CA Paris, Pôle 5 ch. 6, 19 décembre 2018, n° 17-00444
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Agences n° 1 Alpha immobilier (Sté)
Défendeur :
BNP Paribas (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Chandelon
Conseillers :
Mmes Guesdon, Liégeois
Avocats :
Mes Guyonnet, Denis-Bertin, Guizard
La société de droit gabonais Agences n° 1 Alpha immobilier, qui exerce au Gabon une activité de transaction immobilière, de gestion locative et de syndic de copropriété est titulaire, depuis 2000, d'un compte courant en euros n° 30004 09179 00010008757 91 dans les livres de la société BNP Paribas en son agence de Monte-Carlo, Principauté de Monaco, qui a toujours fonctionné en solde créditeur et sur lequel aucune autorisation de découvert n'a été consentie par la banque.
Par courrier en date du 7 mai 2013, la société BNP Paribas a informé la société Agences n° 1 Alpha immobilier qu'elle n'avait plus convenance à maintenir la relation bancaire et qu'elle procèderait à la clôture du compte à l'issue d'un délai d'un mois.
Estimant ce comportement fautif, la société Agences n° 1 Alpha immobilier a mis en demeure la société BNP Paribas de lui régler la somme de 200 000 euros en réparation du préjudice subi par courrier du 7 novembre 2014 puis l'a assignée devant le tribunal de commerce de Paris, par acte d'huissier de justice en date du 1er juillet 2015.
Par jugement en date du 24 novembre 2016, le tribunal de commerce de Paris a :
dit la loi monégasque applicable au contrat entrepris aux motifs que, bien que les parties ne puissent matériellement produire la convention ayant établi leur relation d'origine, les conditions générales usuellement appliquées par la BNP Paribas soumettent les opérations réalisées par ses succursales monégasques au droit monégasque et que les opérations réalisées par la société Agences n° 1 Alpha immobilier aboutissant ou étant issues d'un compte ouvert dans la Principauté de Monaco sont de toute évidence soumises aux dispositions du droit monégasque, notamment celles régissant l'activité bancaire, aucune opération litigieuse effectuée sur ce compte courant n'ayant été signée ou réalisée en France, de sorte que la société Agences n° 1 Alpha immobilier ne démontrait pas l'existence d'un lien de rattachement de ces opérations avec la France,
débouté la société Agences n° 1 Alpha immobilier de l'ensemble de ses demandes aux motifs qu'elle ne justifiait pas d'une rupture fautive de la relation bancaire alors que la société BNP Paribas avait respecté le préavis d'un mois prévu par les conditions générales et l'usage dans la Principauté en matière bancaire, ni que la banque aurait mal exécuté des opérations bancaires préalablement à la 2 clôture du compte, sauf une erreur, reconnue par la banque, concernant un virement d'un montant de 5 101,24 euros non exécuté alors que le compte était approvisionné, mais aucun préjudice n'étant justifié,
débouté les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
condamné la société Agences n° 1 Alpha immobilier aux dépens.
Par déclaration remise au greffe de la cour le 3 janvier 2017, la société Agences n° 1 Alpha immobilier a interjeté appel de ce jugement.
Dans ses dernières conclusions notifiées le 1er juin 2017, la société Agences n° 1 Alpha immobilier demande à la cour de :
Réformer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 24 novembre 2016
Et, statuant à nouveau :
A titre principal,
Dire et juger que la loi française est applicable au présent litige,
Dire et juger que la BNP Paribas a commis une faute en clôturant brutalement le compte de la société Agences n° 1 Alpha immobilier sans respect d'un préavis d'une durée raisonnable,
Dire et juger que les manquements et fautes commises par la BNP Paribas ont causé un préjudice à la société Agences n° 1 Alpha immobilier
Par conséquent,
Condamner la BNP Paribas à payer à la société Agences n° 1 Alpha immobilier la somme de 100 000 à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,
A titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour devait considérer que la loi française n'est pas applicable
Vu les dispositions des articles 989 et 1002 du Code civil monégasque :
Dire et juger que la BNP Paribas a manqué à son obligation de loyauté contractuelle et a commis une faute dans l'exécution de la convention de compte, qui a causé un préjudice à la société Agences n° 1 Alpha immobilier
Par conséquent,
Condamner la BNP Paribas à payer à la société Agences n° 1 Alpha immobilier la somme de 200 000 à titre de dommages et intérêts, en réparation du préjudice subi,
En tout état de cause,
Dire et juger inopposables à la société Agences n° 1 Alpha immobilier les conditions générales de la société BNP Paribas,
Condamner la BNP Paribas à payer à la société Agences n° 1 Alpha immobilier la 3 somme de 4 000 sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
Condamner les mêmes aux entiers dépens de première instance et d'appel.
La société Agences n° 1 Alpha immobilier fait valoir que :
les conditions générales de compte de dépôt dont se prévaut la banque aux termes desquelles le droit monégasque serait applicable ne lui sont ni applicables ni opposables alors qu'elle ont été éditées en juin 2015, soit postérieurement à la clôture de son compte, et qu'il n'est pas justifié que cette version comme des versions antérieures aient été portées à sa connaissance,
en application des dispositions de la Convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles, la loi française est applicable car elle est celle du pays avec lequel le contrat présente les liens les plus étroits dans la mesure où le siège social de la société BNP Paribas est en France et qu'elle est aussi le lieu de son administration centrale, la tenue des comptes de sa succursale monégasque étant centralisée, par voie électronique, en France,
l'article L. 442-6 du Code de commerce est une loi de police conduisant à écarter l'application d'une autre loi,
en application des articles 1134 et 1147 du Code civil et de l'article L. 442-6-5° du Code de commerce, la société BNP Paribas n'a pas respecté un délai de préavis suffisant au regard de l'ancienneté de la relation commerciale établie depuis plus de 10 années, de l'absence de tout incident de fonctionnement du compte comme de la complexité tenant à ouvrir un autre compte dans un pays de la zone euro et à prévenir l'ensemble des locataires versant leur loyer à la société Agences n° 1 Alpha immobilier dans le cadre de son activité de gestion,
à titre subsidiaire, au regard des articles 989 et 1002 du Code civil monégasque comme des usages bancaires monégasques, le délai de moins d'un mois qui lui a été accordé, la société Agences n° 1 Alpha immobilier n'ayant réceptionné le courrier du 7 mai 2013 au Gabon que le 18 mai 2013, n'est pas proportionné et apparaît également fautif,
durant le délai de préavis, la société BNP Paribas a refusé de porter au crédit du compte deux chèques et n'a pas exécuté deux virements, sans motif légitime et sans prévenir sa cliente,
le comportement fautif de la banque lui a causé des difficultés de gestion et a porté gravement atteinte à sa notoriété, la clôture brutale du compte bancaire comme le rejet de plusieurs opérations étant de nature à la décrédibiliser au yeux de la clientèle aisée auprès de laquelle elle intervient.
Dans ses dernières écritures notifiées le 24 juillet 2017, la société BNP Paribas demande à la cour de :
Déclarer la société Agences n° 1 Alpha immobilier recevable mais mal fondée en son appel.
Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
Condamner la société Agences n° 1 Alpha immobilier à payer à BNP Paribas la somme de 5 000 au titre de l'article 700 du CPC ainsi que les entiers dépens de la procédure.
La société BNP Paribas fait valoir sur le fondement de la Convention de La Haye du 14 mars 1978, des dispositions de l'article 3 du Code civil français et des dispositions des articles 1002 et suivants du Code civil monégasque, que :
la Convention de La Haye prévoit le principe de liberté de choix de parties de la loi applicable aux contrats qu'elles concluent,
la loi applicable au litige est la loi monégasque, comme cela ressort des conditions générales de la convention de compte qu'elle produit, quand bien même il s'agirait d'une édition de juin 2015, la banque ne conservant pas les originaux au-delà d'un délai de 5 ans et aucune des parties n'étant en mesure de produire la convention de compte courant les liant,
à supposer que ces conditions générales soient écartées, le droit international privé prévoit que c'est la loi monégasque qui doit régir la convention de compte entre la succursale monégasque et la société Agences n° 1 Alpha immobilier,
le caractère de loi de police de l'article L. 442-6 du Code de commerce invoqué par la société Agences n° 1 Alpha immobilier ne la dispense pas, en application de l'article 3 du Code civil, de rapporter la preuve d'un lien de rattachement avec la France,
la Convention de Rome comme le Règlement CE 593/2008 du 17 juin 2008 dit Rome I ne sont pas applicables à la Principauté de Monaco, lequel règlement renvoie à la notion d'administration centrale invoquée par la société Agences n° 1 Alpha immobilier,
il n'existe aucun lien avec le territoire français, le litige portant sur la relation bancaire entre une société gabonaise et un établissement bancaire monégasque,
l'activité financière est réalisée sur le territoire monégasque, les données personnelles et les comptes bancaires étant gérés exclusivement par la succursale, seules les données comptables étant adressées au siège parisien qui ne dispose d'aucun pouvoir de supervision, de sorte qu'il n'existe aucun lien de rattachement avec la loi française,
s'agissant d'une convention de compte à durée indéterminée, la banque était en droit d'y mettre un terme en informant par écrit et en temps utile sa cliente, laquelle a bénéficié d'un délai suffisant d'un mois, les usages et pratiques bancaires en Principauté de Monaco imposant seulement de respecter un principe de proportionnalité et la société Agences n° 1 Alpha immobilier ayant été en mesure, dès le 14 mai 2013, de faire virer ses fonds vers un autre compte bancaire auprès du Crédit foncier de Monaco,
en droit français, la société Agences n° 1 Alpha immobilier ne peut se prévaloir de l'article L. 442-6 du Code de commerce qui ne s'applique pas aux relations bancaires, et le délai de 30 jours accordé étant là encore suffisant,
elle n'a pas refusé les deux chèques d'un montant de 2 771,98 euros et 1 012,62 euros car ceux-ci ne lui ont pas été présentés à l'encaissement le bordereau produit n'étant pas l'exemplaire client et ne comportant pas le cachet de l'agence, le virement d'un montant de 5 101,24 euros au profit de Mme Bongo n'a pas été exécuté par erreur et celui d'un montant de 105 648 euros crédité sur le compte de société Agences n° 1 Alpha immobilier a finalement été rejeté en raison de son montant inhabituel en application du droit monégasque en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux, le financement du terrorisme et la corruption, à défaut pour la société Agences n° 1 Alpha immobilier d'avoir répondu à ses demandes d'explication sur l'origine des fonds,
elle n'a commis aucune faute et la société Agences n° 1 Alpha immobilier ne justifie d'aucun préjudice.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 11 septembre 2018.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la loi applicable
En application de l'article 3 du Code civil, il appartient au juge du fond, dans l'usage de la règle française de conflit de lois, de déterminer la loi applicable au litige.
Le litige portant sur l'exécution d'opérations relatives à un compte courant ouvert en 2000 par la société de droit gabonais Agences n° 1 Alpha immobilier établie au Gabon et à sa clôture par la succursale située à Monte Carlo d'une banque française, la société BNP Paribas, il convient pour déterminer la loi applicable à ce contrat de se référer à la Convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles, entrée en vigueur le 1er avril 1991, ensuite remplacée par le règlement (CE) n° 593/2008 du Parlement européen et du Conseil du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles, surnommé " Rome I ".
A ce titre, la société BNP Paribas soutient à tort que cette convention internationale ne permet pas de régler le conflit de lois entre la loi française dont la société société Agences n° 1 Alpha immobilier se prévaut et la loi monégasque dont elle sollicite pour sa part l'application dans la présente affaire au motif que la Principauté de Monaco n'aurait pas ratifié la Convention de Rome, à l'instar de la France, alors que l'article 2 de ladite convention en rappelle son caractère universel en ce que la loi désignée par la convention s'applique même si cette loi est celle d'un État non contractant.
En application de l'article 3.1 de la Convention de Rome, le contrat est régi par la loi choisie par les parties, lequel choix doit être exprès ou résulter de façon certaine des dispositions du contrat ou des circonstances de la cause.
A défaut de choix, l'article 4 de la convention prévoit que :
" 1. Dans la mesure où la loi applicable au contrat n'a pas été choisie conformément aux dispositions de l'article 3, le contrat est régi par la loi du pays avec lequel il présente les liens les plus étroits. Toutefois, si une partie du contrat est séparable du reste du contrat et présente un lien plus étroit avec un autre pays, il pourra être fait application, à titre exceptionnel, à cette partie du contrat de la loi de cet autre pays.
2. Sous réserve du paragraphe 5, il est présumé que le contrat présente les liens les plus étroits avec le pays où la partie qui doit fournir la prestation caractéristique a, au moment de la conclusion du contrat, sa résidence habituelle ou, s'il s'agit d'une société, association ou personne morale, son administration centrale. Toutefois, si le contrat est conclu dans l'exercice de l'activité professionnelle de cette partie, ce pays est celui où est situé son principal établissement ou, si, selon le contrat, la prestation doit être fournie par un établissement autre que l'établissement principal, celui où est situé cet autre établissement.
3. Nonobstant les dispositions du paragraphe 2, dans la mesure où le contrat a pour objet un droit réel immobilier ou un droit d'utilisation d'un immeuble, il est présumé que le contrat présente les liens les plus étroits avec le pays où est situé l'immeuble.
4. Le contrat de transport de marchandises n'est pas soumis à la présomption du paragraphe 2.
Dans ce contrat, si le pays dans lequel le transporteur a son établissement principal au moment de la conclusion du contrat est aussi celui dans lequel est situé le lieu de chargement ou de déchargement ou l'établissement principal de l'expéditeur, il est présumé que le contrat a les liens les plus étroits avec ce pays. Pour l'application du présent paragraphe, sont considérés comme contrats de transport de marchandises les contrats d'affrètement pour un seul voyage ou d'autres contrats lorsqu'ils ont principalement pour objet de réaliser un transport de marchandises.
5. L'application du paragraphe 2 est écartée lorsque la prestation caractéristique ne peut être déterminée. Les présomptions des paragraphes 2, 3 et 4 sont écartées lorsqu'il résulte de l'ensemble des circonstances que le contrat présente des liens plus étroits avec un autre pays. "
En l'espèce, les parties sont dans l'incapacité de produire la convention à l'origine de leurs relations contractuelles dont elles ne contestent pas qu'elles remontent à 2000.
Les relevés de compte produits par la société Agences n° 1 Alpha immobilier précisent que le compte bancaire litigieux est un compte courant en euros.
La banque produit les conditions générales de la " Convention de compte de dépôt Bienvenue ", dans leur édition de juin 2015 qui sont donc largement postérieures à l'établissement de la relation bancaire d'origine avec la société Agences n° 1 Alpha immobilier et même à sa rupture intervenue en mai 2013.
De plus, le chapitre VIII de ce document relatif au champ d'application, à la loi applicable, aux tribunaux compétents et à la langue, vise les personnes physiques n'agissant pas pour des besoins professionnels de sorte que ces stipulations n'ont manifestement pas vocation à s'appliquer au contrat conclu entre la société Agences n° 1 Alpha immobilier et la société BNP Paribas.
En l'absence de production du contrat liant les parties ou de toute autre pièce permettant de déterminer la loi applicable selon la volonté des parties, comme en l'absence d'accord entre elles sur la loi compétente, il convient donc de la rechercher en application de l'article 4 de la Convention de Rome du 19 juin 1980 et plus particulièrement de son paragraphe 2 aux termes duquel il est présumé que le contrat présente les liens les plus étroits avec le pays où la partie qui doit fournir la prestation caractéristique a, au moment de la conclusion du contrat, sa résidence habituelle ou, s'il s'agit d'une société, association ou personne morale, son administration centrale.
Sous la réserve que : " Toutefois, si le contrat est conclu dans l'exercice de l'activité professionnelle de cette partie, ce pays est celui où est situé son principal établissement ou, si, selon le contrat, la prestation doit être fournie par un établissement autre que l'établissement principal, celui où est situé cet autre établissement. "
En l'espèce, si la société Agences n° 1 Alpha immobilier fait valoir que le compte bancaire litigieux est ouvert auprès d'une simple succursale de la société de droit français BNP Paribas dont le siège social est à Paris, 16 boulevard des Italiens où se situe son administration centrale et que la banque ne conteste pas une centralisation des données comptables au siège parisien, il ressort néanmoins des pièces produites que, comme le soutient la société BNP Paribas, les prestations bancaires attachées au compte courant litigieux sont réalisées par l'agence de Monte Carlo située Galerie Charles III, laquelle est inscrite au répertoire du commerce et de l'industrie de la Principauté de Monaco comme établissement secondaire de la société étrangère BNP Paribas.
En particulier, la gestion opérationnelle du compte s'agissant des remises de chèques et des ordres de virements, de même que les relations avec la cliente et les prises de décisions sur les prestations fournies sont effectuées par la succursale de Monte Carlo, le courrier informant la société Agences n° 1 Alpha immobilier de la clôture de son compte émanant du directeur de cette agence et non du siège social à Paris.
Par ailleurs, comme relevé par les premiers juges, aucune opération liée au fonctionnement de ce compte courant n'est signée ou réalisée en France de sorte que la société Agences n° 1 Alpha immobilier ne démontre pas l'existence d'un lien de rattachement avec la France.
Dans ces conditions, la prestation caractéristique étant fournie par la succursale de la société BNP Paribas établie à Monte Carlo, il en résulte que la loi applicable au litige est la loi monégasque et le jugement entrepris est confirmé de ce chef.
Sur la demande en paiement de dommages-intérêts
La société BNP Paribas verse aux débats les articles 989 et 1002 du Code civil monégasque qui sont l'exacte réplique des articles 1134 et 1147 du Code civil français dans leur version en vigueur avant le 1er octobre 2016 en ce qu'ils disposent pour le premier texte que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites, qu'elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise et doivent être exécutées de bonne foi et pour le second texte, que le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.
Concernant la clôture du compte bancaire de la société Agences n° 1 Alpha immobilier, les parties s'accordent sur l'absence de texte spécifique en droit monégasque fixant la durée d'un délai de préavis minimum à respecter par la banque mais également, sur l'appréciation, en droit monégasque, du caractère abusif de la rupture unilatérale de la convention de compte au regard d'un principe de proportionnalité.
A ce titre, la société Agences n° 1 Alpha immobilier invoque vainement l'application de l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce qui dispose que : " Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers :
[...]
5° De rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels. [...]. " au motif qu'il aurait le caractère d'une loi de police conduisant à écarter la loi monégasque.
En effet, à supposer que l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce présente le caractère de loi de police, encore faudrait-il comme l'admet la société Agences n° 1 Alpha immobilier, pour l'appliquer au présent litige, quel que soit la loi applicable au contrat, qu'il existe un lien de rattachement suffisant avec la France ce qui n'est pas démontré.
De plus, comme le soutient la société BNP Paribas, ce texte n'est pas, en droit français, considéré comme applicable aux prestations fournies par les banques dont la règlementation relève, sauf exception, du Code monétaire et financier.
En l'espèce, l'agence BNP Paribas de Monte Carlo a informé par écrit, suivant courrier envoyé par DHL du 7 mai 2013, la société Agences n° 1 Alpha immobilier de sa décision de clôturer le compte bancaire en lui octroyant un délai de préavis d'un mois.
Si la société Agences n° 1 Alpha immobilier indique n'avoir effectivement reçu ce courrier au Gabon que le 18 mai 2013, il ressort néanmoins de ses relevés bancaires qu'elle viré, dès le 17 mai 2013, la quasi-totalité du solde créditeur de son compte courant à la BNP Paribas, soit la somme de 609 796,07 euros, laissant un reliquat d'environ 13 000 euros.
Elle ne conteste pas plus avoir disposé, d'un autre compte bancaire auprès de la société Crédit Foncier de Monaco et il ressort également des relevés produits que son compte bancaire à la société BNP Paribas a enregistré des opérations jusqu'au 6 juin 2013 pour être effectivement clôturé le 24 juin 2013, la société Agences n° 1 Alpha immobilier virant le reliquat du solde créditeur de ce compte le 19 juin 2013 pour un montant de 13 715,10 euros.
Enfin, la société BNP Paribas produit aux débats des extraits de conditions générales de convention de compte émanant de banques concurrentes établies à Monaco dont il ressort que la société Fortis prévoit un préavis de 15 jours en cas de rupture à l'initiative de l'une ou l'autre partie, là où la société Lloyd's TSB Bank stipule un délai d'un mois et où la société Crédit foncier de Monaco ne prévoit aucun délai en permettant aux parties de clôturer le compte avec effet immédiat et sans indication de motif.
Dans ces conditions, la société Agences n° 1 Alpha immobilier ne rapporte pas la preuve d'un caractère abusif de la clôture de son compte bancaire par la succursale monégasque de la société BNP Paribas le 7 mai 2013 à l'issue d'un préavis d'un mois, tant au regard de la loi applicable monégasque, des usages et pratiques bancaires que de sa situation professionnelle et financière, s'agissant d'un compte courant professionnel fonctionnant uniquement en solde créditeur et dédié principalement à son activité de gestion locative consistant donc à encaisser des loyers et à les reverser aux propriétaires, la société Agences n° 1 Alpha immobilier bénéficiant en outre d'un autre compte bancaire ouvert dans les livres du Crédit foncier de Monaco vers lequel elle pu manifestement, très rapidement, transférer ses avoirs.
Dès lors, aucune faute n'est retenue à l'encontre de la société BNP Paribas au titre de la clôture du compte bancaire.
Par ailleurs, concernant les opérations de banque non réalisées, les premiers juges ont retenu à juste titre que la société Agences n° 1 Alpha immobilier ne justifiait pas suffisamment du défaut d'encaissement de deux chèques par la société BNP Paribas remis le 13 mai 2013 d'un montant de 2 771,98 euros et de 1 012,61 euros alors que la copie du bordereau produit ne comporte aucune date, qu'il ne s'agit pas de l'exemplaire client mais de celui du centre de traitement et qu'elle ne fait état d'aucune réclamation ni de ses clients ni d'elle-même contre la banque pour un rejet injustifié avant son assignation en justice, sauf à ajouter que son relevé de compte mentionne à la date de valeur du 13 mai 2013 une remise de chèques pour un montant de total de 3 907,08 euros soit un montant légèrement supérieur au total des deux chèques litigieux.
Concernant le refus de la banque d'exécuter un virement en date du 18 avril 2013 d'un montant de 5 101,24 euros au profit de Mme Nadine Bongo au titre d'un reversement de loyer alors que son compte était suffisamment provisionné, si la société BNP Paribas admet une erreur, ce défaut d'exécution d'un ordre de virement valablement passé, sans motif légitime, constitue bien un manquement à ses obligations contractuelles envers sa cliente.
De même, le rejet, le 3 mai 2013, du virement opéré le 30 avril 2014 par M. Michel Robert pour un montant de 105 649 euros au crédit du compte courant de la société Agences n° 1 Alpha immobilier portant sur le paiement des frais d'une transaction immobilière n'apparaît pas justifié.
En effet, si la société BNP Paribas invoque le caractère inhabituel d'un tel virement en raison de son montant, ses obligations en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le silence de sa cliente à ses demandes d'explications, force est de constater que la banque ne justifie nullement de telles demandes, qu'il ressort des relevés de compte produits que si les opérations au crédit du compte portent en effet principalement sur des montants de quelques milliers d'euros, la société Agences n° 1 Alpha immobilier a néanmoins bénéficié par le passé, sans refus de la banque, d'un virement de plus de 45 000 euros le 3 janvier 2012 et d'un virement de 531 946, 38 euros en provenance d'une étude notariale le 3 décembre 2012 et qu'enfin, M. Michel Robert indique dans une attestation du 21 juin 2013 que son virement a été refusé " pour cause de fermeture de compte ".
Dans ces conditions, il est retenu, au titre de ces deux opérations bancaires, un défaut d'exécution de la banque de ses obligations contractuelles dont il a résulté une atteinte à la crédibilité et à la réputation de la société Agences n° 1 Alpha immobilier auprès de ses clients comme l'indique également M. Robert dans son attestation, la société Agences n° 1 Alpha immobilier ne justifiant en revanche d'aucun préjudice financier résultant de ces manquements.
Son préjudice sera donc suffisamment réparé par l'allocation d'une somme de 5 000 euros.
Par conséquent, le jugement entrepris est infirmé en ce qu'il a rejeté la demande en paiement de dommages-intérêts de la société Agences n° 1 Alpha immobilier et la société BNP Paribas est condamnée à lui payer la somme de 5 000 euros.
Par ailleurs, le jugement est infirmé en ses dispositions relatives aux dépens.
La société BNP Paribas, qui succombe en appel, supportera les dépens de première instance et d'appel ainsi que ses frais irrépétibles.
En application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, il est inéquitable de laisser à la charge de la société Agences n° 1 Alpha immobilier les frais non compris dans les dépens exposés en appel et il convient de condamner la société BNP Paribas à lui payer la somme de 3 000 euros à ce titre.
Par ces motifs, infirme le jugement déféré en ce qu'il a rejeté la demande en paiement de dommages-intérêts de la société Agences n° 1 Alpha immobilier et l'a condamnée aux dépens, statuant à nouveau de ces chefs, dit que la société BNP Paribas a engagé sa responsabilité civile contractuelle au titre du refus d'exécution du virement bancaire ordonné par la société Agences n° 1 Alpha immobilier au profit de mme bongo et du rejet du virement bancaire opéré par M. Robert au profit de la société Agences n° 1 Alpha immobilier, condamne la société BNP Paribas à payer à la société Agences n° 1 Alpha immobilier la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice, confirme le jugement déféré en toutes ses autres dispositions, condamne la société bnp Paribas aux dépens de première instance et d'appel, condamne la société bnp Paribas à payer à la société Agences n° 1 Alpha immobilier la somme de 3 000 euro en application de l'article 700 du Code de procédure civile.