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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 3 octobre 2018, n° 17-20760

PARIS

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Souchon (ès qual.), Acara (SA)

Défendeur :

Rent A Car (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouthon Vidilles

Conseillers :

Mmes Comte, Durand

Avocats :

Mes Diesbecq, Molinie, Sainton

T. com. Paris, du 25 févr. 2010

25 février 2010

Faits et procédure

Suivant contrat du 15 décembre 1999, la société Acara, créée en 1993, a intégré le réseau de franchise de la société Rent A Car. La société Acara a développé son activité et a exploité onze fonds de commerce sous contrats de franchise lesquels ont été prorogés le 2 février 2004 jusqu'au 31 décembre 2011, la prorogation ayant un effet rétroactif à la date de cessation des effets des contrats de franchise échus, telle que fixée dans chacun des contrats.

Par exploit du 6 avril 2005, la société Acara et son dirigeant, M. Catheline, ont assigné la société Rent A Car devant le tribunal de commerce de Paris afin d'obtenir la nullité des contrats de franchise souscrits et voir ordonner une expertise pour chiffrer les préjudices directs et indirects qu'ils auraient subis.

Par jugement du 11 avril 2005, le Tribunal de commerce d'Evry a ouvert une procédure de redressement judiciaire au profit de la société Acara et a nommé Mme Du Buit en qualité de représentant des créanciers et M. Azevou en qualité d'administrateur judiciaire.

Par jugement du 13 juin 2005, le Tribunal de commerce d'Evry a arrêté un plan de cession totale de l'entreprise Acara au profit de la société EDA moyennant le prix de 400 000 euros, et a désigné Mme Du Buit en qualité de commissaire à l'exécution du plan de cession.

Le 8 mai 2006, Mme Du Buit, ès qualités, est intervenue à l'instance en cours et a sollicité la condamnation de la société Rent A Car à lui payer des dommages et intérêts correspondant au passif de la procédure collective.

Par jugement du 29 mai 2006, la mission du commissaire à l'exécution du plan a été prolongée sans limitation de durée.

Par ordonnance du 18 février 2009, le Tribunal de commerce d'Evry a désigné M. Marc Catheline comme mandataire ad hoc pour représenter Acara.

Par jugement du 25 février 2010, le Tribunal de commerce de Paris, sous le régime de l'exécution provisoire, a :

- dit tant la SA Acara, ès qualités de mandataire ad hoc que M. Marc Catheline agissant à titre personnel, irrecevable en leurs demandes pour défaut de qualité à agir, et les déboute de toutes leurs demandes,

- dit Mme Marie Dominique Du Buit, ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de cession de la SA Acara, irrecevable en son intervention volontaire du 8 mai 2006 à la présente instance, et le déboutera de toutes ses demandes,

- débouté la SA Rent A Car de sa demande de dommages et intérêts,

- condamné in solidum M. Marc Catheline et Mme Marie Dominique Du Buit, ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de cession de la SA Acara, à payer à la SA Rent A Car 20 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, déboutant pour le surplus,

- dit les parties mal fondées en leurs demandes autres, plus amples ou contraires au présent jugement

et les en déboute,

- condamné in solidum M. Marc Catheline et Mme Marie Dominique Du Buit, ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de cession de la SA Acara aux dépens du présent jugement dont ceux à recouvrer par le greffe liquidés à la somme de 128,81 euros TTC (dont TVA 20,89 euros). Le 1er avril 2010, Mme Du Buit, ès qualités, a interjeté appel de ce jugement.

