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Décisions

CA Versailles, 12e ch., 11 septembre 2018, n° 17-04657

VERSAILLES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Garage Val de Saône (SARL)

Défendeur :

Renault Retail Group (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Leplat

Conseillers :

M. Ardisson, Mme Muller

Avocats :

Mes Lafon, Buisson, Debray, Assemat

CA Versailles n° 17-04657

11 septembre 2018

Exposé du litige

Par acte du 21 février 2005, la société Garage Val de Saône (ci-après société GVS) a acquis un fonds de commerce de garage automobile situé à Couzon au Mont d'Or (69).

Par acte du 1er février 2005, la société GVS a conclu un contrat d'agent Renault Service avec la société RFA Lyon Alpes Auvergne, aux droits de laquelle se trouve la société Renault Retail Group (ci-après société RRG).

Par courrier du 7 novembre 2011, la société RRG a résilié le contrat d'agent conclu avec la société GVS, au motif du non-respect par cette dernière de ses obligations contractuelles, la durée du préavis étant fixée à 8 mois. Cette résiliation faisait suite à un litige opposant la société GVS à l'un de ses clients, mais impliquant la société RRG, à la suite d'un remplacement de moteur, la société GVS ayant indiqué sur la facture deux références, dont une référence Renault, alors que le moteur était fourni par une société tierce.

Par courrier du 15 novembre 2011, la société GVS a sollicité une médiation qui a été refusée par la société RRG le 5 décembre 2011.

Par acte du 3 octobre 2012, la société GVS a fait assigner la société RRG devant le Tribunal de commerce de Lyon, en contestant la résiliation du contrat d'agent, sollicitant paiement de diverses indemnités. Par jugement du 29 octobre 2013, le Tribunal de Lyon s'est déclaré incompétent au profit du Tribunal de commerce de Nanterre. Par arrêt du 10 avril 2014, la Cour d'appel de Lyon a confirmé l'incompétence territoriale du Tribunal de Lyon.

Parallèlement, la société Renault SAS a fait citer la société GVS devant le Tribunal correctionnel de Lyon pour usage illicite de marque (postérieurement à la résiliation du contrat). Par jugement du 18 juin 2015, ce tribunal l'a déclarée coupable, la condamnant au paiement d'une amende de 10 000 euros. La société GVS a en outre été condamnée, solidairement avec ses gérants à payer à la société Renault SAS la somme de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts. Par arrêt du 22 novembre 2017, la Cour d'appel de Lyon a confirmé le jugement correctionnel sur la culpabilité, l'infirmant toutefois sur la peine en réduisant celle-ci à une amende de 5 000 euros, ordonnant à titre de peine complémentaire la destruction des objets portant la marque ou la signalétique Renault. Les dispositions civiles du jugement ont été confirmées.

Par jugement du 12 mai 2017, le Tribunal de commerce de Nanterre a :

- dit que la société Renault a régulièrement résilié le contrat d'agent conclu avec la société Garage Val de Saône,

- débouté la société Garage Val de Saône de ses demandes,

- dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande de cessation d'utilisation des enseignes,

- condamné la société Garage Val de Saône à payer à la société Renault la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour concurrence déloyale et publicité trompeuse,

- condamné la société Garage Val de Saône au paiement de la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles, ainsi qu'aux dépens.

Prétentions des parties

Vu l'appel interjeté le 19 juin 2017 par la société GVS.

Vu les dernières écritures signifiées le 23 mai 2018 par lesquelles la société GVS demande à la cour, au visa du contrat, de l'article 1104 du Code civil, et de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce, de :

- Débouter la société RRG de la fin de non-recevoir soulevée.

- Déclarer l'appel recevable,

- Infirmer dans son intégralité le jugement rendu le 17 mai 2017.

Statuant à nouveau :

A titre principal :

- Dire que la résiliation prononcée par la société RRG est nulle et de nul effet.

- Constater en conséquence que le contrat d'Agent Renault est toujours en cours.

- Condamner la société RRG à rétablir la société GVS dans l'intégralité des termes du contrat; et notamment l'accès aux banques de données, ainsi qu'aux pièces détachées et à l'ensemble des garanties du réseau Renault, le tout sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard dans les 8 jours de la signification de l'arrêt à intervenir.

