CA Paris, Pôle 5 ch. 7, 20 décembre 2018, n° 17-21459
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Graham & Brown France (SARL), Graham & Brown Ltd (Sté), MCF Investissements (SAS), AS Création france (SAS), Société de Conception et d'Édition (SAS), Décoralis (SA), AS Création Tapeten AG (Sté)
Défendeur :
Autorité de la concurrence, Ministre chargé de l'Économie
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Mollard
Conseillers :
MM. Lecaroz, Claver
Avocats :
Mes Belgin Pelit-Jumel, Loubeyre, Teytaud, Christol
LA COUR,
Vu la décision de lAutorité de la concurrence n° 14-D-20 du 22 décembre 2014 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur du papier peint en France;
Vu larrêt de la cour dappel de Paris n° RG 15/01855 du 14 avril 2016, rectifié par arrêt n° RG 16/10592 du 30 juin 2016, ayant partiellement réformé cette décision;
Vu larrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, du 8 novembre 2017 (pourvois nos 16-17.226 et 16-17.330), ayant partiellement cassé ledit arrêt;
Vu la déclaration de saisine après cassation déposée au greffe de la cour dappel de Paris le 22 novembre 2017 par les sociétés Graham & Brown France SARL et Graham & Brown Limited, enregistrée sous le numéro RG 2017/21459;
Vu lexposé des moyens déposé au greffe de la cour le 21 décembre 2017 par les sociétés Graham & Brown France SARL et Graham & Brown Limited;
Vu les déclarations de saisine après cassation déposées au greffe de la cour dappel de Paris le 8 janvier 2018 par les sociétés MCF Investissements SAS, Société de Conception et dEditiôn SAS, Décoralis SA ainsi que AS Création France SAS et AS Création Tapeten AG, enregistrées respectivement sous les numéros RG 2018/00548, 2018/00552, 2018/00553 et 2018/00555 ;
Vu lordonnance du délégué du premier président de la cour en date du 27 février 2018 ordonnant la jonction de lensemble de ces recours sous le numéro RG 2017/21459;
Vu les observations du ministre chargé de lÉconomie déposées au greffe de la cour le 25 avril 2018;
Vu les obervations de lAutorité de la concurrence déposées au greffe de la cour le 15 mai 2018;
Vu le mémoire en réplique déposé au greffe de la cour le 5 septembre 2018 par les sociétés Graham & Brown France SARL et Graham & Brown Lirnited;
Vu les mémoires en réplique déposés au greffe de la cour le 12 septembre 2018 par les sociétés MCF Investissements SAS, Société de Conception et dEdition SAS, Décoralis SA ainsi que AS Création France SAS et AS Création Tapeten AG;
Vu lavis écrit du ministère public en date du 23 octobre 2018, communiqué le même jour aux requérantes, à lAutorité de la concurrence et au ministre chargé de lEconomie;
Après avoir entendu à laudience publique du 25 octobre 2018 les conseils des requérantes, qui ont été mises en mesure de répliquer et ont eu la parole en dernier, ainsi que le représentant de lAutorité de la concurrence, celui du ministre chargé de lÉconomie et le ministère public;
FAITS ET PROCÉDURE
1. Par procès-verbal du 9 juin 2010, le rapporteur général adjoint de l'Autorité de la concurrence a reçu une demande de clémence présentée par la société Tapeten Fabrik Gebr. Rasch GmbH & Co. KG et sa filiale Rasch France SARL sur le fondement du IV de l'article L. 464-2 du Code de commerce.
2. Ces sociétés souhaitaient porter à la connaissance de l'Autorité de la concurrence (ci-après l'Autorité des informations établissant l'existence de pratiques potentiellement prohibées par les articles L. 420-1 du Code de commerce et 101, paragraphe 1, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (ci-après le " TFUE "), dans le secteur du papier peint.
3. Par décision n° 10-SO-07 du 4 novembre 2010, l'Autorité s'est saisie d'office des pratiques mises en œuvre dans le secteur du papier peint.
4. Le 8 juillet 2013, le rapporteur général de l'Autorité a notifié un grief unique se décomposant en trois branches, faisant grief aux entreprises concernées :
" D'avoir dans le secteur des papiers peints, mis en œuvre sur le territoire national des pratiques concertées consistant en des échanges d'informations (confidentielles ou relevant du secret des affaires) présentant un caractère sensible portant sur les conditions commerciales en matière de collections communes (en particulier celles réalisées par la société DOD et concernant d'autres clients communs comme notamment Socoda, Akzo Nobel, PPG, Delzongle Aquitaine, Delzongle Midi-Pyrénées, Maison du Papier Peint), ainsi que sur les niveaux prévisibles d'évolution tarifaire annuelle à venir concernant les prix des papiers peints et sur les niveaux d'évolution de leurs chiffres d'affaires mensuels et trimestriels. Ces échanges sont intervenus entre sociétés fournisseurs en situation de se faire concurrence sur le marché des papiers peints français qui ont ainsi directement et réciproquement bénéficié, grâce à cette concertation, d'informations susceptibles de leur permettre de prévoir, surveiller et contrôler leur comportement respect en matière de conditions commerciales, de prix et de volume de leurs chiffres d'affaires.
En mettant en œuvre ces pratiques, les destinataires des griefs ont mis en place sur le marché français des papiers peints un mode d'échanges d'informations substituant au libre jeu de la concurrence, à l'autonomie et à l'incertitude, une collusion entre concurrents.
Ces pratiques avaient pour objet et ont pu avoir pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser la concurrence sur le marché français des papiers peints, notamment en permettant à ces sociétés de faire obstacle à la fixation de conditions commerciales en matière de collections communes et des prix des papiers peints par le libre jeu du marché. Ceci leur a permis de garantir une meilleure maîtrise de leur politique et/ou stratégie commerciale sur les conditions commerciales en matière de collections communes, d'évolution tarifaire annuelle de prix de papiers peints et d'évolution de leur chiffre d'affaires et tendre ainsi à limiter de fait l'accès au marché ou le libre exercice de la concurrence entre entreprises.
Elles sont prohibées par les articles 101 [du] TFUE et L. 420-1 1° et 2° du Code de commerce.
Ces pratiques ont été mises en œuvre au moins depuis le 17 mai 2006 et jusqu'au 30 novembre 2010. La participation respective des entreprises à la pratique relevée s'établit comme suit :
- du 17 mai 2006 au 30 novembre 2010 pour les échanges d'informations sur les conditions commerciales en matière de collections communes et les échanges sur les niveaux prévisibles d'évolution tarifaire à venir relatifs aux prix des papiers peints : L'Editeur SA, Grandeco Wall Fashion Group NV SA (et imputé également à GIMV NV), MCF Investissement SAS (et imputé également à Decoralis SA), AS Création France SAS et AS création Tapeten AG Rasch France SARL (et imputé également à Tapeten Fabrik Gebr. Rasch GmbH & Co. KG), Société de Conception et d'Edition SCE SAS (et imputé également à Decoralis SA, AS création France SAS et AS Création Tapeten AG), Zambaiti France SAS (et imputé également à Zambaiti International Srl);
- courant avril 2010 pour les éqhanges d'informations sur leurs chiffres d'affaires mensuels et trimestriels : L'Editeur SA, Graham & Brown SARL (et imputé également à Graham & Brown Limited), Grandeco Wall Fashion Group NV SA (et imputé également à GIMV NV), MCF Investissement SAS (et imputé également à Decoralis SA, AS Création France SAS et AS Création Tapeten AG), Rasch France SARL (et imputé également à Tapeten Fabrik Gebr. Rasch GmbH & Co. KG), Société de Conception et d'Edition (SCE) SAS (et imputé également à Decoralis SA, AS Création France SAS et AS Création Tapeten AG), Zambaiti France SAS (et imputé également à Zambaiti International)
- le 2 septembre 2010 pour les échanges d'information sur les niveaux prévisibles d'évolution tarifaire à venir relatifs aux prix des papiers peints : Graham & Brown SARL (et imputé également à Graham & Brown Limited) ".
5. Par décision n° 14-D-20 du 22 décembre 2014 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur du papier peint en France (ci-après la " décision attaquée "), l'Autorité de la concurrence a sanctionné plusieurs sociétés pour avoir mis en œuvre tout ou partie des pratiques concertées consistant en des échanges d'informations présentant un caractère sensible portant:
- sur les conditions commerciales en matière de collections communes (première branche du grief);
- sur les niveaux prévisibles d'évolution tarifaire annuelle à venir concernant les prix des papiers peints (deuxième branche du grief) et
- sur le niveau d'évolution de leurs chiffres d'affaires mensuels et trimestriels (troisième branche du grief).
6. L'Autorité a notamment infligé à la société Graham & Brown France SARL (ci-après la " société G&B France ", solidairement avec sa société mère Graham & Brown Limited (ci-après la " société G&B Limited "), une sanction de 247 000 euros au titre de leur participation aux pratiques objet de la deuxième branche du grief.
7. Elle a également sanctionné les sociétés MCF Investissement SAS (ci-après la " société MCF ") et Société de Conception et d'Édition SAS (ci-après, la " société SCE ") à hauteur, respectivement, de 1 415 000 euros et 3 564 000 euros, au titre de leur participation à l'ensemble des pratiques. La société Décoralis SA, société mère des sociétés MCF et SCE pour la période du 17 mai 2006 au 18 décembre 2008, a été déclarée solidairement responsable du paiement de ces sanctions à concurrence de 1 985 000 euros; les sociétés Décoralis SA, AS Création France SAS et AS Création Tapeten AG, sociétés mères des sociétés MCF et SCE pour la période du 19 décembre 2008 au 30 novembre 2010, ont été déclarées solidairement responsables du paiement desdites sanctions à concurrence de 2 994 000 euros.
8. Les sociétés G&B France et G&B Limited, d'une part, et les sociétés MCF, SCE, Décoralis, AS Création Franco ct AS Création Tapeten, d'autre part, ont formé, les unes, un recours en annulation, les autres, un recours en réformation de la décision attaquée.