Le 26 avril 2010, M. Catheline a, à son tour, interjeté appel dudit jugement, au nom de la société Acara et en son nom personnel

Par arrêt du 4 mars 2015, la Cour d'appel de Paris a :

- dit n'y avoir lieu de rejeter les conclusions de M. Catheline du 14 octobre 2014, statuant sur la recevabilité des demandes de M. Catheline formées à titre personnel, statuant à nouveau,

- déclaré irrecevable M. Catheline en ses demandes,

- débouté M. Catheline de ses demandes en réparation,

- confirmé le jugement pour le surplus,

- débouté la société Rent A Car de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- condamné in solidum Mme Du Buit, ès qualités, la société Acara et M. Catheline à payer à la société Rent A Car la somme de 20 000 euros à titre d'indemnité pour frais irrépétibles engagés en appel,

- condamné in solidum Mme Du Buit, ès qualités, la société Acara et M. Catheline aux dépens d'appel qui seront recouvrés avec le bénéfice des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

La Cour d'appel de Paris a notamment considéré que le jugement du 29 mai 2006 ayant prorogé la mission de Mme Du Buit, ès qualités, qui n'apparaissait sur l'extrait Kbis de la société Acara, n'était pas opposable à la société Rent A Car et que le commissaire à l'exécution du plan n'avait pas le pouvoir de continuer l'instance au-delà du 13 juin 2006.

Par jugement du 4 mai 2015, le Tribunal de commerce d'Evry a désigné Mme Du Buit en qualité de mandataire ad hoc de la société Acara et lui a donné pour mission de poursuivre l'instance engagée à l'encontre de la société Rent A Car, représenter la société Acara et poursuivre les répartitions engagées par le commissaire à l'exécution du plan.

Par ordonnance du Président du 24 novembre 2015, le Tribunal de commerce d'Evry a désigné M. Souchon en remplacement de Mme Du Buit pour exécuter le mandat conféré par le jugement du 4 mai 2015.

Par un arrêt du 21 juin 2017, la Cour de cassation a cassé et annulé, mais seulement en ce qu'il a déclaré Mme Du Buit, ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de cession de la société Acara, irrecevable en son intervention volontaire et a rejeté ses demandes de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 4 mars 2015 par la Cour d'appel de Paris et, en conséquence, remis sur ce point la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant le dit arrêt, les renvoyant devant la Cour d'appel de Paris autrement composée.

La Cour de cassation a considéré que le défaut d'accomplissement de la formalité de la mention au registre du commerce étant sans influence sur l'existence et l'étendue des pouvoirs que Mme Du Buit détenait en vertu du jugement du 29 mai 2006 ayant prorogé la durée pendant laquelle elle était investie de tous les pouvoirs conférés par la loi au commissaire à l'exécution du plan.

LA COUR

Vu les dernières conclusions de M. Alain-François Souchon, agissant en qualité de mandataire ad-hoc de la société Acara en vertu de l'ordonnance rendue par le Président du Tribunal de commerce d'Evry le 24 novembre 2015, en remplacement de Mme Du Buit préalablement désignée à ces fonctions par jugement du Tribunal de commerce d'Evry du 4 mai 2015, appelant, notifiées le 18 juin 2018, par lesquelles il est demandé à la cour, au visa de l'article 1240 (anciennement 1382) du Code civil, de :

- déclarer M. Souchon, ès qualités, recevable et bien fondé en ses demandes, fins et conclusions,

- infirmer le jugement du Tribunal de commerce de Paris du 25 février 2010 en ce qu'il a :

* débouté Mme Du Buit, ès qualités, de ses demandes,

* condamné Mme Du Buit, ès qualités, au paiement, d'une somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- rejeter les pièces n° 48 et 50 de la société Rent A Car, statuant à nouveau,

- dire que l'inexécution par la société Rent A Car de ses obligations contractuelles envers son franchisé, la société Acara, sont constitutifs d'une faute,

- dire que cette faute a directement provoqué la cessation des paiements de la société Acara, causant ainsi un préjudice à la collectivité des créanciers, qu'il convient de réparer, par la condamnation de la société Rent A Car au paiement de dommages et intérêts d'un montant égal au passif admis, en conséquence,

- condamner la société Rent A Car à payer à M. Souchon, ès qualités, la somme de 5 380 667,60 euros, à titre de dommages et intérêts, en réparation du préjudice subi collectivement par les créanciers de la société Acara,