Subsidiairement :

- Dire que le préavis de 8 mois alloué à la société GVS est insuffisant.

- Dire que la responsabilité de la société RRG est pleinement engagée.

- Condamner la société RRG à payer à la GVS une indemnité de préavis complémentaire de 16 mois, soit la somme de 624 713 euros, outre une indemnité complémentaire équitable de 468 535 euros.

En tout état de cause :

- Débouter la société RRG de l'ensemble de ses demandes,

- Condamner la société RRG à payer à la société GVS la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Condamner la société RRG aux entiers dépens dont distraction conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Vu les dernières écritures signifiées le 1er mars 2018 au terme desquelles la société RRG demande, pour l'essentiel, à la cour de :

A titre principal,

• constater que la Cour d'appel de Versailles n'a pas de pouvoir juridictionnel pour statuer sur les demandes de GVS : (i) relatives à une prétendue violation des dispositions du règlement 1400/2002 et (ii) et à une prétendue violation de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce.

En conséquence, déclarer irrecevables l'ensemble des demandes formées sur ce fondement par GVS.

A titre subsidiaire,

• confirmer le jugement en ce qu'il a en ce qu'il a dit que RRG a régulièrement résilié le contrat,

A titre subsidiaire,

• constater que GVS n'est pas fondé à soutenir qu'il n'aurait pas bénéficié d'un préavis suffisant au regard de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce, et en conséquence, débouter GVS de ses demandes à ce titre.

A titre plus subsidiaire,

• constater que GVS a continué à utiliser les enseignes et la marque Renault, s'octroyant unilatéralement quatre années de contrat supplémentaires,

• constater que GVS ne justifie ni de son préjudice ni le lien de causalité entre le préjudice qu'il allègue et les fautes reprochées à la société RRG, et en conséquence, débouter GVS de ses demandes à ce titre.

A cet égard, confirmer le jugement en ce qu'il a débouté GVS de ses demandes relatives à l'indemnité de préavis complémentaire et à l'indemnité complémentaire équitable.

Sur l'appel incident formé par RRG

• ordonner à GVS de cesser immédiatement d'utiliser les enseignes Renault et plus généralement de faire toute référence à son appartenance au réseau Renault, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,

• condamner GVS à verser à RRG la somme de 206 600 euros à titre de dommages et intérêts pour concurrence déloyale et publicité trompeuse,

En tout état de cause,

• débouter GVS de l'ensemble de ses demandes.

• condamner la société GVS au paiement de la somme de 10 000 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel.

• condamner la société GVS en tous dépens dont distraction conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du Code de procédure civile, renvoie aux conclusions déposées par les parties et au jugement déféré.

Motifs de la décision

1 - Sur la recevabilité des demandes formées par la société Garage Val de Saône

Il résulte de l'article R. 311-3 du Code de l'organisation judiciaire que, sauf disposition particulière, la cour d'appel connaît de l'appel des jugements des juridictions situées dans son ressort.

Il résulte de l'article L. 420-7 du Code de commerce que les litiges relatifs à l'application des règles contenues dans les articles L. 420-1 et L. 420-5 ainsi que dans les articles 81 et 82 du traité instituant la Communauté européenne et ceux dans lesquels ces dispositions sont invoquées sont attribués (...) aux juridictions civiles ou commerciales dont le siège et le ressort sont fixés par décret en Conseil d'Etat. Ce décret détermine également le siège et le ressort de la ou des cours d'appel appelées à connaître des décisions rendues par ces juridictions.

Il résulte de l'article L. 442-6 du même Code que les litiges relatifs à l'application du présent article (notamment ceux relatifs à la rupture brutale de relations commerciales établies) sont attribués aux juridictions dont le siège et le ressort sont fixés par décret.

Il résulte enfin des articles R. 420-5 et D. 442-3 du Code de commerce que la cour d'appel compétente pour connaître des décisions rendues par les juridictions spécialisées (en application des articles L. 420-7 et L. 442-6 précités) est celle de Paris.

En l'espèce, il apparaît que les dispositions des articles L. 420-7 et L. 442-6 du Code de commerce - attribuant, pour certains litiges, compétence exclusive à des juridictions spécialisées - n'ont pas été invoquées en première instance, de sorte que le tribunal de commerce n'avait aucun motif de déclarer irrecevables les demandes formées devant lui. Ce n'est qu'en cause d'appel que les parties ont invoqué ces dispositions, se fondant désormais cumulativement sur les dispositions de droit commun en matière contractuelle et sur les dispositions spéciales.

