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Décisions

CA Versailles, 12e ch., 16 janvier 2020, n° 18-05534

VERSAILLES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Dyson (SAS), Dyson Technology Limited (Sté)

Défendeur :

Royal Appliance International GmbH (Sté), TTI Floor Care France (Sasu)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Andrieu

Conseillers :

Mmes Soulmagnon, Muller

Avocats :

Mes Dupuis, Utzschneider, Clarens, Debray, Morelli

T. com. Nanterre, du 28 juin 2018

28 juin 2018

EXPOSE DU LITIGE

La société de droit anglais Dyson Technology Limited et la société de droit français Dyson, sont des filiales du groupe anglais Dyson qui a pour activité la conception, la fabrication et la commercialisation de produits électroménagers destinés à la grande consommation.

A compter de décembre 1996, la société Dyson France a été chargée d'assurer la commercialisation des aspirateurs conçus et développés par l'Angleterre.

La société de droit allemand XX Y N L (ci-après, XX Y) et la société de droit français TTI Floor Care France (ci-après TTI France) sont des filiales du groupe hongkongais Techtronic Industries qui conçoit, fabrique et vend des outils électriques, des appareils électroménagers et des appareils électriques pour le jardin. Il détient un portefeuille de marques comprenant notamment Dirt Devil.

En février 2011, la société Dyson a lancé en France une gamme d'aspirateurs balais multifonctions dont la première série a été dénommée DC35.

L'aspirateur DC 35 est sorti en novembre 2012 et le DC 45 en juillet 2015.

Il s'agit d'une gamme d'aspirateurs balais sans fil, polyvalents avec une communication ciblée sur cette gamme de produits, insistant sur la forme, les assemblages de couleurs, le caractère apparent de la brosse principale et une architecture particulière " stick " qui positionne le centre de gravité de l'appareil au niveau de la poignée où se trouve un bloc batterie moteur collecteur.

Plusieurs références d'aspirateurs balais Dyson utilisent dans leur désignation le terme " Up Top ".

Les sociétés Dyson ont reproché aux sociétés Royal Appliance et TTI France d'avoir depuis octobre 2016 commercialisé de nouveaux aspirateurs sans fil dénommés Dirt Devil " D " (référencés notamment sous différents n° DD 698-2, DD698-3, D 698-4) appartenant à la gamme Dirt Devil Cavalier et d'avoir imité tant le design que la communication faites pour les aspirateurs DC 35 et DC 45.

Les sociétés Dyson ont adressé des courriers recommandés avec accusé de réception du 27 juillet 2017, aux sociétés Royal Appliance et TTI France, puis estimant que ces faits étaient constitutifs d'une concurrence déloyale et parasitaire à son égard leur causant un préjudice , elles ont mis en demeure les sociétés Royal Appliance et TTI France de cesser immédiatement toute imitation des produits Dyson, et toute commercialisation, distribution et publicité pour la gamme d'aspirateurs balais Dirt Devil Cavalier ainsi que toute commercialisation et distribution de leurs produits sous le " nom Up Top " ou de toute publicité utilisant ce nom.

Par courrier en réponse du 17 août 2017, les sociétés Royal Appliance et TTI France ont contesté tout acte fautif de leur part. Elles ont informé la société Dyson que, en gage de bonne volonté, elles avaient pris des mesures afin que soit supprimé tout usage éventuel du terme " Up Top " pour la vente de leurs produits aux consommateurs français.

Par actes du 17 août 2017, les sociétés Dyson et Dyson Technology ont assigné à bref délai les sociétés Royal Appliance et TTI France devant le tribunal de commerce de Nanterre aux fins de reconnaître l'existence d'actes de concurrence déloyale et parasitaire et faire cesser la commercialisation des produits litigieux, l'utilisation du nom " Up Top " et des éléments caractéristiques de sa communication.

Par jugement du 28 juin 2018, le tribunal de commerce de Nanterre a :

- Débouté la société Dyson Technology Ltd et la société Dyson de leur demande d'interdire, aux sociétés XX Y N L et la société TTI Floor Care France toute distribution et commercialisation en France des aspirateurs Dirt Devil Cavalier ;

- Débouté la société Dyson Technology Ltd et la société Dyson de leur demande d'interdire à la société XX Appliance International Gmbh et la société TTI Floor Care France, sous astreinte, l'utilisation du terme " Up Top " pour promouvoir et commercialiser ses aspirateurs ;

- Condamné solidairement la société Royal Appliance International Gmbh et la société TTI Floor Care France à payer la somme de 50 000 euros à chacune des sociétés Dyson Technology Ltd et Dyson à titre de dommages et intérêts ;

- Débouté la société Dyson Technology Ltd et la société Dyson de leur demande d'interdire, aux sociétés XX Y N L et la société Tti Floor Care France, l'utilisation sur tous supports de commercialisation ou de promotion des éléments allégués par la société Dyson Technology Ltd et la société Dyson comme évocateurs de sa communication ;

- Débouté la société Dyson Technology Ltd et Ia société Dyson de leur demande de publication d'un communiqué judiciaire ;

- Dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire ;

- Condamné solidairement les sociétés Royal Appliance International Gmbh et TTI Floor Care France à payer aux sociétés Dyson Technology Ltd et Dyson Société la somme de 5 000 euros, chacune au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- Condamné solidairement les sociétés Royal Appliance International Gmbh et TTI Floor Care France à supporter les dépens.

Par déclaration du 30 juillet 2018, les sociétés Dyson et Dyson Technology Limited ont interjeté appel du jugement.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par dernières conclusions notifiées le 16 octobre 2019, les sociétés Dyson et Dyson Technology Limited ont demandé à la cour de :

Sur l'appel principal de Dyson :

- Infirmer le jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 28 juin 2018 sauf en ce qu'il a :

Jugé qu'en présentant sur le marché français à partir du mois d'octobre 2016 et sans nécessité technique, le modèle d'aspirateur balai DD698-2 en utilisant le terme " Up Top ", les sociétés Royal Appliance et TTI France se sont placées dans le sillage de la société Dyson pour profiter de sa notoriété et ont donc commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire engageant leur responsabilité civile sur le fondement de l'article 1240 du Code civil ;

Condamné les sociétés Royal Appliance et TTI France aux dépens ;

Statuant à nouveau :

- Dire que les sociétés Royal Appliance et TTI France ont repris à leur compte, dans le cadre de la promotion et de la commercialisation de leur modèle Dirt Devil " D ", le nom de produit " Up Top " propre aux modèles de Dyson depuis plusieurs années ;