- condamner la société Rent A Car à payer à M. Souchon, ès qualités, la somme de 20 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner la société Rent A Car aux entiers dépens, dont distraction au profit du cabinet Racine, avocat ;

Vu les dernières conclusions de la société Rent A Car, intimée, notifiées le 14 juin 2018, par lesquelles il est demandé à la cour, au visa des dispositions des articles 122, 123 et 2224 du Code de procédure civile, 90 du décret du 27 décembre 1985, 1134, 1147, 1304, 1382 du Code civil, 480 du Code de procédure civile et 1355 du Code civil, de :

s'agissant des fins de non-recevoir,

- dire irrecevable pour défaut de pouvoir et de qualité à agir M. Souchon, ès qualités de mandataire ad hoc de la Société Acara, aux motifs que :

* l'ordonnance du 24 novembre 2015, désignant M. Souchon en remplacement de Mme Du Buit, ne pouvait être rendue au visa de l'article 90 du décret du 27 décembre 1985, lequel requiert comme condition d'application l'existence d'instances en cours auxquelles est partie l'administrateur ou le représentant des créanciers et qui se sont terminées lorsque leur mission a pris fin, conditions inexistantes au cas d'espèce,

* que si les dispositions de l'article 90 du décret du 27 décembre 1985 étaient jugées applicables, M. Souchon ne pouvait être désigné par ordonnance rendue par le président du Tribunal de commerce d'Evry, lequel était incompétent, mais exclusivement par le Tribunal de commerce d'Evry, en remplacement de Mme Du Buit, désignée par jugement du Tribunal de commerce du 4 mai 2015 (RG n° 2015L00962),

* que les dispositions de l'article L. 812-6 du Code de commerce ne sont pas applicables à la désignation de M. Souchon, et qu'en tout état de cause, si elles l'étaient, ne pouvaient donner lieu alors qu'à une désignation de M. Souchon par le tribunal et non par ordonnance du président, en tout état de cause,

- dire Mme Du Buit prescrite en son action en dommages et intérêts, telle qu'engagée par conclusions d'intervention volontaire n° 3 du 31 mars 2009, par lesquelles celle-ci a opéré substitution de fondement juridique et opté pour le fondement délictuel,

en conséquence,

- dire irrecevable M. Souchon, ès qualités, en son appel et le débouter de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

subsidiairement, si la cour de céans venait à déclarer recevable à agir M. Souchon, ès qualités,

- dire que, par arrêt de la Cour d'appel de Paris du 4 mars 2015 (RG n° 12/15293) et arrêt de la chambre commerciale de la Cour de cassation du 21 juin 2017 (n° de pourvoi 15-20.101), pourvus de l'autorité de chose jugée, les griefs et manquements invoqués par M. Souchon, ès qualités, ont d'ores et déjà été jugés et écartés par les juridictions précitées,

en tout état de cause,

- dire que, par arrêt de la Cour d'appel de Paris du 4 mars 2015 (RG n° 12/15293) dont la motivation n'a pas été censurée par la Cour de cassation, dans le cadre de l'examen du pourvoi incident formé par M. Catheline pour manque de base légale, il a définitivement été statué sur l'absence de lien de causalité entre les manquements contractuels invoqués par le franchisé à l'égard de la société Rent A Car et l'origine des difficultés de la société Acara par la cour d'appel (autre formation), en tout état de cause,

- dire particulièrement mal fondé M. Souchon, ès qualités, en ses demandes formulées au visa de l'article 1240 du Code civil, à défaut de justifier de fautes contractuelles imputables à la société Rent A Car et d'un préjudice certain, et en relation directe avec les manquements reprochés,

- le débouter de sa demande de rejet des pièces n° 48 et 50 de la société Rent A Car, en conséquence,

- dire et juger mal fondé M. Souchon, ès qualités, en son appel et le débouter de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

en tout état de cause,

- condamner M. Souchon, ès qualités de mandataire ad hoc de la société Acara, à payer à la société Rent A Car les sommes de :

* 100 000 euros de dommages et intérêts à titre de procédure abusive et demandes fantaisistes et infondées,

