Livv
Décisions

Cass. 2e civ., 22 novembre 2018, n° 17-27.730

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Transaction auto mécanique (SARL)

Défendeur :

Axa France IARD (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Flise

Rapporteur :

M. Besson

Avocat général :

M. Grignon Dumoulinet

Avocats :

SCP Zribi, Texier, SCP Célice, Soltner, Texidor, Périer

Aix-en-Provence, 3e ch. A, du 14 sept. 2…

14 septembre 2017

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Transaction auto mécanique (la société TAM), qui exploitait un fonds de commerce d'achat-vente-location de véhicules et bateaux neufs et d'occasion, a souscrit le 6 novembre 2000 auprès de la société Axa France IARD (l'assureur) un contrat d'assurance multirisques des professionnels de l'automobile ; qu'à la suite d'un incendie survenu le 26 septembre 2009 dans les locaux qu'elle occupait en vertu d'un bail commercial, le propriétaire des lieux, invoquant leur destruction, a résilié ce bail le 16 février 2010 ; qu'ayant été contrainte de quitter les lieux, la société TAM, invoquant l'impossibilité pour elle de retrouver des locaux lui permettant de poursuivre son exploitation, a sollicité la mise en œuvre des garanties " pertes d'exploitation " et " perte de la valeur vénale du fonds " qui lui a été refusée ; qu'elle a assigné l'assureur en paiement ;

Sur le premier moyen, pris en ses première et troisième branches : - Attendu que la société TAM fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande tendant à voir déclarer abusive et non écrite la clause supplémentaire de " perte totale de clientèle " en " transférant l'activité dans d'autres locaux " pour la mise en œuvre de la garantie " perte de la valeur vénale du fonds " et de sa demande, subséquente de mise en œuvre de cette garantie, alors, selon le moyen : 1°) que les dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la consommation, devenu l'article L. 212-1 du même code, s'appliquent aux contrats conclus entre professionnels et non-professionnels, ces qualités s'appréciant au regard de la sphère de compétence réciproque des cocontractants ; qu'en retenant que ces dispositions ne sont pas applicables au contrat d'assurance conclu entre la société TAM, professionnel dans le secteur de l'automobile mais profane en matière d'assurance, et la société Axa France IARD, professionnel en matière d'assurance, au motif impropre que ce contrat est en lien avec l'activité professionnelle de la société TAM, la cour d'appel a violé l'article susvisé ; 2°) que la clause imposant, pour la mise en œuvre de la garantie " perte du fonds de commerce ", la preuve de l'impossibilité complète et définitive pour l'assuré de transférer ses activités dans d'autres locaux que les locaux assurés sans perdre la totalité de sa clientèle constitue une clause indirecte d'exclusion de garantie, dont la preuve, nonobstant toute convention contraire, est à la charge de l'assureur ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 113-1 du Code des assurances ;

Mais attendu, d'abord, que les dispositions de l'article L. 132-1 du Code de la consommation, devenu L. 212-1 du même code, qui s'appliquent exclusivement au consommateur et au non-professionnel, sont inapplicables aux contrats d'assurance conclus par des sociétés commerciales ;

Attendu, ensuite, que formule une exigence générale et précise, instituant une condition de la garantie, la clause d'un contrat d'assurance multirisques professionnels imposant, pour la mise en œuvre de la garantie de " perte totale " de la valeur vénale d'un fonds de commerce, la preuve de l'impossibilité complète et définitive pour l'assuré de poursuivre l'exercice de ses activités dans les locaux assurés et de les transférer dans d'autres locaux sans perdre la totalité de sa clientèle ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur la deuxième branche du premier moyen, sur le deuxième moyen et sur la troisième branche du troisième moyen, annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le troisième moyen, pris en ses deux premières branches : - Vu l'article 1134 dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, applicable à la cause ; - Attendu que, pour débouter la société TAM de sa demande tendant à la mise en œuvre par l'assureur de la garantie " pertes d'exploitation ", l'arrêt retient que l'article 5.1 des conditions générales exclut le bénéfice de toute indemnité pour perte d'exploitation en cas de cessation d'activité sauf si cette cessation d'activité est imputable à un évènement indépendant de la volonté de l'assuré, et que tel n'est pas le cas en l'espèce ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si, comme le faisait valoir la société TAM, la garantie " pertes d'exploitation " pouvait être mise en œuvre en cas de cessation d'activité partielle et si, à la suite de l'incendie du 26 septembre 2009, elle n'avait pas maintenu une telle activité jusqu'à la résiliation du bail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

Par ces motifs : casse et annule, mais seulement en ce qu'il déboute la société Transaction auto mécanique de sa demande tendant à la mise en œuvre par la société Axa France IARD de la garantie " pertes d'exploitation ", l'arrêt rendu le 14 septembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée.