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Décisions

CA Orléans, ch. com., économique et financière, 18 octobre 2018, n° 17-02179

ORLÉANS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Eco Environnement (Sasu)

Défendeur :

BNP Paribas Personal Finance (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Hours

Conseillers :

M. Bersch, Mme Renault-Malignac

TI Tours, du 23 mai 2017

23 mai 2017

Expose du litige

Le 15 décembre 2014, Monsieur X a conclu avec la société Eco Environnement, un contrat portant sur des travaux de fourniture et pose d'une isolation du plancher des combles perdus de son immeuble d'habitation et d'un chauffe-eau thermodynamique pour un prix total de 16 000 euros payé au moyen d'un prêt souscrit par Monsieur et Madame X le même jour auprès de la société Sygma Banque, aux droits de laquelle vient la société BNP Paribas Personal Finance, remboursable à l'issue d'un différé de 9 mois, en 120 mensualités au taux nominal de 5,76 %.

Les travaux qui ont été réceptionnés le 13 janvier 2015 ont fait l'objet d'une facture émise le 26 janvier 2015.

Le 10 février 2015, Monsieur X et la société Eco Environnement ont signé un protocole d'accord aux termes duquel il leur a été accordé une remise commerciale de 4 000 euros.

Par actes d'huissier de justice du 8 juin 2016, Monsieur et Madame X ont fait assigner la société Eco Environnement et la société BNP Paribas Personal Finance (ci-après la BNP) devant le Tribunal d'instance de Tours aux fins, avant dire droit, de voir suspendre l'exécution du contrat de prêt jusqu'à la solution du litige, et au fond, en l'état de leurs dernières conclusions de voir prononcer l'annulation du contrat de prestation de services et du contrat de prêt affecté, de voir condamner la société Eco Environnement à reprendre possession à ses frais les équipements livrés et à les garantir de la restitution au prêteur du capital emprunté, de voir juger que la BNP a commis de nombreuses fautes la privant de sa créance de restitution, de la voir débouter de ses prétentions et condamner à leur restituer les sommes versées en exécution du contrat de prêt.

La société Eco Environnement, qui s'est opposée aux demandes, a sollicité reconventionnellement la condamnation des époux S. à lui payer la somme de 4 000 euros versée au titre du protocole d'accord et une somme de 2 000 euros pour frais de procédure.

La BNP a demandé pour le cas où le tribunal ferait droit aux prétentions des époux X de les condamner à lui rembourser la somme de 16 000 euros au titre du capital, de condamner la société Eco Environnement à garantir le paiement de cette somme et à lui payer la somme de 6 014 euros à titre de dommages et intérêts.

Par jugement avant dire droit du 6 janvier 2017, le tribunal a ordonné la suspension jusqu'à la solution du litige de l'exécution du contrat de crédit affecté.

Par jugement du 23 mai 2017, le Tribunal d'instance de Tours a déclaré recevable l'action en nullité engagée par les époux X relativement au contrat de vente régularisé par Monsieur X et la société Eco Environnement, a prononcé la nullité du contrat conclu le 15 décembre 2014 entre Monsieur X et la société Eco Environnement et du contrat de crédit affecté, a débouté la société BNP de ses demandes formées contre les époux X, l'a condamnée à leur rembourser la somme correspondant aux échéances du crédit déjà versées, avec intérêt au taux légal à compter de la signification du jugement à intervenir, a dit que la société Eco Environnement reprendra possession à ses frais des équipements livrés en exécution du contrat annulé, l'a condamnée à payer à la société BNP la somme de 16 000 euros en réparation du préjudice subi par suite de l'annulation du contrat de prêt consécutive à l'annu1ation du contrat de vente.