9. Par arrêt du 14 avril 2016, rectifié le 30 juin 2016 (ci-après l' "arrêt du 14 avril 2016 "), la cour d'appel de Paris, faisant partiellement droit aux seuls moyens des sociétés G&B France et G&B Limited, MCF, SCE, Décoralis ainsi que AS Création France et AS Création Tapeten contestant le montant des sanctions, a réformé la décision attaquée et, statuant à nouveau, a
- fixé le montant de la sanction pécuniaire infligée à la société G&B France solidairement avec la société G&B Limited, à la somme de 67 045 euros
- fixé le montant de la sanction pécuniaire infligée à la société MCF à la somme de 594 043 euros
- fixé lemontant de la sanction pécuniaire infligée à la société SCE à la somme de 1 496 310 euros
- déclaré les sociétés Décoralis et AS Création France et AS Création Tapeten solidairement responsables du paiement des sanctions pécuniaires infligées aux sociétés MCF et SCE à hauteur de, respectivement, 1 191 501 euros pour la société Décoralis et 898 851 euros pour les sociétés AS Création France et AS Création Tapeten.
10. Par arrêt du 8 novembre 2017 (pourvois nos 16-17.226 et 16-17.330), la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, a rejeté le pourvoi des sociétés G&B France et G&B Limited. Faisant en revanche droit au pourvoi du président de l'Autorité, elle a cassé l'arrêt du 14 avril 2016, mais seulement en ce que, réformant la décision attaquée concernant le montant des sanctions pécuniaires infligées aux sociétés G&B France et G&B Limited ainsi que MCF, SCE, Décoralis, AS Création France et AS Création Tapeten, il fixait le montant de leurs condamnations.
11. La présente cour a été saisie par les sociétés G&B France et G&B Limited, par déclaration du 22 novembre 2017, et par les sociétés MCF, SCF, Décoralis, AS Création France et AS Création Tapcten, par déclarations du 8 janvier 2018.
MOTIVATION
12. La cour relève d'emblée qu'à la suite du rejet du pourvoi des sociétés G&B France et G&B Limited, l'arrêt du 14 avril 2016 est devenu irrévocable en tant qu'il a constaté la réalité des pratiques reprochées à la société G&B France, Elle rappelle par ailleurs que les sociétés MCF, SCE, Décoralis ainsi que AS. Création France et AS Création Tapeten n'ont pas formé de recours en contestation de la décision attaquée, en tant que celle-ci a retenu que les sociétés MCF et SCF avaient participé aux pratiques qui leur étaient reprochées et que leurs agissements étaient imputables à leurs sociétés mères successives.
13. Dès lors, seul reste susceptible de contestation le montant des sanctions infligées aux requérantes par la décision attaquée.
14. Au paragraphe 225 de la décision attaquée, l'Autorité a indiqué qu'elle ferait application de son communiqué du 16 mai 2011 relatif à la méthode de détermination des sanctions pécuniaires (ci-après le " communiqué sanctions ") pour arrêter les sanctions infligées.
15. La cour constate qu'aucune des requérantes ne conteste le principe même de cette application.
A. Sur le recours des sociétés G&B France et G&B Limited
16. Les sociétés G&B France et G&B Limited demandent à la cour d'annuler ou de réformer l'article 2 de la décision attaquée en tant qu'il les condamne solidairement à une sanction pécuniaire de 247 000 euros et, statuant à nouveau, de fixer le montant de base de la sanction à 1 728 euros et d'y appliquer une première réduction de 80 %, afin de proportionner la sanction à la participation individuelle limitée de la société G&B France, et une seconde réduction de 70 % au titre du caractère d'entreprise mono-produit de cette société.
I. Sur la contestation de la valeur des ventes en relation avec l'infraction
17. Le point 23 du communiqué sanctions prévoit que, pour donner une traduction chiffrée à son appréciation de la gravité des faits et de l'importance du dommage causé à l'économie, l'Autorité retient, comme montant de base de la sanction pécuniaire, une proportion de la valeur des ventes, réalisées par chaque entreprise ou organisme en cause, de produits ou de services en relation avec l'infraction ou s'il y a lieu, les infractions en cause ".
18. Le point 24 du même communiqué précise que, " Si la valeur de ces ventes est donc prise comme référence pour déterminer, dans un premier temps, le montant de base de la sanction pécuniaire en fonction de la gravité des faits et de l'importance du dommage causé à l'économie, elle ne doit pas revenir une importance disproportionnée par rapport à d'autres éléments à prendre en considération pour en fixer le montant définitif ".
19. Enfin, aux termes du point 39 dudit communiqué, " la méthode décrite ci-dessus peut être adaptée dans les cas particuliers où l'Autorité estime que la référence à la valeur des ventes ou ses modalités de prise en compte aboutirait à un résultat ne reflétant manifestement pas de façon appropriée l'ampleur économique de l'infraction ou le poids relatif de chaque entreprise ou organisme qui y a pris part ".
20. En l'espèce, après avoir précisé que l'exercice comptable retenu pour déterminer la valeur des ventes de la société G&B France serait l'exercice 2010 (décision attaquée, § 234), l'Autorité a indiqué que la valeur des ventes en relation avec l'infraction réalisées au cours de cet exercice s'établissait à la somme de 11 636 000 euros (décision attaquée, § 235 et 236).
21. Les sociétés G&B France et G&B Limited font valoir, en premier lieu, que l'Autorité n'a pas respecté le principe de proportionnalité lorsqu'elle a déterminé l'assiette de la sanction qui leur a été infligée.
22. Elles rappellent que, alors que les autres entreprises mises en cause se sont vu reprocher des échanges d'information portant à la fois sur les conditions commerciales en matière de collections communes, sur les niveaux prévisibles d'évolution tarifaire annuelle à venir concernant les prix des papiers peints et sur le niveau d'évolution des chiffres d'affaires mensuels et trimestriels, la société G&B a été sanctionnée pour un seul échange d'informations concernant une hausse tarifaire, de sorte qu'elle en a été impliquée que dans une seule des trois branches du grief.
23. Elles considèrent, en conséquence, que l'Autorité ne pouvait leur appliquer la même règle de détermination de l'assiette de la sanction qu'aux autres mises en cause.
24. En second lieu, les requérantes soutiennent que, selon une pratique décisionnelle constante, le montant des ventes doit être diminué des remises qui impactent directement le chiffre d'affaires réalisé en relation avec l'infraction.
25. Selon elles, l'Autorité aurait donc dû déduire du chiffre d'affaires de l'exercice 2010 le montant des remises de fin d'année pour la distribution en grandes surfaces de bricolage, lesquelles se sont élevées, lors de cet exercice, à 1 119 000 euros pour la seule activité de vente de papiers peints, réduisant le montant de la valeur des ventes à prendre en compte à la somme de 10 517 000 euros.
26. En dernier lieu, les requérantes font valoir qu'ayant uniquement échangé des informations sur un niveau de hausse tarifaire, informations ne pouvant, par hypothèse, pas concerner des produits non reconduits ou des produits nouveaux, mais uniquement des produits reconduits, l'assiette de la sanction aurait dû être limitée à la seule part du chiffre d'affaires en relation avec la vente de produits reconduits, soit, selon l'étude Xerfi communiquée par les services d'instruction de l'Autorité, 60 % du chiffre d'affaires généré par l'activité de vente de papiers peints.
27. Elles invitent donc la cour à réduire l'assiette de la sanction à 6 310 200 euros (10 517 000 x 60 %).
28. L'Autorité, qui ne répond qu'au dernier moyen, souligne qu'en application d'une jurisprudence constante, doivent être pris en compte au titre de la détermination de la valeur des ventes, non les seuls produits particuliers ayant fait l'objet des pratiques concertées, mais ceux " en relation avec l'infraction ". Elle fait valoir qu'en l'espèce, il s'agit de l'ensemble des papiers peints vendus en France par la société G&B France, et non de la liste restreinte des seuls produits ayant fait l'objet des pratiques concertées.
29. Le ministre de l'Économie estime justifiée la demande de déduction des remises de fin d'année.
30. Il conclut en revanche au rejet du moyen pris de ce que seules ventes de produits reconduits auraient été affectées par la pratique. Il souligne que la démarche de l'Autorité, qui considère que la notion de valeur des ventes englobe les ventes réalisées sur le marché concerné par infraction, est conforme à la dernière jurisprudence française et européenne. Dès lors, selon le ministre, c'est à bon droit que l'Autorité a retenu la valeur des ventes de l'ensemble des catégories de produits relevant du secteur des papiers peints, peu important qu'il s'agisse de produits reconduits, non reconduits ou nouveaux.
31. En réplique, les sociétés G&B France et G&B Limited soutiennent qu'une entreprise ne saurait être empêchée de démontrer, conformément au communiqué sanctions, que certaines de ses ventes ne sont pas affectées et par conséquent " ne sont pas en relation avec l'infraction ". À cet égard, elles contestent la présomption selon laquelle une hausse tarifaire aurait nécessairement une influence sur la détermination des prix des produits nouveaux " qui se trouvent nécessairement mieux valorisés ", faisant valoir que, si la commercialisation de produits nouveaux et la diversification des gammes qui en découle maintiennent une attractivité commerciale auprès de la clientèle, elles ne permettent pas d'augmenter les prix, dont le niveau général stagne ou baisse, comme le confirme la dégradation des comptes de résultat de toutes les entreprises du secteur du papier peint.
32. En premier lieu, la cour rappelle qu'il est constant que la part du chiffre d'affaires de l'entreprise qui provient des produits ou services faisant l'objet de l'infraction est de nature à donner une indication de l'ampleur de celle-ci (en ce sens, CJUE, arrêt du 9 juillet 2015, InnoLux/Cornmission, C-231/14 P, point 47 et jurisprudence citée).