La recevabilité de l'appel formé devant la Cour de Versailles n'est pas discutée, en ce que celle-ci connaît habituellement des jugements du Tribunal de commerce de Nanterre, situé dans son ressort.

La société RRG soulève toutefois l'irrecevabilité des demandes formées par la société GVS sur le fondement des articles L. 420-7 et L. 442-6 précités, au motif que seule la Cour d'appel de Paris a compétence pour statuer sur ces fondements, la Cour de Versailles ne disposant d'aucun pouvoir juridictionnel à ce titre.

La société GVS répond que ces demandes seraient recevables en ce que l'appelant peut toujours invoquer des moyens nouveaux, ce qui n'est toutefois pas contesté.

La Cour d'appel de Versailles étant dépourvue de tout pouvoir juridictionnel pour statuer sur l'application des articles L. 420-7 et L. 442-6 du Code de commerce, les demandes formées sur ces fondements seront déclarées irrecevables.

La présente cour garde toutefois le pouvoir de statuer sur l'application des dispositions de droit commun en matière contractuelle, de sorte que les demandes formées sur ce fondement seront déclarées recevables. Il convient donc de statuer sur celles-ci.

2 - Sur la demande principale de nullité de la résiliation du 7 novembre 2011

Il résulte de l'article 9.1 du contrat d'agent que : " le présent contrat est conclu pour une durée indéterminée. La partie qui désirerait y mettre fin devra en prévenir l'autre par lettre recommandée, en respectant un préavis de 6 mois. Le concessionnaire devra spécifier les raisons objectives et transparentes de la décision, conformément au règlement CE 1400/2002, afin qu'il puisse être vérifié que la résiliation n'est pas intervenue à cause de pratiques qui ne peuvent faire l'objet de restrictions dans le cadre dudit règlement. "

Le règlement CE 1400/2002 sur lequel se fonde la société GVS pour solliciter la nullité de la résiliation n'est pas expressément visé par l'article L. 420-7 du Code de commerce, de sorte qu'il peut être appliqué par la présente juridiction, même si elle ne constitue pas une juridiction spécialisée.

Au regard du principe de liberté contractuelle, nul n'est tenu de se maintenir dans les liens d'un contrat à durée indéterminée qui, sous réserve du respect des conditions de forme et de délai, doit pouvoir être rompu à tout moment sans qu'il soit nécessaire de justifier d'un motif particulier, sauf à démontrer que la faculté de résiliation présente un caractère abusif.

En l'espèce, la résiliation du contrat conclu avec la société GVS est ainsi motivée : " conformément aux termes du contrat, nous vous précisons que notre décision de résiliation a été prise en raison de l'irrespect de vos obligations contractuelles liées à l'article 5.5 de votre contrat ". Le premier juge a considéré que la résiliation était régulière au regard des dispositions de l'article 9.1 du contrat.

La société GVS soutient que les raisons invoquées pour justifier la résiliation ne sont pas " objectives et transparentes " en ce que le prétendu non-respect des obligations contractuelles n'est pas explicité, ce qui équivaut à une absence de motif, ajoutant que ce non-respect correspond en fait à une rupture pour faute prévue à l'article 9.2 du contrat, alors même qu'il n'est justifié d'aucune faute qui lui soit imputable. Elle affirme que le motif allégué est un " motif bidon ", et que le réel motif de la résiliation serait une réorganisation du réseau susceptible de correspondre à des pratiques anti-concurrentielles contraires au règlement CE 1400/2002.

La société RRG soutient que la motivation de la résiliation est suffisante, son obligation à ce titre ayant pour seul but de permettre une vérification de l'absence d'objet anti-concurrentiel. Elle ajoute que le juge n'a pas le pouvoir de contrôler le bien-fondé de la résiliation. Elle indique que les raisons de la rupture sont connues de la société GVS dès lors qu'il est fait référence à l'article 5.5 du contrat aux termes duquel l'agent Renault doit indiquer aux utilisateurs le fournisseur des pièces de rechange utilisées.

La seule obligation qui est faite à la partie qui entend résilier le contrat sur le fondement de l'article 9.1 est de fournir les "raisons objectives et transparentes" de sa décision permettant de contrôler qu'elles n'entraînent pas de restrictions de concurrence. Il n'y a pas lieu à d'autres contrôles, notamment du bien-fondé des motifs de résiliation, leur simple existence matérielle - exclusive de restrictions de concurrence - étant ainsi suffisante pour justifier de la régularité de la décision.

Dès lors que la lettre de résiliation fait référence à l'article 5.5 du contrat (relatif à l'obligation d'indiquer le fournisseur des pièces de rechange utilisées), l'irrespect des obligations contractuelles allégué par la société RRG est parfaitement clair et transparent, ainsi que l'a décidé le premier juge. Ce motif est matériellement exact ainsi qu'il ressort des éléments du dossier, dès lors que la société GVS a fait usage, sur certaines factures, de références de pièces Renault alors qu'il s'agissait en réalité de pièces provenant d'autres fournisseurs.

La société RRG ayant choisi de faire application des dispositions relatives à la résiliation simple, et non pas de celles relatives à la résiliation pour faute, il importe peu que le motif allégué - tenant à l'indication erronée du fournisseur des pièces de rechange - dont la matérialité n'est pas contestée, soit ou non bien fondé. L'indication d'un motif de résiliation matériellement exact ne permet pas, en outre, de caractériser l'existence d'un abus dans la faculté de résiliation. Il n'est enfin nullement établi que ce motif puisse constituer une restriction de concurrence.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a considéré que la résiliation était régulière au regard des dispositions de l'article 9.1 du contrat.

3 - Sur la demande subsidiaire relative à la responsabilité contractuelle de la société RRG

La société GVS soutient à titre subsidiaire que la société RRG a, d'une part manqué à son obligation d'exécution de bonne foi du contrat, d'autre part omis de respecter un délai de préavis suffisant.

* Sur le délai de préavis

Comme il a déjà été démontré, la présente cour est dépourvue de tout pouvoir juridictionnel pour statuer sur le fondement de l'article L. 442-6 relatif à la rupture brutale de relations commerciales établies.

Sur le fondement des seules dispositions contractuelles, il était prévu que le délai de préavis était de 6 mois, ce qui a été parfaitement respecté par la société RRG qui a même accordé à la société GVS un délai supérieur, à savoir 8 mois. Il n'est ainsi justifié d'aucun manquement contractuel de la société RRG.

* Sur le manquement à l'obligation de bonne foi dans l'exécution du Contrat

Il résulte de l'article 1134 du Code civil, en sa version applicable en l'espèce, que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites, et qu'elles doivent être exécutées de bonne foi. La société GVS soutient que la société RRG a manqué à son obligation de bonne foi en invoquant un " motif bidon, artificiel et non pertinent " à l'appui de sa demande de résiliation.

Il convient de rappeler ici le principe de liberté contractuelle qui permet à l'un des contractants de rompre un contrat à durée indéterminée sans avoir à justifier d'un motif dès lors qu'il respecte les conditions de forme et de délai. Ainsi qu'il a déjà été rappelé, il importe peu que le motif allégué soit ou non fondé, dès lors qu'il correspond à une réalité matérielle, ce qui est le cas en l'espèce.

Il n'est ainsi justifié d'aucun manquement de la société RRG à ses obligations contractuelles, de sorte que les demandes indemnitaires formées par la société GVS seront rejetées. Le jugement sera confirmé de ce chef.

4 - Sur les demandes reconventionnelles formées par la société RRG

4-1 - Sur la demande de cessation d'utilisation des enseignes Renault

Il résulte de l'article 7.3 du contrat d'agent Renault qu'à la cessation de son contrat, sur simple demande du concessionnaire ou du constructeur, l'agent Renault s'engage à remettre ou rétrocéder immédiatement et à faire disparaître toutes les inscriptions, objets ou documents portant une marque déposée par Renault. A défaut, et notamment pour éviter toute possibilité de publicité mensongère, le constructeur et le concessionnaire sont autorisés à prendre toutes mesures y compris judiciaires destinées à supprimer tout risque de confusion sur la situation réelle vis-à-vis de la marque.

La société RRG demande que la société GVS soit condamnée à déposer les enseignes Renault, et à cesser toute référence, directe ou indirecte à l'appartenance au réseau, et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Le premier juge avait rejeté cette demande au motif que la juridiction pénale était déjà saisie d'une demande de destruction des éléments constitutifs de l'usage illicite de la marque.