Pour statuer ainsi le tribunal a retenu, sur la recevabilité de l'action des époux X : que les termes généraux du protocole d'accord du 10 février 2015 ne permettaient pas de déterminer l'objet du différend auquel les parties avaient entendu mettre un terme et qu'en application de l'article 2054 du Code civil, à défaut pour les parties d'avoir interdit pour l'avenir toute action en nullité du contrat les liant, celle-ci était recevable, sur la nullité du contrat : que la société Eco Environnement par sa pratique commerciale trompeuse consistant à se prévaloir d'un label de qualité dont elle n'était pas titulaire, avait induit Monsieur X en erreur sur le coût final du bien vendu, qu'il s'agissait d'une manœuvre dolosive entachant le contrat de nullité et que celle-ci n'avait pas été couverte dès lors qu'il n'était pas établi que les époux X en laissant se poursuivre l'opération et en réglant le crédit, en aient eu l'intention et qu'ils aient eu alors conscience du vice affectant leur engagement, que la nullité du contrat principal entraînait la nullité du contrat affecté par application de l'article L. 312-55 du Code de la consommation, sur les conséquences de la nullité du contrat de crédit affecté, que la banque avait commis une faute en libérant les fonds au vu d'un bon de commande ne respectant pas les dispositions du Code de la consommation prescrites à peine de nullité, ce qui la privait de son droit à remboursement du capital prêté, sur la demande de la BNP, que sa faute excluait qu'elle puisse prétendre à la réparation intégrale du préjudice subi.

La société Eco Environnement a relevé appel de la décision le 12 juillet 2017.

Les dernières écritures des parties, prises en compte par la cour en application de l'article 954 du Code de procédure civile, ont été déposées :

- le 11 avril 2018 par la société Eco Environnement,

- le 28 février 2018 par les époux X,

- le 8 décembre 2017 par la BNP.

La société Eco Environnement, qui sollicite l'infirmation de la décision dont appel, demande à la cour de débouter les époux X de leurs prétentions, de constater que le litige a déjà été réglé amiablement par le protocole d'accord, de les condamner à lui rembourser la somme de 4 000 euros réglée en application de ce protocole, de débouter la BNP de ses prétentions. Elle réclame en tout état de cause la condamnation des époux X à lui payer la somme de 2 000 euros pour frais de procédure.

Elle soutient que l'action en nullité des époux X est irrecevable au motif que le protocole d'accord qu'ils ont signé a mis fin à leur différend et à toute contestation à naître dans le cadre de leur relation contractuelle. Elle s'estime fondée, pour le cas où la cour déclarerait leur action recevable, à obtenir le remboursement de la somme de 4 000 euros qu'elle leur a versée en application du protocole.

S'opposant à la nullité du contrat et contestant s'être livrée à des manœuvres dolosives, elle fait valoir qu'elle est titulaire du label RGE, que c'est sans preuve que les époux X soutiennent qu'elle les a contactés après la signature du bon de commande pour leur confirmer que les travaux donnaient droit à des avantages fiscaux, qu'il leur appartenait d'effectuer la demande d'aide à la rénovation thermique dans les délais, que le bon de commande ne prévoit aucune garantie quant aux avantages fiscaux, que le crédit d'impôt est présenté uniquement en page 42 de la brochure qui en compte 50 avec la mention sous conditions, qu'ils étaient libres d'accepter le prix proposé et que faute d'avoir exercé leur faculté de rétractation, ils ne peuvent se prévaloir d'un prix disproportionné.

Elle affirme avoir satisfait à son obligation d'information précontractuelle et réplique que le bon de commande mentionne les caractéristiques essentielles des biens vendus qui sont détaillées dans les documents annexes remis aux époux X, que les informations prévues à l'article L. 111-1 du Code de la consommation, qui sont celles relatives à la société et non celles de son démarcheur figurent sur le bon de commande, que la mention du délai de livraison n'est pas prescrite à peine de nullité, que l'installation a été effectuée et réceptionnée le 13 janvier 2015 sans réserve ce qui empêche toute contestation relative au délai de livraison, que le prix unitaire de chaque matériel n'a pas à être précisé alors que le Code de la consommation n'interdit pas de mentionner un prix forfaitaire, que la loi n'impose pas que le formulaire de rétractation soit détachable et ne précise pas son contenu. Elle considère, en tout état de cause, que l'article L. 111-1 du Code de la consommation, ne sanctionne pas par la nullité du contrat le manquement du professionnel à son obligation d'information et souligne que le dol n'est caractérisé qu'en cas d'intention de nuire qui en l'espèce n'est pas établie.