- Dire que les sociétés Royal Appliance et TTI France ont repris, pour leur modèle Dirt Devil " D " DD698-2, la couleur Dyson Satin Blue propre à Dyson depuis plusieurs années ;

- Dire que les sociétés Royal Appliance et TTI France ont repris un ensemble d'éléments constitutifs du design aspirateurs balais Dyson qui donne à leur gamme d'aspirateurs Dirt Devil " D " une impression visuelle d'ensemble similaire aux aspirateurs balais Dyson DC35 et DC45 ;

- Dire que les sociétés Royal Appliance et TTI France ont repris à leur compte, dans le cadre de la promotion et de la commercialisation de leur modèle Dirt Devil " D ", des visuels de la communication de Dyson ;

- Dire que la reprise du nom de produit " Up Top ", de la couleur Dyson Satin Blue, des éléments constitutifs du design des aspirateurs balais Dyson DC35 et DC45 ainsi que des visuels de communication de Dyson constitue autant de fautes au sens de l'article 1240 du Code civil ;

- Dire que la reprise du nom de produit " Up Top ", de la couleur Dyson Satin Blue, des éléments constitutifs du design des aspirateurs balais Dyson DC35 et DC45 ainsi que des visuels de communication de Dyson, constitue, en toute hypothèse, un faisceau d'indices d'un comportement fautif.

- Dire que les sociétés Royal Appliance et TTI France se sont placées dans le sillage des sociétés Dyson Technology et Dyson France et tirent profit des investissements de ces dernières et de la notoriété de leur produit.

- Dire que ce comportement parasitaire engage la responsabilité délictuelle des sociétés Royal Appliance et TTI France sur le fondement de l'article 1240 du Code civil ;

- Dire qu'en reprenant les éléments constitutifs du design des aspirateurs balais Dyson DC35 et DC45 et le nom de produit " Up Top ", XX Y et TTI France ont créé un risque de confusion dans l'esprit d'un consommateur d'attention moyenne qui ne dispose pas en même temps des aspirateurs balais Dirt Devil " D " et Dyson sous les yeux ;

- Dire que ce comportement déloyal engage la responsabilité des sociétés Royal Appliance et TTI France sur le fondement de l'article 1240 du Code civil ;

- Dire qu'en reprenant le design des aspirateurs balais Dyson Royal Appliance et TTI France l'ont banalisé et ont porté atteinte à la valeur économique individualisée qu'il constitue pour Dyson ;

- Dire que le comportement déloyal et parasitaire des sociétés Royal Appliance et TTI France constitue pour les sociétés Dyson Technology et Dyson France la source d'un préjudice substantiel ;

En conséquence,

- Condamner solidairement les sociétés Royal Appliance et TTI France à payer à chacune des sociétés Dyson Technology et Dyson France la somme de 809 533 euros (huit cent neuf mille cinq cent trente-trois euros) de dommages et intérêts au titre du préjudice subi pour les agissements déloyaux et parasitaires ;

- Interdire aux sociétés Royal Appliance et TTI France, sur tout support de commercialisation ou de promotion, de quelque manière que ce soit, directement ou indirectement, par toute personne morale ou physique interposée, d'utiliser le nom de produit " Up Top " pour promouvoir et commercialiser ses aspirateurs sous astreinte de 5 000 euros (cinq mille euros) par support de commercialisation ou de promotion à compter de la signification de la décision à intervenir ;

- Interdire aux sociétés Royal Appliance et TTI France toute distribution et commercialisation en France des aspirateurs Dirt Devil " D " reprenant les éléments constitutifs du design des aspirateurs Dyson et ce sous astreinte de 5 000 euros (cinq mille euros) par aspirateur à compter de la signification de la décision à intervenir ;

- Interdire aux sociétés Royal Appliance et TTI France, sur tout support de commercialisation ou de promotion, de quelque manière que ce soit, directement ou indirectement, par toute personne morale ou physique interposée, les visuels de communication de Dyson, pour promouvoir et commercialiser ses aspirateurs sous astreinte de 5 000 euros (cinq mille euros) par support de commercialisation ou de promotion à compter de la signification de la décision à intervenir ;

Sur l'appel incident des sociétés Royal Appliance et TTI France :

- Débouter les sociétés Royal Appliance et TTI France de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

En toute hypothèse,

- Ordonner la publication, aux frais des sociétés Royal Appliance et TTI France d'un communiqué judiciaire dans trois journaux ou magazines au choix des sociétés requérantes, le coût de chacune de ces publications ne pourra être inférieur à 15 000 euros (quinze mille euros) hors taxe, ainsi que sur la page d'accueil du site internet de www.dirtdevil.fr ;

- Condamner les sociétés Royal Appliance et TTI France à verser aux sociétés Dyson Technology et Dyson France la somme de 100 000 euros (cent mille euros) chacune au titre de l'article 700 du Code de procédure civile pour les frais irrépétibles engagés en première instance ;

- Condamner les sociétés Royal Appliance et TTI France à verser aux sociétés Dyson Technology et Dyson France la somme de 100 000 euros (cent mille euros) chacune au titre de l'article 700 du Code de procédure civile pour les frais irrépétibles engagés en appel ;

- Condamner les sociétés Royal Appliance et TTI France aux entiers dépens de l'appel.

Par dernières conclusions notifiées le 16 octobre 2019, les sociétés Royal Appliance International et TTI Floor Care France prient la cour de :

- Confirmer le jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 28 juin 2018 en ce qu'il a :

Débouté les sociétés Dyson Technology Limited et Dyson de leur demande d'interdire, aux sociétés Royal Appliance International et TTI Floor Care France, toute distribution et commercialisation en France des aspirateurs Dirt Devil Cavalier ;

Débouté les sociétés Dyson Technology Limited et Dyson de leur demande d'interdire, aux sociétés Royal Appliance International et TTI Floor Care France, sous astreinte, l'utilisation du terme " Up Top " pour promouvoir et commercialiser leurs aspirateurs ; Débouté les sociétés Dyson Technology Limited et Dyson de leur demande d'interdire, aux sociétés Royal Appliance International et TTI Floor Care France, l'utilisation sur tous supports de commercialisation ou de promotion des éléments allégués par les sociétés Dyson Technology Limited et Dyson comme évocateurs de leur communication ;

Débouté les sociétés Dyson Technology Limited et Dyson de leur demande de publication d'un communiqué judiciaire.