* 40 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner M. Souchon, ès qualités de mandataire ad hoc la société Acara, aux entiers dépens, lesquels seront recouvrés dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile ;

Sur ce

Sur les fins de non-recevoir

Sur le défaut de pouvoir et de qualité à agir de M. Souchon, ès qualités de mandataire ad hoc de la société Acara

La société Rent A Car soutient que la désignation de Mme Du Buit, ès qualités de mandataire ad hoc, par jugement du 4 mai 2015 au visa de l'article 90 du décret du 27 décembre 1985 est " inopérante " puisque la condition requise par cet article, à savoir l'existence d'une instance auquelle est partie l'administrateur ou le représentant des créanciers, n'était pas réunie, et qu'il en est de même de la désignation subséquente de M. Souchon aux lieu et place de Mme Du Buit. Mais, M. Souchon, ès qualités, réplique à juste titre que la société Rent A Car est irrecevable à contester devant la cour d'appel de renvoi saisie du fond, sa désignation en tant que mandataire ad hoc par ordonnance du Président du Tribunal de commerce d'Evry rendue le 24 novembre 2015 en remplacement de Mme Du Buit préalablement désignée à cette fonction par jugement du Tribunal de commerce d'Evry du 4 mai 2015, dès lors que ces désignations successives n'ont fait l'objet d'aucun recours.

Cette exception d'irrecevabilité sera donc rejetée.

Sur la prescription de l'action en dommages et intérêts

La société Rent A Car soutient que l'action en dommages et intérêts de Mme Du Buit, ès qualités de commissaire à l'exécution du plan, est prescrite par application de l'article 2224 du Code civil, les manquements contractuels qu'elle invoque étant connus depuis l'année 2000 de sorte que l'action initiée en mai 2006 sur le fondement contractuel était prescrite depuis 2005 et par suite, la demande d'indemnisation suivant conclusions d'intervention volontaire du 31 mars 2009 qui ont opéré substitution de fondement juridique en optant pour le fondement délictuel, le sont également.

M. Souchon, ès qualités, réplique que l'action de Mme Du Buit, ès qualités, se prescrivait initialement par 10 ans, que l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008 a eu pour effet de faire courir un nouveau délai de 5 ans et que ce n'est donc que le 18 juin 2013, que les faits auraient été prescrits. Il ajoute que l'intervention volontaire de Mme Du Buit, ès qualités, par conclusions du 9 mai 2006 a interrompu le délai de prescription de l'action qu'elle soit sur un fondement contractuel ou délictuel.

L'action en responsabilité civile, qu'elle soit contractuelle ou délictuelle, exercée par Mme Du Buit, ès qualités, relève du régime de la prescription quinquennale - anciennement décennale - de l'article L. 110-4 du Code de commerce instaurée par la loi du 17 juin 2008 laquelle est applicable à compter du 19 juin 2008, date de son entrée en vigueur, conformément aux dispositions transitoires prévues à l'article 26-II, dès lors que le délai de prescription décennale n'était pas expiré à cette date, et ce, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.

Par ailleurs, selon l'article 2241 du Code civil, " La demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion " et l'article 2242 prévoit que " l'interruption résultant de la demande en justice produit ses effets jusqu'à l'extinction de l'instance ".

Par suite de l'ensemble de ces éléments, à supposer même que Mme Du Buit, ès qualités, ait eu connaissance, en 2000, des manquements qu'elle invoque, voire en 1997 pour certains, elle les a dénoncés par conclusions d'intervention volontaire du 9 mai 2006, soit dans le délai de prescription qu'elles ont interrompu, peu important à cet égard la substitution de fondement juridique dans les conclusions du 31 mars 2009.

L'exception de prescription sera donc rejetée.

Sur l'autorité de la chose jugée

La société Rent A Car soutient que M. Souchon, ès qualités, invoque les mêmes griefs que ceux invoqués par M. Catheline qui a été débouté par arrêt de la Cour d'appel de Paris du 4 mars 2015 au motif qu'il ne justifiait pas que la société Rent A Car ait commis des manquements contractuels, confirmé par arrêt de la Cour de cassation du 21 juin 2017 de sorte que la chose a été définitivement jugée.

