agissant de la plateforme de diffusion, la Commission avait reconnu, dans ses décisions1999/CEBertelsmann/Kirch/Premiere et 1999/154/CE Deutsche Telekom/Beta Research du 27 mai 1998, la spécificité des décodeurs selon la plateforme de distribution utilisée, notant qu'il était nécessaire d'utiliser une " technologie différente selon que les signaux de télévision numériques sont diffusés par satellite ou par câble " et que concernant " la diffusion par satellite, le signal de télévision [...] [est reçu par l'abonné] " au moyen d'un décodeur conçu pour ce type de réception ".
81. En outre, en raison des différences quant aux zones de couverture des différentes plateformes (voir supraparagraphes 9 et 10), tous les consommateurs n'ont pas accès à toutes les offres via l'ensemble des modes de diffusion. Un consommateur peut, par exemple, se trouver en dehors des zones de couverture des réseaux filaires (qui correspondent aujourd'hui aux zones densément peuplées), ou ne pas disposer d'un accès à un débit suffisant lui permettant de recevoir la télévision via ces plateformes. Ainsi, près de 11 % des foyers métropolitains équipés au moins d'un téléviseur ne reçoivent la télévision que par la voie satellitaire.
82. Les consommateurs qui ont accès à plusieurs modes de diffusion et qui souhaitent basculer d'une plateforme à une autre peuvent, quant à eux, être contraints de changer de distributeur de télévision, et doivent, partant, changer d'équipement de réception, ce qui engendre des coûts qui peuvent être élevés28. L'ARCEP rappelle à ce titre qu'une réception satellitaire implique pour l'utilisateur un coût d'entrée (parabole, décodeurs) de plusieurs centaines d'euros29.
83. La situation décrite ci-dessus est néanmoins en cours d'évolution, la réception par internet de la télévision étant en essor rapide et la réception par satellite et TNT étant en déclin. Ainsi, comme le note l'Autorité dans sa décision n° 17-DCC-92, "parmi les plateformes de réception de la télévision payante, la télévision sur IP a fortement progressé depuis 2011 (+ 47 %), alors que la TNT payante a perdu 50 % d'abonnés et le satellite en a perdu 30 %. "30
84. Malgré cette tendance, il résulte des constats opérés aux paragraphes 80 à 82 que les décodeurs permettant une réception de contenu par voie satellitaire demeurent susceptibles à l'heure actuelle d'appartenir à un marché distinct des autres décodeurs.
85. S'agissant de l'offre de télévision, le décodeur entretient un lien étroit avec la distribution des contenus télévisuels (voir infra), qui a une incidence sur le degré de substituabilité des décodeurs qu'un consommateur peut choisir pour accéder à une offre donnée.
86. Ainsi, sur la plateforme satellitaire, un consommateur souhaitant accéder aux contenus distribués par GCP peut choisir soit un décodeur Le Cube, soit l'un des décodeurs labellisés Canal Ready. Il pourra également se voir mettre à disposition un décodeur par l'un des FAI, dans les cas où ces derniers mettent à disposition de leurs abonnés une réception satellitaire pour pallier une insuffisance de débit sur les réseaux filaires. Dans ce cas, le consommateur n'ayant pas un accès suffisant à un réseau filaire ne choisit pas sa plateforme de diffusion, devant obligatoirement recourir au satellite, et doit avoir souscrit à une offre multiservice de base du FAI31.
87. Il résulte de l'ensemble de ces constatations qu'il pourrait être considéré que seuls les décodeurs permettant une réception de contenu par voie satellitaire et compatibles avec l'offre ou les offres du ou des opérateurs pour laquelle ou lesquelles ils ont été développés sont susceptibles aujourd'hui d'appartenir au même marché.
88. Les décodeurs concernés étant compatibles avec l'offre de GCP disponible en France métropolitaine, le marché géographique de ces produits est également susceptible d'être de dimension métropolitaine.