Elle prétend subsidiairement que s'agissant d'une nullité relative, elle a été couverte par les époux X qui ont reconnu avoir pris connaissance des conditions générales de vente et en ont accepté les termes en signant le bon de commande, ont constaté l'achèvement des travaux d'installation par la signature du certificat de livraison le 13 janvier 2015 et ont autorisé la banque à se libérer des fonds à son profit, qui n'ont pas annulé leur commande dans le délai imparti, ont réglé les échéances du prêt et ont signé un protocole d'accord en connaissant les causes de nullité qu'ils invoquent.

Elle stigmatise la mauvaise foi des appelants qui après avoir laissé exécuter les travaux, conclu un protocole d'accord et utilisé l'installation pendant 2 ans tentent de s'exonérer de leurs obligations.

Dans l'hypothèse où la cour accueillerait les prétentions des époux X, elle s'oppose aux demandes de la BNP considérant qu'elle n'a pas à supporter l'obligation pesant sur la banque de restituer le sommes prêtées augmentées des intérêts.

Les époux X, qui souhaitent voir confirmer la décision déférée, réclament la condamnation in solidum des sociétés Eco Environnement et BNP à leur payer 5 000 euros pour frais de procédure.

Ils répliquent à la fin de non-recevoir que le protocole invoqué par la société Eco Environnement n'emporte pas renonciation de leur part à contester en justice la validité du contrat, que ses effets sont limités au différend concernant le nombre de m² d'isolant facturé, ce qui explique la remise commerciale consentie de 4 000 euros, et qu'il n'a jamais eu pour vocation de terminer le litige existant entre les parties à la suite de la découverte, postérieurement à sa signature, des manœuvres dolosives commises à leur préjudice ainsi que des irrégularités affectant le contrat.

Ils soutiennent que la demande de remboursement de la somme de 4 000 euros qui leur a été versée en exécution du protocole d'accord est irrecevable comme étant formée pour la première fois devant la cour d'appel.

Ils affirment que la société Eco Environnement a utilisé des pratiques commerciales trompeuses constitutives d'un dol, qui a vicié le consentement de Monsieur X et entache le contrat de nullité, en affirmant faussement être titulaire de différents labels notamment RGE et de la qualification pour réaliser des travaux d'aménagement thermique ouvrant droit à un crédit d'impôt, ce qui l'a déterminé à s'engager à des conditions de prix exorbitantes qui n'étaient acceptables qu'en raison des promesses d'avantages fiscaux dont ils n'ont pu bénéficier faute pour l'entreprise de disposer de la certification exigée par l'administration fiscale.

Ils font valoir que la nullité du contrat est également encourue pour manquement de la société Eco Environnement à son obligation d'information précontractuelle prévue par les dispositions d'ordre public de l'article L. 111-1 du Code de la consommation au motif que le bon de commande ne comporte ni le prix unitaire des biens vendus, ni le délai de livraison, ni l'identité du démarcheur et que le bordereau de rétractation n'est pas conforme à l'article R. 121-1 du même Code.

Ils contestent avoir confirmé le contrat entaché de nullité en laissant se poursuivre l'opération dans la mesure où ils ignoraient les vices affectant le bon de commande et n'ont découvert les manœuvres dolosives que postérieurement à l'exécution des travaux.

Ils s'estiment en droit en application de l'article L. 311-33 du Code de la consommation à obtenir la condamnation de la société Eco Environnement à les garantir du remboursement du prêt dès lors que la nullité du contrat principal lui est imputable et à voir la BNP privée de sa créance de restitution en raison de la faute de l'établissement prêteur qui s'est dessaisi des fonds sans procéder à la vérification des documents contractuels.

Ils contestent enfin avoir agi de mauvaise foi et expliquent les délais pour agir par leur ignorance de la législation.

La BNP, qui conclut à l'infirmation du jugement, demande à la cour, à titre principal, de déclarer irrecevable l'action en nullité des époux X au vu du protocole transactionnel, à titre subsidiaire, de les débouter de leurs prétentions et de leur ordonner de reprendre le remboursement du prêt, à titre très subsidiaire en cas de nullité des contrats, de les condamner à lui régler la somme de 16 000 euros, plus subsidiairement, de juger que le préjudice des époux X ne peut excéder la somme de 3 840 euros correspondant au montant du crédit d'impôt, de les condamner in solidum à lui payer la somme de 16 000 euros et d'ordonner le cas échéant la compensation des créances, de condamner la société Eco Environnement à la garantir de la restitution du capital prêté et à lui verser le montant des intérêts perdus, de la condamner en conséquence à lui payer 16 000 euros au titre du capital et 6 014 euros au titre des intérêts.