M. Souchon, ès qualités, réplique à juste titre que ses demandes ne se heurtent pas à l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 4 mars 2015, ni à celui rendu par la Cour de cassation le 21 juin 2017 qui ont rejeté les moyens et demandes de M. Catheline, dès lors que les trois éléments cumulatifs exigés par l'article 1351 du Code civil ne sont pas réunis.

En effet, par application de l'article 1351 ancien, devenu 1355 du Code civil, compte tenu de l'absence d'identité entre M. Catheline et la société Acara, ce qui a été définitivement jugé à l'égard du premier n'est pas opposable à la seconde qui a été déclarée irrecevable à agir.

Par suite, le moyen tiré de l'autorité de la chose jugée sera rejeté et les demandes formées par M. Souchon, ès qualités, seront déclarées recevables.

Sur le fond

Sur la demande de rejet des pièces 48 et 50

M. Souchon, ès qualités, sollicite le rejet des pièces 48 et 50 en ce qu'elles sont couvertes par la confidentialité par application de l'article L. 611-15 du Code de commerce.

Mais la société Rent A Car fait valoir, à raison, que ces dispositions ne sont pas applicables dès lors que ces deux courriers sont échangés entre des parties à la présente procédure. En effet, ces deux pièces constituées respectivement d'un courrier du 18 août 2004 adressé par la société Acara à la société Rent A Car et d'un courrier du 10 mai 2005 écrit par la société Rent A Car à M. Avezou, ès qualités d'administrateur judiciaire, sont nécessaires à l'exercice des droits de la défense qui justifie leur communication dans une instance qui oppose les mêmes parties. Par suite, M. Souchon, ès qualités, sera débouté de sa demande de rejet de pièces.

Sur les griefs

M. Souchon, ès qualités, fait grief au franchiseur d'avoir conduit son franchisé à la cessation de paiements, puis de l'avoir mis dans l'impossibilité de poursuivre son activité afin d'assurer son redressement et d'apurer son passif, par ses manquements généralisés et répétés à ses obligations essentielles d'assistance et de conseil, de contrôle, d'entretien de la marque et de loyauté. Il lui reproche plus précisément :

- de ne pas avoir tenté d'adapter son savoir-faire et d'assister son franchisé pour l'aider à surmonter les difficultés qu'il rencontrait

M. Souchon, ès qualités, soutient principalement que le modèle de franchise était inadapté en ce que les charges de publicité et les redevances de franchise étaient disproportionnées et que le système de primes octroyées en fonction des quotas de commandes de véhicules engendrait une dépendance du franchisé qui, pour équilibrer ses résultats au regard notamment de l'augmentation des charges, était incité à acquérir davantage de véhicules pour les obtenir.

Mais, la fixation et la perception des charges et redevances dues par le franchisé pendant la durée du contrat ne relèvent pas de l'obligation d'assistance commerciale et technique incombant au franchiseur. En outre, il n'est pas justifié que ces charges et redevances aient été anormales et non conformes aux usages de la franchise. Il est établi que la société Acara a bénéficié en 2000 et 2001 d'un taux de redevance plus faible que celui des autres franchisés du réseau (3,5 % au lieu de 6 % pour les redevances de franchise et de 1,5 % au lieu de 2 % pour les charges publicitaires, soit un total de 5 % au lieu de 8 %) puis en 2002 et 2003, des taux de 4,5 et 1,5 %, soit au total de 6 %, et enfin par avenant du 2 février 2004, d'un taux de 3 % " à titre exceptionnel " et d'un taux de 1,5 %, soit un total de 4,5 %. Par ailleurs, il ne ressort d'aucun élément que les augmentations des charges de détention du parc automobile induites par l'augmentation du parc automobile aient été anormales. Il n'est pas contesté que la société Acara ne s'approvisionnait en véhicules référencés par la société Rent A Car qu'à hauteur de 20 % de ses acquisitions. Par conséquent, 80 % de ses primes de volume étaient reversées par les concessionnaires auxquels elle s'adressait et non par la société Rent A Car. Enfin, il apparaît qu'elle s'était volontairement engagée dans l'acquisition de véhicules excédant ses besoins d'exploitation à seule fin de bénéficier de l'octroi de primes et générer ainsi de la trésorerie. Par ailleurs, la société Acara n'ayant intégré le réseau de franchise que le 15 décembre 1999 à effet différé au 1er janvier 2000, c'est vainement qu'elle soutient que le franchiseur n'aurait mis en œuvre aucune campagne publicitaire entre 1997 et 1999. Pour la période de 2000 à 2002, la société Rent A Car justifie avoir organisé des campagnes publicitaires et télévisuelles (pièce n° 37) de sorte que le grief tiré de l'absence de toute campagne commerciale et dynamique entre 1997 et 2002 n'est pas démontré.