La connexité des marchés
89. Dans son avis n° 06-A-13précité32, le Conseil de la concurrence avait estimé que "même si[les décodeurs] sont nécessaires à la réception de la télévision par satellite, ils appartiennent à des marchés pertinents voisins mais distincts de celui des offres de télévision. "
90. Cette position est confirmée par les éléments recueillis au cours de l'instruction.
91. À l'égard des consommateurs, l'achat d'un décodeur Canal Ready n'a lieu ni au même endroit, ni au même moment, ni auprès du même offreur que la souscription à l'abonnement de contenu choisi34. Par ailleurs, GCP commercialisant ses abonnements sans décodeur, leur location constitue un service distinct de l'abonnement lui-même35.
92. Cependant, les décodeurs, qui sont conçus et fabriqués spécifiquement pour accéder au contenu distribué par GCP, sont nécessaires à la réception des chaines de télévision.
93. Les clients de GCP sur le marché de la télévision payante sont également clients sur le marché de la commercialisation des décodeurs, dans la mesure où l'abonné a la possibilitéde se procurer son propre décodeur compatible en complément de l'abonnement proposé par GCP. De plus, la marque Canal Ready, qui indique à l'acheteur qu'un décodeur permet de recevoir le contenu distribué par GCP, constitue un élément de différenciation des autres décodeurs du point de vue de l'abonné.
94. Enfin, la maîtrise par GCP de la mise à disposition du contenu ainsi que des conditions techniques que doivent respecter les décodeurs vendus dans le commerce et permettant d'y accéder témoigne de l'influence que GCP est susceptible d'exercer sur le marché de la commercialisation des décodeurs compatibles avec ses offres.
95. Dans ces conditions, l'existence de liens de connexité entre les deux marchés concernés paraît établie.
b) La position de GCP sur le marché de la distribution de la télévision payante
96. L'Autorité a estimé dans différentes décisions, et notamment, en dernier lieu, la décisionn° 14-MC-01 du 30 juillet 2014 relative à la demande de mesures conservatoires présentée par la société BeIN Sports France dans le secteur de la télévision payante, que GCP avait une position dominante sur le marché de la distribution de la télévision payante. Dans sa décision n° 17-DCC-92 précitée, elle a, par ailleurs, relevé que sur ce marché, les offres de second niveau des FAI exerçaient une pression concurrentielle sur les offres de GCP. L'Autorité a toutefois constaté que, bien qu'en baisse sur les cinq dernières années, la position de GCP était toujours significative et supérieure à celle de ses concurrents. En effet, la part de marché en valeur de GCP se situait entre 70 et 80 % entre 2013 et 2015 et entre 50 et 60 % en volume sur la même période36.
97. Il apparaît ainsi que, nonobstant les évolutions récentes du marché de la distribution de la télévision payante linéaire et de rattrapage, GCPy détient toujours une position dominante.
3. LES PRÉOCCUPATIONS DE CONCURRENCE
98. La jurisprudence a reconnu à plusieurs reprises qu'une entreprise en position dominante sur un marché donné pouvait abuser de cette position sur un marché distinct mais voisin de ce marché. Il a, ainsi, été jugé que constituait un abus de position dominante " le fait, pour une entreprise détenant une position dominante sur un marché donné, de se réserver, sans nécessité objective, une activité auxiliaire ou dérivée sur un marché voisin [...]". 37
99. Par ailleurs, la jurisprudence considère comme abusif le comportement d'une entreprise en position dominante qui tend "à enlever à l'acheteur ou à restreindre dans son chef la possibilité de choix en ce qui concerne ses sources d'approvisionnement ou à barrer l'accès du marché aux concurrents "38.
100. Enfin, l'entreprise en position dominante peut faire valoir que le comportement qui lui est reproché est objectivement justifié. Il lui incombe dans ce cas de démontrer le bien-fondé d'une telle justification objective, au moyen d'arguments et d'éléments de preuve convaincants. 39
101. En l'espèce, le courrier de résiliation du 8 juillet 2014 envoyé par GCP à l'ensemble des fabricants de décodeurs Canal Ready formalise sa décision unilatérale de mettre un terme, de manière définitive, au système carte seule, tant sur le volet de la commercialisation des cartes que sur celui de la fabrication et de la ventede décodeurs compatibles avec ces cartes.