Il est également réclamé la condamnation de la partie succombante à lui payer 3 000 euros pour frais de procédure ainsi qu'à supporter les dépens dont distraction au profit de la Selarl Y.

Elle soutient que l'action en nullité des époux X est irrecevable dès lors qu'ils ne peuvent pas revenir sur le protocole d'accord aux termes duquel ils ont mis fin à tout litige afférent au contrat.

Elle estime, subsidiairement, que les époux X ne rapportent pas la preuve du dol allégué et fait valoir que le bon de commande ne garantit pas un crédit d'impôt, qu'aucun des éléments produits n'établit qu'ils aient été persuadés de bénéficier d'un avantage fiscal et que cet élément été déterminant de leur engagement, que la brochure qui contient des informations générales n'est pas probante, qu'ils ne prouvent pas que le vendeur leur a promis des avantages fiscaux en sachant qu'ils ne pourraient pas en profiter, qu'il n'est d'ailleurs pas démontré qu'ils ne remplissaient pas les conditions pour en bénéficier alors que l'entreprise dispose de la qualification RGE et qu'ils peuvent tout au plus solliciter des dommages intérêts correspondant au montant du crédit d'impôt dont ils ont été privés.

Elle affirme que le bon de commande n'est pas affecté d'irrégularités formelles, qu'il mentionne précisément les prestations commandées, que l'identité du démarcheur qui n'a pas à être indiquée y figure, que l'installation ayant été réceptionnée aucune contestation ne peut être élevée concernant le délai de livraison, qu'aux termes de l'article L. 111-1 du Code de la consommation seul le prix global doit être indiqué et non le prix unitaire, que le bordereau de rétractation reprend les mentions du modèle type et qu'en tout état de cause les éventuelles irrégularités ne sont pas sanctionnées par la nullité du contrat.

Elle considère, subsidiairement, que l'acquéreur qui était informé des mentions que devait comporter le bon de commande puisque celui-ci reproduit les dispositions de l'article L. 121-17 du Code de la consommation, a confirmé l'éventuelle nullité relative du contrat en l'exécutant volontairement, en réceptionnant les travaux, en sollicitant le paiement des prestations, en concluant un protocole d'accord, en réglant l'emprunt et en se servant du matériel installé.

La BNP s'estime en droit, pour le cas où le contrat principal et le contrat de prêt affecté seraient annulés, d'obtenir le remboursement du capital emprunté dès lors qu'aucune faute ne peut être reprochée à la banque qui a versé les fonds au vu du certificat d'achèvement des travaux signé par Monsieur X et qui n'avait pas à contrôler la régularité formelle du contrat principal.

Elle relève qu'il n'existe pas de lien de causalité entre la faute reprochée à la banque et le préjudice résultant de la privation de l'avantage fiscal et qu'en tout état de cause, le préjudice des appelants ne peut excéder le montant du crédit d'impôt.

Elle demande au visa de l'article L. 311-33 du Code de la consommation à ce que la société Eco Environnement soit condamnée à garantir le remboursement du capital prêté.

Sur ce

I - Sur le protocole d'accord :

Attendu que le protocole d'accord signé entre la société Eco Environnement et Monsieur X le 10 février 2015 est ainsi rédigé : "Avenir Ecologie consent à Monsieur X : [...] - une remise commerciale nette de 4 000 euros (quatre mille euros). Cette remise exceptionnelle et unique solde purement et simplement toute demande ou autres. Monsieur X certifie accepter cette remise commerciale de 4 000 euros (quatre mille euros) en retournant le présent protocole dûment signé pour accord à Avenir Ecologie. Aucune autre demande supplémentaire de remise, escompte ou autres ne pourra être faite à Avenir Ecologie pour quelque motif que ce soit, quand bien même la demande prendrait cause sur un autre fondement" ;

Attendu que selon l'article 2044 du Code civil dans sa rédaction applicable à la cause, la transaction est un contrat par lequel les parties, par des concessions réciproques, terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître ;

