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Décisions

Cass. 1re civ., 12 décembre 2018, n° 17-18.491

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Ricci, Joliff

Défendeur :

BNP Paribas Personal Finance (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Batut

Rapporteur :

M. Avel

Avocat général :

M. Chaumont

Avocats :

SARL Cabinet Briard, SCP Rocheteau, Uzan-Sarano

Paris, pôle 5 ch. 6, du 6 janv. 2017

6 janvier 2017

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 6 janvier 2017), que, suivant offre de prêt acceptée le 1er juillet 2009, la société BNP Paribas Invest immo, aux droits de laquelle vient la société BNP Paribas Personal Finance (la banque), a consenti à M. Ricci et Mme Joliff (les emprunteurs) un prêt libellé en francs suisses et remboursable en euros, dénommé Helvet Immo ; qu'invoquant l'irrégularité de la clause contractuelle prévoyant l'indexation du prêt sur la valeur du franc suisse, ainsi qu'un manquement de la banque à ses obligations, les emprunteurs ont assigné celle-ci en annulation de la clause litigieuse et en indemnisation ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé : - Attendu que les emprunteurs font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes fondées sur l'illicéité et le caractère abusif de la clause d'indexation ;

Attendu, d'abord, que l'arrêt énonce qu'en application de l'article L. 112-2 du Code monétaire et financier, la validité d'une clause d'indexation fondée sur une monnaie étrangère est subordonnée à l'existence d'une relation directe avec l'objet de la convention ou l'activité de l'une des parties ; qu'il constate que la relation directe du taux de change, dont dépendait la révision du taux d'intérêt initialement stipulé, avec l'activité de la banque est suffisamment caractérisée ; que, de ces seuls motifs, la cour d'appel, qui a répondu aux conclusions prétendument délaissées, a déduit, à bon droit, que la clause litigieuse était licite ;

Attendu, ensuite, qu'après avoir énoncé que l'appréciation du caractère abusif des clauses, au sens de l'article L. 132-1, devenu L. 212-1 du Code de la consommation, ne concerne pas celles qui portent sur l'objet principal du contrat, pour autant qu'elles soient rédigées de façon claire et compréhensible, et après avoir relevé qu'en ce qu'elle prévoit la conversion en francs suisses du solde des règlements mensuels après paiement des charges annexes du crédit, la clause litigieuse définit l'objet principal du contrat, l'arrêt retient, d'une part, que cette clause figure dans une offre préalable qui précise que le prêt contracté est libellé en francs suisses, que l'amortissement du prêt se fait par la conversion des échéances fixes payées en euros, qu'une telle conversion s'opère selon un taux de change qui est susceptible d'évoluer à la hausse ou à la baisse, et que cette évolution peut entraîner l'allongement ou la réduction de la durée d'amortissement du prêt et, le cas échéant, modifier la charge totale de remboursement, d'autre part, qu'à l'offre de prêt était annexée une simulation chiffrée permettant d'apprécier l'influence de la fluctuation du taux de change sur le capital emprunté et la variation de la durée du prêt en résultant ; que, par ces seuls motifs, la cour d'appel a fait ressortir le caractère clair et compréhensible de la clause litigieuse, de sorte qu'elle n'était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations et énonciations rendaient inopérante ;

Attendu, enfin, que, les emprunteurs n'ont pas soutenu, dans leurs conclusions d'appel, qu'est abusive la clause ayant pour objet ou pour effet de stipuler une date indicative d'exécution du contrat hors les cas où la loi l'autorise ; d'où il suit que le moyen, pour partie irrecevable comme nouveau et mélangé de fait, n'est pas fondé pour le surplus ;

Sur le deuxième moyen, ci-après annexé : - Attendu que les emprunteurs font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes fondées sur la nullité de la clause d'indexation pour erreur ou dol ;

Attendu qu'ayant souverainement estimé que, dans l'offre de prêt à laquelle était annexée une simulation chiffrée permettant d'apprécier l'influence de la fluctuation du taux de change sur le capital emprunté et la variation de la durée du prêt en résultant, les emprunteurs avaient été informés par la banque, de façon claire, précise et expresse, sur le risque de variation du taux de change, sur son influence sur la durée des prêts et sur la charge totale de remboursements de ces prêts, de sorte qu'ils ne pouvaient utilement faire valoir que la banque leur aurait dissimulé le risque d'une augmentation du coût du crédit ou qu'eux-mêmes auraient commis une erreur excusable, la cour d'appel, procédant à la recherche prétendument omise, a légalement justifié sa décision de ce chef ;

Sur le troisième moyen, ci-après annexé : - Attendu que les emprunteurs font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes indemnitaires fondées sur le manquement de la banque à ses obligations d'information et de mise en garde, et pour atteinte à la gestion paisible et à la confiance contractuelle ;

Attendu, que l'arrêt relève que l'établissement de crédit qui consent un prêt à un emprunteur non averti, est tenu à son égard, lors de la conclusion du contrat, d'un devoir de mise en garde en considération des capacités financières de ce dernier et du risque de l'endettement né de l'octroi du prêt, qu'il n'est pas contesté que la banque a rempli son obligation de se renseigner sur les capacités financières des emprunteurs et que le prêt était, lors de sa souscription, proportionné à leurs capacités financières et n'a entraîné aucun endettement excessif ; qu'il ajoute que les emprunteurs incriminent le manquement de la banque à son devoir d'information sur le risque de variation du taux de change et des conséquences de cette dernière sur l'amortissement du prêt pour soutenir que leur consentement a été vicié par leur erreur et par les manœuvres dolosives de la banque, mais que le manquement allégué n'est pas établi ; que, par ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation ni de procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, a légalement justifié sa décision de ce chef ;

Par ces motifs : Rejette le pourvoi.