102. La rupture des contrats de partenariat signifie notamment que :
- GCP ne fournit plus les spécifications techniques nécessaires à la conception et fabrication de décodeurs compatibles avec l'offre de contenu payant de GCP (voir supra) ;
- GCP n'autorise plus la fabrication et la vente de ces décodeurs.
103. Or, sur le marché amont desdécodeurs compatibles avec les offres de GCP, les spécifications techniques sont indispensables à l'activité des fabricants dans la mesure où, depuis la mise en place des partenariats en 2009, les décodeurs qui ne les intègrent pas ne sont pas compatibles avec les offres payantes distribuées par GCP40.
104. Par ailleurs, la décision de GCP de stopper la commercialisation des cartes seules met nécessairement un terme à l'activité des fabricants sur le marché concerné, dès lors que la vente aux réseaux de grande distribution et aux réseaux spécialisés de décodeurs compatibles avec les offres payantes de GCP dépend de la mise à disposition effective par GCP des cartes aux abonnés41.
105. La pratique de GCP conduit ainsi nécessairement, à terme, à l'indisponibilité de ces décodeurs sur le marché aval, et, par conséquent, est également susceptible d'affecter les consommateurs finals actuels et potentiels, notamment en les privant de la possibilité de choisir leur décodeur.
106. Les abonnés actuels équipés d'un décodeur satellitaire labellisé Canal Ready sont directement touchés par la décision de GCP en ce qu'elle prévoyait l'arrêt de la commercialisation des cartes seules à partir du 1er juillet 2015 et, in fine, la coupure des droits rattachés aux cartes à partir du 1er juillet 2016.
107. S'agissant des abonnés potentiels, à la suite de l'arrêt du système carte seule, tout nouveau consommateur ayant accès aux offres de GCP exclusivement par satellite ne serait plus en mesure de choisir son produit dans le commerce parmi une large gamme de décodeurs compatibles, présentant des fonctionnalités diverses et vendus à des prix variés.
108. Certes, une entreprise, y compris lorsqu'elle détient une position dominante, conserve la possibilité de modifier son modèle stratégique ou son plan d'affaires, dès lors que, comme rappelé ci-avant (paragraphe 100), ces changements n'ont pas un objet anticoncurrentiel et peuvent être justifiés par des motifs légitimes. Toutefois, un changement rapide et brutal peut, dans certaines circonstances, être considéré comme constitutif d'un abus de position dominante au sens des articles 102 TFUE et L. 420-2 du Code de commerce, en fonction notamment de l'appréciation portée sur la justification d'une telle décision, les conditions dans lesquelles elle est mise en œuvre et ses effets sur les concurrents ou sur les tiers.
109. En l'espèce, GCP, ainsi que rappelé supra, invoque l'ampleur du piratage qu'il subit du fait des failles sécuritaires du système carte seule. Cet argument doit être pris en considération, les fraudes dénoncées n'ayant pas été contestées et le coût pour GCP étant important. Cependant, eu égard aux constats opérés ci-avant, il apparaît nécessaire que l'arrêt du système carte seule soit accompagné de mesures propres à dissiper les interrogations que le projet initial de GCP avait pu susciter.
B. LES ENGAGEMENTSPROPOSÉS
1. LES ENGAGEMENTS PROPOSÉS PAR GCP LE 4 AVRIL 2018
110. À titre principal, GCP s'engage à ouvrir la possibilité de concevoir et commercialiser des décodeurs compatibles avec son offre, linéaire et non linéaire, sous réserve du téléchargement d'un " module d'accès logiciel ".
111. À ce titre, GCP s'engage à garantir la disponibilité de ce module permettant à l'abonné d'accéder aux offres proposées par GCP via une connexion internet sans avoir à louer un décodeur auprès de GCP et à ne pas s'opposer à l'usage de ce module dans tout décodeur tiers si ce dernier utilise le système d'exploitation pour lequel le module a été développé.
112. Par ailleurs, GCP s'engage à ne pas s'opposer indument à ce qu'une société tierce communique aux utilisateurs finaux la possibilité d'installer le module dans un décodeur afin d'accéder aux offres proposées par GCP dans le respect des termes de la licence de marque décrivant les termes et conditions d'utilisation de la marque "myCanal ".
113. GCP indique qu'à compter de la date d'effet des engagements, il informera les industriels fabricants des matériels Canal Ready de sa décision d'arrêter dans les trois mois de la date d'effet des engagements le label et la commercialisation de ses offres en carte seule. Il précise que les industriels ne pourront plus commercialiser de décodeurs Canal Ready à l'expiration de ce délai.
114. GCP propose également une série de mesures visant à accompagner les abonnés utilisant un décodeur Canal Ready dans la transition vers d'autres modes de réception.
115. GCP s'engage à maintenir le signal à l'égard des abonnés actuels utilisant un décodeur Canal Ready, pendant une période de 7 mois à compter de la date de la décision. En outre, ils auront la possibilité de résilier leur abonnement avec effet immédiat (abonnements résiliables tous les mois) ou de continuer à recevoir les offres de GCP via un décodeur fourni par GCP, un tiers ou sur un module d'accès logiciel. Ils seront enfin informés par GCP des modifications dans une communication qui doit intervenir dans le mois de la décision.
116. GCP s'engage enfin à leur proposer une subvention pour la mise à disposition d'un décodeur Canal à hauteur de 50 % au moins des frais d'une année de mise à disposition.
117. Les engagements sont en vigueur jusqu'au 31 décembre 2021.
2. LES OBSERVATIONS RECUEILLIES
118. Le 5 avril 2018, l'Autorité a transmis à la partie saisissante et à la DGCCRF et mis en ligne sur son site internet la proposition d'engagements de GCP.
119. Seule la DGCCRF a formulé des observations. Aucune observation n'a été transmise par le saisissant ou dans le cadre du test de marché.
120. Les observations de la DGCCRF portent sur les engagements relatifs aux marchés amont et aval de la fourniture et de la commercialisation de décodeurs ainsi que sur l'articulation temporelle entre les engagements amont et aval.
121. S'agissant des engagements relatifs au marché amont, la DGCCRF estime qu'il conviendrait de clarifier si l'engagement relatif à l'utilisation d'un module logiciel dans tout dispositif de décodage tiers, qui nécessite une connexion bidirectionnelle par internet, permet de répondre aux préoccupations de concurrence dans les zones géographiques où la télévision payante est exclusivement desservie par le satellite et dans lesquelles le débit internet est insuffisant.
122. S'agissant des engagements relatifs au marché aval, l'engagement relatif à la subvention accordée par GCP aux abonnés Canal Ready les inciterait à se tourner vers le matériel de GCP au détriment des décodeurs concurrents. Il serait donc nécessaire que GCP s'engage à ne pas proposer une telle offre avant que les décodeurs compatibles tiers puissent être proposés aux consommateurs.
123. La DGCCRF considère enfin que l'articulation temporelle entre les engagements amont et aval n'est pas suffisamment précise pour assurer la disponibilité de décodeurs satellitaires concurrents en temps utile. Ainsi, il faudrait laisser aux fabricants un délai raisonnable pour concevoir et commercialiser leurs produits afin que ceux-ci soient disponibles sur le marché au moment où les abonnés seront avertis de la fin du label.
3. LES ENGAGEMENTS PROPOSÉS PAR GCP EN SÉANCE
124. Lors de la séance du 27 juin 2018, GCP a proposé d'apporter certaines modifications à ses engagements initiaux.
125. Au regard des observations formulées en séance, notamment par le commissaire du Gouvernement, GCP a ainsi proposé la suppression de l'engagement relatif à la mise à disposition, auprès des abonnés recevant une offre via un décodeur Canal Ready, d'un dispositif de décodage GCP subventionné à hauteur de 50 % des frais d'une année de mise à disposition.