La société GVS se borne à soutenir avoir légitimement continué à utiliser l'ensemble des signes de la marque Renault " puisqu'elle estime que la résiliation de son contrat d'agent Renault est nulle ".

La résiliation du contrat étant régulière, la société RRG est fondée en sa demande de cessation d'utilisation des enseignes et de toute référence directe ou indirecte à l'appartenance au réseau, de sorte qu'il sera fait droit à cette demande sous astreinte, comme il sera précisé au dispositif.

4-2 - Sur la demande indemnitaire fondée sur les actes de concurrence déloyale

Il résulte de l'article 9.8 du contrat que : " à l'expiration de son contrat, l'agent Renault s'abstiendra de tous actes de concurrence déloyale à l'égard des membres du réseau Renault ou susceptibles de porter atteinte à l'image de la marque ".

Par courrier du 19 septembre 2012, la société RRG a rappelé à la société GVS qu'elle devait cesser d'utiliser les signes distinctifs et documents afférents à la marque, indiquant que l'usage persistant de ces derniers portait atteinte à ses droits, la mettant en demeure de faire cesser cet usage.

La société RRG fait valoir que l'usage, sans droit, des signes d'appartenance au réseau est constitutif d'actes de concurrence déloyale en ce qu'il s'agit d'une manière de détourner les clients du réseau Renault, ce que la société GVS a expressément reconnu. Elle sollicite réparation de son préjudice qu'elle évalue à la somme de 206 600 euros, soit 100 euros par jour depuis la fin du préavis, le 7 juillet 2012.

La société GVS soutient avoir "légitimement continué à utiliser l'ensemble des signes de la marque Renault puisqu'elle estime que la résiliation de son contrat est nulle et de nul effet". Elle estime que la preuve de l'existence d'un préjudice n'est pas rapportée par la société RRG, en ce qu'il n'est pas démontré que les anciens clients auraient confié leurs véhicules à un autre établissement si elle avait cessé de faire usage de la marque, rappelant que la société RRG ne produit pas ses comptes, ajoutant que le mode de calcul de cette société " ne correspond à rien".

Le fait pour la société GVS de continuer de faire usage des signes distinctifs de la marque postérieurement à la résiliation de son contrat caractérise des actes de concurrence déloyale qui sont à l'origine d'un trouble commercial certain, en ce que ces actes placent cette société dans une situation anormalement favorable par rapport à ses concurrents, outre le fait que ces actes portent atteinte à la marque.

Tenant compte, certes de l'absence d'éléments comptables de la société RRG, mais également de la période particulièrement longue au cours de laquelle les actes de concurrence ont été exercés (depuis juillet 2012), la cour estime pouvoir évaluer le préjudice subi à la somme de 30 000 euros, réformant le jugement de ce chef.

Sur l'article 700 du Code de procédure civile :

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a alloué une somme de 1 500 euros à la société RRG au titre de ses frais irrépétibles. Il est équitable de lui allouer une indemnité complémentaire de 3 000 euros au titre des frais exposés en cause d'appel.

Par ces motifs : LA COUR, statuant par arrêt contradictoire, Déclare irrecevables les demandes formées sur le fondement des articles L. 420-7 et L. 442-6 du Code de commerce, Confirme le jugement déféré en ce qu'il a - sur le fondement des dispositions contractuelles - constaté la régularité de la résiliation du contrat, débouté la société Garage Val de Saône de ses demandes, la condamnant en outre au paiement de frais irrépétibles et des dépens, Le Réforme pour le surplus, Et statuant à nouveau, Condamne la société Garage Val de Saône à cesser immédiatement d'utiliser les enseignes Renault et de faire référence à son appartenance à ce réseau, et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard, cette astreinte commençant à courir 15 jours après la signification du présent arrêt pour une durée de 3 mois, Condamne la société Garage Val de Saône à payer à la société Renault Retail Group la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des actes de concurrence déloyale, Rejette toutes autres demandes, Condamne la société Garage Val de Saône à payer à la société Renault Retail Group la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne la société Garage Val de Saône aux dépens d'appel, avec droit de recouvrement direct, par application de l'article 699 du Code de procédure civile.