33. Le choix, aux points 33 et suivants du communiqué sanctions, de se référer, pour la détermination du montant de base de la sanction, à la valeur des ventes des produits ou des services en relation avec l'infraction, n'est donc pas en soi critiquable, et ne saurait être remis en cause que s'il apparaît que, par exception, cette valeur est impropre à constituer une référence pertinente. Une telle hypothèse a été prévue au point 39 du communiqué sanctions, dont il ressort que l'Autorité renonce à se référer à la valeur des ventes des produits ou des services en relation avec l'infraction lorsque cette référence " aboutirait à un résultat ne reflétant manifestement pas de façon appropriée l'ampleur économique de l'infraction ou le poids relatif de chaque entreprise ou organisme qui y a pris part ".
34. Mais, en l'espèce, le chiffre d'affaires réalisé en 2010 sur le marché français du papier peint par la société G&B France reflète exactement l'ampleur économique de l'infraction comme le poids relatif de cette société sur ledit marché, qui est celui sur lequel s'est déployée l'infraction. Partant, en retenant comme assiette de la sanction l'ensemble des ventes de papiers peints réalisées, en France et au cours de l'exercice 2010, par la société G&B France, l'Autorité a exactement proportionné cette assiette à l'ampleur économique de l'infraction.
35. Certes, la société G&B France s'est limitée à un seul échange d'informations sur les niveaux prévisibles d'évolution tarifaire annuelle à venir concernant les prix des papiers peints, tandis que les autres entreprises mises en cause se sont vu reprocher des échanges d'information portant non seulement sur les niveaux prévisibles d'évolution tarifaire annuelle, mais aussi sur les conditions commerciales en matière de collections communes et sur le niveau d'évolution des chiffres d'affaires mensuels et trimestriels. Toutefois, conformément à son communiqué sanctions, l'Autorité a pris en compte cette circonstance propre à la société G&B France au stade de l'individualisation des sanctions, en diminuant, pour ce motif, le montant de base de la sanction pour cette société (décision attaquée, § 301).
36. Le moyen pris de la violation du principe de proportionnalité au stade de la détermination de l'assiette de la sanction, est donc écarté.
37. En deuxième lieu, le point 23 du communiqué sanctions est ainsi libellé :
" Pour donner une traduction chiffrée à son appréciation de la gravité des faits et de l'importance du dommage causé à l'économie, l'Autorité retient, comme montant de base de la sanction pécuniaire, une proportion de la valeur des ventes, réalisées par chaque entreprise ou organisme en cause, de produits ou de services en relation avec l'infraction ou, s'il y a lieu, les infractions en cause (2). La valeur de ces ventes constitue en effet une référence appropriée et objective pour déterminer le montant de base de la sanction pécuniaire, dans la mesure où elle permet d'en proportionner au cas par cas l'assiette à l'ampleur économique de l'infraction ou des infractions en cause, d'une part, et au poids relatif sur le(s) secteur(s) ou marché(s) concerné(s), de chaque entreprise ou organisme qui y a participé, d'autre part. Elle est donc retenue par l'Autorité, à l'instar d'autres autorités de concurrence européennes, de préférence au chiffre d'affaires total de chaque entreprise ou organisme en cause, qui peut ne pas être en rapport avec l'ampleur de ces infractions et le poids relatif de chaque participant sur le(s) secteur(s) ou marché(s) concerné(s). " (Souligné par la cour).
38.Le point 33 du communiqué sanctions précise :
" La référence prise par l'Autorité pour donner une traduction chiffrée à son appréciation de la gravité des faits et de l'importance du dommage causé à l'économie est la valeur de l'ensemble des catégories de produits ou de services en relation avec l'infraction, ou s'il y a lieu avec les infractions, vendues par l'entreprise ou l'organisme concerné durant son dernier exercice comptable complet de participation à la qualification de l'infraction ou des infractions effectuée par l'Autorité, au regarde leur objet ou de leurs rejets anticoncurrentiels, détermine ces catégories de produits ou de services. " (Souligné par la cour).
39. Il ressort de ces points du communiqué sanctions que, dès l'instant où une catégorie de produits ou de services est " en relation avec l'infraction ", la valeur des ventes de cette catégorie de produits ou de services doit être prise en compte. Ainsi que le précise le point 33 du communiqué sanctions, c'est la qualification de l'infraction, effectuée au regard de son objet ou de ses effets, qui permet de déterminer les catégories de produits ou de services en relation avec cette infraction. Il n'est, en revanche, fait aucune référence à une nécessaire affectation des ventes de ces catégories de produits ou services par l'infraction pour pouvoir prendre en compte leur valeur.
40. Le choix fait par l'Autorité de ne pas prendre en compte le critère de l'affectation des ventes par l'infraction, apparaît justifié.
41. En effet, outre que l'exigence de proportionnalité ne l'impose pas, l'obligation de mettre un tel critère en œuvre contraindrait l'Autorité, non certes pas à démontrer, pour chaque catégorie de produits ou services, que leurs ventes ont été réellement affectées par l'entente, mais à vérifier l'affirmation des entreprises incriminées selon laquelle les ventes de certaines catégories de produits ou services n'ont pas pu être affectées. Or une telle exigence, en obligeant les services d'enquête de l'Autorité à consacrer un temps important à de telles vérifications, limiterait très sensiblement l'efficacité de son action.
42. Surtout, ladite obligation priverait largement d'effet dissuasif les sanctions que prononce l'Autorité, puisque chaque entreprise pourrait espérer, en cas de poursuites, voir sa sanction calculée sur la base d'un chiffre d'affaires très inférieur à celui qu'elle réalise sur le marché sur lequel se déroule l'entente. A l'inverse, l'approche retenue par l'Autorité est plus conforme à l'exigence de prévisibilité dans la sanction, et donc à son caractère dissuasif, toute entreprise se livrant à des pratiques anticoncurrentielles sur un marché donné étant d'emblée en mesure de savoir que la sanction qu'elle encourt sera, principe, calculée sur la totalité du chiffre d'affaires qu'elle réalise sur ledit marché.
43. Enfin, si, conformément au principe d'autonomie procédurale, l'Autorité n'est pas liée par les règles de droit de la concurrence de l'Union relatives au calcul des sanctions, la cour juge opportun de souligner que la détermination de la valeur des ventes est arrêtée de la même façon au niveau européen. C'est ainsi que, dans son arrêt du 23 avril 2015, LG Display et LG Display Taiwan/Commission, C-227/14 P, la Cour de justice a approuvé, dans les termes suivants, le Tribunal d'avoir retenu l'ensemble des ventes réalisées sur le marché concerné par l'infraction : " 56. En l'espèce, le Tribunal a donc jugé à bon droit, au point 97 de l'arrêt attaqué, que la possibilité pour la Commission d'inclure dans la valeur des ventes pertinentes aux fins du calcul du montant de l'amende les ventes de LCD cartellisés faites par les requérantes à LGE et à Philips dépend non pas de la question de savoir si ces ventes refrisaient à des prix influencés par l'entente, mais du simple fait que celles-ci étaient réalisées sur un marché affecté par l'existence d'une entente à laquelle les requérantes participaient.
[...]
58. En conséquence, ayant constaté, au point 69 de l'arrêt attaqué, dans le cadre de son appréciation souveraine des faits, sans que les requérantes invoquent la moindre dénaturation, que les ventes de LCD cartellisés effectuées par ces dernières à LGE et à Philips ont été réalisées sur le marché concerné par l'infraction, c'est sans commettre d'erreur de droit que le Tribunal a estimé, aux points 71 et 72 de cet arrêt, que la Commission était en droit de tenir compte desdites ventes pour calculer le montant de l'amende à leur infliger, sans qu''il importe de savoir si LGE et Philips leur ont effectivement payé des prix majorés en raison de l'entente et si elles ont répercuté cette éventuelle majoration sur le prix des produits finis intégrant les LCD cartellisés qu'elles ont vendus aux consommateurs dans l'EEE.
59. Dans ces conditions, le Tribunal n'était tenu ni de préciser les raisons pour lesquelles les ventes desdits LCD réalisées par LGD auprès de LGE et de Philips, en dépit des clauses contractuelles liant LGD à ces dernières dans le cadre de leur accord d'entreprise commune, auraient pu fausser la concurrence sur le marché pertinent, ni d'examiner les preuves fournies par les requérantes à cette fin.
[...]
64. Contrairement à ce que font valoir les requérantes, le Tribunal n'a, ce faisant, nullement fait prévaloir une présomption irréfragable selon laquelle toutes les ventes réalisées sur le marché pertinent ont été affectées par l'infraction en cause. En revanche, le Tribunal a considéré, par une motivation qui, ainsi qu'il résulte despjoints 48 à 59 du présent arrêt, n'est entachée d'aucune erreur de droit, que, même en l'absence de toute preuve que les ventes des LCD cartellisés par les requérantes à leurs sociétés mères ont été affectées par cette infraction, ces ventes peuvent néanmoins être prises en compte (aux fins du calcul du montant de l'amende à infliger aux requérantes, dès lorsqu'elles ont été réalisées sur le marché concerné par l'infraction...) " (souligné par la cour).
44. En l'espèce, il est constant que l'ensemble des pratiques incriminées se sont déroulées sur le marché français du papier peint. Dès lors, c'est à juste titre que l'Autorité a considéré que l'ensemble des ventes de papiers peints réalisées sur le marché français étaient en relation avec la deuxième branche du grief, sans qu'il y ait lieu d'opérer une distinction selon que les produits vendus en 2010 par la société G&B France étaient des produits reconduits ou nouveaux, ou selon que cette société envisageait ou non de le reconduire en 2011.