126. Par ailleurs, afin d'assurer le suivi des engagements, GCP a proposé de communiquer annuellement à l'Autorité un rapport sur leur exécution, le premier un an après la date de la décision et le dernier en décembre 2021.
127. Une version amendée des engagements a été transmise le 6 juillet 2018.
III. Discussion
A. SUR L'APPRÉCIATION DES ENGAGEMENTS AMENDÉS
128. À titre liminaire, l'Autorité constate qu'un maintien prolongé du système carte seule paraît incompatible avec l'impératif légitime de résorption du piratage de contenu subi par GCP.
129. La proposition de GCP de permettre à tout fabricant tiers de fabriquer et commercialiser des décodeurs incluant un module logiciel permettant de recevoir les offres distribuées par GCP confirme qu'il est possible de maintenir sur le marché des produits tiers compatibles tout en répondant aux préoccupations liées à la sécurité des contenus qu'il distribue.
130. Cette possibilité apparaît, en outre, à la fois plus flexible que celle existante, car elle sera accessible aux fabricants tiers en l'absence de tout partenariat avec GCP, et plus ouverte, car elle permet également l'accès aux contenus non-linéaires de GCP.
131. Grâce à la licence de marque, les industriels pourront indiquer, dans le cadre de la commercialisation de leurs matériels de réception, que leurs décodeurs permettent de recevoir le contenu distribué par GCP.
132. Par ailleurs, la dernière version des engagements proposée par GCP en séance assure une meilleure articulation entre la fin du système "carte seule " et la disponibilité de matériels alternatifs compatibles, sans pour autant artificiellement privilégier les décodeurs offerts en location par GCP.
133. Les engagements permettent en outre d'offrir rapidement des alternatives aux consommateurs, notamment ceux qui seront contraints de changer d'équipement à la suite de l'arrêt du système carte seule. Ils accompagnent la transition du secteur vers des produits connectés donnant accès à plus de services que ne le permettaient les décodeurs Canal Ready, notamment le replay et la vidéo à la demande, et permettant également d'accéder à plus de contenus grâce à une combinaison de modes de réception.
134. Les engagements constituent donc une réponse équilibrée aux préoccupations de concurrence, en encadrant les conditions de sortie du système "carte seule " tout en prenant en compte les contraintes liées à la lutte contre le piratage de contenu. Ils prennent également en considération les évolutions du secteur, du point de vue tant technologique que des usages des consommateurs.
135. L'Autorité considère ainsi que les engagements de GCP, dans leur version finale du
27 juin 2018, répondent aux préoccupations de concurrence exprimées et présentent un caractère substantiel, crédible et vérifiable. Il y a donc lieu de les accepter, de les rendre obligatoires et de clore la procédure.
B. SUR LES OBSERVATIONS DU COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT
136. S'agissant tout d'abord de la question de l'indisponibilité de décodeurs tiers dans les zones blanches, dans lesquelles le contenu distribué par GCP n'est accessible que par le satellite, l'Autorité note que, même si ces zones existent encore aujourd'hui, elles sont en constante diminution, eu égard à l'accès croissant des foyers à l'internet via les réseaux filaires. De plus, le plan gouvernemental France très haut débit déployé parallèlement aux engagements permet de réduire ces zones progressivement, de sorte que le nombre de foyers cantonnés à la plateforme satellitaire est en constante diminution. Par ailleurs, le parc d'abonnés utilisant un décodeur Canal Ready décroît constamment. Ainsi, selon GCP, seuls subsisteraient 66 000 abonnés Canal Ready, dont 12000seulementne seraient pas éligibles à une réception internet suffisante pour recevoir la télévision par ce biais.
137. Durant la période transitoire, les consommateurs situés dans ces zones pourront choisir de louer un décodeur satellitaire auprès de GCP dans l'attente de disposer d'une connexion internet permettant un débit suffisant pour recevoir le contenu via le matériel de réception de leur choix. Ces foyers pourront également choisir d'accéder à l'internet haut débit par des moyens alternatifs proposés récemment sur le marché jusqu'à ce qu'ils puissent y avoir accès via les réseaux filaires42.