- Recevoir les sociétés Royal Appliance International et TTI Floor Care France en leur appel incident et infirmer ledit jugement en ce qu'il a :

Jugé qu'en utilisant le terme " Up Top " en lien avec un seul modèle de leur gamme d'aspirateurs Dirt Devil Cavalier (modèle DD 698-2), les sociétés Royal Appliance International et TTI Floor Care France ont commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire à l'encontre des sociétés Dyson Technology Limited et Dyson ;

Condamné les sociétés Royal Appliance International et TTI Floor Care France à payer la somme de 50 000 euros à chacune des sociétés Dyson Technology Limited et Dyson à titre de dommages et intérêts ;

Condamné les sociétés Royal Appliance International et TTI Floor Care France, en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, à verser à chacune des sociétés Dyson Technology Limited et Dyson la somme de 5.000 euros au titre de leurs frais irrépétibles ;

Condamné les sociétés Royal Appliance International et TTI Floor Care France aux dépens.

Statuant à nouveau,

- Constater que l'usage du terme " Up Top " reproché aux sociétés Royal Appliance International et TTI Floor Care France par les sociétés Dyson Technology Limited et Dyson ne peut être considéré comme constitutif d'acte de concurrence déloyale ou de parasitisme, en ce que l'usage de ce terme a été effectué par XX Appliance International et TTI Floor Care France dans son sens usuel, dans un temps et sur des supports limités ;

En conséquence,

- Débouter les sociétés Dyson Technology Limited et Dyson de leur demande de dommages et intérêts relative à l'usage du terme " Up Top " sur le fondement de l'article 1240 du Code civil.

A titre subsidiaire, si, par extraordinaire, la cour entrait en voie de condamnation à l'encontre des intimées :

- Constater que les préjudices commercial et d'image prétendument subis par les sociétés Dyson Technology Limited et Dyson du fait du lancement, de la commercialisation et de la promotion de la gamme d'aspirateurs balais Dirt Devil Cavalier en France et de l'usage du terme " Up Top " en lien avec l'aspirateur D DD698-2 par les sociétés Royal Appliance International et TTI Floor Care France ne sont justifiés ni dans leur existence, ni dans leur quantum.

A titre infiniment subsidiaire, si, par extraordinaire, la cour, reconnaissait l'existence d'un préjudice :

- Limiter l'indemnisation qui serait accordée aux sociétés Dyson Technology Limited et Dyson, au titre du lancement, de la commercialisation et de la promotion de la gamme d'aspirateurs balais Dirt Devil Cavalier en France par les sociétés Royal Appliance International et TTI Floor Care France, à plus justes proportions ;

- Limiter l'indemnisation qui serait accordée aux sociétés Dyson Technology Limited et Dyson, au titre de l'utilisation du terme " Up Top " par les sociétés Royal Appliance International et TTI Floor Care France en lien avec leur aspirateur D DD698-2, à une somme totale de 10 000 euros ;

- Réduire le montant des astreintes ordonnées, le cas échéant, à plus justes proportions ;

- Réduire le nombre de publications d'un communiqué judiciaire ordonnées, le cas échéant, à une seule insertion dans un journal ou magazine du choix des sociétés Dyson Technology Limited et Dyson, pour un budget total de 2 000 euros hors taxes ;

En tout état de cause :

- Condamner les sociétés Dyson Technology Limited et Dyson, en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, à verser à chacune des sociétés Royal Appliance International et TTI Floor Care France la somme de 156 600 euros au titre de leurs frais irrépétibles de première instance ;

- Condamner les sociétés Dyson Technology Limited et Dyson, en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, à verser à chacune des sociétés Royal Appliance International et TTI Floor Care France la somme de 91 000 euros au titre de leurs frais irrépétibles d'appel, sauf à parfaire.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 5 novembre 2019.

Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément au jugement déféré et aux écritures des parties ainsi que cela est prescrit à l'article 455 du Code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

Il convient à titre liminaire de rappeler que les sociétés Dyson fabriquent et commercialisent des aspirateurs balais, s'agissant d'aspirateurs sans sacs à poussière. Elles ont ainsi lancé en février 2011 puis commercialisé l'aspirateur balai DC 35 en novembre 2012 et le DC45 en juillet 2015, qui ont été déclinés en séries successives.

Les sociétés intimées ont lancé les aspirateurs incriminés de la gamme Dirt Devil Cavalier en octobre 2016.

1- Sur les actes de concurrence déloyale et parasitaire

1-1 sur l'imitation entraînant un risque de confusion pouvant caractériser des actes de concurrence déloyale

La concurrence déloyale doit être appréciée au regard du principe de la liberté du commerce ce qui implique qu'un produit puisse être librement reproduit sous réserve de l'absence de faute par la création d'un risque de confusion dans l'esprit de la clientèle sur l'origine du produit circonstance préjudiciable à un exercice paisible et loyal du commerce.

L'appréciation de la faute au regard du risque de confusion doit résulter d'une approche concrète et circonstanciée des faits de la cause prenant en compte le caractère plus ou moins servile, systématique ou répétitif de la reproduction ou de l'imitation, l'ancienneté d'usage, l'originalité, la notoriété de la prestation copiée.

La reprise d'une combinaison d'éléments et de leur agencement, fussent-ils individuellement usuels, peut caractériser des actes de concurrence déloyale s'il en résulte un risque de confusion dans l'esprit du public.

L'appréciation de l'imitation doit se faire de manière globale au regard de l'impression visuelle d'ensemble qui se dégage des produits.

Sur la reprise du nom de produit Up Top

Les sociétés Dyson reprochent aux sociétés Royal Appliance et TTI France l'utilisation du nom Up Top pour désigner l'aspirateur Dirt Devil D DD698-2 et ce alors qu'elles l'utilisent pour leur part depuis plusieurs années pour désigner plusieurs de leurs aspirateurs balais et à traîneaux.

Elles considèrent que l'utilisation de " Up Top " constitue un acte de concurrence déloyale, s'agissant d'une imitation à la lettre près du nom du produit Dyson, que le terme a ainsi été utilisé au moins du mois de décembre 2016 jusqu'au mois d'avril 2019 par les sociétés intimées.

Les sociétés Royal Appliance et TTI France considèrent pour leur part que le terme " Up Top " est utilisé dans son sens usuel et descriptif, que d'autres concurrents comme la société Rowenta ont employé le terme " Up Top " pour décrire la fonctionnalité de certains accessoires, que le consommateur n'associe le terme Up Top ni à la société Dyson, ni au secteur de l'électroménager, ni même aux aspirateurs balais.