45. La cour ajoute surabondamment que la pratique reprochée à la société G&B France est la communication d'informations sur les niveaux prévisibles d'évolution tarifaire annuelle à venir concernant les prix des papiers peints, c'est-à-dire une information globale, sur laquelle les aléas de commercialisation de telle ou telle référence n'ont pu avoir aucune incidence. Plus surabondamment encore, elle souligne que les produits commercialisés pour la première fois en 2010 (produits nouveaux) étaient tout à fait susceptibles de faire l'objet d'échanges d'informations sur les niveaux prévisibles d'évolution tarifaire annuelle à venir concernant leurs prix ; quant aux produits non reconduits en 2010, ils n'ont, par hypothèse, fait l'objet d'aucune vente au cours de cet exercice, de sorte qu'il n'y a rien à déduire du chiffre d'affaires 2010 ; enfin, les requérantes ne démontrent pas qu'au 2 septembre 2010, le choix de ne pas reconduire certains produits en 2011 avait déjà été fait ou qu'il n'a pas été éclairé par l'échange d'informations incriminé.
46. En dernier lieu, la demande des requérantes de voir écarter de la valeur des ventes les remises de fin d'année pour la distribution en grandes surfaces de bricolage, doit être accueillie. En effet, ces remises dont l'Autorité n'allègue pas qu'il s'agirait de montants versés aux distributeurs au titre de la coopération commerciale (" marges arrière ") viennent en déduction du chiffre d'affaires réalisé sur le marché du papier peint par la société G&B France.
47. Selon les éléments fournis par les requérantes, et non contestés par l'Autorité et le ministre, le montant de ces remises s'est élevé, pour l'exercice 2010, à 1 119 000 euros.
48. La valeur des ventes servant d'assiette au calcul de la sanction doit donc être réduit à la somme de 10 517 000 euros. II en sera tenu compte ci-après.
2. Sur la contestation de la durée de la pratique
49. Les sociétés G&B France et G&B Limited font valoir, à titre principal, que l'Autorité n'est pas fondée à sanctionner une pratique non visée par la notification des griefs, quand bien même elle aurait été dénoncée par le rapport et les parties s'en seraient-elles expliquées.
50. Or, en l'espèce, la durée de participation de trois mois, retenue à l'encontre de la société G&B France par la décision attaquée, n'aurait pas été visée dans la notification des griefs, par laquelle serait reprochée une pratique s'étendant sur une seule journée.
51. Elles soutiennent, à titre subsidiaire, que l'infraction reprochée à la société G&B France constitue un acte isolé, accompli le 2 septembre 2010.
52. Selon les requérantes, il résulte de la jurisprudence tant nationale (Cass. com., arrêt du 15 mars 2011, pourvoi n° 09-17.055) que de l'Union (TUE, arrêt du 7 juillet 1994, Dunlop Slazenger/Commission, T-43/92, point 79) qu'il n'est pas possible de déduire la preuve d'une poursuite d'une infraction de la seule finalité anticoncurrentielle de l'acte initial. En l'espèce, l'Autorité ne relèverait aucun acte matériel imputable à la société G&B France ni persistance d'une intention délictuelle quelconque imputable à cette société postérieurement à l'acte isolé du 2 septembre 2010 ; ladite société n'aurait, notamment, pas partagé l'objectif commun poursuivi par l'ensemble des participants à l'entente. Ainsi, l'infraction reprochée à la société B&G France ne serait pas une infraction continue, mais constituerait au contraire un acte isolé.
53. En conséquence, l'Autorité aurait dû retenir une durée d'une seule journée soit un coefficient de durée de 1/365e, et non, comme elle l'a fait, une durée de trois mois, entre le 2 septembre 2010 et le 30 novembre 2010, date de la fin des pratiques reprochées aux autres entreprises.
54. L'Autorité répond que, par leurs arguments, développés à l'occasion de la discussion du montant de la sanction pécuniaire, les requérantes tentent en réalité de remettre en cause la durée du grief, pourtant définitivement validé par la cour première saisie, dans son arrêt du 14 avril 2016.
55. Elle ajoute qu'en tout état de cause, et ainsi qu'elle l'a relevé aux paragraphes 147, 185, 288 et suivants de la décision attaquée, la responsabilité d'une entreprise est retenue lorsqu'elle a participé à des réunions en ayant connaissance de leur objet anticoncurrentiel, un seul échange ponctuel pouvant suffire à réaliser la finalité anticoncurrentielle recherchée (CJUE, 4 juin 2009, T-Mobile, C-08/08, point 59). L'Autorité considère qu'elle a suffisamment démontré, aux paragraphes 173 et suivants de la décision attaquée, que l'échange ponctuel du 2 septembre 2010 avait suffi à réaliser la finalité anticoncurrentielle recherchée dans la mesure où cette concertation visait une harmonisation des niveaux d'évolution tarifaire annuelle à venir concernant les prix des papiers peints et que les prévisions de hausse globale étaient discutées entre concurrents une fois par an à compter du mois d'août pour l'année suivante.
56. En conséquence, l'Autorité soutient qu'il y a lieu de retenir la période allant de l'entrée de la société G&B France dans la pratique concertée, c'est-à-dire le 2 septembre2010, jusqu'à la fin de cette pratique, telle qu'elle a été notifiée à toutes les parties, fixée au 30 novembre 2010, ce qui correspond à une durée de trois mois.
57. Le ministre de l'Économie soulève l'irrecevabilité du premier moyen, dans la mesure où la Cour de cassation n'a renvoyé l'affaire à la présente cour qu'aux fins de statuer sur le montant des sanctions, et non sur le respect de la procédure par l'Autorité ou sur le bien-fondé du grief.
58. Sur le bien-fondé de ce moyen, le ministre rappelle que, selon une jurisprudence constante, le collège de l'Autorité n'est pas tenu par l'analyse des rapporteurs et que seul importe que la requérante ait pu se défendre utilement sur le grief qui lui a été notifié, ce qui a été le cas de l'espèce.
59. Quant au second moyen, le ministre fait valoir que l'argumentation des requérantes n'est pas fondée dans la mesure où l'échange anticoncurrentiel auquel s'est livrée la société G&B France visait à harmoniser les comportements des opérateurs sur le marché du papier peint pour l'année qui suivait et que c'est donc à bon droit et de façon proportionnée que l'Autorité a estimé que la participation de cette société à l'infraction avait duré jusqu'au terme de l'entente.
60. En réplique, les sociétés G&B France et G&B Limited font valoir que, dans ses observations devant la cour, l'Autorité se contente de rappeler que l'infraction reprochée à la société G&B France est constituée, sans pour autant démontrer les éléments qu'elle a retenus pour apprécier sa durée ainsi que le caractère continu qu'elle impute à cette infraction. Elles ajoutent que l'Autorité leur étend une responsabilité de comportement auquel la société G&B France n'a pas participé et d'objectifs communs poursuivis par les autres participants auxquels elle n'a jamais entendu contribuer, qu'elle ne pouvait raisonnablement prévoir et dont elle n'a pu accepter les risques.
61. S'agissant du premier moyen des requérantes, dans la mesure où il vise à contester, non pas la réalité de l'infraction qui leur est reprochée, mais la durée de celle-ci, telle qu'est prise en compte pour déterminer le montant de la sanction, il doit être déclaré recevable.
62. Sur le fond, c'est à tort que les requérantes soutiennent que la durée de participation aux pratiques retenue à leur encontre - trois mois - n'était pas visée dans la notification des griefs. En effet, la notification des griefs précise expressément, à l'égard de toutes les entreprises mises en cause, que les pratiques incriminées " ont été mises en œuvre au moins depuis le 17 mai 2006 et jusqu'au 30 novembre 2010 ". Il en découle que, lors de la notification des griefs, il a été reproché à toutes les entreprises mise en cause, y compris les sociétés G&B France et GB Limited, de s'être livrées à des pratiques anticoncurrentielles "jusqu'au 30 novembre 2010", seul variant le début des pratiques, en fonction des entreprises concernées et de la nature des informations échangées.
63. Le moyen, qui manque donc en fait, doit être rejeté.
64. S'agissant du second moyen des requérantes, la cour rappelle qu'une pratique anticoncurrentielle revêt un caractère instantané lorsqu'elle est réalisée en un trait de temps, dès la commission des faits qui la constituent et revêt au contraire un caractère continu lorsque l'état délictuel se prolonge dans le temps par la réitération constante ou par la persistance de la volonté anticoncurrentielle après l'acte initial sans qu'un acte matériel ait nécessairement à la renouveler dans le temps.
65. S'agissant d'un échange d'informations anticoncurrentielles, la participation à l'infraction se prolonge pendant toute la période où l'entreprise exploite les informations obtenues de ses concurrents, cette exploitation suffisant, en l'absence de distanciation publique, à caractériser la persistance de la volonté anticoncurrentielle après l'acte initial.
66. En l'espèce, c'est durant la seule journée du 2 septembre 2010 que les informations en cause ont été échangées, alors que les pratiques reprochées aux autres entreprises, et auxquelles la société G&B France n'a pas participé, ont été mises en œuvre à partir de mai 2006, pour les échanges d'informations sur les conditions commerciales en matière de collections communes, et en avril 2010, pour les échanges d'informations sur les chiffres d'affaires mensuels et trimestriels.
67. Mais, d'une part, les informations échangées le 2 septembre 2010 ont conservé leur intérêt dans les mois suivants pour les deux participantes à cet échange, celles-ci ayant pu déterminer leur comportement futur, et notamment leur politique de hausse tarifaire pour l'année à venir, en ayant connaissance des intentions de leur concurrent. À cet égard, les requérantes n'allèguent, et a fortiori ne démontrent pas, qu'entre septembre et novembre 2010, la société G&B France se serait abstenue d'exploiter les informations obtenues de la société Rasch France. Les effets de la participation de la société G&B ont donc perduré jusqu'à la date de cessation des pratiques, le 30 novembre 2010, ainsi que l'a souligné l'Autorité au paragraphe 189 de la décision attaquée.