138. Quant à la question de la disponibilité sur le marché de décodeurs hybrides en temps utile, l'Autorité constate d'une part que certains fabricants qui avaient conclu un contrat de partenariat Canal Ready avec GCP fabriquent déjà de tels décodeurs43, d'autre part que les fabricants concernés par la décision de GCP ont, d'ores et déjà, bénéficié de plusieurs années supplémentaires leur permettant soit de continuer à commercialiser leurs produits en l'état, soit de concevoir des produits adaptés aux nouvelles technologies et aux exigences de la lutte contre le piratage sur la plateforme satellitaire. En outre, dès la date de la décision, les fabricants pourront indiquer que leurs produits permettent de recevoir les offres de GCP en utilisant la marque "myCanal ".
139. Au regard de ces différents éléments, l'Autorité considère que les engagements initialement proposés par GCP répondent de manière suffisante aux observations du commissaire du Gouvernement.
DÉCISION
Article 1er : L'Autorité de la concurrence accepte les engagements pris par la société Groupe Canal Plus, qui font partie intégrante de la décision à laquelle ils sont annexés. Ces engagements sont rendus obligatoires à compter de la date de notification de la décision.
Article 2 : La procédure enregistrée sous le numéro 14/0074 F est close.
NOTES :
1 Ce résumé a un caractère strictement informatif. Seuls font foi les motifs de la décision numérotés ci-après.
2 Il est à noter que les contenus télévisuels sont également accessibles via la distribution dite OTT ("over the top ") qui est "un moyen technique de diffusion émergent et stratégique ayant pour principe d'utiliser " une infrastructure technique qui est celle de l'internet ouvert " et donc d'offrir un service qui n'est pas géré par le FAI. " (Décision n° 17-DCC-92 du 22 juin 2017).
3 S'agissant de l'offre TNT SAT, il est nécessaire d'installer une parabole orientée vers la position orbitale 19,2° Est et décodeur labellisé TNT SAT. L'offre Fransat nécessite quant à elle une parabole orientée vers la position 5 ° Ouest et un décodeur agréé Fransat.
4 Environ 5 % des abonnés disposent d'un décodeur satellitaire fourni par Orange ou SFR aux foyers inéligibles la télévision par ADSL ou fibre, cote M 1234 (VNC F2215).
5 Cotes M 1074 (VNC M 1092), M 1455, M 1584 (VNC M 1601).
6 Avant la création du label, l'accès aux offres de GCP via les décodeurs "carte seule "était déjà possible par l'achat d'un terminal certifié Viaccess dans lequel l'abonné insérait une carte fournie par CGP (voir cotes F 1236, F 1245 et F 1077-1078). Aston indique à ce titre qu'il "commercialisait une gamme de décodeurs
7 Cote M 1487 (VNC M 1658) et M 1072.
8 Cote M 561 et M 1199 et suivantes.
9 Troisième version du système Médiaguard développé par GCP, devenu Nagravision.
10 Société par actions simplifiée, numéro d'immatriculation 392 802039, R.C.S. de Bobigny.
11 Selon les dernières données du dossier. Environ 75 % de son chiffre d'affaires était réalisé en France en 2014 et 2015.
12 Société anonyme à directoire et conseil de surveillance, numéro d'immatriculation 420 624 777, R.C.S. de Nanterre.
13 Cote M 1076.
14 Cote M 1073 (VNC M 1091).
15 Cotes M 1072 et M 1487 (VNC M 1658).
16 Cote M 1487 (VNC M 1658).
17 Cote M 1488 (VNC M 1659).
18 CotesM 1489 (VNC M 1660), F 1013 ; voir également cote F 1060 (VNC F 1138).
19 La demande en référé d'ASTON avait dans un premier temps été rejetée le 17 octobre 2014 par le tribunal de commerce.
20 Communication de la commission Lignes directrices relative à la notion d'affectation du commerce figurant aux articles 81 et 82 du traité (2004/C 101/07). Cf. point 18.