Qu'aux termes de l'article 2048 du même Code, les transactions se renferment dans leur objet : la renonciation qui y est faite à tous droits, actions et prétentions, ne s'entend que de ce qui est relatif au différend qui y a donné lieu ;

Attendu que les parties s'opposent sur la nature de la situation litigieuse les ayant amené à conclure ce protocole ;

Attendu que Monsieur X soutient que le différend portait sur la surface de combles isolée et facturée tandis que la société Eco Environnement affirme qu'il est relatif au crédit d'impôt revendiqué par les époux X et à leur souhait de revenir sur leurs engagements ;

Mais attendu que, comme l'a relevé le tribunal, aucune des parties ne fournit d'élément établissant la preuve de ses allégations ;

Attendu qu'aux termes du protocole reproduit ci-dessus dans lesquels les parties se sont engagées, la société Eco Environnement a consenti aux époux X un simple remise commerciale destinée à mettre fin à toute contestation relative au prix de la prestation, en contrepartie de laquelle les époux X ont renoncé à toute demande supplémentaire de remise, d'escompte ou autres, ces autres demandes s'entendant nécessairement, en l'absence de précision, des demandes relatives au prix ;

Qu'il s'ensuit que les époux X n'ayant pas renoncé aux termes de ce protocole à toute action en justice née du contrat souscrit et en particulier à en contester la validité mais ayant uniquement accepté de renoncer à en contester le prix, leur action en nullité du contrat est recevable ;

Qu'il convient par conséquent pour ces motifs et ceux non contraires du premier juge que la cour adopte de confirmer la décision déférée sur ce point ;

II - Sur la nullité du contrat :

1) Sur le dol :

Attendu que selon l'article 1109 du Code civil dans sa rédaction applicable à la relation contractuelle, il n'y a point de consentement valable, si le consentement n'a pas été donné par erreur, ou s'il a été extorqué par violence ou surpris par le dol ;

Attendu que l'article 1116 du même Code dispose que le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que sans ses manœuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté, qu'il ne se présume pas, et doit être prouvé ;

Attendu qu'en vertu de l'article L. 121-1- du Code de la consommation en vigueur à la date de conclusion du contrat, sont réputées trompeuses les pratiques qui ont pour objet d'afficher un certificat, un label de qualité ou un équivalent sans avoir obtenu l'autorisation nécessaire;

Attendu que les époux X ont commandé l'achat et l'installation d'un chauffe-eau thermodynamique et des travaux d'isolation des combles perdus par soufflage ;

Attendu que la brochure commerciale remise aux époux X qui reprend chacune des prestations commercialisées dont le chauffe-eau thermodynamique et l'isolation, mentionne en page 7 : "Les bénéfices d'une rénovation énergétique globale. En plus des aides et subventions du plan du bâtiment durable, la rénovation thermique de votre habitation vous offre de multiples avantages"' ; qu'il est indiqué en page 42 : aide pour votre programme Iso Habitat, l'Etat se doit d'inciter les particuliers, c'est le grand chantier national habitat 2014, crédit d'impôt développement durable 2014, 30 %, TVA réduite 5,5 %, prime aide solidaire particulier 1 350 euros, prime économie d'énergie, Avec avenir écologie vos installations et équipements sont financés jusqu'à 80 % par l'état et les pollueurs* sous conditions ; que sont également reproduits en page 42 plusieurs logos dont les suivants : programme éco-rénove 100 000 foyers subventionnés par des aides d'Etat, l'éco-rénove j'économise, bénéficiez d'un crédit d'impôt, Grenelle de l'environnement ; qu'il est indiqué en page 3 nos labels RGE Quali PV, Qualifelec, reconnu Grenelle de l'environnement, Qualit'enr ;

Attendu qu'il ressort de l'examen du bon de commande qu'il reproduit en regard des prestations commandées les logos c2e, bénéficiez d'un crédit d'impôt et j'éco-rénove j'économise et qu'il y figure l'indication de ce que Eco Environnement est partenaire RGE Quali PV 2014 ;

Attendu que les prestations et installations commandées par les époux X étaient destinées à leur faire réaliser des économies d'énergie comme le présente la documentation commerciale, qu'elles étaient en outre, aux termes de cette documentation et des logos reproduits sur le bon de commande, susceptibles d'ouvrir droit à crédit d'impôt ;