68. D'autre part, même si l'échange d'informations auquel a participé la société G&B France s'est déroulé tout entier dans la seule journée du 2 septembre 2010, la participation de cette société s'est trouvée constamment renouvelée, jusqu'au 30 novembre 2010, date de cessation de l'ensemble des pratiques, par le choix qui a été le sien de ne pas se distancier publiquement de la pratique concertée, alors qu'une telle démarche aurait rétabli, dans toute la mesure du possible, une opacité, que l'échange d'information avait précisément pour objet de faire disparaître, concernant sa politique tarifaire pour l'année à venir.
69. Au vu des considérations qui précèdent, c'est à juste titre que l'Autorité a constaté que la société G&B France avait pris part à une pratique concertée jusqu'au 30 novembre 2010.
70. Le moyen est rejeté.
3. Sur la contestation du refus de reconnaître à la société G&B France le caractère d'entreprise mono-produit
71. Au titre des " autres éléments d'individualisation ", le point 48 du communiqué sanctions précise que le montant de base peut être adapté à la baisse pour tenir compte du fait que " l'entreprise mène l'essentiel de son activité sur le secteur ou marché en relation avec l'infraction (entreprise "mono-produit").
72. La prise en compte du caractère d'"entreprise mono-produit" a pour finalité d'éviter que l'application de la méthode normale de détermination des sanctions aboutisse à des montants disproportionnés.
73. Conformément au communiqué sanctions (point 23), le montant de base de la sanction pécuniaire représente une proportion de la valeur des ventes, réalisées par chaque entreprise concernée, de produits ou de services en relation avec l'infraction. Or, pour une entreprise dont la valeur de ces ventes est proche de son chiffre d'affaires, parce que ce dernier est réalisé pour l'essentiel dans le cadre des ventes de produits en relation avec l'infraction (entreprisse mono-produit), la méthode normale de détermination de la sanction peut conduire à lui infliger une sanction représentant un pourcentage très élevé de son chiffre d'affaires.
74. Pourtant, le caractère dissuasif d'une sanction s'apprécie davantage au regard du pourcentage du chiffre d'affaires de l'entreprise concernée que représente la sanction qu'au regard du montant de cette sanction.
75. Ainsi, la prise en compte du caractère d'entreprise mono-produit, prévu au point 48 du communiqué sanctions, s'analyse comme un exemple de mise en œuvre de la volonté, exprimée par l'Autorité au point 24 du même communiqué, de ne pas accorder une importance disproportionnée à la valeur des ventes par rapport à d'autres éléments à prendre en considération, tel le chiffre d'affaires.
76. C'est à la lumière de ces considérations qu'il convient d'apprécier les moyens des requérantes revendiquant la qualité d'entreprise mono-produit pour la société G&B France.
77. Les sociétés G&B France et G&B Limited vont valoir, d'une part, que la valeur des ventes en France en relation avec l'infraction de la société G&B France doit être comparée au seul chiffre d'affaires réalisé par cette même société. Or, selon ces requérantes, il est incontestable que la société G&B France mène " l'essentiel de son activité " sur le secteur du papier peint, au sens du communiqué sanctions, puisque le chiffre d'affaires lié aux papiers peints en 2010 représentait 76,82 % de son chiffre d'affaires.
78. Ellles avancent, d'autre part, qu'au regard des comptes consolidés le caractère mono-produit est encore plus affirmé puisque les chiffres d'affaires des sociétés G&B France et G&B Limited liés aux papiers peints en 2010 représentaient 97 % du chiffre d'affaires du groupe.
79. L'Autorité soutient, tout d'abord, que la notion d'entreprise à laquelle renvoient l'article L. 464-2 du Code de commerce et le communiqué sanctions, notamment son point 48 relatif aux entreprises mono-produit, doit s'entendre comme tout groupe de sociétés constituant une entité économique.
80. L'Autorité fait valoir, ensuite, qu'il ressort d'une pratique décisionnelle constante, confirmée par la jurisprudence, que, pour déterminer si une entreprise peut revendiquer une réduction de sanction au titre du mono-produit, il convient de rapporter la valeur des ventes en relation avec l'infraction au chiffre d'affaires global de l'entreprise sanctionnée. Selon l'Autorité, seule cette analyse permet d'identifier les situations dans lesquelles l'assiette de la sanction, c'est-à-dire la valeur des ventes en relation avec l'infraction, est proche du chiffre d'affaires de l'entreprise sanctionnée et peut alors conduire à une réduction de la sanction. En l'espèce, l'Autorité souligne qu'elle a retenu la responsabilité de la société G&B France en tant qu'auteur des pratiques en cause et celle de la société G&B Limited en sa qualité de société mère de la première. Ces deux sociétés formant ensemble une seule et même entité économique, l'Autorité estime que c'est au regard de cette même " entreprise " au sens du communiqué sanctions qu'il convient d'apprécier l'éventuel caractère mono-produit.
81. Enfin, l'Autorité rappelle que, dans la présente affaire, la Cour de cassation a dit que seule la valeur des ventes en lien avec l'infraction pouvait être prise en compte lors de l'appréciation du caractère mono-produit de l'entreprise en cause. Dès lors, il n'y aurait pas lieu de comparer la valeur de ventes des sociétés du groupe G&B au chiffre d'affaires du groupe pour déterminer si l'entreprise mène " l'essentiel de son activité " sur le secteur du papier peint, au sens du communiqué sanctions.
82. L'Autorité constate que la valeur des ventes retenue pour le calcul de la sanction, à savoir la valeur des ventes en lien avec l'infraction réalisées en France par la société G&B France, comparée au chiffre d'affaires du groupe, représentait environ 10 % du chiffre d'affaires consolidé de l'entreprise et conclut que les deux sociétés ne sont pas fondées à soutenir qu'elles auraient dû bénéficier d'une réduction au titre d'une activité mono-produit.
83. Le ministre de l'Économie partage la même analyse que l'Autorité et en appelle au rejet du moyen.
84. Les sociétés G&B France et G&B Limited répliquent, d'abord, que l'interprétation préconisée par l'Autorité et le ministre remettrait en cause directement l'application du communiqué sanctions, car toute entreprise exerçant sur le territoire national se verrait refuser par principe et automatiquement le bénéfice de la notion d'activité mono-produit dès lors qu'elle est liée à des sociétés étrangères, sans même tenir compte de la nature effective de leur activité.
85. Elles soutiennent, par ailleurs, qu'il en résulterait une atteinte radicale aux principes d'égalité de traitement et de non-discrimination, en toute hypothèse injustifiable puisque cette sanction systématique exclurait toute proportionnalité et individualisation.
86. Enfïn, elles dénoncent l'incohérence du raisonnement de l'Autorité qui vise des sociétés différentes selon qu'il s'agit d'apprécier la valeur des ventes de l'entreprise partie à l'entente ou de déterminer l' " entreprise concernée " au sens du paragraphe 48 du communiqué sanctions relatives au mono-produit. Pour les requérantes, l'entreprise concernée par l'entente ne peut être que l'entreprise effectivement sanctionnée dont l'activité en relation avec l'infractionnel peut être comparée qu'à son propre chiffre d'affaires.
87. Il ressort de la décision attaquée qu'a été retenue la responsabilité de la société G&B France en tant qu'auteur de la pratique et celle de la société G&B Limited, en tant que société mère exerçant une influence déterminante sur le comportement de sa filiale. Les requérantes ne contestent pas cette analyse dans le cadre du présent recours.
88. Il s'ensuit que l' "entreprise", au sens tant de l'article L. 464-2 du Code de commerce que du communiqué sanctions, notamment son point 48, est constituée de l'entité formée par la société G&B France et sa société mère G&B Limited.
89. Il appartient donc aux requérantes d'établir que cette entité avait le caractère d'entreprise mono-produit.
90. Le chiffre d'affaires consolidé de la société G&B Limited s'élevait, en 2010, à 107 315 000 euros, suivant les explications des requérantes. La valeur des ventes de produits en relation avec l'infraction, d'un montant de 11 636 000 euros, qui constitue l'assiette de la sanction, ne représentait donc que 10,84 % du chiffre d'affaires de l'entreprise sanctionnée. Cette entreprise n'a, à l'évidence, pas la qualité d'entreprise mono-produit.
91. C'est en vain que les requérantes arguent de ce que la société G&B France, considérée isolément, a bien le caractère d'entreprise mono-produit ; en effet, elle n'est pas l'entreprise sanctionnée, laquelle, ainsi qu'il a été dit, est constituée de l'entité formée par cette société et sa société mère G&B Limited. C'est tout aussi vainement que les requérantes font valoir que le groupe G&B réalise 100 % de son activité dans le secteur du papier peint ; en effet, l'assiette de la sanction retenue n'est pas la valeur des ventes de papier peint réalisées au plan mondial par la société G&B Limited, société faîtière du groupe, mais la valeur des ventes de papier peint réalisées sur le marché français par la société G&B France, seul marché en lien avec l'infraction.
92. Contrairernent à ce que soutiennent les requérantes, il ne découle pas de l'analyse qui précède que toute filiale française, ou active sur le marché français, d'une société étrangère se verra automatiquement refuser la qualité d'entreprise mono-produit. D'une part, s'il apparaît que la société mère n'a pas exercé une influence déterminante sur le comportement de sa filiale, seule cette dernière sera sanctionnée, de sorte que c'est dans son seul chef que sera appréciée la qualité d'entreprise mono-produit. D'autre part, quand la société mère est sanctionnée solidairement avec sa filiale pour avoir exercé sur elle une influence déterminante, il est possible que soit constaté le caractère d'entreprise mono-produit de l'entité fondée par la société mère et sa filiale, si l'essentiel du chiffre d'affaires de cette entité est réalisé par la filiale sur le marché en relation avec l'infraction.
93. De même, il ne résulte de ladite analyse aucune violation du principe d'égalité et de non-discrimination. Lorsque la responsabilité de la société mère n'est pas engagée par le comportement de sa filiale, auteur des faits, cette dernière est seule condamnée au paiement de la sanction, la société mère pouvant notamment choisir de ne pas aider sa filiale, qui acquittera seule le montant de la sanction ; à l'inverse, lorsqu'est condamnée l'entité formée de la société auteur des faits et de sa société mère, cette dernière est personnellement tenue au paiement de la sanction. Dans ces conditions, aucune violation du principe d'égalité et de non-discrimination, eu égard à la différence entre les deux situations.
