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Décisions

Cass. com., 26 septembre 2018, n° 17-17.743

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Dart France (SARL)

Défendeur :

Buonomo

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Riffault-Silk

Rapporteur :

Mme Laporte

Avocat général :

M. Debacq

Avocats :

SCP Jean-Philippe Caston, SCP Garreau, Bauer-Violas, Feschotte-Desbois

Grenoble, ch. com., du 9 mars 2017

9 mars 2017

LA COUR : - Sur le moyen unique : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 9 mars 2017), que la société Dart France (la société Dart) ayant résilié pour faute grave le contrat d'agence commerciale qui la liait à M. Buonomo, celui-ci, contestant avoir commis une telle faute, l'a assignée en paiement d'une indemnité de cessation de contrat ;

Attendu que la société Dart fait grief à l'arrêt de faire droit à cette demande alors, selon le moyen : 1°) que la faute grave de l'agent commercial, exclusive d'indemnité compensatrice de rupture, est celle qui porte atteinte à la finalité commune du mandat d'intérêt commun et rend impossible le maintien du lien contractuel ; qu'en considérant, pour imputer la rupture du contrat d'agent commercial à la société Dart et exclure la faute grave de M. Buonomo, agent commercial, que la société Dart invoquait de " simples griefs certes justifiés " qui ne caractérisaient toutefois pas la faute grave reprochée à l'agent commercial, dès lors que les obligations respectives des parties n'avaient pas été formalisées par écrit, qu'aucun courrier préalable n'avait fait état de difficultés susceptibles de justifier de la rupture et qu'il était au contraire constant que la société Dart avait modifié, sans son accord préalable, la rémunération de l'intéressé à la baisse à compter du 1er mars 2009, la cour d'appel, qui s'est déterminée par des motifs inopérants et impropres à écarter toute faute grave de M. Buonomo, a violé les articles L. 134-12 et L. 134-13 du Code de commerce ; 2°) que la faute grave de l'agent commercial, exclusive d'indemnité compensatrice de rupture, est celle qui porte atteinte à la finalité commune du mandat d'intérêt commun et rend impossible le maintien du lien contractuel ; qu'au demeurant, en retenant ainsi, pour imputer la rupture du contrat d'agent commercial à la société Dart et exclure la faute grave de M. Buonomo, que la société Dart invoquait de " simples griefs certes justifiés " qui ne caractérisaient toutefois pas la faute grave reprochée à l'agent commercial, dès lors que les obligations respectives n'avaient pas été formalisées par écrit, qu'aucun courrier préalable n'avait fait état de difficultés susceptibles de justifier de la rupture et qu'il était au contraire constant que la société Dart avait modifié, sans son accord préalable, la rémunération de l'intéressé à la baisse à compter du 1er mars 2009, sans vérifier précisément si ces " simples griefs certes justifiés " n'étaient pas de nature à porter atteinte à la finalité commune du mandat d'intérêt commun et s'ils ne rendaient pas impossible le maintien du lien contractuel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 134-12 et L. 134-13 du Code de commerce ; 3°) que la faute grave de l'agent commercial, exclusive d'indemnité compensatrice de rupture, est celle qui porte atteinte à la finalité commune du mandat d'intérêt commun et rend impossible le maintien du lien contractuel ; qu'au demeurant encore, en retenant parmi ces " simples griefs certes justifiés " insusceptibles de caractériser la faute grave reprochée à l'agent commercial, que l'envoi de courriers ou courriels de clients mécontents quant à la trop faible fréquence des passages de M. Buonomo dans leur enseigne et la demande directe par une centrale d'achat à la société Dart de suivi avec des modalités spécifiques étaient insuffisants en ce que la société Dart ne justifiait pas avoir répercuté ces différentes doléances à son agent commercial, quand cette prétendue absence de répercussion des doléances ne dispensait pas l'agent de remplir ses obligations, spécialement celles tenant à la prospection de clientèle et au suivi de celle-ci, de sorte que la faute grave était caractérisée, la cour d'appel a violé les articles L. 134-12 et L. 134-13 du Code de commerce ; 4°) que la faute grave de l'agent commercial, exclusive d'indemnité compensatrice de rupture, est celle qui porte atteinte à la finalité commune du mandat d'intérêt commun et rend impossible le maintien du lien contractuel ; que de même, en retenant que la seule baisse des résultats de l'agent commercial, alléguée par la société Dart et non contestée, n'était pas mieux de nature à justifier d'une faute grave de ce dernier, dès lors qu'il était constant qu'elle avait embauché un salarié pour prospecter sur le même secteur que son agent et n'avait jamais émis le moindre reproche à ce sujet à son agent commercial ou mis en demeure celui-ci de respecter un quelconque objectif, sans rechercher précisément si, compte tenu du comportement fautif de l'agent, qui avait porté atteinte à la finalité commune du mandat d'intérêt et rendu impossible le maintien du lien contractuel, la société Dart n'avait pas été contrainte de recruter un commercial pour pallier ces manquements, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 134-12 et L. 134-13 du Code de commerce ; 5°) que la faute grave de l'agent commercial, exclusive d'indemnité compensatrice de rupture, est celle qui porte atteinte à la finalité commune du mandat d'intérêt commun et rend impossible le maintien du lien contractuel ; qu'en retenant pareillement, pour finir, que M. Buonomo contestait avoir eu recours à des sous-agents commerciaux, que la société Dart France n'en justifiait par aucun élément, qu'il n'était pas contesté par l'agent commercial de l'achat de produits de la société Dart France en vue de leur revente et que celle-ci ne contestait pas avoir eu connaissance de la commercialisation de ses produits par son agent commercial, y compris de produits concurrents, mais que l'intéressé n'était pas tenu par une clause d'exclusivité et que les ventes litigieuses ne pouvaient par suite constituer un quelconque manquement à la loyauté, sans rechercher si M. Buonomo, tenu en sa qualité d'agent commercial d'une obligation de loyauté envers sa mandante, n'avait pas manqué à cette obligation en commercialisant des produits, y compris concurrents, sans l'avoir en outre informée préalablement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 134-12 et L. 134-13 du Code de commerce ;

Mais attendu que l'arrêt relève que seuls quelques clients ont fait état de leur mécontentement quant à la trop faible fréquence des passages de M. Buonomo, sans que cela lui soit reproché par la société Dart, que la baisse de résultats de celui-ci ne caractérise pas, à elle seule, une faute grave, dès lors que la mandante, qui ne s'en est pas plainte avant la rupture, ne lui a pas fixé d'objectif et a embauché un salarié pour prospecter dans son secteur, et qu'aucun manquement de M. Buonomo à son devoir de loyauté ne peut être retenu puisque la société Dart connaissait l'activité de revente de ses produits par l'agent, lequel n'était pas tenu par une obligation d'exclusivité; qu'en l'état de ces appréciations, la cour d'appel, qui s'est référée à l'absence de contrat écrit et de lettre de dénonciation des griefs imputés à l'agent préalablement à la rupture, aux seules fins de constater que M. Buonomo n'avait pu violer des obligations auxquelles il ne s'était pas engagé ni se voir reprocher des manquements qui avaient été tolérés, et qui, après les avoir analysés, a retenu, soit qu'ils n'étaient pas établis, soit qu'ils ne caractérisaient pas une faute grave, a pu statuer comme elle a fait ; que le moyen n'est pas fondé ;

Par ces motifs : rejette le pourvoi.