Elles concluent en conséquence à l'infirmation du jugement entrepris et à titre subsidiaire à la diminution de dommages et intérêts qui pourraient être alloués à la société Dyson, ayant en tout état de cause limité l'utilisation du terme " Up Top " à un seul de leurs aspirateurs et l'ayant fait cesser dès la lettre recommandée qui leur a été adressée par les sociétés Dyson.

Le fait pour un opérateur d'utiliser une dénomination sociale, un nom commercial, un nom de domaine identique ou proche de celui d'un concurrent peut constituer un acte de concurrence déloyale.

Le fait pour un opérateur économique de reprendre un nom peut donc constituer une faute lorsque la reprise de cet élément crée un risque de confusion dans l'esprit du public.

En l'espèce, le terme " Up Top " utilisé par les sociétés Dyson n'est ni un nom commercial, ni une dénomination sociale, ni un nom de domaine mais un terme accolé à DC45. Il est employé pour d'autres aspirateurs balais qu'ils soient à traîneau ou balai étant utilisé pour désigner une caractéristique du produit, s'agissant d'un aspirateur qui comprend des accessoires spécialement conçus pour nettoyer " les surfaces en hauteur difficiles d'accès " comme il est indiqué dans les documents publicitaires de la société Dyson.

Il n'est pas contesté que le même terme " Up Top " a été utilisé par la société XX Y et la société TTI France concernant l'aspirateur Dirt Devil Cavalier DD698-2 lequel a pour nom sur la page facebook française de Dirt Devil " Le D EE BB DD698-2 " ainsi que sur d'autres sites marchands.

Il s'agit comme le font valoir les sociétés Royal Appliance et TTI France d'un terme fait de deux locutions dont le premier terme " Up " signifie en haut ce qui correspond aux caractéristiques des aspirateurs qui peuvent nettoyer en hauteur et est dès lors descriptif.

S'y ajoute le terme Top sans que pour autant l'association des deux termes ne permette aux sociétés Dyson de prétendre qu'il s'agit d'une " dénomination qui leur est propre ". Il s'agit d'une locution attachée à certains aspirateurs qui est descriptive de la finalité de l'accessoire, à savoir nettoyer des endroits haut placés difficilement accessibles.

L'emploi de deux termes anglais compréhensibles de tous car entrés dans le langage commun ne permet pas aux sociétés Dyson d'invoquer davantage le caractère du terme qui leur serait " propre ".

Au surplus, il ressort de l'étude d'opinion confiée par les sociétés intimées à l'institut Open Mind et diligentée en juillet 2019 que :

Pour 94 % des répondants, la locution Up Top n'est associée à aucune marque (et en assisté sur liste, 18 % associent le terme à la marque Dyson, 50 % ne l'associant à aucune marque), pour 85 % des répondants le terme Up Top n'est associé à aucun secteur d'activité (et en assisté, 17 % l'associent à l'électroménager) pour 86 % des répondants, le terme Up Top n'est associé à aucun produit particulier (et en assisté, 18 % à un aspirateur sans fil).

Pour 57 % des répondants, lorsque des visuels d'accessoires d'aspirateurs leur sont présentés, le terme Up Top est associé à une brosse pour le dessus et le haut des meubles difficiles d'accès.

Si dans les réponses assistées, 18 % des consommateurs associent le terme Up Top à la marque Dyson, contrairement à ce que soutiennent les sociétés Dyson, ce résultat n'est pas suffisant pour rapporter la preuve d'un risque de confusion.

Il ressort de ce qui précède que les sociétés Dyson ne démontrent pas que l'utilisation du terme Up Top par les sociétés intimées pour désigner un aspirateur balai est de nature à engendrer dans l'esprit de la clientèle un risque de confusion concernant l'origine du produit dans la mesure où le terme Up Top n'est associé à aucune marque en particulier par le consommateur, à aucun secteur d'activité ciblé ni à aucun produit particulier.

Les sociétés Dyson ne peuvent tirer argument de ce que les sociétés TTI France et XX Y ont fait supprimer l'usage du terme Up Top dès la mise en demeure qui leur a été adressée pour en tirer la conséquence qu'elles auraient reconnu le caractère fautif de la reprise alléguée.

En conséquence, l'emploi par les sociétés intimées du terme Up Top composé de deux mots entrés dans le langage courant et compréhensible de tous et descriptifs pour désigner un aspirateur qui comprend des accessoires spécialement conçus pour nettoyer " les surfaces en hauteur difficiles d'accès " n'entraîne pas de risque de confusion dans l'esprit du public sur l'origine du produit pour désigner des accessoires de même nature concernant des aspirateurs balais.

Sur la reprise de la couleur " Dyson Satin Blue "

Les sociétés Dyson font valoir accorder beaucoup d'importance à la couleur et notamment à la couleur " Dyson Satin Blue " utilisée depuis 2008. Elles exposent ne pas revendiquer la couleur bleue en général mais bien la couleur " Dyson Satin Blue " qui a été reprise par les sociétés intimées. Elles produisent à cet égard un sondage réalisé par BVA en 2019 qui démontre selon elles que le consommateur considère que la couleur de l'aspirateur Dirt Devil Cavalier est ressemblante pour 67 % d'entre eux et très ressemblante pour 40 %.

Elles indiquent que pour réaliser la couleur Dyson Satin Blue qui n'est pas référencée dans le nuancier Pantone, elles ont suivi un long processus créatif depuis 2006, que O I a donné son approbation, que la couleur a évolué à compter de 2010 et a été adoptée une fois qu'elle était légèrement plus vive pour l'aspirateur DC35.

Les sociétés Royal Appliance et TTI France répliquent que les bleus ne sont pas identiques, celui de la société Dyson tirant vers le violet alors que le bleu des aspirateurs Dirt Devil Cavalier est plus froid et tend davantage vers le bleu roi, que la couleur bleue est souvent utilisée pour les aspirateurs, que le consommateur n'associe pas en tout état de cause la couleur Dyson Satin Blue à la société Dyson.

S'il est incontestable qu'une recherche sur la couleur a eu lieu pour obtenir la couleur " Dyson satin blue " appliquée à l'aspirateur DC35 et si la couleur des aspirateurs Dirt Devil Cavalier DD698-2 reprend une couleur bleue satin laquelle si elle n'est pas identique, est similaire bien que moins brillante, il n'en demeure pas moins que la couleur bleue, sa nuance fut elle recherchée est libre de droits sauf à démontrer que sa reprise engendre un risque de confusion dans l'esprit de la clientèle sur l'origine du produit dans la mesure où la couleur " Dyson Satin Blue " bleue serait associée aux produits de la société Dyson.

Pour démontrer le risque de confusion, les sociétés Dyson produisent un sondage réalisé par BVA en 2019 qui démontre selon elles que le consommateur considère que la couleur de l'aspirateur Dirt Devil Cavalier est ressemblante pour 67 % d'entre eux et très ressemblante pour 40 %.

Les sociétés intimées versent au débat un autre sondage réalisé par OponedMind le 5 juillet 2019 pour conclure que la couleur bleue Dyson est dépourvue d'une valeur économique individualisée pour les sociétés Dyson.

Il ressort de ce sondage que :

69 % des sondés n'associent pas la couleur bleue à une marque, (dans la liste assistée, 1 % associe la couleur bleue à la marque Dyson),

74 % n'associent pas la couleur à un secteur d'activité particulier (dans la liste assistée, 3 % l'associent au secteur de l'électroménager),

78 % des répondants n'associent pas la couleur bleue à un type de produit particulier (et dans la liste assistée, 3 % à un aspirateur balai sans fil),

88 % des répondants n'associent pas cette couleur à une marque d'aspirateur balai sans fil (et dans la liste assistée, 22 % l'associent à la marque Dyson soit moins d'un quart des répondants).

Il ressort de ce sondage d'opinion que le consommateur n'associe pas la couleur bleue aux aspirateurs balais des sociétés Dyson et vient éclairer et compléter le premier sondage.

Si les sondés estiment ressemblante à très ressemblante la couleur utilisée par l'aspirateur Dirt Devil lors de la comparaison avec celle utilisée par l'aspirateur Dyson, il n'en demeure pas moins qu'il n'est pas démontré que le public associe la couleur Dyson Satin Blue à la société Dyson de sorte que la couleur reprise si elle est similaire n'engendre pas un risque de confusion dans l'esprit du public sur l'origine du produit.

Dès lors, la reprise par imitation de la couleur du Dyson Satin Blue ne génère pas un risque de confusion dans l'esprit du public.

Sur la reprise du design des aspirateurs balais séries DC 35 et DC 45

Les sociétés Dyson font grief aux sociétés intimées d'avoir imité le design de leurs aspirateurs balais DC 35 et DC 45 en commercialisant les balais aspirateurs " Dirt Devil " D. Elles font valoir que l'accumulation délibérée d'une combinaison d'éléments constitutifs du design de leurs aspirateurs multifonctions Dyson même si certains sont usuels confère aux aspirateurs " Dirt Devil " D une impression d'ensemble similaire à leurs produits qui est constitutive d'actes de concurrence déloyale.

Les sociétés Dyson font valoir qu'au-delà de l'architecture générale de l'aspirateur, les proportions des aspirateurs balais Dirt Devil Cavalier sont identiques à celles des aspirateurs Dyson DC 35 et DC 45, que le tube, la partie haute et les brosses des deux produits sont de dimensions similaires, que la forme n'est induite par aucune contrainte technique ou fonctionnelle, que le tube de l'aspirateur est cylindrique et d'une longueur identique à savoir 58,8 centimètres pour la partie en aluminium et 69,9 centimètres, attaches en plastiques incluses d'un seul tenant, que les brosses sont de forme similaire ainsi que le bouton poussoir.

Elles précisent que la partie haute des aspirateurs Dirt Devil Cavalier reprend l'agencement des aspirateurs Dyson DC 35 et DC 45 en ce qu'il existe une démarcation entre une partie inférieure arrondie et une partie supérieure allongée qui la surplombe, un collecteur de poussière en plastique transparent de forme cylindrique placé à l'arrière de l'appareil à l'horizontale, une poignée à l'arrière de l'appareil qui ne se voit pas quand l'appareil est de face.

Elles indiquent que l'assemblage des couleurs s'agissant de l'association d'une couleur sombre avec une couleur vive est identique et constitue la reprise du Code couleur.

Elles considèrent que la technologie et les contraintes inhérentes à ce type d'aspirateur balai laissent pour autant une marge de liberté aux fabricants et que c'est de façon fautive et délibérée que les sociétés intimées ont repris le design alors qu'elles n'y étaient contraintes par aucune nécessité technique ou fonctionnelle.

Les sociétés intimées répliquent que les éléments dont la reprise leur est reprochée sont banals et standards, que le design des aspirateurs Dyson n'est pas repris en son ensemble comme le soutiennent les sociétés Dyson, que les différences sont notables, que l'impression visuelle d'ensemble n'est pas similaire.

La cour relève que le bloc moteur de l'aspirateur balai Dirt Devil Cavalier est localisé au niveau de la poignée en hauteur comme celui des sociétés Dyson, que la poignée est positionnée à l'arrière alors qu'elle peut l'être à l'avant comme pour l'aspirateur Black et Decker " HVFE2150LB " , que les sociétés intimées ont choisi de la placer à l'arrière n'y étant pas contraintes techniquement.

Ces dernières font valoir en réplique avoir commercialisé avant les sociétés Dyson un aspirateur avec le bloc moteur au niveau de la poignée du même type que celui des aspirateurs DC35 et DC 45 en décembre 2009, le M ... multifonctions et considèrent que le fait qu'il s'agisse d'un aspirateur à main et non d'un aspirateur balai n'a pas d'incidence.

Elles font état d'un autre aspirateur Q qui a été commercialisé avant les aspirateurs Dyson avec ce même bloc moteur au niveau de la poignée et en forme de stick. Les sociétés appelantes font remarquer qu'il a connu une diffusion très limitée la forme stick était néanmoins connue ce qui fait dire aux sociétés intimées que la société Dyson qui se dit pionnière n'a fait que reprendre son propre aspirateur lancé en décembre 2009.

Il est établi que les aspirateurs balais ont connu un développement certain à compter de 2015 avec l'aspirateur Z A et Decker suivi ensuite par la société Rowenta, le premier dès 2015 ayant un bloc moteur en hauteur et non pas au niveau de la brosse, les sociétés intimées ayant elle mêmes lancé l'aspirateur à main M ... avec un bloc moteur en hauteur même si celui-ci se trouvait à la onzième place sur le marché mondial.

Cependant l'aspirateur à main précité a une physionomie différente de l'aspirateur balai DC35 et DC45.

Si celui-ci a un bloc moteur au niveau de la poignée, il est différent dans son design de celui des aspirateurs Dyson étant un aspirateur à main auquel seulement un tube peut être joint.

Le récupérateur à poussière est cylindrique et transparent pour les aspirateurs DC 35 et D698-3 comme pour ceux de la société Dyson mais la poignée n'est pas rattachée de la même façon dans les aspirateurs des sociétés intimées.

Les sociétés Dyson font valoir que le Code couleur s'agissant de l'association de la couleur métal sombre et d'une couleur vive (rouge ou bleu métallisé) est repris.

Toutefois, il convient de relever d'une part que l'association d'une couleur métal et d'une couleur plus vive est courante et que d'autre part la reprise de la couleur bleue n'est pas placée au même endroit, la couleur bleue étant dominante dans l'aspirateur Dyson au niveau du cyclone alors que si elle est aussi placée au niveau du bloc moteur chez les aspirateurs Dirt Devil Cavalier, elle est moins mise en avant figurant au niveau du bloc moteur et sur les boutons alors que ceux-ci sont de couleur acier pour l'aspirateur Dyson.

La forme du tube en acier cylindrique et d'un seul tenant est fonctionnelle même si d'autres formes peuvent exister, celle-ci pouvant aussi être plate ou cubique, la forme en est courante et n'est pas reprise à l'identique dans la mesure où il présente à l'arrière une arête dorsale.

La brosse est quasiment identique dans la mesure où la longueur est de 22 centimètres pour l'aspirateur Dyson et de 23,5 centimètres pour l'aspirateur Dirt Devil, la forme est très proche, le capot est transparent, les poils sont disposés en spirale, un liseré de couleur est positionné sur la partie basse.

Cependant les dimensions d'un tube d'aspirateur d'un seul tenant sont adaptées à la taille humaine pour pouvoir être passé en étant debout, et la brosse si elle est de même forme rectangulaire ce qui correspond à la plupart des brosses d'aspirateurs n'est pas rattachée de la même façon au tube.

Les sociétés Dyson décrivent le bouton poussoir qui est de forme ovale avec un aspect concave mais il s'agit d'un bouton poussoir utilisé communément et qui répond à une fonction technique.

Les sociétés Royal Appliance et TTI France font état de ce que l'élément non pas générique et fonctionnel mais caractéristique de la société Dyson s'agissant des protubérances en forme de cône (appelée cyclone) n'est pas reproduit ce à quoi la société Dyson réplique qu'il serait alors loisible à toute société de reproduire ses aspirateurs si elle ne reprend pas le cyclone.

La cour relève que les sociétés Royal Appliance et TTI France ont pris la précaution comme elles le soulignent de ne pas reprendre l'élément cyclone caractéristique des aspirateurs Dyson, que l'imitation du design de l'aspirateur balai en son ensemble ne peut être écartée du seul fait de l'absence de reprise du cyclone, élément caractéristique des aspirateurs Dyson mais qu'il n'en demeure pas moins que cet élément dominant des aspirateurs Dyson leur confère une identité qui ne se retrouve pas dans l'aspirateur balai soumis au débat.

En effet, la seule reprise du design de l'aspirateur en son ensemble répondant à la forme générale stick, associant le positionnement du bloc moteur au niveau de la poignée, un tube en acier, une brosse rectangulaire et des bouton poussoir sont des éléments fonctionnels de l'aspirateur et non caractéristiques.

Si l'on y ajoute la combinaison avec un Code de deux couleurs associant une couleur de métal sombre et une couleur vive rouge ou bleue, force est de constater que la couleur n'est pas reportée sur les mêmes éléments des aspirateurs, la couleur étant essentiellement mise en valeur et dominante sur le cyclone de l'aspirateur Dyson alors qu'elle figure de façon moins prégnante au niveau du bloc moteur et est localisée sur les différents boutons des aspirateurs Dirt D.

Pour rapporter la preuve du risque de confusion dans l'esprit du public, les sociétés Dyson versent aux débats le sondage d'opinion réalisé par la société BVA dont il ressort selon elles que 94 % des sondés trouvent que la forme des aspirateurs Dirt Devil est semblable et 88 % très ressemblants.

Cependant, il ressort du sondage que lorsque les sondés n'avaient pas simultanément les deux appareils présentés devant eux 19 % et non 88 % d'entre eux ont confondu l'appareil Dirt Devil avec l'appareil Dyson et 46 % lorsque l'appareil Dyson ne faisait pas partie du panel.

Il ressort de ce qui précède que l'impression visuelle d'ensemble qui se dégage du design des aspirateurs Dirt D n'est pas similaire à celle des aspirateurs Dyson, la reprise d'éléments fonctionnels combinée à l'association de deux couleurs vive et métal agencée dans une forme générale de stick déjà connue n'étant pas suffisante à engendrer un risque de confusion dans l'esprit du public.

Sur la reprise des éléments de communication

Les sociétés Dyson font grief aux sociétés Royal Appliance et TTI France du fait d'avoir repris certains de leurs visuels. Elles font valoir que s'agissant du visuel " rangement buanderie ", il y a une même prise de vue d'ambiance, le lieu de la buanderie, la présence d'un lave-linge, des murs blancs, un appareil accroché au mur, un éclairage du produit par la gauche et une lumière recréant un éclairage naturel.

S'agissant du visuel " utilisation sous canapé ", il y a une même prise de vue de l'appareil, un salon, un canapé avec des pieds de faible hauteur, une ambiance neutre, un cadrage serré sur une partie du canapé, une vue de la brosse et d'une partie du tube, une mise en avant de l'accessibilité sous meuble, une lumière rasante pour éclairer le dessous du canapé et la reproduction d'un éclairage naturel provenant d'une fenêtre.

Elles insistent sur le caractère épuré de leur visuel avec une approche monochromatique.

Si des similitudes existent entre les deux visuels de communication s'agissant du lieu de la buanderie, du rapprochement entre un aspirateur balai et une machine à laver dans un décor clair, il n'en demeure pas moins que la scénarisation en son ensemble n'est pas la même, l'aspirateur de la société Dyson étant suspendu alors que celui des sociétés intimées est posé sur le sol, le cadre de vue étant plus large chez le visuel des sociétés Dyson intégrant davantage d'éléments tels des étagères, un pot de fleur, un fer à repasser, un panier à linge.

Le visuel des sociétés Dyson est plus vivant alors que celui des sociétés intimées est plus froid et technique.

Si donc les ressemblances tenant à la présentation même de l'aspirateur rapproché d'une machine à laver existent, elles ne sont pas suffisantes à créer une impression visuelle d'ensemble similaire sachant que la mise en scène d'aspirateurs dans une buanderie, une cuisine ou un salon sont courantes pour en démontrer les qualités, la couleur blanche renvoyant à la propreté.

Les sociétés Dyson ne peut davantage soutenir que le visuel dans le salon présente une originalité, le positionnement de l'aspirateur sous le canapé du salon dans un univers propre qui s'impose en matière de ménage étant courant.

Elles revendiquent de façon générale une mise en scène fonctionnelle et épurée ainsi que monochromique mais n'est pas suffisamment spécifique pour que l'utilisation d'éléments similaires par les sociétés intimées dans leur communication entraîne un risque de confusion dans l'esprit du public.

1-2 Sur les agissements parasitaires imputés aux sociétés Royal Appliance et TTI France

Les sociétés Dyson font valoir que les sociétés Royal Appliance et TTI France ont eu un comportement parasitaire à leur égard, s'inscrivant dans leur sillage en utilisant la locution " Up Top " et en reprenant les éléments constitutifs de l'identité des aspirateurs balais Dyson pour créer un lien dans l'esprit des consommateurs entre les aspirateurs Dyson et Dirt Devil Cavalier, et ce en développant à moindres frais des produits leur procurant un avantage économique indu. Elles exposent qu'elles subissent un préjudice économique ayant vu leurs ventes chuter ainsi qu'un préjudice d'image.

Elles excipent du fait que les sociétés intimées se sont ainsi placées dans leur sillage ce qui est démontré par le lien qui a été fait tant par les journalistes spécialisés que par les consommateurs entre les deux séries d'aspirateurs.

En réplique, les sociétés Royal Appliance et TTI France concluent à la confirmation du jugement entrepris qui a débouté les sociétés appelantes de leurs demandes au titre du parasitisme.

Elles font valoir que les sociétés Dyson ne démontrent pas les investissements prétendument effectués pour la réalisation, la conception et la promotion des aspirateurs DC 35 et DC 45.

Le parasitisme est l'ensemble des comportements par lesquels un agent économique s'immisce dans le sillage d'un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire.

La preuve doit être rapportée de la recherche d'une économie au détriment d'un concurrent, par reprise du savoir-faire, de la notoriété ou des fruits d'investissements.

Il appartient aux sociétés Dyson de rapporter la preuve de leurs investissements pour développer le lancements et la commercialisation des aspirateurs DC 35 et DC 45, soutenant que les sociétés intimées auraient profité de leur notoriété et du fruit de leurs investissements sans C J en s'inscrivant dans leur sillage.

Pour rapporter la preuve de ses investissements, les sociétés Dyson versent au débat :

- une attestation de M. X CC, directeur financier R&D,

- une attestation de M. W U, également directeur R&D,

- une attestation de Mme AA B M directrice administrative et financière,

- une attestation de Mme P K.

Les sociétés Royal Appliance et TTI France critiquent ces attestations au motif qu'elles seraient imprécises et générales ne spécifiant pas les dépenses occasionnées par les aspirateurs concernés, seuls objets du présent débat et ne seraient dès lors pas pertinentes.

Cependant, si certes ces attestations sont globales portant sur les coûts d'investissements pour tous les aspirateurs balais sur le territoire français, elles font état d'investissements importants pour le développement des aspects techniques et mécaniques et pour leur promotion. M. X CC en qualité de directeur financier de la société Dyson indique avoir engagé pour les frais de personnel d'élaboration du prototype des développements et autres coûts directs la somme de 3,25 millions de livres. Il est précisé par Mmes K dans ses deux attestations que les frais engagés media pour la période d'octobre 2016 à octobre 2017 s'élèvent à la somme de 8 120 116 € et à celle de 9 110 015 € pour la période d'octobre 2017 à octobre 2018, les sommes se décomposant en frais d'affichage, internet, opérations spéciales, presse et télévision.

Il est également rapporté la preuve de ce que le processus de développement du " Dyson satin blue " a nécessité des investissements humains, techniques et financiers avec une implication de M. O I et un travail avec un partenariat industriel IVC qui en atteste.

Concernant les investissements allégués par les sociétés intimées pour le développement des aspirateurs balais Dirt Devil Cavalier, elles produisent une attestation rédigée en anglais par une salariée chinoise qui indique que les investissements exposés le sont par une société Ecovax pour une gamme d'aspirateurs " Titus " auprès de laquelle la filiale anglaise du groupe TTI se serait approvisionnée.

C'est à juste titre que les sociétés appelantes relèvent l'absence de pertinence de cette attestation qui évoque des investissements par une société tierce, la société Vax Limited concernant un produit " Titus " et qui n'évoque pas de fonds consacrés au développement du design des produits litigieux.

Les factures de conseils juridiques, une facture d'avocat et des factures de conseillers en propriété intellectuelle adressés à la société Vax ne sont pas davantage probantes pour démontrer les investissements allégués ni les factures adressées à la société Vax Limited portant sur un projet Titus dont le lien avec les aspirateurs balais Dirt devil Cavalier n'est pas établi.

La société Dirt Devil ne rapporte pas la preuve d'avoir engagé des frais conséquents pour le développement des produits et notamment pour les aspirateurs Dirt Devil Cavalier.

Les sociétés intimées versent une autre attestation de Mme G T F, de nationalité australienne, exerçant la fonction de directrice financière du département Entretien des sols pour l'Europe, le

Moyen Orient et l'Asie au sein de la société Vax Limited. Elle atteste de ce que les dépenses de communication effectuées par la société TTI Floor Care France pour les balais sans fil D entre 2016 et 2019 s'élèvent à 1 222 608 €.

Il convient de relever que cette attestation portant sur le chiffrage des investissements pour le développement et la promotion des aspirateurs sans fil D est produite par une salariée de la société Vax Limited et non des sociétés Royal Appliance ou TTI France, qu'aucun document interne aux sociétés intimées n'est produit.

En tout état de cause, l'investissement mentionné est peu élevé, la société TTI France expliquant être une petite PME ayant une surface financière limitée alors qu'elle a pu se présenter aussi de façon contradictoire comme une filiale d'un groupe hong kongais TTI leader en son domaine de l'électroménager.

En outre, les sociétés Dyson entendent démontrer leur notoriété, 68 % des sondés donnant Dyson comme marque d'aspirateur

Si les faits d'imitation dont il résulterait un risque de confusion dans l'esprit du public n'ont pas été retenus, il n'en demeure pas moins que les sociétés intimées ont repris le design des aspirateurs balai DC 35 et DC 45 associé à un Code couleur avec un bleu très proche du Dyson Satin Blue, qu'alors que la société Dyson a fait des investissements pour développer ses aspirateurs et ce tant de conception que de communication, les sociétés intimées se sont inscrites dans son sillage pour commercialiser un aspirateur Dirt Devil Cavalier sans C J, ne rapportant pas avoir fait des investissements particuliers et importants pour sa part ce qui révèle la volonté de profiter des fruits des investissements de la société Dyson.