Qu'il s'ensuit que la faculté de bénéficier d'un crédit d'impôt pour les produits et prestations commandées est bien rentrée dans le champ contractuel ;

Attendu que les époux X rapportent la preuve par la production de la lettre du 1er février 2016 du centre des finances publiques, qu'ils n'ont pas pu bénéficier du crédit d'impôt au titre des travaux destinés à améliorer la performance thermique de leur habitation réalisés et facturés par la société Eco Environnement aux motifs qu'en vertu de l'article 200 quater du Code général des impôts, les travaux auraient dû être réalisés par un artisan reconnu garant de l'environnement et que la société Eco Environnement n'était pas titulaire de ce label RGE à la date de facturation des travaux le 26 janvier 2015, label qu'elle n'a acquis qu'en décembre 2015 ;

Attendu que la société Eco Environnement qui procède par voie d'affirmation ne communique aucun élément venant contredire les termes de ce courrier et établissant qu'elle était comme elle le prétend, titulaire de la qualification RGE ouvrant droit à crédit d'impôt, alors même qu'il lui était pourtant aisé de rapporter cette preuve si tel avait été le cas en produisant la copie de son agrément ;

Attendu que c'est sans bonne foi que la société Eco Environnement réplique que l'octroi d'un crédit d'impôt était soumis à conditions en invoquant la mention "sous conditions" figurant en page 42 de la brochure commerciale dès lors que cette mention ne concerne pas le crédit d'impôt mais la possibilité d'obtenir un financement à 80 % et que surtout l'impossibilité de bénéficier de ce crédit d'impôt lui est imputable en raison de son défaut de qualification et ne résulte pas de la situation des époux X ;

Attendu que le fait, pour la société Eco Environnement, de laisser accroire qu'elle bénéficiait de la qualification RGE caractérise les manœuvres et l'intention dolosive dès lors que la société a fait faussement état d'une qualification dont elle ne disposait pas et qui était nécessaire pour permettre aux époux X de bénéficier du crédit d'impôt auquel ouvrait droit comme le mentionnait la brochure commerciale et le bon de commande les prestations commandées ;

Attendu qu'il est évident que sans de telles manœuvres, les époux X, qui avaient l'intention légitime de bénéficier du crédit d'impôt accordé par l'Etat lors de l'acquisition de prestations destinées à améliorer l'isolation de leur habitation et leur consommation énergétique et de pouvoir ainsi diminuer le coût de leur investissement, n'auraient pas contracté avec la société Eco Evironnement ;

Attendu que pour ces motifs le contrat encourt la nullité pour vice du consentement ;

2) Sur les dispositions de l'article L. 111-1 du Code de la consommation :

Attendu que selon l'article L. 111-1 du Code de la consommation dans sa rédaction applicable au contrat, avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;

2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 113-3 et L. 113-3-1 ;

3° En l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;

4° Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu'elles ne ressortent pas du contexte, ainsi que, s'il y a lieu, celles relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l'existence et aux modalités de mise en œuvre des garanties et aux autres conditions contractuelles. La liste et le contenu précis de ces informations sont fixés par décret en Conseil d'Etat.

Attendu qu'en vertu de l'article L. 111-7 du Code de la consommation les dispositions du chapitre 1er du titre I sont d'ordre public ;

Attendu qu'en application des dispositions de l'article 6 du Code civil on ne peut déroger par des conventions particulières, aux lois qui intéressent l'ordre public et les bonnes moeurs ; qu'il s'ensuit que les conventions intervenues en méconnaissance des dispositions d'ordre public de l'article L. 111-1 du Code de la consommation précité sont nulles ;

Attendu que l'examen du bon de commande révèle qu'il mentionne un prix global de 16 000 euros alors qu'il concerne deux biens et deux services distincts à savoir des prestations d'isolation de la toiture et d'achat et d'installation d'un chauffe-eau pour lesquelles il devait être indiqué le prix de chacune des prestations et services commandés en vertu des dispositions du 1° de l'article L. 111-1 du Code la consommation qui exige que le professionnel communique le prix du bien ou du service, ce qui implique que le prix unitaire de chaque prestation soit précisé ;