M. Souchon, ès qualités, fait également valoir qu'à compter du 1er janvier 2003 et jusqu'au 15 mars 2004 la société Rent A Car a différé la signature d'un nouveau contrat de franchise, ce dont il est résulté, faute d'accord relatif aux primes de volume, un manque à gagner de 1 008 K euros. Il considère que ce non-versement de primes constitue un manquement à l'obligation d'exécuter de bonne foi et à l'obligation d'assistance. Il précise qu'il n'excipe pas du non-paiement des factures émises par la société Acara à ce titre aux termes de longues discussions ayant donné lieu à renégociation des contrats de franchise au mois de mars 2004.

Or, M. Souchon, ès qualités, ne justifie pas de l'existence du préjudice qu'il invoque à ce titre et qu'il évalue à la somme de 1 008 K euros sur la seule base de l'évaluation faite par M. Avezou, ès qualités, dans son bilan économique et social de la société Acara, évaluation que ce dernier aurait lui-même reprise de l'expert-comptable et qui n'est étayée par la production d'aucun document. De surcroît, il ne ressort d'aucun élément que le non-renouvellement des contrats de franchise entre janvier 2003 et mars 2004 soit le fait exclusif de la société Rent A Car qui n'avait, au demeurant, aucune obligation contractuelle à cet égard. Il est établi que les parties, en désaccord sur de nombreux points (redevances, primes, durée..), n'ont cessé de discuter avant de parvenir à un accord suivant avenant du 2 février 2004 prorogeant les contrats de franchise pour 8 années, soit jusqu'au 31 décembre 2011, avec effet rétroactif à leurs dates d'échéance respectives. M. Souchon s'abstient de faire état d'une convention intervenue entre la société Rent A Car et la société Acara le 18 mars 2004 qui précise que compte tenu de ses achats de véhicules au titre de l'année 2003, la société Acara estime devoir recevoir un montant de primes de l'ordre de 200 000 euros TTC qu'elle demande à la société Rent A Car de lui régler par anticipation à la date du 1er avril 2004 (pièce intimée n° 21). Il produit une pièce n° 32 qui fait apparaître un montant de primes de volumes ne dépassant pas 260 000 euros et qui est hors de proportion avec la somme de 1 008 K euros qu'il réclame et en contradiction avec sa pièce n° 26, constituée d'un tableau sur l'évolution des primes de volume pour l'année 2003 qui fait état d'une somme payée à ce titre de 346 000 euros. Enfin, la société Rent A Car justifie avoir réglé des primes de volume entre août 2003 et mars 2004 (pièces intimée n° 46 et 47) à hauteur de la somme totale de 490 370,55 euros.

- de ne pas avoir assisté ni contrôlé efficacement son franchisé de manière à lui permettre de surmonter ses difficultés

M. Souchon, ès qualités, soutient que la société Rent A Car, parfaitement informée de la situation économique de la société Acara, ne lui a apporté en retour aucune assistance violant ainsi ses obligations contractuelles par son inertie fautive. Il fait état plus particulièrement des refus de réaliser un audit exceptionnel prévu à l'article 17.2 du contrat entre 2000 et 2004, de renégocier les contrats de franchise et de les renouveler.