94. Il n'y a pas davantage de violation du principe de proportionnalité à refuser une réduction de sanction à l'entreprise tenue au paiement, lorsque celle-ci n'a pas la qualité d'entreprise mono-produit.
95. Le moyen est rejeté.
4. Sur l'allégation de l'insuffisante prise en compte de la moindre participation de la société G&B France aux pratiques
96. Aux paragraphes 300 et 301 de la décision attaquée, l'Autorité a, dans le cadre de l'individualisation de la sanction, tenu compte du fait que la société G&B France " n'est tenue pour responsable que de la seule deuxième branche du grief à savoir la pratique concertée consistant en des échanges sur les hausses tarifaires de l'année à venir, au demeurant la pratique la plus grave ", en diminuant sa sanction de 15 %.
97. Les sociétés G&B France et G&B Limited considèrent qu'en se bornant à réduire le montant de base de la sanction de 15 % pour tenir compte de la faible participation de la société G&B France aux pratiques, l'Autorité a manqué à son obligation d'individualisation dont les requérantes soulignent le caractère d'ordre public.
98. Elles font valoir qu'alors que le calcul du montant de base est, notamment, le produit de l'application à la valeur des ventes d'un coefficient de 10 %, traduisant la gravité des faits et d'importance du dommage causé à l'économie par les trois branches du grief cumulées, la société G&B France n'a participé qu'à la deuxième branche.
99. De plus, à la différence des autres entreprises mises en cause, la société G&B France n'a pas participé aux réunions dites " DOD ", tenues en 2007, 2008 et 2009, au cours desquelles des informations relatives aux hausses tarifaires envisagées étaient échangées et elle n'était pas davantage impliquée dans les échanges d'informations avec les grossistes. Sa participation à la deuxième branche du grief unique, serait donc minime et ponctuelle, sans commune mesure avec l'ampleur de la participation des autres entreprises sanctionnées.
100. Les requérantes ajoutent que l'échange d'informations auquel la société G&B France s'est livrée le 2 septembre 2010 n'a ni supprimé l'incertitude de son comportement ni permis de fixer, même indirectement, les prix, alors qu'il n'existait pas de grille ou de structure tarifaire commune semblable entre les concurrents, et qu'aucun système de vérification, de contrôle ou de surveillance entre concurrents n'a été mis en place.
101. Elles font enfin valoir que le défaut d'individualisation aboutit à une sanction disproportionnée, qui a absorbé la totalité des bénéfices de la société G&B France et produit un déficit d'exploitation et comptable affectant directement ses fonds propres.
102.Elles demandent dès lors à la cour d'accorder, à raison de la faible participation au grief, une réduction de 80 %.
103. L'Autorité, approuvée par le ministre de l'Économie, répond que, si elle a accordé le bénéfice d'une réduction de sanction à la société G&B France en raison de sa participation à une seule branche du grief sur les trois existantes, cette branche constitue de loin la plus grave puisqu'elle porte sur des hausses tarifaires, alors que la première branche concerne uniquement les collections communes, c'est-à-dire une petite partie des ventes de papiers peints, et la troisième branche porte sur des informations passées.
104. En tout état de cause, l'Autorité souligne qu'il n'y a pas lieu, au stade de l'examen des circonstances atténuantes, de rechercher si la société G&B France a participé moins longtemps que les autres entreprises en cause à la pratique, ce paramètre ayant déjà été pris en compte au stade de l'étude de la durée.
105. Quant à l'allégation de difficultés financières de la société G&B France, l'Autorité et le ministre répondent que l'évaluation de la capacité contributive d'un groupe de sociétés doit tenir compte de la situation financière de la société mère solidairement condamnée au paiement de l'amende (CA Paris, 23 mai 2017, Produits laitiers, RG 15/08224, point 723). Or la société mère G&B Limited, condamnée solidairement avec sa filiale, n'apporterait aucun élément s'agissant de sa propre situation financière.
106. La cour rappelle en préambule que le montant de base de la sanction a été calculé individuellement pour chacune des entreprises participantes, puisque, d'une part, l'assiette de la sanction d'une entreprise est égale à la valeur des ventes qu'elle a réalisées en relation avec l'infraction et qu'est appliqué un coefficient de durée qui dépend de la durée de participation de l'entreprise. Par ailleurs, c'est à juste titre que l'Autorité a appliqué le même coefficient de 10 %, traduisant la gravité du grief et l'importance du dommage à l'économie, l'une et l'autre devant s'apprécier de façon globale, tandis que l'inégale participation des entreprises au grief est prise en compte au stade de l'individualisation.
107, Quant à la demande des requérantes, d'abord, s'il est exact que la société G&B France n'a participé qu'à une seule des trois pratiques visées par le grief, à savoir l'échange d'informations sensibles sur les niveaux prévisibles d'évolution tarifaire annuelle à venir concernant les prix des papiers peints (deuxième branche du grief), c'est à juste titre que l'Autorité a souligné, au paragraphe 300 de la décision attaquée, qu'il s'agissait de la plus grave des trois pratiques.
108. En effet, ainsi que l'Autorité l'a parfaitement exposé aux paragraphes 272 à 274 de la décision attaquée, cette concertation portant sur les intentions de hausses tarifaires pour l'année à venir " revêt un intérêt stratégique ", car " les échanges d'informations sur le pourcentage de hausse entre fournisseurs concurrents permettent à ceux-ci d'afficher des augmentations relativement similaires, ce qui limite la capacité de négociation des distributeurs ".
109. La circonstance que la participation de la société G&B France s'est limitée à un unique échange avec la société Rasch France, le 2 septembre 2010, n'est pas de nature à remettre en cause le caractère de gravité de ce comportement, la cour constatant qu'en l'espèce, un unique échange au cours du second semestre suffisait aux entreprises pour s'informer mutuellement sur les hausses tarifaires qu'elles projetaient pour l'année à venir et, ainsi, déterminer leur comportement futur, et notamment leur politique de hausse tarifaire, en ayant connaissance des intentions de leurs concurrents.
110. Ensuite, la durée de participation de la société G&B France est certes très courte - trois mois - comparée aux autres entreprises mises en cause - quatre ans et demi. Mais, il en a déjà été tenu compte, puisque les sociétés G&B France et G&B Limited se sont vu appliquer un coefficient de durée beaucoup plus faible.
111. Enfin, dans la mesure où la société G&B France a été condamnée solidairement avec sa société mère, G&B Limited, et où les requérantes n'allèguent pas que cette dernière, société d'envergure mondiale, rencontrerait des difficultés à payer la sanction de 247 000 euros à laquelle la décision attaquée a condamné les requérantes solidairement, ladite sanction n'apparaît nullement disproportionnée.
112. À la lumière de ces considérations, la cour considère que la réduction de 15 % du montant de la sanction traduit une juste prise en compte de la moindre participation de la société G&B France aux pratiques anticoncurrentielles incriminées.
113. Elle ajoute que la comparaison du montant de 247 000 euros avec celui des sanctions infligées aux autres entreprises confirme, en tant que de besoin, que l'Autorité a pleinement tenu compte de cette moindre participation.
114. Le moyen sera rejeté conclusion sur le montant de la sanction
115. Compte tenu de la réduction de la valeur des ventes retenue comme assiette de la sanction, portée à 10 517 000 euros, le montant final de la sanction infligée aux sociétés G&B France et G&B Limited établit à 223 486 euros, arrondi à 223 000 euros, conformement au calcul ci-dessous :
10 517 000 (Valeur des ventes) x 10 % (coefficient gravité du dommage) x 0,25 (coefficient de durée) = 262 925 - 15 % (moindre participation de G&B aux pratiques) = 223 486 arrondi à 223 000
116. La décision attaquée sera réformée en ce sens.
117. La cour rappelle que le présent arrêt constitue le titre ouvrant droit à restitution des sommes versées en surplus au titre de l'exécution de la décision attaquée, partiellement réformée, ces sommes étant assorties des intérêts au taux légal à compter de la notification, valant mise en demeure, de cet arrêt avec, s'il y a lieu, capitalisation dans les termes de l'article 1154 du Code civil.
B. Sur les moyens des sociétés MCF, SCE, Décoralis, AS Création France et AS Création Tapeten
118. Les sociétés MCF, SCE, Décoralis, AS Création France et AS Création Tapeten demandent à la cour de réformer l'article 2 de la décision attaquée en tant qu'il inflige une sanction de 1 415 000 euros à la société MCF et une sanction de 3 564 000 euros à la société SCE, ainsi que son article 3, en tant qu'il déclare les sociétés AS Création France et AS Création Tapeten solidairement responsables à hauteur de 2 994 000 euros du paiement des sanctions infligées aux sociétés MCF et SCE, et, statuant de nouveau:
- à titre principal, de fixer à un montant de 594 043 euros, la sanction pécuniaire infligée à la société MCF, à un montant de 1 495 410 euros, celle infligée à la société SCE, et à un montant de 898 464 euros, la part de responsabilité conjointe et solidaire des sociétés AS Création France et AS Création Tapeten;
- à titre subsidiaire, de fixer à un montant de 975 088 euros, la sanction pécuniaire infligée à la société MCF, à un montant de 2 507 369 euros, celle infligée à la société SCE, et à un montant de 1 497 457 euros la part de responsabilité conjointe et solidaire des sociétés AS Création France et AS Création Tapeten.
1. Sur la contestation du refus de reconnaître aux sociétés MCF et SCE le caractère d'entreprise mono-produit
119. Les sociétés MCI, SCE, Décoralis, AS Création France et AS Création Tapeten demandent, à titre principal, que les sanctions pécuniaires qui ont été infligées aux sociétés MCF et SCE soient réduites de 70 % pour tenir compte du caractère d'entreprise mono-produit de ces sociétés,
120. Les requérantes font valoir que la Cour de cassation n'a pas remis en question le principe, retenu par la cour première saisie dans l'arrêt du 14 avril 2014, de l'homogénéité des bases de comparaison à prendre en compte pour déterminer l'activité mono-produit d'une entreprise. Selon ces sociétés, dès lors que l'Autorité retient la valeur des ventes d'une société comme assiette de la sanction, elle doit également se référer au chiffre d'affaires total de cette société pour déterminer si le critère du mono-produit est satisfait, peu important que celle-ci appartienne ou non à un groupe.
121. Les requérantes soutiennent qu'une comparaison de la valeur des ventes réalisée en relation avec l'infraction par la société auteur des faits avec le chiffre d'affaires du groupe auquel elle appartient constituerait une violation du principe d'égalité de traitement ou de non-discrimination, car elle aboutirait à apprécier la proportion représentée par une valeur comparable la valeur des ventes en relation avec l'infraction par rapport à des références différentes - le chiffre d'affaires de la société auteur des faits ou celui du groupe auquel elle appartient -, selon que la société contrevenante appartient ou non à un groupe, sans que cette différence de méthode soit justifiée par la différence de situation.
122. Exclues quasi-automatiquement et systématiquement du bénéfice de l'abattement au titre du caractère mono-produit, les entreprises appartenant à un groupe se verraient appliquer des sanctions disproportionnées.
123. Au surplus, l'appartenance à un groupe serait prise deux fois en considération au stade de l'individualisation : au titre du refus d'accorder la circonstance atténuante tenant au caractère mono-produit (point 48, premier tiret, du communiqué sanctions) et au titre de la prise en compte de circonstance aggravante tenant à l'appartenance à un groupe (point 49, second tiret du communiqué sanctions).
124. Faisant application à leur situation de la méthode qu'elles préconisent, les requérantes concluent que les sociétés MCF et SCE sont des entreprises mono-produit au sens du communiqué sanctions.
125. Elles ajoutent que, dans la présente espèce, l'Autorité a reconnu à l'entreprise Zambaiti le caractère d'entreprise mono-produit en comparant la valeur des ventes en relation avec l'infraction réalisées par la société Zambaiti France avec le chiffre d'affaires de cette même société, et non avec celui du groupe auquel elle appartient, alors que la responsabilité de sa société mère, Zambaiti International, a été retenue (décision attaquée, § 305).
126. Selon les requérantes, sauf à commettre une différence de traitement manifeste, l'Autorité aurait dû appliquer la même méthode pour les sociétés MCF et SCE.
127. L'Autorité répond, d'abord, que la notion de mono-produit est un outil d'individualisation de la sanction qui tend à rétablir une égalité de traitement entre les entreprises parties à une entente, au profit de celles qui développent une activité moins diversifiée que d'autres. En ce sens, l'Autorité fait valoir qu'elle a convenablement analysé, aux paragraphes 306 et 307 de la décision attaquée, si la méthode normale de détermination des sanctions n'aboutissait pas à des montants disproportionnés, au stade de l'individualisation de la sanction.
128. Elle fait valoir, ensuite, que la méthode d'évaluation préconisée par les requérantes a précisément été censurée par l'arrêt de cassation, en ce qu'elle intègre dans les termes de son analyse des valeurs de ventes sans lien avec l'infraction. L'Autorité souligne que le communiqué sanctions se réfère à la notion d'entreprise comme groupe constituant une unité économique et que c'est au regard de cette unité économique qu'il convient d'apprécier le caractère d'entreprise mono-produit. En l'espèce, l'Autorité rappelle avoir retenu la responsabilité des sociétés MCF et SCE, en tant qu'auteurs des pratiques, et celle des sociétés AS Création France et AS en tant que sociétés mères des premières, et que c'est donc au regard de l'entité économique formée par lesdites sociétés qu'il convient d'apprécier le caractère d'entreprise mono-produit.
129. En conséquence, dans la mesure où il ressort des paragraphes 306 et 307 de la décision attaquée que 4 % seulement du chiffre d'affaires consolidé du groupe MCF et 11 % seulement du chiffre d'affaires consolidé du groupe SCF relevaient de l'activité papiers peints, l'Autorité considère qu'elle a refusé à bon droit de reconnaître le caractère d'entreprise mono-produit au groupe constitué par les sociétés MCF, AS Création France et AS Création Tapeten, d'une part, et au groupe constitué par les sociétés SCE, AS Création France et AS Création 'l'apeten AG, d'autre part.
130. L'Autorité rappelle qu'il est de jurisprudence constante que le principe d'égalité de traitement ou de non-discrimination exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu'un tel traitement ne soit objectivement justifié. L'objectif même du point 48 du communiqué sanctions serait justement d'adapter la méthode de détermination de la sanction à des situations particulières pour rétablir l'égalité de traitement des entreprises, dès lors qu'une application uniforme du communiqué conduirait à des sanctions démesurées pour certaines d'entre elles.
131. S'agissant plus spécialement de la méthode retenue par l'Autorité pour l'entreprise Zambaiti, l'Autorité estime s'être prononcée au vu des seules informations relatives à cette société dont elle disposait (cote 16730) pour, en définitive, fixer une sanction forfaitaire, eu égard à la situation financière de l'entreprise, qui avait cessé toute activité depuis le 16 décembre 2013, sans que de caractère mono-produit de l'activité de cette société n'entre en ligne de compte.
132. Le ministre de l'Économie partage l'analyse que l'Autorité et en appelle au rejet du moyen pris dans ses deux branches.
133. Il fait valoir qu'aucune violation du principe d'égalité de traitement ou de proportionnalité ne peut être utilement invoquée dans la mesure où une société qui appartient à un groupe de sociétés et une société qui n'y appartient pas ne sont objectivement pas dans la même situation.
134. En l'espèce, le ministre ajoute que les groupes Décoralis et AS Création ont un chiffre d'affaires consolidé de, respectivement, 65 millions d'euros et de 200 millions d'euros et que ces chiffres représentent, l'un, 10 fois, l'autre, 33 fois le chiffre d'affaires réalisé par le groupe Zambaiti France et International, avec lequel ces deux groupes se comparent. Le ministre rappelle à cet égard que les sociétés mères des sociétés MCF et SCE ayant été condamnées solidairement avec elles au paiement d'une amende, c'est seulement au regard de la situation des sociétés MCF et SCE et de leurs sociétés mères que le caractère disproportionné de leurs sanctions pécuniaires doit être examiné, ce qui, en l'espèce, n'est pas démontré.
135. En réplique, les sociétés MCF, SCE, Décoralis, AS Création France et AS Création Tapeten répondent à l'Autorité, que cette dernière ne saurait se retrancher derrière un prétendu défaut d'information pour justifier sa violation du principe d'égalité de traitement, d'autant qu'elle disposait de toutes les informations nécessaires pour savoir que le chiffre d'affaires qu'elle retenait était celui de la société Zambaili France.
136. Par ailleurs, elles objectent au ministre de l'Économie que le fait que le montant du chiffre d'affaires réalisé par le groupe AS Création soit plus élevé que celui du groupe Zambaiti International est totalement dénué de pertinence à cet égard pour justifier la différence de traitement dans l'application de la méthode pour la qualification d'entreprise mono-produit.
137. S'agissant de la notion d'entreprise mono-produit, la cour renvoie expressément aux développements figurant aux paragraphes 71 à 76 du présent arrêt.
138. Il ressort du paragraphe 332 à 334 de la décision attaquée que, d'une part, pour la période du 17 mai 2006 au 17 décembre 2008, a été retenue la responsabilité de la société Décoralis, en tant que société mère exerçant une influence déterminante sur le comportement de ses filiales MCF et SCF, d'autre part, pour la période du 18 décembre 2008 au 30 novembre 2010, a été retenue la responsabilité des sociétés AS Création France et AS Création Tapeten, en tant que sociétés mère et grand-mère exerçant une influence déterminante sur le comportement de leurs filiales MCF et SCE.
139. Il s'ensuit que l'" entreprise ", au sens tant de l'article L. 464-2 du Code du commerce que du communiqué sanctions, notamment son point 48, était constituée, du 17 mai 2006 au 16 juin 2009, de l'entité formée par les sociétés MCF et Décoralis ou de celle formée par les sociétés SCE et Décoralis et, du 17 juin 2009 au 30 novembre 2010, de l'entité formée par les sociétés MCF, AS Création France et AS Création Tapeten ou de celle formée par les sociétés SCE, AS Création France et AS Création Tapeten.
140. Or, d'une part, force est de constater que les requérantes n'allèguent pas que lesdites entités avaient le caractère d'entreprise mono-produit.
141. D'autre part, c'est en vain que les requérantes arguent de ce que les sociétés MCF et SCE, considérées isolément, avaient bien le caractère d'entreprise mono-produit ; en effet, elles ne sont pas les entreprises sanctionnées, lesquelles, ainsi qu'il a été dit, sont constituées de l'entité formée par l'une ou l'autre de ces sociétés avec leurs sociétés mères successives.
142. Contrairement à ce que soutiennent les requérantes, il ne découle pas de l'analyse qui précède que toute filiale française, ou exerçant sur le marché français, d'une société étrangère se verra automatiquement refuser la qualité d'entreprise mono-produit. Ainsi qu'il a déjà été exposé au paragraphe 92 du présent arrêt, d'une part, s'il apparaît que la société mère n'a pas exercé une influence déterminante sur le comportement de sa filiale, seule cette dernière sera sanctionnée, de sorte que c'est dans son seul chef que sera appréciée la qualité d'entreprise mono-produit; d'autre part, quand la société mère est sanctionnée solidairement avec sa filiale pour avoir exercé sur elle une influence déterminante, il est possible que soit constaté le caractère d'entreprise mono-produit de l'entité formée par la société mère et sa filiale, si la majeure partie du chiffre d'affaires de cette entité est réalisé par la filiale sur le marché des produits en relation avec l'infraction.
143. De même, il ne résulte de ladite analyse aucune violation du principe d'égalité et de non-discrimination. Lorsque la responsabilité de la société mère n'est pas engagée par le comportement de sa filiale, auteur des faits, cette dernière est seule condamnée au paiement de la sanction, la société mère pouvant notamment choisir de ne pas aider sa filiale, qui acquittera seule le montant de la sanction ; à l'inverse, lorsqu'est condamnée l'entité formée de la société auteur des faits et de sa société mère, cette dernière est personnellement tenue au paiement de la sanction. La différence entre ces deux situations justifie la différence de traitement dans l'appréciation du caractère d'entreprise mono-produit.
144. Il n'y a pas davantage violation du principe de proportionnalité à refuser une réduction de sanction à l'entreprise tenue au paiement, lorsque celle-ci n'a pas la qualité d'entreprise mono-produit.
145. Quant à la circonstance aggravante tenant à l'appartenance à un groupe (point 49, second tiret du communiqué sanctions), un relèvement de la sanction à ce titre n'est envisageable que si la société faîtière du groupe n'est pas condamnée solidairement avec sa filiale auteur des faits, de sorte qu'en pareil cas, c'est dans le seul chef de cette dernière que le caractère d'entreprise mono-produit sera apprécié.
146. Enfin, il résulte de la cote 16730 que le chiffre d'affaires mondial de la société Zambaiti International, qui ne consolide pas les comptes de ses filiales, était égal à zéro, de sorte qu'en se fondant, au paragraphe 205 de la décision attaquée, sur le seul chiffre d'affaires de la société Zambaiti France pour reconnaître le caractère d'entreprise mono-produit à l'entité constituée de cette société et de sa société mère Zambaiti International, l'Autorité n'a pas mis en œuvre une autre méthode d'analyse que celle appliquée aux requérantes pour leur refuser ce caractère.
147. À supposer même que l'Autorité ait à tort reconnu le caractère d'entreprise mono-produit à l'entité constituée des sociétés Zambaiti France et Zambaiti International, d'une part, la discrimination qui en découlerait consisterait dans cette reconnaissance indue, et non dans le refus de reconnaître le caractère d'entreprise mono-produit à l'entité constituée successivement des sociétés MCF Décoralis puis des sociétés MCF, AS Création France et AS Création Tapeten, et à l'entité constituée successivement des sociétés SCE et Décoralis puis des sociétés SCE, AS Création France et AS Création Tapeten. D'autre part, ladite discrimination, à la supposer démontrée, a été sans conséquence sur le montant final de la sanction infligée aux sociétés Zatnbaiti France et Zambaiti International, puisque, au stade des ajustements finaux, à raison des difficultés financières propres à la société Zambaiti France, la sanction qui leur a été infligée a finalement été fixée " de façon forfaitaire à 50 000 euros " (décision attaquée, § 339).
148. Il n'y a dès lors pas lieu de faire droit à la demande des requérantes, de réduire de 70 % les sanctions prononcées à leur encontre.
2. Sur le non-respect allégué des quotes-parts de responsabilité des sociétés Décoralis, AS création France et AS création Tapeten
149. Les sociétés MCF, SCE, Décoralis, AS Création France et AS. Création Tapeten demandent, à titre subsidiaire, une réduction des sanctions infligées aux sociétés MCF, SCE ainsi AS Création France et AS Création Tapeten, afin de respecter la quote-part de responsabilité des sociétés mères successives des filiales MCF et SCE.
150. Elles rappellent que, aux termes mêmes de la décision attaquée (334), les quotes-parts de responsabilité de la société Décoralis, d'une part, et des sociétés AS Création France et AS Création Tapeten, d'autre part, sont respectivement de 57 % et de 43 %. Partant, et dès lors que la part de responsabilité solidaire de la société Décoralis a été fixée par l'Autorité à 1 985 000 euros - montant qu'elles ne contestent pas dans le cadre du présent moyen et que ce montant doit correspondre à 57 % de la sanction pécuniaire totale infligée aux sociétés MCF et SCE, le montant de cette dernière aurait dû être fixé à 3 482 457 euros (3 482 457 x 57 % = 1 985 000).
151. Elles en déduisent que la sanction propre à la société MCF doit être ramenée à 975 088 euros et celle propre à la société SCE à 2 507 369 euros, et que le montant auquel les sociétés AS Création France et AS Création Tapeten sont solidairement tenues doit être fixé à 1 497 457 euros (3 482 457 x 43 %).
152. Les requérantes soulignent que leurs arguments n'ont pas été examinés par la cour première saisie dans son arrêt du 14 avril 2016.
153. L'Autorité répond que le raisonnement des requérantes aboutirait à faire bénéficier, sans raison, les filiales, auteures des pratiques, et la société AS Création Tapeten, seconde mère, des ajustements finaux de la sanction prononcée contre la société Decoralis, première mère, au regard de sa situation particulière, et notamment de l'insuffisance de ses capacités contributives.
154. Elle fait valoir qu'au contraire, l'analyse qu'elle a suivie en l'espèce lui a permis d'arriver au prononcé de sanctions strictement proportionnées et individualisées dans le respect des critères fixés par la loi.
155. Le ministre de l'Économie relève que ce moyen a déjà été rejeté par la présente cour dans son arrêt du 14 avril 2016, qui n'a pas été cassé sur ce point, et demande à la cour de le rejeter de nouveau.
156. Il résulte de la décision attaquée (308, 331 et 334) que, avant prise en compte de la situation particulière de la société Décoralis, la sanction infligée à l'entité constituée de la société MCF et de sa société mère Décoralis s'établissait à la somme de 1 128 682,65 euros [(2 200 161 x 90 %) x 57 %], et celle infligée à l'entité constituée de la société MCF et de ses sociétés mères AS Création France et AS Création Tapeten à la somme de 851 462,35 euros (1 980 145 x 43 %)
157. De même, la sanction infligée à l'entité constituée de la société SCE et de sa société mère Décoralis s'établissait à la somme de 2 841 279 euros [(5 538 556 x 90 %) x 57 %j, et celle infligée à l'entité constituée de la société SCE et de ses sociétés mères AS Création France et AS Création Tapeten à la somme de 2 143 421 euros (4 984 700 x 43 %).
158. L'Autorité a considéré, aux paragraphes 341 à346 de la décision attaquée, que la situation particulière de la société Décoralis, qui " ne sera pas en mesure d'assumer sa responsabilité solidaire à l'égard de ses anciennes filiales " justifiait une réduction d'environ 50 % des sanctions infligées, d'une part, à l'entité constituée des sociétés MCF et Décoralis, d'autre part, à l'entité constituée des sociétés SCE et Décoralis.
159. Elle a en conséquence réduit le montant cumulé de ces sanctions de 3 969 960 euros (1 128 682,65 + 2 841 279, résultat arrondi) à 1 985 000 euros, soit 564 346,75 euros au titre de la sanction infligée à l'entité MCF et Décoralis, et 1 420 653,25 euros au titre de la sanction infligée à l'entité SCE et Décoralis.
160. À l'évidence, rien ne justifie que les circonstances propres à la société Décoralis soient prises en compte aux fins du calcul de la sanction infligée aux entités constituées, l'une, des sociétés MCF, AS Création France et AS Création Tapeten, l'autre, des sociétés SCE, AS Création France et AS Création Tapeten.
161. C'est donc à juste titre que l'Autorité a appliqué à la société MCF une sanction globale de 1 415 000 euros (564 346,75 + 851 462,35 = 1 415 809,10, arrondi à 1 415 000) et à la société SCE une sanction globale de 3 564 000 euros (1 420 653,25 + 2 143 421 = 564 074,25, arrondi à 3 564 000). De même, c'est à juste titre qu'elle a appliqué aux sociétés AS Création France et AS Création Tapeten une sanction globale de 2 994 000 (851 462,35 + 2 143 421 = 2 994 883,35, arrondi à 2 994 000).
162. Les arguments des requérantes sont rejetés.
C. Sur la transmission du présent arrêt à la Commission de l'Union européenne
163. En application de l'article 15, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil du 16 décembre 2002 relatif la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 et 82 du traité, le présent arrêt sera transmis à la Commission de l'Union européenne.
D. Sur l'article 700 du Code de procédure civile et les dépens
164. Il n'y a pas lieu de prononcer des condamnations en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
165. Les requérantes sont condamnées aux dépens.
Par ces motifs, déboute les sociétés MCF Investissement SAS, Société de Conception et d'Édition SAS, Décoralis SA, AS Création France SAS et AS Création Tapeten AG de leurs recours contre la décision de l'Autorité de la concurrence n° 14-D-20 du 22 décembre 2014 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur du papier peint en France ; réforme l'article 2 de la décision n° 14-D-20 en tant qu'il inflige à la société Graham & Brown France SARL, solidairement avec sa société mère Graham & Brown Limited, une sanction de 247 000 euros; statuant de nouveau, inflige à la société Graham & Brown France SARL, solidairement avec sa société mère Graham& Brown Limited, une sanction de 223 000 euros; rappelle que les sommes payées excédant le montant ci-dessus fixé devront être remboursées aux sociétés concernées, outre les intérêts au taux légal à compter de la notification du présent arrêt et, s'il y a lieu, capitalisation des intérêts dans les termes de l'article 1154 du Code civil ; rejette tous autres moyens des sociétés Graham & Brown France SARL et Graham & Brown Limited; qu'en application de l'article 15, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil du 16 décembre 2002 relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 et 82 du traité, le présent arrêt sera transmis par la cour à la Commission de l'Union européenne; il n'y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ; condamne les sociétés MCF Investissement SAS, Société de Conception et d'Édition SAS, Décoralis SA, AS Création France SAS et AS Création Tapeten AG ainsi que les sociétés Graham & Brown France SARL et Graham & Brown Limited aux dépens.