Attendu en outre que la date de livraison et d'exécution des travaux ne figure pas sur bon de commande en méconnaissance des dispositions du 3° de l'article L. 111-1 du Code de la consommation ;

Qu'il s'ensuit et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens d'annulation que le bon de commande est entaché de nullité , étant relevé que la jurisprudence citée par la BNP qui a été rendu au visa de textes antérieurs à la loi de 2014-344 du 17 mars 2014 ne trouve pas à s'appliquer ;

II - Sur la confirmation de la nullité

Attendu que la BNP et la société Eco Environnement soutiennent au visa de l'article 1338 du Code civil dans sa version antérieure au 1er octobre 2016 que les époux X ont confirmé la nullité affectant le contrat ;

Mais attendu qu'aux termes de l'article 1138 du Code civil, la confirmation d'une obligation entachée de nullité est subordonnée à la conclusion d'un acte révélant que son auteur a eu connaissance du vice affectant l'obligation et l'intention de le réparer ;

Or attendu que la reproduction des articles du Code de la consommation dans les conditions générales du contrat ne suffit pas à elle seule pour retenir que le consommateur non juriste doit vérifier lui-même que le contrat conclu est régulier en se reportant à ces articles ;

Qu'en conséquence, la confirmation du contrat entaché de nullité relative pour non respect des dispositions de l'article L. 111-1 du Code de la consommation qui relèvent de l'ordre public de protection ne peut résulter de la signature par Monsieur X du bon de commande au dos duquel sont reproduits les articles du Code de la consommation ;

Attendu qu'il ne peut pas davantage se déduire du fait les époux X ont laissé se poursuivre l'opération en laissant réaliser les travaux, en signant l'attestation de fin de travaux, en autorisant le déblocage des fonds et en réglant les premières échéances qu'ils aient eu connaissance de cette nullité et qu'ils aient entendu renoncer à s'en prévaloir ;

Attendu enfin qu'il n'est pas établi que les époux X aient su, antérieurement au courrier du service des finances publiques, qui est postérieur à l'achèvement et au règlement des travaux, que la société Eco Environnement ne disposait pas de l'agrément pour leur permettre de bénéficier du crédit d'impôt, de sorte qu'ils n'ont pas pu couvrir la nullité affectant le contrat pour dol en laissant se poursuivre l'opération ;

Qu'enfin, le règlement des échéances du prêt postérieurement à la connaissance des vices affectant le contrat ne peut valoir renonciation à se prévaloir de ces nullités, les époux X, qui ne pouvaient se faire justice à eux-mêmes, ayant régulièrement sollicité la suspension du paiement des échéances du prêt ;

Qu'il convient, en conséquence, de confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat de vente ;

III - Sur les conséquences de la nullité du contrat de vente :

Attendu que par l'effet de la nullité du contrat, les parties doivent être remises dans l'état dans lequel elles se trouvaient avant son exécution ;

Qu'en conséquence, la société Eco Environnement devra reprendre à ses frais le matériel vendu et installé ;

Attendu qu'il ressort de la lecture du jugement déféré que la société Eco Environnement a bien sollicité en première instance la condamnation des époux X à lui payer la somme de 4 000 euros qu'elle leur a réglée en exécution du protocole d'accord du 10 février 2015 et que le tribunal a omis de se prononcer sur cette prétention qui ne constitue pas une demande nouvelle ;

Attendu que le protocole d'accord aux termes duquel la société Eco Environnement a consenti aux époux X une remise commerciale sur le prix des prestations vendues se trouve anéanti par l'effet de la nullité du contrat de vente de sorte que les parties doivent être replacé dans l'état dans lequel ils se trouvaient avant sa conclusion ;

Qu'il convient de condamner les époux X à payer à la société Eco Environnement la somme de 4 000 euros ;

IV - Sur la nullité du contrat de crédit affecté :

Attendu qu'en application de l'article L. 311-32 du Code de la consommation, le contrat de crédit affecté est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.

Qu'il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a annulé le contrat de crédit en raison de l'annulation du contrat de vente ;

Attendu que l'annulation du contrat emporte restitution des prestations reçues de part et d'autre en exécution du contrat ; qu'il s'ensuit que la nullité du contrat de prêt faisant suite à la nullité du contrat de vente emporte l'obligation pour les emprunteurs de rembourser au prêteur le capital emprunté sous déduction des sommes déjà versées sauf à établir que celui-ci a commis une faute de nature à le priver de sa créance de restitution ;

Attendu que le contrat de vente étant entaché de nullité sur le double fondement du dol et du non respect des dispositions protectrices du Code de la consommation, c'est a bon droit que les époux X font valoir que le prêteur a fautivement omis de vérifier l'opération qu'il finançait alors qu'à la simple lecture du bon de commande, il aurait dû constater les carences flagrantes relatives à l'absence de prix unitaire et de délai de livraison que celui-ci présentait au regard des dispositions protectrices du consommateur, se persuader que le contrat principal s'en trouvait nul ou à tout le moins annulable, et refuser en conséquence de mettre les fonds à la disposition du vendeur ;

Attendu que la faute de l'organisme de crédit a empêché les époux X de se prévaloir de la nullité du contrat avant la libération des fonds au profit de la société ce qui leur a causé un préjudice les conduisant à s'endetter pour des prestations dont ils ne sont plus susceptibles d'avoir l'usage par l'effet de la nullité du contrat de vente ;

Attendu que cette faute prive l'organisme prêteur de sa créance de restitution ;

Qu'il convient, en conséquence, de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la BNP Paribas Personal Finance de ses demandes formées à l'encontre des époux X au titre du crédit et l'a condamnée à leur rembourser les échéances de crédit déjà versées ;

V - Sur la demande d'appel en garantie de la BNP Paribas Personal Finance:

Attendu qu'en vertu de l'article L. 311-33 du Code de la consommation si la résolution judiciaire ou l'annulation du contrat principal survient du fait du vendeur celui-ci pourra, à la demande du prêteur, être condamné à garantir l'emprunteur du remboursement du prêt sans préjudice de dommages et intérêts vis à vis du prêteur et de l'emprunteur ;

Attendu que l'annulation du contrat de vente étant imputable à la société Eco Environnement qui n'a pas respecté les dispositions protectrices du Code de la consommation et a usé de manœuvres dolosives, la décision doit être confirmée en ce qu'elle l'a condamnée à payer à la BNP Paribas Personal Finance la somme de 16 000 euros en garantie du remboursement du capital prêté aux époux X par application des dispositions de l'article précité ;

Attendu que la faute de la société Eco Environnement a causé un préjudice à la BNP Paribas Personal Finance en ce qu'elle se trouve privée par l'effet de l'annulation du contrat de prêt du montant des intérêts auxquels elle aurait pu prétendre ;

Attendu toutefois que ce préjudice ne peut correspondre au coût total des intérêts du prêt, dès lors qu'il se trouve compensée pour partie par le fait que la banque obtient restitution du capital avant l'échéance fixée contractuellement ;

Qu'ainsi au regard de la date de souscription du prêt le 15 décembre 2014, de sa durée de 120 mois, du taux d'intérêt de 5,91 % et de la date à laquelle la banque obtient restitution du capital, son préjudice sera entièrement réparé par l'allocation de la somme de 3 000 euros que la société Eco Environnement sera condamnée à lui payer, la faute commise à l'égard de l'emprunteur par la banque ne pouvant lui faire perdre son droit à être indemnisée du préjudice que lui a causé la faute du vendeur ;

Qu'il convient de réformer la décision en conséquence ;

VI - Sur les autres demandes :

Attendu qu'il y a lieu de condamner in solidum la société BNP Paribas Personal Finance aux dépens de la procédure d'appel ;

Attendu que l'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Par ces motifs : LA COUR Statuant par arrêt rendu par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort : Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a débouté la BNP Paribas Personal Finance de sa demande indemnitaire dirigée contre la société Eco Environnement au titre de la perte des intérêts ; Statuant À Nouveau Condamne la société Eco Environnement à payer à la BNP Paribas Personal Finance la somme de 3 000 euros de dommages et intérêts au titre des intérêts dont elle a été privée ; Y Ajoutant Condamne Monsieur X et Madame X à payer à la société Eco Environnement la somme de 4 000 euros versée au titre du protocole d'accord du 10 février 2015 ; Dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ; Condamne in solidum la société Eco Environnement et la BNP Paribas Personal Finance aux dépens de la procédure d'appel.