21 Décision n° 12-DCC-100 de l'Autorité de la concurrence du 23 juillet 2012 relative à la prise de contrôle exclusif de TPS et Canal Satellite par Vivendi et Groupe Canal Plus, paragraphe 556.
22 Décision n° 17-DCC-92du 22 juin 2017 portant réexamen des injonctions de la décision n° 12-DCC-100du 23 juillet 2012 relative à la prise de contrôle exclusif de TPS et Canal Satellite par Vivendi SA et Groupe Canal Plus ; Décision n° 12-DCC-100, paragraphes 108 et suivants ; Décision n° 14-MC-01 du 30 juillet 2014 relative à la demande de mesures conservatoires présentée par la société BeIN Sports France dans le secteur de la télévision payante, paragraphes 147 et suivants ; Décision n° 10-D-32 du 16 novembre 2010 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la télévision payante, paragraphes 244 et suivants.
23 Décision n° 17-DCC-92 précitée, paragraphe 296.
24 Voir en particulier les paragraphes 242 et 298.
25 Décision n° 10-D-32 du 16 novembre 2010 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la télévision payante, paragraphe 254 ; décision n° 14-DCC-15 précitée, paragraphe 105.
26 Paragraphes 241 et 242.
27 Avis relatif à l'acquisition des sociétés TPS et Canalsatellite par Vivendi Universal et Groupe Canal Plus, paragraphe 225.
28 Autorité de la concurrence, décision n° 10-D-32du 16 novembre 2014 relative à des pratiques dans le secteur de la télévision payante, paragraphe 294.
29 Cote F 2015.
30 Décision n° 17-DCC-92, paragraphe 32.
31 Cette souscription peut comprendre des produits et services que ne souhaite pas nécessairement le consommateur.
32 Avis relatif à l'acquisition des sociétés TPS et Canalsatellite par Vivendi Universal et Groupe Canal Plus, paragraphe 225.
33 Paragraphe 170.
34 Les décodeurs Canal Ready permettent en effet aux abonnés de recevoir les chaines gratuites de la TNT et de souscrire à une offre payante de GCP au moment de leur choix.
35 Ainsi, indépendamment du coût de l'abonnement, qui est identique, que l'abonné loue un décodeur auprès de GCP ou non, la location d'un décodeur est facturée6 euros par mois à l'abonné, qui doit également déposer une garantie d'un montant de 75 euros.
36 Décision n° 17-DCC-92, paragraphes 453 et suivants.
37 Tribunal, affaire T-83/91, Tetra Pak International SA/Commission des Communautés européennes, Recueil 1994 p. 755, point 115.
38 CJUE, affaires 85/76, Hoffmann-La Roche & Co./Commission, Recueil 1979, p. 461.
39 Voir notamment CJUE, affaire C-95/04 P British Airways/Commission, Recueil 2007 p. I-2331, point 69 et Tribunal, affaire T-301/04 Clearstream/Commission, Recueil 2009, p. II-3155, point 185 ; Conseil de la concurrence, décision n° 06-D-18 du 28 juin 2006 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la publicité cinématographique, paragraphe 244.
40 Techniquement, cette compatibilité comporte notamment la mise en place d'un appairage entre la carte seule et le décodeur, qui consiste à "mettre en place une clé matérielle entre le " chipset " du décodeur et la carte seule " (cote F 1056 et VNC F 1134).
41 Le CSA " relève également que la commercialisation de cartes seules constitue un élément incontournable de l'utilité de la labellisation Canal Ready ". Il ajoute que " la poursuite de la commercialisation de cartes seules après l'arrêt de la labellisation Canal Ready ne présente un intérêt que pour les foyers déjà équipés d'un décodeur labellisé [...] " (cote M 1774).
42 Il s'agit notamment des boitiers 4G qui utilisent les antennes de réseau mobile et l'internet par le satellite.
43 Voir par exemple https://www.strong.tv/fr/products/ip-tv-receivers/srt2401.