CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 29 janvier 2020, n° 18-10059
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Alpha Taxis (SARL)
Défendeur :
Viacab (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Dallery
Conseillers :
Mmes Bodard-Hermant, M. Gilles
FAITS ET PROCÉDURE
La société Viacab, détenue à 50 % par M. X qui est son gérant, a été créée en 2011 et exploite notamment les noms commerciaux et les marques déposées SOS Taxis et les sites de même nom sur lesquels elle propose un service de réservation de taxis à Paris et en région parisienne.
La société Alpha Taxis exploite à Paris et en région parisienne une centrale de réservation, diffuse des appels auprès des taxis affiliés et propose un service d'abonnement à une clientèle d'entreprise ou de particuliers.
Estimant que la société Alpha Taxis exerce une concurrence déloyale en ne respectant pas la réglementation de la profession de chauffeur de taxi, ce qui l'a empêchée de développer son réseau, la société Viacab a, par acte en date du 10 janvier 2017, fait assigner la société Alpha Taxis devant le tribunal de commerce de Paris qui, par un jugement en date du 7 mai 2018, a :
- condamné la société Alpha Taxis à cesser de proposer des abonnements incluant un supplément non autorisé en sus du prix de la course sous astreinte de 5 000 euros par infraction constatée, à compter de 60 jours après la signification du jugement pour une période de 90 jours au-delà de laquelle il pourra à nouveau y être fait droit ;
- condamné la société Alpha Taxis à payer à la société Viacab une somme de 58 900 euros en dommages et intérêts pour concurrence déloyale, majorée des intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement et jusqu'à parfait paiement ;
- débouté la société Viacab de toutes ses demandes autres, plus amples ou contraires ;
- ordonné l'exécution provisoire du jugement, nonobstant appel et sans caution ;
- condamné la société Alpha Taxis à payer à la société Viacab la somme de 20 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- condamné la société Alpha Taxis aux dépens.
Par déclaration du 23 mai 2018, la société Alpha Taxis a interjeté appel de ce jugement.
Vu les dernières conclusions de la société Alpha Taxis, appelante, déposées et notifiées le 14 octobre 2019, par lesquelles il est demandé à la Cour de :
- dire et juger recevable et bien fonde e la société Alpha Taxis en son appel du jugement rendu le 7 mai 2018 par le tribunal de commerce de Paris ;
En conséquence,
- infirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris en date du 7 mai 2018 en toutes ses dispositions lui faisant grief et spécialement ce qu'il a :
Admis la recevabilité de la demande de la société Viacab
" Condamné la société Alpha Taxis à cesser de proposer des abonnements incluant un supplément non autorisé en sus du prix de la course sous astreinte de 5 000 euros par infraction constatée, à compter de 60 jours après la signification du présent jugement pour une période de 90 jours au-delà de laquelle il pourra à nouveau y être fait droit " ;
Condamné la société Alpha Taxis " à payer à la société Viacab une somme de 58 900 euros de dommages et intérêts pour concurrence de loyale, majorée des intérêts au taux légal à dater de la signification du présent jugement et jusqu'à parfait paiement " ;
Condamné la société Alpha Taxis à payer la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Condamné la société Alpha Taxis aux dépens de l'instance, " dont ceux recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 78,36 euros dont 12,85 euros de TVA ".
Et statuant à nouveau,
- dire et juger irrecevable l'action introduite par la société Viacab devant le tribunal de commerce de Paris pour défaut d'intérêt à agir ;
- dire et juger que les contrats d'abonnement proposés par la société Alpha Taxis n'enfreignent pas la réglementation sur les prix des taxis et, par conséquence, ne constituent pas des actes de concurrence déloyale ;
- dire et juger que la société Alpha Taxis n'a commis aucun acte de concurrence déloyale ;
- dire et juger que la société Viacab n'a subi aucun préjudice direct et indemnisable ;
- rejeter l'appel incident formé par la société Viacab contre le jugement rendu le 7 mai 2018 ;
- débouter la société Viacab de l'ensemble de ses demandes présentées tant en première instance qu'en appel ;
- juger irrecevable comme nouvelle la demande formulée en cause d'appel par la société Viacab d'" enjoindre la société Alpha Taxis, sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard passé le de lai de 30 jours suivant la signification de l'arrêt de la cour d'appel, d'envoyer par courrier recommandé avec accusé de réception un avenant contractuel à l'ensemble de la cliente le concernée par cette pratique de loyale en l'informant en ces termes que " par arrêt en date du ...., la société Alpha Taxis a été condamnée à retirer de ses abonnements la facturation d'un supplément non-autorisé de 15 % appelé "service chauffeur " " ;
En toute hypothèse,
- rejeter l'ensemble des demandes de la société Viacab ;
- condamner la société Viacab à verser à la société Alpha Taxis la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- condamner la société Viacab aux entiers dépens qui seront recouvrés selon les dispositions du Code de procédure civile.
Vu les dernières conclusions de la société Viacab, déposées et notifiées le 17 septembre 2019, par lesquelles il est demandé à la Cour de :
Vu l'article 12 du Code de procédure civile,
Vu l'article 1er du décret n° 95-935 du 17 août 1995, modifié, portant application de la loi n° 95-66 du 20 janvier 1995,
Vu l'arrêté inter-préfectoral n° 01-16385 du 31 juillet 2001 relatif aux exploitants et aux conducteurs de taxis dans la zone parisienne,
Vu les arrêtés préfectoraux n° 2012-00026 du 9 janvier 2012, n° 2013-00066 du 18 janvier 2013, n° 2014-00016 du 7 janvier 2014, n° 2015-00041 du 19 janvier 2015, du 3 décembre 2015 et l'arrêté du 22 décembre 2016 fixant les tarifs applicables aux taxis parisiens,
Vu les décrets n° 87-238 du 6 avril 1987 et n° 2015-1252 du 7 octobre 2015 relatif aux tarifs des courses de taxi,
Vu les articles L. 121-2, L. 121-3 et L. 121-4-9° du Code de la consommation,
Vu les articles L. 3121-1, L. 3121-11-2, L. 3141-1, L. 3142-1, L. 3142-2, L. 3142-3 et L. 3142-5 du Code des transports,
Vu les articles L. 420-1, L. 420-2, L. 420-2-2, L. 420-3, L. 420-5 et L. 441-6 du Code de commerce,
Vu les articles L. 131-2, L. 131-3, L. 313-1, L. 511-5 et L. 571-3 du Code monétaire et financier,
Vu l'article L. 8221-3 du Code du travail,
Vu l'article L. 240 (1382 ancien) et suivants du Code civil,
Vu la jurisprudence versée au débat,
Vu les pièces versées au débat,
- infirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris en date du 7 mai 2018 en ce qu'il a :
Débouté la société Viacab de toutes ses demandes, autres, plus amples ou contraires ;
- confirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris en ce qu'il a :
Condamné la société Alpha Taxis à payer à la société Viacab une somme de 58 900 euros en dommages et intérêts pour concurrence de loyale, majorée des intérêts au taux légal à dater de la signification du présent jugement et jusqu'à parfait paiement ;
Condamné la société Alpha Taxis à cesser de proposer des abonnements incluant un supplément non autorisé en sus du prix de la course sous astreinte de 5 000 euros par infraction constatée, à compter de 60 jours après la signification du présent jugement pour une période de 90 jours au-delà de laquelle il pourra à nouveau y être fait droit ;
Condamné la société Alpha Taxis à payer la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Condamné la société Alpha Taxis aux dépens de l'instance, " dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 78,36 euros dont 12,85 euros de TVA " ;
Statuant à nouveau de :
- dire et juger que la société Viacab, n'exploitant pas son service de réservation de taxis SOS Taxis au moyen d'un standard-radio, n'a jamais eu la moindre obligation de déclaration de son activité auprès de la préfecture de police de Paris comme l'aurait exigé l'arrêté préfectoral du 31 juillet 2001 et qu'elle exerce donc son activité de centrale de réservation de taxis sans infraction à la réglementation ;
- dire et juger que le décret d'application de l'article L. 3142-2 du Code des transports n'étant pas paru en octobre 2018, la société Viacab ne se trouve pas en défaut de déclaration de son activité de centrale de réservation de taxis ;
- dire et juger que la société Viacab a donc parfaitement intérêt à agir contre la société Alpha Taxis ;
Sur la taxe de service appelée " service " ou " service chauffeur ",
- constater que sur les contrats et les factures de la société Alpha Taxis la de nomination du " service " facture est écrite exclusivement en ces termes : " service " ou " service du chauffeur " ;
- constater que sur les contrats et les factures de la société Alpha Taxis la dénomination de " service de paiement différé " n'est jamais inscrite ;
- dire et juger que la taxe de service de 15 %, nommée " service " ou " service chauffeur " et facturée par Alpha Taxis pour le compte de ses chauffeurs affiliés, est un supplément de prix qui n'est pas autorisé par la réglementation du taxi parisien ;
- dire et juger que la pratique de " service chauffeur " mis en place par Alpha Taxis dans ses abonnements contrevient à l'article 25 alinéa 16 de l'arrête inter- préfectoral n° 01-16385 du 31 juillet 2001 qui interdit aux chauffeurs de taxi de solliciter un pourboire de " quelque façon que ce soit ".
- dire et juger que les " contrats d'abonnements à paiement différé " proposés à la clientèle de la société Alpha Taxis sont donc contraires à la réglementation sur les prix des taxis et sur l'intermédiation des taxis ;
- dire et juger que la société Alpha Taxis a donc mieux rémunéré les taxis qui lui étaient affiliés ce qui lui a permis de devenir " plus attractive " que la société Viacab sur le marché des centrales de réservations de taxis ;
Sur l'utilisation irrégulière de la dénomination " chèque ",
- dire et juger que les " chèques-transport " fournis par Alpha Taxis ne sont pas des chèques mais sont, en réalité, des " bons de transport " valables pour une course en taxi à prix unique ;
- dire et juger que l'utilisation de la dénomination " chèque " est utilisée irrégulièrement pour nommer le service " chèque-transport " proposé par Alpha Taxis ;
Sur l'atteinte à la liberté du commerce,
- dire et juger que les clauses " d'interdiction d'utilisation de la publicité des concurrents " incluses dans les contrats proposés par la société Alpha Taxis sont des clauses contractuelles nulles ;
- dire et juger que les " clauses d'interdiction d'affiliation à d'autres centrales de réservations de taxis " et que les " clauses d'interdiction d'utilisation de matériel de mise en relation avec la clientèle des concurrents " incluses dans les contrats proposés par la société Alpha Taxis sont des clauses contractuelles nulles ;
- dire et juger que la société Alpha Taxis a donc privé indûment la société Viacab de pouvoir proposer ses services à chacun des " 1 300 taxis affiliés " à Alpha Taxis ;
Sur l'activité non-déclarée de transport de personnes et le dépassement des prix,
- dire et juger que la société Alpha Taxis n'a pas respecté la réglementation des prix des courses en taxis ;
Sur les pratiques commerciales déloyales,
- dire et juger que Alpha Taxis ne communique pas à la clientèles coordonnées (adresse et identité) du " professionnel taxi indépendant " considérées comme des " informations substantielles " sur le prestataire de transport avant le début de la prestation de transport (= montée à bord du véhicule) et que ce fait constitue une pratique commerciale trompeuse ;
- dire et juger que Alpha Taxis déclare ou donne l'impression à la clientèle que ses bons de transports peuvent utiliser la dénomination " chèque " alors que ce n'est pas le cas et que ce fait constitue une pratique commerciale trompeuse ;
- dire et juger que Alpha Taxis déclare ou donne l'impression à la clientèle que ses prestations de transport sont licites alors que Alpha Taxis n'a déclaré aucune activité de transport sur son Kbis et que ce fait constitue une pratique commerciale trompeuse ;
En conséquence,
- ordonner à la société Alpha Taxis, sous astreinte de 20 000 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt de la cour d'appel, de retirer de ses abonnements (en proposant un nouveau contrat expurgé ou en proposant un avenant pour des contrats en cours de souscription) toute condition générale ou particulière (dénommée pourboire ou service ou service chauffeur et pré-remplie par Alpha Taxis ou post-remplie de la main du client) prévoyant la facturation d'un " supplément non autorisé " en sus du montant d'une course de taxi ;
- ordonner à la société Alpha Taxis, sous astreinte de 20 000 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt de la cour d'appel, de cesser des proposer des abonnements (nouvellement souscrits mais aussi en cours d'exécution) incluant un " supplément non autorisé " en sus du montant d'une course de taxi ;
- enjoindre la société Alpha Taxis, sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard, passé le délai de 30 jours suivant la signification de l'arrêt de la cour d'appel, d'envoyer par courrier recommandé avec accusé de réception un avenant contractuel à l'ensemble de la clientèle concernée par cette pratique déloyale en l'informant en ces termes que " par arrêt en date du ..., la société Alpha Taxis a été condamnée à retirer de ses abonnements la facturation d'un supplément non-autorisé de 15 % appelé " service chauffeur " " ;
- ordonner à la société Alpha Taxis, sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt de la cour d'appel, de retirer de ses abonnements toute mention qui interdirait d'apposer aucune autre publicité que celle de Alpha Taxis à quelque titre et sous quelque forme que ce soit, et ce tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du véhicule du taxi affilié à Alpha Taxis.
- ordonner à la société Alpha Taxis, sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt de la cour d'appel, de retirer de ses abonnements toute mention qui interdirait de s'affilier directement ou indirectement à une autre centrale de réservation de taxis ;
- ordonner à la société Alpha Taxis, sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt de la cour d'appel, dans le cas d'une mise en relation entre un client et un taxi (ou tout transporteur de manière générale) affilié à alpha taxis, de communiquer au client les " coordonnées complètes du transporteur " et ses " conditions générales de vente " avant toute commande préalable ;
- ordonner à la société Alpha Taxis, sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt de la cour d'appel, de retirer de ses " chèques-transport " la dénomination " chèque " ;
- ordonner à la société Alpha Taxis, sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt de la cour d'appel, de ne plus proposer de prestations de transport de personnes en vendant à prix forfaitaire à l'avance des courses en taxi ;
En conséquence,
- débouter la société Alpha Taxis de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions, dire et juger que la société Alpha Taxis a commis des actes de concurrence déloyale à l'encontre de la société Viacab ;
- condamner la société Alpha Taxis à verser à la société Viacab :
150 000 euros au titre de la désorganisation économique ;
85 140 euros au titre de la perte de chance sur le chiffre d'affaires des usagers ;
500 000 euros au titre du préjudice moral ;
30 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- ordonner la publication du jugement à intervenir sur la page d'accueil des sites internet http://www.alphataxis.fr ainsi que dans 2 revues ou journaux parisiens, au choix de la société Viacab et aux frais des défenderesses, à concurrence de 3 000 euros HT par insertion, et ce, au besoin, à titre de dommages-intérêts complémentaires ;
- dire et juger que les sommes allouées à la société Viacab porteront intérêt au taux légal avec capitalisation à compter de la délivrance de l'assignation ;
- condamner la société Alpha Taxis aux entiers dépens qui comprendront notamment les frais de constat par huissier.
SUR CE, LA COUR
Sur la recevabilité de l'action de la société Viacab
La société Alpha Taxis soulève sur le fondement de l'article 31 du Code de procédure civile, l'irrecevabilité de l'action de Viacab, motif pris du défaut d'intérêt légitime à agir en concurrence déloyale de cette dernière dont l'activité est illégale, en l'absence de toute déclaration auprès des organismes publics.
Elle se fonde sur l'article L. 3142-2 alinéa 1 et 2 du Code des transports pour soutenir que toute centrale de réservation doit être déclarée à l'autorité administrative et que s'agissant de l'activité standard-radio, l'article 8 de l'arrêté inter-préfectoral du 31 juillet 2001 organise une procédure d'agrément.
Mais, Viacab fait en premier lieu, à juste raison valoir, qu'elle exploite exclusivement son activité de réservation de taxis au moyen de la " technologie téléphonique " GPRS (3G et 4G) avec un standard téléphonique et un site internet ainsi qu'elle en justifie par les constats d'huissier qu'elle produit (ses pièces 6 à 9), de sorte qu'elle n'a pas eu à déclarer une activité de " standard-radio " auprès de la préfecture de police, l'article 8 de l'arrêté susvisé visant en effet " toute personne qui met en service un standard radio affectant des courses à des taxis parisiens ".
En second lieu, elle justifie avoir procédé à la déclaration de son activité de centrale de réservation prescrite par l'article L. 3142-2 du Code des transports le 25 février 2019 après la publication du décret du 26 novembre 2018 pris en application de cette disposition, décret entré en vigueur le 1er janvier 2019, soit dans le délai de six mois imparti pour le faire (ses pièces 10, 78 et 79).
A cet égard, le courriel produit (pièce 79) justifie à suffisance de cette déclaration, en l'absence de tout élément contraire.
Enfin, Alpha Taxis soutient sans l'établir que Viacab ne serait qu'un intermédiaire avec des chauffeurs VTC et non avec les chauffeurs de taxis de sorte qu'elle serait dépourvue d'un intérêt propre à agir à son encontre puisqu'elle n'est composée que de chauffeurs de taxis.
Mais, Viacab justifie d'un intérêt à agir en ce qu'elle serait privée de la possibilité d'exercer son activité d'intermédiaire avec les chauffeurs de taxis du fait de la concurrence déloyale alléguée exercée à son encontre par Alpha Taxis, ce qui expliquerait que les taxis parisiens se désintéressent d'elle.
Dès lors la fin de non-recevoir prise du défaut d'intérêt à agir de Viacab est rejetée.
Sur l'illicéité des contrats d'abonnement à paiement différé proposés par Alpha Taxis
La société Alpha Taxis soutient qu'il existe dans le cas des contrats d'abonnement à paiement différé, deux services distincts : d'un côté, celui de la course soumis à la réglementation sur la tarification horokilométrique des taxis et, de l'autre, celui de l'avance de trésorerie, lequel n'y est pas soumis. Selon elle, le tribunal a donc confondu ces deux services pour retenir qu'il était facturé une rémunération supplémentaire du prix de la course non autorisée par la réglementation sur les taxis. A cet égard, elle fait valoir que si un professionnel réalise une prestation à une date donnée mais ne reçoit le prix de cette prestation qu'après un certain délai, il offre au client une avance de trésorerie, service relevant d'une politique commerciale libre qui n'est pas soumise à la réglementation des tarifs des taxis sur les suppléments autorisés, comme n'étant pas un composant du prix versé en seule contrepartie de la course, peu important qu'il soit calculé par pourcentage du prix de celle-ci.
Elle s'estime donc libre de commercialiser des prestations distinctes, complément de la prestation de transport et dit qu'en retenant le contraire, le tribunal a restreint la liberté de commerce et d'industrie alors que toute restriction à la liberté d'entreprendre et à la liberté des prix et de la concurrence doit être expresse et justifiée par un intérêt légitime comme la protection du consommateur. Elle fait valoir qu'en l'occurrence, la prestation de paiement différé distincte de la prestation de transport, ne peut justifier aucune restriction.
Mais Viacab rétorque à juste raison, qu'en facturant un supplément de " service chauffeur lors d'un paiement différé " en plus du prix d'une course alors que ce supplément ne peut être qualifié de taxe de " service de paiement différé " qui serait distincte de la prestation de transport, Alpha Taxis a contrevenu à la réglementation des prix de la course des taxis, s'agissant d'un supplément de prix non autorisé lié à la course.
En effet, Alpha Taxis propose des contrats d'abonnement avec des suppléments de services facturés à la clientèle des particuliers et des entreprises au profit des chauffeurs qui lui sont affiliés, représentant un " service de 15 % " du montant de chaque course en paiement différé, intégralement reversé au chauffeur par Alpha taxis mandatée par l'abonné. Viacab produit à cet égard des contrats d'abonnement de 2012 à 2016-2017 proposés par Alpha Taxis (ses pièces 26 à 31) ceux de l'année 2016/2017 faisant état de la majoration de 15 % " pour le service du chauffeur " en cas de paiement différé des courses, supplément que la société Alpha taxis tente vainement de rattacher au prix du service rendu pour l'avance de trésorerie alors qu'il constitue une majoration automatique prohibé du prix de la course versé au chauffeur, contraire à la réglementation sur les prix des taxis et ainsi un acte de concurrence déloyale.
En effet, en garantissant à ses taxis affiliés une majoration de 15 % du prix de la course en cas de paiement différé, Alpha taxis s'est attitré potentiellement une partie de la flotte des taxis s'assurant indûment un avantage concurrentiel au détriment d'autres entreprises de taxis qui s'en tiennent à la seule tarification horokilométrique en vigueur.
Le jugement est donc confirmé en ce qu'il a condamné la société Alpha Taxis à cesser de proposer des abonnements incluant un supplément non autorisé en sus du prix de la course sous astreinte de 5 000 euros par infraction constatée, à compter de 60 jours après la signification du présent jugement pour une période de 90 jours au-delà de laquelle il pourra à nouveau y être fait droit.
En cause d'appel, la société Viacab demande d'ordonner à la société Alpha Taxis, sous astreinte de 20 000 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt de la cour d'appel, d'une part de retirer de ses abonnements (en proposant un nouveau contrat expurgé ou en proposant un avenant pour des contrats en cours de souscription) toute condition générale ou particulière (dénommée pourboire ou service ou service chauffeur et pré-remplie par Alpha Taxis ou post-remplie de la main du client) prévoyant la facturation d'un " supplément non autorisé " en sus du montant d'une course de taxi, d'autre part, de cesser de proposer des abonnements (nouvellement souscrits mais aussi en cours d'exécution) incluant un " supplément non autorisé " en sus du montant d'une course de taxi.
Alpha Taxis s'y oppose en faisant valoir que le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Créteil dans son jugement définitif du 12 février 2019 n'a pu constater aucune infraction et a fixé une nouvelle période de surveillance sous astreinte provisoire de 6 000 euros par infraction constatée. Elle soutient que la demande tendant à ce qu'il lui soit enjoint d'envoyer un courrier recommandé à sa clientèle pour l'informer de sa pratique déloyale serait une demande nouvelle, en tant que telle irrecevable et tout état de cause infondée, ayant procédé à la régularisation de l'ensemble de ses contrats.
La circonstance que le juge de l'exécution qui a constaté que Alpha Taxis a continué de proposer ses contrats litigieux plus de 15 jours après la fin de la période de première astreinte, ait prononcé une nouvelle astreinte ne fait pas obstacle à la demande de Viacab tendant à voir ordonner à la société Alpha Taxis, sous astreinte de 20 000 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt de la cour d'appel, d'une part de retirer de ses abonnements (en proposant un nouveau contrat expurgé ou en proposant un avenant pour des contrats en cours de souscription) toute condition générale ou particulière (dénommée pourboire ou service ou service chauffeur et pré-remplie par Alpha Taxis ou post-remplie de la main du client) prévoyant la facturation d'un " supplément non autorisé " en sus du montant d'une course de taxi, d'autre part, de cesser de proposer des abonnements (nouvellement souscrits mais aussi en cours d'exécution) incluant un " supplément non autorisé " en sus du montant d'une course de taxi.
Il sera fait droit à la demande d'injonction uniquement en ce qu'elle tend à voir ordonner à la société Alpha Taxis de cesser de proposer des abonnements (nouvellement souscrits mais aussi en cours d'exécution) incluant un supplément service ou service chauffeur pré-rempli par elle, en sus du montant d'une course de taxi, sous astreinte provisoire de 6 000 euros par infraction constatée, puisqu'en effet Viacab justifie par ses pièces 73 à 74 bis que de telles pratiques ont perduré au mois de septembre 2018 sur un contrat d'abonnement 6503.
Par ailleurs, si la demande de Viacab tendant à voir enjoindre sous astreinte à Alpha Taxis d'informer sa clientèle est recevable, comme tendant aux mêmes fins que celle soumise au premier juge, une telle injonction n'apparaît nullement nécessaire au regard de l'astreinte prononcée visant également les contrats en cours d'exécution.
Sur l'activité non déclarée de transport de personnes et le dépassement de prix
La société Viacab soutient que la société Alpha Taxis ne respecterait pas la réglementation des prix des taxis et le plafond tarifaire, par le biais du " chèque " transport, en proposant à la cliente des prix au forfait ou dépassant illégalement le prix maximal d'une course en taxi. Elle fait observer que la société Alpha Taxis n'est pas déclarée comme société de transport mais uniquement comme intermédiaire de réservation de taxis. Assumant, selon elle, pourtant le transport de passagers, elle s'adonne donc à une dissimulation d'activité, comme en dispose l'article L. 8221-3 du Code du travail. N'ayant pas déclaré cette activité, il s'agit là d'une faute de la part d'Alpha Taxis.
Mais la société Alpha Taxis rétorque justement qu'elle vend des chèques transport à tarif unique aux passagers clients et qu'elle paye au chauffeur qui lui est affilié le montant de la course selon son compteur, le prix payé par le client au moyen du chèque utilisé étant plus ou moins élevé que celui de la course et qu'elle en assume les profits et les risques.
Le jugement est confirmé en ce qu'il a constaté que cette pratique ne violait pas la réglementation applicable aux tarifs des taxis et aux éléments de facturation et débouté la société Viacab de sa demande de ce chef, étant observé que la dissimulation d'activité reprochée n'est pas davantage établie.
Sur l'interdiction faite aux chauffeurs de s'affilier à d'autres centrales
La société Viacab soutient que la société Alpha Taxis interdisait à tous ses chauffeurs de s'affilier à d'autres centrales de réservation, notamment d'apposer une autre publicité que celle d'Alpha Taxis sur leur véhicule, contrevenant ainsi aux dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce. Elle estime également qu'il s'agit d'un abus de position dominante au titre de l'article L. 420-2 du même Code.
La société Alpha Taxis rappelle que la loi interdit depuis 2015 à la centrale d'empêcher le chauffeur de développer une clientèle propre (article L. 3121-11-2 du Code des transports), ne provenant pas des courses proposées par le terminal fourni par la centrale. Elle soutient que le matériel technologique installé à bord du taxi n'empêche pas le chauffeur de recevoir une clientèle propre de sorte qu'elle n'a commis aucun acte de concurrence déloyale.
Si Viacab produit un contrat et une annexe " charte qualité " de Alpha Taxis de 2016, " charte qualité " faisant interdiction de tout adhésif sur le véhicule non distribué par Alpha Taxis et de toute publicité autre que celle de la compagnie sur la carrosserie (pièce 42), elle ne rapporte pas la preuve du manquement d'Alpha Taxis aux dispositions de l'article L. 3121-11-2 du Code des transports aux termes desquelles :
" Un intermédiaire proposant à des clients de réserver un taxi ne peut interdire à l'exploitant ou au conducteur d'un taxi de prendre en charge un client en étant arrêté et stationné ou en circulant sur la voie ouverte à la circulation publique, y compris quand la sollicitation du taxi par le client est intervenue par voie de communications électroniques ou par l'intermédiaire d'un tiers ".
Elle ne justifie pas que cette seule interdiction de coexistence de publicité figurant dans la charte qualité de 2016 serait de nature à fausser le jeu de la concurrence sur le fondement de l'article L. 420-1 du Code de commerce en ce qu'elle tendrait à limiter l'accès au marché ou le libre exercice de la concurrence par d'autres entreprises, étant observé qu'il n'est pas justifié du maintien de cette interdiction postérieurement à l'entrée en vigueur le 1er mars 2017 de l'article L. 420-2-2 du Code de commerce issue de la loi du 31 décembre 2016 remplaçant l'article L. 3121-11-2 du Code des transports aux termes duquel :
" Sont prohibés les accords, les pratiques concertées et les pratiques unilatérales ayant pour objet ou pour effet d'interdire ou de limiter substantiellement la possibilité pour une entreprise qui exécute des prestations de transport public particulier de personnes ou des services occasionnels de transport collectif de personnes effectués au moyen de véhicules légers :
1°) De recourir simultanément à plusieurs intermédiaires ou acteurs de mise en relation avec des clients en vue de la réalisation de ces prestations ;
(...) 3°) De faire la promotion, au moyen de signes extérieurs sur le véhicule, d'une ou plusieurs offres de transport, y compris celles qu'elle commercialise sans intermédiaire ".
De même, elle ne justifie pas de la mise en place de contrats d'affiliation imposant " une exclusivité d'affiliation aux chauffeurs de taxi ", en violation de l'article L. 420-2 du Code de commerce, ni davantage de l'article L. 3121-11-2 postérieurement à l'entrée en vigueur de ce dernier article issu de la loi n° 2014-1104 du 1er octobre 2014 et de l'article L. 420-2-2 du Code de commerce précité.
Le jugement est donc confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes de ce chef.
Sur les pratiques commerciales trompeuses
La société Viacab reproche sur le fondement des articles L. 121-1, L. 212-3 et L. 121-4-9° du Code de la consommation à Alpha Taxis en premier lieu, de ne pas identifier les chauffeurs mis en relation.
En vertu des dispositions de l'article L. 121-3 du Code de la consommation :
" Dans toute communication commerciale constituant une invitation à l'achat et destinée au consommateur mentionnant le prix et les caractéristiques du bien ou du service proposé, sont considérées comme substantielles les informations suivantes :
1°) ...
2°) l'adresse et l'identité du professionnel
3°) ...".
L'article L. 121-4-9° du même Code répute trompeuses au sens des articles L. 121-2 et L. 121-3, les pratiques commerciales qui ont pour objet de déclarer ou de donner l'impression que la vente d'un produit ou la fourniture d'un service est licite alors qu'elle ne l'est pas.
Viacab a intérêt à agir sur le fondement du Code de la consommation même si elle n'a pas la qualité de consommateur puisqu'en effet, la violation par un opérateur de dispositions qu'il contient est susceptible de constituer un acte de concurrence déloyale au détriment d'un concurrent.
En l'espèce, contrairement à ce qu'il est soutenu, la circonstance que les chauffeurs de la société Aplha Taxis ne soient pas identifiés sur les documents de commande fournis par la société, ne peut constituer une pratique commerciale trompeuse alors que le contrat s'effectue entre le client et Alpha Taxis et non avec le chauffeur de taxi et que le client dispose de toutes les informations requises s'agissant de la société Alpha Taxis.
En second lieu, la société Viacab soutient que les " chèques-transport " fournis par la société Alpha Taxis ne sont pas des chèques mais des " bons de transport " valables pour une course en taxi à prix unique et que l'utilisation de la dénomination " chèque " est irrégulière au regard de l'article L. 131-3 Code monétaire et financier. Elle en conclut que Apha Taxis contrevient aux dispositions de l'article L. 121-1 du Code de la consommation.
Or, force est de constater que la société Viacab n'établit pas en quoi l'utilisation de la dénomination " Chèque-transport " au lieu de " bon de transport " altérerait ou serait susceptible d'altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur normalement attentif et avisé, à l'égard de ce service.
Sa demande au titre d'une pratique commerciale déloyale de ce chef ne peut prospérer.
En troisième lieu, la société Viacab se prévaut de pratiques commerciales trompeuses de la société Alpha Taxis en ce que celle-ci vendrait des prestations de transport sans avoir déclaré son activité et en ne respectant pas les plafonds de prix maximal du taxi.
Or, ainsi qu'il a été relevé ci-dessus, de tels manquements ne sont pas établis. A cet égard, il sera rappelé que le K-bis de Alpha Taxis (pièce 20 de Viacab) mentionne " Exploitation de réseaux de distribution de courses de taxis par radio-téléphone, achat, vente, location entretien et approvisionnement de tout matériel en vue du bon fonctionnement des réseaux précités ".
Les demandes de ce chef sont rejetées.
Sur le préjudice de la société Viacab et le lien de causalité avec les actes allégués
La société Viacab invoque un préjudice subi du fait des activités de la société Alpha Taxis qu'elle considère être une concurrence déloyale. Elle allègue une désorganisation de son entreprise du fait que Alpha Taxis propose illégalement des offres qui ne correspondent pas selon elle à la réalité du marché. Sans ces agissements, elle aurait pu conclure des contrats d'affiliation avec les chauffeurs et conserver sa clientèle. Elle prétend ainsi avoir investi en pure perte dans son service de réservation SOS Taxis, qui ne connaît aucun succès depuis 2011. Elle demande de l'indemniser de cette désorganisation économique à hauteur de 150 000 euros.
Elle invoque ensuite une perte de chance sur le chiffre d'affaires taxis, relatif à l'affiliation des chauffeurs à sa centrale. Accusant la promesse faite par Alpha Taxis de rémunérer 15 % plus cher ses chauffeurs de la priver d'une concurrence loyale, elle estime qu'elle aurait pu convaincre 2 % des chauffeurs désormais affiliés Alpha Taxis de rejoindre ses rangs. Elle demande réparation de cette perte de chance d'avoir conquis 2 % du marché gagné par sa concurrente.
Elle fait également état d'un préjudice de perte de chance sur le chiffre d'affaires clients, se basant sur le fait qu'elle aurait pu à minima conquérir 50 clients particuliers et 50 clients entreprises, outre un préjudice moral, en se fondant sur la perte potentielle de son fonds de commerce, du fait des agissements de la société Alpha Taxis.
La société Alpha Taxis conteste qu'" un préjudice s'infère nécessairement d'un acte de concurrence de loyale " ainsi que l'a retenu le tribunal. En effet, elle considère qu'il ne peut être retenu un préjudice pour un concurrent qui n'exerce pas légalement sur le marché, comme c'est le cas de la société Viacab faute d'avoir procédé aux formalités administratives obligatoires.
Elle estime que la société Viacab ne rapporte pas la preuve d'un lien de causalité dès lors que d'autres éléments peuvent expliquer les difficultés économiques rencontrées par cette dernière, en particulier la concurrence des nouveaux acteurs sur le marché tels Uber ou Heetch. Elle ajoute que les chauffeurs affiliés Alpha Taxis sont coopérateurs, propriétaires de ladite société au travers des SCOP, que la société Viacab délivre des courses de VTC. Les chauffeurs ne peuvent donc pas choisir Viacab plutôt qu'Alpha, et vice versa.
Elle dénie l'existence d'un préjudice certain du fait de la perte de chance de récupérer des chauffeurs de taxi, quand Viacab a une activité de VTC et que les affiliés Alpha Taxis sont en réalité des coopérateurs, propriétaires de leur société.
Enfin, elle estime que les préjudices allégués ne peuvent être chiffrés étant donné l'incapacité de la société Viacab de rapporter une situation ex ante qui aurait permis de déduire l'impact allégué des agissements tout aussi allégués et observe que le tribunal a fixé lui-même le montant du préjudice.
Le tribunal a justement dit qu'un préjudice s'infère nécessairement d'un acte de concurrence déloyale générateur d'un trouble commercial, fût-il seulement moral.
En l'espèce, Viacab est notamment une centrale de réservation de taxis qui propose ses services par téléphone ou internet sur son site www.sos-taxis.com.
Ainsi qu'il a été dit en garantissant à ses taxis affiliés une majoration de 15 % du prix de la course en cas de paiement différé, Alpha taxis s'est attitré potentiellement une partie de la flotte des taxis s'assurant indûment un avantage concurrentiel au détriment d'autres entreprises de taxis qui s'en tiennent à la seule tarification horokilométrique en vigueur.
Ces pratiques ont nécessairement causé un préjudice à la société Viacab qui exerce une activité concurrente de réservation de taxis en région parisienne.
Ce préjudice a justement été évalué par le tribunal par des motifs adoptés à la somme de 58 900 euros correspondant à une perte de chance de vendre ses abonnements à des chauffeurs si une majoration de prix n'avait pas été proposée par Alpha Taxis. Le tribunal a en effet retenu le coût moyen annuel des abonnements Viacab, soit 1 260 euros sur 6 années multiplié par un nombre moyen de taxis disponibles (1 300) sur les six dernières années, affectés d'un pourcentage de probabilité de 2 % sur 6 ans et une marge estimée à 30 %.
En revanche, elle ne justifie pas d'un préjudice non réparé par la somme ainsi allouée faute de démonstration tant de pertes subies du fait de la nécessité de réorganiser l'entreprise, cette société arrivée sur le marché en 2011 ne pouvant justifier d'une situation antérieure que d'une perte de chance sur le chiffre d'affaires clients, faute de démontrer en quoi la majoration du prix de la course des taxis affiliés par Alpha taxis en cas de paiement différé lui aurait fait perdre une chance de conquérir des clients, que ce soit des entreprises ou des particuliers
De même sa demande au titre du préjudice moral n'est pas justifiée.
Sur la publication de la décision
Cette demande n'apparaît nullement nécessaire au regard des injonctions prononcées et doit être rejetée.
Sur l'article 700 du Code de procédure civile
La somme de 8 000 euros sera allouée à Viacab sur ce fondement, en sus de la somme allouée à ce titre par le tribunal.
En revanche, le sens de l'arrêt conduit à débouter Alpha Taxis de sa demande de ce chef.
Par ces motifs : LA COUR, Rejette la fin de non-recevoir prise du défaut d'intérêt à agir de la société Viacab ; Confirme le jugement ; Y ajoutant, Déclare recevable mais non fondée la demande de la société Viacab tendant à voir enjoindre la société Alpha Taxis, sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard, passé le délai de 30 jours suivant la signification de l'arrêt de la cour d'appel, d'envoyer par courrier recommandé avec accusé de réception un avenant contractuel à l'ensemble de la clientèle concernée par cette pratique déloyale en l'informant en ces termes que " par arrêt en date du ..., la société Alpha Taxis a été condamnée à retirer de ses abonnements la facturation d'un supplément non-autorisé de 15 % appelé " service chauffeur " " ; Ordonne à la société Alpha Taxis, sous astreinte provisoire de 6 000 euros par infraction constatée à compter de la signification du présent arrêt de cesser de proposer des abonnements (nouvellement souscrits mais aussi en cours d'exécution) incluant un supplément service ou service chauffeur pré-rempli par elle, en sus du montant d'une course de taxi ; Rejette toute autre demande ; Déboute la société Alpha Taxis de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; Condamne la société Alpha Taxis aux dépens d'appel et à payer à la société Viacab la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.