S'agissant de l'obligation contractuelle du franchiseur de réaliser un audit exceptionnel en cas de non-réalisation des objectifs minima (article 17.2) que ce dernier n'aurait pas respectée entre 2000 et 2004, il ne ressort d'aucun élément qu'à l'expiration des contrats intervenus fin 2002, la société Acara n'avait pas réalisé les objectifs impartis et il résulte d'ailleurs du Bilan économique et social réalisé par M. Avezou, ès qualités, que ses difficultés sont intervenues postérieurement dès lors qu'il indique, sans être démenti, qu'elles trouvent leur origine principalement dans le retournement de marché en 2003. A compter du 1er janvier 2003, les contrats étant expirés, il ne subsistait plus à la charge du franchiseur une obligation de réaliser un audit.

S'agissant des refus de renégocier les contrats et de les renouveler, d'une part, le renouvellement d'un contrat de franchise, à son échéance, ne relève pas de l'obligation d'assistance commerciale et technique incombant, en cours d'exécution du contrat, au franchiseur, d'autre part, il a été vu ci-dessus qu'après de nombreuses négociations, les parties se sont accordées sur les questions qui les opposaient (redevances et charges de publicité, calcul des primes de volume...) et qu'au final, les contrats de franchise venus à expiration ont été renouvelés suivant avenant du 2 février 2004 qui les a prorogés pour 8 années, avec effet rétroactif à leurs dates d'échéance respectives, la société Acara bénéficiant, notamment, "à titre exceptionnel" d'un taux de redevance de 1 % du CA HT et d'une avance au titre des primes de volumes sur l'exercice 2003.

En définitive, M. Souchon, ès qualités, échoue à rapporter la preuve de manquements du franchiseur ayant directement provoqué la cessation des paiements de la société Acara. Il sera donc débouté de sa demande en paiement de dommages et intérêts d'un montant égal au passif admis.

Sur la demande en dommages et intérêts formée par la société Rent A Car pour procédure abusive et demandes fantaisistes et infondées

La société Rent A Car ne démontre pas que M. Souchon, ès qualités, ait abusé de son droit d'agir en justice et d'exercer une voie de recours qui lui était légalement ouverte. Elle sera donc déboutée de sa demande à ce titre.

Sur les dépens et l'article 700 du Code de procédure civile

Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a condamné Mme Du Buit, ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de cession de la société Acara aux droits de laquelle vient M. Souchon, ès qualités de mandataire ad hoc de la société Acara, qui succombe, aux dépens de première instance et à verser à la société Rent A Car la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

M. Souchon, ès qualités de mandataire ad hoc de la société Acara, qui succombe en appel, en supportera la charge des dépens et devra verser la somme supplémentaire de 20 000 euros à la société Rent A Car au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, sa propre demande formée à ce titre étant rejetée.

Par ces motifs, LA COUR, statuant dans les limites de sa saisine, sur renvoi après cassation, Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a dit Mme Du Buit, ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de cession de la société Acara, irrecevable en son intervention volontaire du 8 mai 2006 ; Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a condamné Mme Du Buit, ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de cession de la société Acara, aux dépens de première instance et à verser à la société Rent A Car la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; statuant à nouveau, Déclare recevables les demandes formées par M. Souchon, ès qualités de mandataire ad hoc de la société Acara ; Déboute M. Souchon, ès qualités de mandataire ad hoc de la société Acara de l'ensemble de ses demandes ; Déboute la société Rent A Car de sa demande en dommages et intérêts pour procédure abusive ; Condamne M. Souchon, ès qualités de mandataire ad hoc de la société Acara aux dépens de l'appel ; Autorise Maître Stéphane Sainton, avocat, à recouvrer les dépens dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile ; Condamne M. Souchon, ès qualités de mandataire ad hoc de la société Acara, à verser à la société Rent A Car la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.