Cette reprise injustifiée des éléments du design des aspirateurs de la société Dyson par les sociétés intimées ne saurait être fortuite et procède d'une volonté délibérée de se placer dans le sillage des sociétés Dyson ; ce comportement fautif procure aux sociétés Royal Appliance et TTI France un avantage concurrentiel pour développer un produit concurrent qui caractérise les agissements parasitaires.

Il appartient aux sociétés appelantes de rapporter la preuve de leur préjudice du fait du manque à gagner dont elles font état.

Le jugement est infirmé.

2- Sur le préjudice

Les sociétés Dyson excipent d'un préjudice qui serait constitué par un détournement de clientèle à leur détriment, d'un préjudice d'image du fait de la dévalorisation de son positionnement haut de gamme et des interférences dans sa communication.

Elles estiment qu'elles ont subi un manque à gagner et s'appuient pour le chiffrer sur un rapport S qu'elles ont fait diligenter. Elles sollicitent le versement de la somme de 1 619 966 € à titre de dommages et intérêts soit 1 216 693 € au titre du préjudice commercial et la somme de 403 243 € au titre du préjudice d'image.

Pour leur part, les sociétés intimées concluent au rejet des demandes et pour en dénoncer le mal fondé, elles ont fait réaliser un rapport par le cabinet Sorgem Evaluation. Elles font valoir que l'étude diligentée par les sociétés Dyson prend en compte la totalité des aspirateurs vendus par les sociétés Dyson alors qu'elle aurait dû être limitée aux aspirateurs objet du débat DC 35 et DC 45 et que le gain manqué n'est pas démontré.

Le risque de confusion dans l'esprit du public n'ayant pas été retenu, il n'y a pas lieu de s'attacher à l'évaluation d'un éventuel gain manqué par les sociétés Dyson en matière de vente d'aspirateurs, la clientèle n'ayant pas été détournée par les sociétés intimées au préjudice des sociétés Dyson.

Il convient d'apprécier uniquement le préjudice subi du fait des actes de concurrence parasitaire, les sociétés intimées s'étant inscrites dans le sillage des sociétés Dyson en tirant profit de ses investissements, de son savoir-faire et de sa notoriété pour promouvoir et vendre des aspirateurs à un prix inférieur.

Les sociétés Dyson ont subi un préjudice lié au fait que les sociétés intimées ont détourné à leur profit les efforts d'investissements réalisés par les sociétés Dyson lesquels en termes de coûts de développement, d'élaboration du prototype, de la mise production et des autres coûts directs se sont élevés en moyenne pour un aspirateur balai suivant l'attestation de M X CC, directeur financier R&D de la société Dyson Technology limited à la somme de 3,25 millions de livres sterling soit 3,7 millions d'euros.

Les sociétés Dyson ont également subi un préjudice du fait de la dévalorisation de leur positionnement sur le marché de l'aspirateur et des interférences dans sa communication, les sociétés Royal Appliance et TTI France ayant dilué le risque et l'aléa économique d'un nouveau produit lancé sur le marché ayant aussi détourné à leur profit les efforts d'investissement réalisés par les sociétés Dyson en matière de communication et de publicité.

Elles exposent avoir à cet égard dépensé la somme de 8,1 millions d'euros au titre des dépenses publicitaires pour la période octobre 2016- octobre 2017. Elles rapportent cette somme à un coefficient de 4,9 % correspondant au prorata des ventes d'aspirateurs litigieux de Dirt Devil sur celles de Dyson d'après les données de ventes d'aspirateurs balais soit la somme de 403 243 €.

Toutefois, au regard de ce qui précède, Il ne peut être tenu compte de ce coefficient critiqué par l'avis SORGEM dont on ne sait pas comment il été établi.

Au regard des éléments financiers précités, considérant que les sociétés Dyson ont subi un préjudice du fait des agissements parasitaires des sociétés intimées qui ont tiré profit d'une partie de leurs investissements R&D et de communication pour commercialiser les aspirateurs Dirt D, le préjudice sera fixé à la somme globale de 200 000 € qui sera versée aux sociétés Dyson, celle-ci ne justifiant pas d'un préjudice distinct pour chacune d'entre elles.

Le jugement est infirmé.

3- Sur les mesures de publication et d'interdiction

Il y a lieu d'ordonner la publication du dispositif de l'arrêt en ce qu'il dit que " les sociétés ... se sont rendues fautives de concurrence parasitaire à l'égard des sociétés Dyson " aux frais des intimées dans deux journaux ou magazines au choix des appelantes pour un coût de 5 000 € par insertion ainsi que sur la page d'accueil du site internet de www.dirtdevil.fr pendant une durée de trente jours à compter de la signification de l'arrêt.

Il n'y a pas lieu d'ordonner des mesures d'interdiction de vente des aspirateurs ni d'astreinte.

4- Sur les autres demandes

Le jugement est confirmé en ce qui concerne les dépens et les indemnités allouées sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Les sociétés intimées sont condamnées aux dépens d'appel et condamnées à verser aux sociétés Dyson la somme de 15 000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par ces motifs, Statuant par arrêt contradictoire, Infirme le jugement du 28 juin 2018 rendu par le tribunal de commerce de Nanterre en ses dispositions sauf en ce qui concerne les dépens et l'indemnité allouée sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, Statuant à nouveau, Dit que les sociétés Royal Appliance International et TTI Floor Care France se sont rendues fautives d'agissements parasitaires à l'égard des sociétés Dyson et Dyson Technology Limited, Les condamne en conséquence à verser in solidum aux sociétés Dyson et Dyson Technology Limited la somme de 200 000 € au titre du préjudice subi, Ordonne la publication du dispositif de l'arrêt en ce qu'il dit que " les sociétés Royal Appliance International et TTI Floor Care France se sont rendues fautives d'agissements parasitaires à l'égard des sociétés Dyson et Dyson Technology Limited " aux frais des intimées dans deux journaux ou magazines au choix des appelantes pour un coût de 5 000 € par insertion ainsi que sur la page d'accueil du site internet de www.dirtdevil.fr pendant trente jours à compter de la signification de l'arrêt, Déboute les parties de leurs autres demandes, Condamne les sociétés Royal Appliance International et TTI Floor Care France aux dépens, Condamne les sociétés Royal Appliance International et TTI Floor Care France à verser aux sociétés Dyson et Dyson Technology Limited la somme de 15 000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile.