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Décisions

CA Paris, Pôle 4 ch. 9, 27 février 2020, n° 17-04446

PARIS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Défendeur :

France Écologie (Sté), BNP Paribas Personal Finance (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. David

Conseillers :

Mmes Trouiller, Bisch

Avocats :

Mes Vennin, Mendes-Gil

TI Paris, 9e arrdt., du 9 janv. 2017

9 janvier 2017

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 13 octobre 2015, dans le cadre d'un démarchage à domicile, M. X et Mme Y ont conclu avec la société Agence France Écologie, un contrat portant sur la vente, la pose et la mise en service d'une installation aérovoltaïque, pour un montant de 25 000 euros, financé par un prêt consenti par la société Sygma Banque au TAEG de 5,87 % remboursable sur une durée de 144 mois après douze mois de report de paiement.

Le 23 décembre 2015, M. X a signé le certificat de livraison de bien à destination de la banque qui a débloqué les fonds le 29 décembre 2015. La centrale solaire a été raccordée le 12 février 2016.

Par acte en date du 13 mai 2016, M. X et Mme Y ont assigné les sociétés Agence France Écologie (AFE) et BNP Paribas Personal Finance (BNPPPF) venue aux droits de la société Sygma Banque devant le tribunal d'instance de Paris 9e arrondissement, aux fins d'obtenir la nullité des contrats de vente et de crédit, leur condamnation solidaire à la dépose et la remise en l'état, l'exonération du remboursement du capital.

Par jugement contradictoire en date du 9 janvier 2017, le tribunal d'instance de Paris 9e arrondissement a :

- prononcé l'annulation du contrat de vente aux torts de la société AFE,

- condamné le vendeur à faire procéder à la dépose de l'installation et à la remise de la toiture dans son état antérieur,

- dit que l'annulation du contrat de vente avait pour conséquence l'annulation de plein droit du contrat de prêt,

- dit que la société Sygma Banque avait manqué à ses obligations lors de la souscription du contrat de crédit mais que le préjudice résultant de cette faute n'était qu'hypothétique,

- dit par conséquent n'y avoir lieu à dispenser M. X et Mme Y de rembourser le capital emprunté,

- condamné solidairement les acheteurs à rembourser à la société BNPPPF la somme de 25 000 euros, déduction faite des sommes déjà versées,

- condamné la société AFE à les garantir du paiement de cette somme,

- débouté les parties du surplus de leurs prétentions.

Le tribunal a retenu que le bon de commande était d'une parfaite indigence, que le contrat de vente devait être annulé aux torts exclusifs de la société AFE, que rien ne permettait de considérer que les acquéreurs aient même implicitement renoncé à se prévaloir de la nullité du contrat de vente, que la société Sygma Banque avait manqué à ses obligations, que cette faute la privait du droit à réclamer le remboursement du capital prêté, que toutefois le préjudice résultant de cette faute n'était qu'hypothétique de sorte qu'il n'y avait lieu à dispenser les emprunteurs de rembourser le crédit, ces derniers ayant fait preuve d'une singulière légèreté.

Par déclaration en date du 28 février 2017, M. X et Mme Y ont relevé appel de la décision.

La société AFE, a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Bobigny en date du 8 février 2017.

La société BNPPPF a déclaré sa créance pour une somme de 36 627,24 euros auprès de la Selarlu Bally, désignée liquidateur judiciaire.

Par ordonnance de caducité partielle en date du 23 mai 2017, le conseiller de la mise en état a relevé que les appelants n'avaient pas signifié dans les délais légaux la déclaration d'appel à la société AFE et a prononcé en conséquence la caducité de la déclaration d'appel à l'égard de la société AFE.

Dans leurs dernières conclusions signifiées le 9 septembre 2019, M. X et Mme Y demandent à la cour de :

- débouter la société BNPPPF de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- confirmer le jugement en ce qu'il a jugé que la société Sygma Banque, aux droits de laquelle vient la société BNPPPF, avait commis une faute dans le déblocage des fonds,

- infirmer le jugement en ce qu'il a jugé que M. X et Mme Y subissaient un préjudice hypothétique non-indemnisable,

- juger que la faute de la société BNPPPF la prive de son droit à restitution du capital prêté,

- condamner la société BNPPPF à payer à M. X et Mme Y la somme de 2 700 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, outre le paiement des entiers dépens.

Au soutien de leurs demandes, les appelants font valoir que la faute de la société Sygma Banque a un caractère autonome, que les mentions de l'autorisation de versement des fonds ne permettaient pas au prêteur de s'assurer de l'exécution complète du contrat principal, que le déblocage des fonds a été effectué malgré l'absence de fin des travaux, que la banque qui consent un crédit et débloque des fonds sur la base d'un bon de commande nul commet une faute et que cette faute la prive de son droit à restitution du capital.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 10 janvier 2019, la société BNPPPF demande à la cour de :

- infirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la nullité des contrats,

- subsidiairement, le confirmer en ce qu'il a condamné les emprunteurs à restituer le capital prêté, sauf à condamner également la société AFE,

- statuant à nouveau, à titre principal, déclarer irrecevables les demandes de nullité et de résolution du contrat principal, et par voie de conséquence du contrat de crédit, eu égard à la caducité de l'appel vis-à-vis de la société AFE,

- déclarer irrecevables les demandes en nullité et résolution du contrat conclu avec la société AFE s'agissant d'une action visant indirectement à la condamnation au paiement à défaut de déclaration de créance à la procédure collective,

- déclarer, par voie de conséquence, irrecevables les demandes de nullité et de résolution du contrat de crédit affecté,

- en conséquence, juger M. X et Mme Y irrecevables dans leurs demandes,

- les débouter de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

- subsidiairement, juger que M. X et Mme Y n'établissent pas que le bon de commande serait irrégulier au regard des dispositions de l'article L. 121-18-1 du Code de la consommation dans sa rédaction applicable à la date du contrat,

- en conséquence, juger que la nullité des contrats n'est pas encourue,

- juger subsidiairement que M. X et Mme Y ont renoncé à se prévaloir d'une irrégularité purement formelle du contrat et ont confirmé la validité formelle de celui-ci en procédant à son exécution volontaire lorsqu'ils ont réceptionné l'installation sans réserve, procédé volontairement au règlement du prix de la prestation en donnant l'ordre à la société BNPPPF de verser les fonds prêtés en leur nom et pour son compte entre les mains du vendeur, et remboursé les échéances du crédit,

- en conséquence, débouter M. X et Mme Y de leur demande de nullité,

- juger que M. X et Mme Y ne sont pas recevables à opposer à la société BNPPPF l'absence de réalisation de la prestation principale, son inachèvement ou sa non-conformité au vu de l'attestation de réalisation de la prestation attestant de ce que la prestation était terminée et sollicitant expressément le versement des fonds prêtés entre les mains de la société AFE,

- juger, en tout état de cause, que les acquéreurs n'apportent pas la preuve des non-conformités, vices et dysfonctionnements allégués,

- juger à tout le moins qu'il n'est pas justifié d'un manquement suffisamment grave pour fonder la résolution des contrats,

- en conséquence, juger que la demande de résolution formée par M. X et Mme Y est irrecevable, à tout le moins non fondée,

- en conséquence, débouter M. X et Mme Y de leur demande de résolution,

- en tout état de cause, à titre reconventionnel, constater que M. X et Mme Y sont défaillants dans le remboursement du crédit et que la déchéance du terme a été prononcée,

- à défaut, prononcer la résiliation judiciaire du contrat de crédit et fixer la date de ses effets au 22 juin 2018,

- condamner, en tout état de cause, solidairement M. X et Mme Y à lui payer la somme de 29 337,03 euros outre au taux d'intérêts contractuel de 5,75 % l'an à compter du 22 juin 2018 sur la somme de 27 290,83 euros et au taux légal pour le surplus en remboursement du crédit,

- très subsidiairement, en cas de nullité ou résolution des contrats, juger que l'établissement de crédit n'est pas juge du contrat et ne peut donc se substituer au juge dans l'examen de la régularité du contrat principal, ce d'autant plus quand il s'agit d'apprécier la complétude d'une mention,

- juger, à tout le moins, qu'elle n'a commis aucune faute dans la vérification du bon de commande,

- juger, de surcroît, que M. X et Mme Y n'établissent pas le préjudice qu'ils auraient subi en lien avec l'éventuelle irrégularité alléguée du bon de commande, et donc avec la faute alléguée à l'encontre de la banque,

- juger que la banque n'a commis aucune faute dans le versement des fonds prêtés à la société AFE sur la base de l'attestation de réalisation de la prestation produite aux débats,

- juger, de surcroît, que la banque avait l'obligation de verser les fonds prêtés au vu de l'instruction de paiement donnée par ses clients en application des règles du mandat, ce qui est exclusif de toute faute dans le versement des fonds prêtés sur l'ordre du mandant,

- juger, de surcroît, que l'emprunteur n'établit pas le préjudice qu'il aurait subi en lien avec la faute alléguée,

- juger, en conséquence, qu'il ne justifie pas des conditions d'engagement de la responsabilité de la banque,

- juger que, du fait de la nullité ou résolution, l'emprunteur est tenu de restituer le capital prêté au prêteur,

- condamner, en conséquence, in solidum, M. X et Mme Y à lui régler la somme de 25 000 euros en restitution du capital prêté,

- plus subsidiairement, limiter la réparation qui serait due par la société BNPPPF eu égard au préjudice effectivement subi par l'emprunteur à charge pour lui de l'établir et eu égard à la faute de l'emprunteur ayant concouru à son propre préjudice,

- juger que M. X et Mme Y restent tenus de lui restituer la somme de 25 000 euros correspondant au capital prêté,

- les condamner in solidum à lui payer cette somme et ordonner la compensation des créances réciproques à due concurrence,

- à titre infiniment subsidiairement, si la cour devait prononcer la nullité ou résolution des contrats et ne pas ordonner la restitution du capital prêté à charge des emprunteurs, condamner in solidum M. X et Mme Y à lui payer la somme de 25 000 euros correspondant au capital perdu à titre de dommages et intérêts en réparation de leur légèreté blâmable et ordonner la compensation des créances réciproques à due concurrence,

- juger que M. X et Mme Y devront restituer, à leurs frais, le matériel installé chez eux,

- juger, en tout état de cause, en cas de nullité ou résolution des contrats, que la société AFE est garante du remboursement par l'emprunteur du capital prêté, ce qui n'exonère pas l'emprunteur de son obligation, et est débitrice vis-à-vis de la société BNPPPF de dommages et intérêts à hauteur des intérêts perdus,

- condamner, en conséquence, la société AFE à lui payer la somme de 25 000 euros au titre de la créance en garantie de la restitution du capital prêté,

- condamner la société AFE à lui payer la somme de 11 627,24 euros à titre de dommages et intérêts pour les intérêts,

- subsidiairement, si la cour devait estimer que les emprunteurs ne sont pas tenus de restituer le capital prêté, condamner en tout état de cause la société AFE à lui payer la somme de 36 627,24 euros, dont 25 000 euros au titre de la restitution du capital prêté et 11 627,24 euros à titre de dommages et intérêts,

- fixer la créance correspondante au passif de la procédure collective de la société AFE,

- plus généralement, débouter les appelants de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions,

- condamner in solidum les appelants à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance recouvrés par la Selarl Cloix & Mendes-Gil.

Au soutien de ses prétentions, l'intimée fait valoir que la demande de nullité ou de résolution des contrats est irrecevable, à tout le moins infondée, en raison de la caducité de leur appel à l'égard du vendeur et subsidiairement en raison du défaut de déclaration de créance à la procédure collective du vendeur, que la nullité des contrats litigieux est mal fondée en raison de l'absence d'irrégularité formelle du bon de commande, que subsidiairement, la nullité relative a été confirmée par les appelants, notamment par la réception sans réserve des travaux, que la demande de résolution des contrats n'est pas fondée, notamment en ce que les manquements allégués ne sont pas suffisamment graves, qu'en tout état de cause, le capital devra lui être restitué, que la société Sygma Banque n'a commis aucune faute privant l'intimée de son droit à restitution du capital, que les appelants n'établissent ni leur préjudice ni un lien de causalité et que ces derniers conservent l'installation qui possède une valeur marchande conséquente qu'il convient de prendre en compte.

La société Agence France Écologie, à qui les conclusions ont été signifiées par l'intimée le 7 août pour tentative puis 23 août 2017, en application des dispositions de l'article 659 du Code de procédure civile, n'a pas constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci, conformément à l'article 455 du Code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 10 septembre 2019.

SUR CE,

Sur la nullité du contrat de vente

Au visa des articles L. 121-18-1, L. 121-17 et L. 111-1 du Code de la consommation, le premier juge a prononcé la nullité du contrat estimant que le bon de commande était indigent et ne permettait pas de connaître la marque, la dimension, le poids, l'aspect, la performance du matériel vendu ni la date de livraison et qu'il était indifférent qu'une documentation ait pu être remise aux acquéreurs.

Dans leurs dernières écritures d'appelants, les consorts X et Y, dont l'appel a été déclaré caduc à l'égard de la société AFE, n'ont pas formulé de demande de nullité mais ont fait valoir que le bon de commande n'indiquait pas de délai de livraison, ni les prestations de service, ni les caractéristiques essentielles de la centrale aérovoltaïque, qu'il ne précisait pas le nombre de bouches d'insufflation, ni la marque et le modèle des panneaux solaires et de l'onduleur vendus ni le prix unitaire, empêchant les acheteurs de comparer les performances, la provenance des biens, leur norme NF et de se déterminer en toute connaissance de cause.

En application de l'article L. 121-18-1 du Code de la consommation dans sa rédaction issue de la loi Hamon du 17 mars 2014, applicable aux contrats conclus après le 13 juin 2014, " le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l'accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l'engagement exprès des parties. Ce contrat comprend, à peine de nullité, toutes les informations mentionnées au I de l'article L. 121-17 ".

L'article L. 121-17 I prévoit que, préalablement à la conclusion d'un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes : 1°) les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2.

Aux termes de l'article L. 111-1 issue de la loi Hamon, dans sa version applicable au contrat, " avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1°) Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;

2°) Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 113-3 et L. 113-3-1 ;

3°) En l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;

4°) Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu'elles ne ressortent pas du contexte, ainsi que, s'il y a lieu, celles relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l'existence et aux modalités de mise en œuvre des garanties et aux autres conditions contractuelles. La liste et le contenu précis de ces informations sont fixées par décret en Conseil d'État ".

Il résulte de ces dispositions que seule l'absence de mention est une cause de nullité, et non une imprécision de la mention qui ne peut fonder, le cas échéant, qu'une action en responsabilité.

En l'espèce, le bon de commande comporte les mentions suivantes :

" 1 Installation solaire Aérovoltaïque d'une puissance globale de 3 000 Wc comprenant :

12 Panneaux Photovoltaïques certifiés NF EN 61215 Classe II de type : monocristallin

Système d'intégration au bâti - Onduleur - Coffrets de protection - Disjoncteurs - Coffrets

Parafoudre "

Forfait d'installation de l'ensemble

La mise en service, le Consuel, et le tirage de câbles entre le compter et l'onduleur sont inclus

Kit d'intégration GSE

Démarches administratives (Mairie, ERDF, Consuel etc)

Frais de raccordement au réseau ERDF à la charge de la société AFE

Garantie constructeur longue durée rendement des panneaux photovoltaïques 25 ans

Garantie constructeur longue durée onduleur 20 ans

Raccordement et tranché inclus dans le projet sous réserve d'acceptation du projet ".

Les intimés ne précisent pas quels renseignements manquants auraient pu modifier leur choix.

En outre, les conditions générales de vente, approuvées par M. X, précisent dans leur paragraphe intitulé " Devis préalable et choix des produits " que :

" Le client reconnaît et accepte que le présent bon de commande tient lieu de devis préalable à sa commande.

Préalablement à la signature de cette commande, le client reconnaît avoir été conseillé par le conseiller du distributeur, représentant le vendeur, sur l'ensemble des produits proposés, ainsi que des tarifs au jour de la commande. En conséquence, le client reconnaît avoir librement et sous sa seule responsabilité, choisi les différents produits dont il passe commande, tant en fonction des caractéristiques qu'il juge utiles, que des produits proposés et du budget qu'il entend y consacrer ".

Par ailleurs, la rubrique Livraison du contrat indique :

" La livraison des produits et matériels, dans la limite des stocks disponibles, est déterminée avec le distributeur qui fixe avec le client une date de livraison/d'installation respectant obligatoirement les dispositions du Code de la consommation (L. 121-25) et dans la limite de soixante (60) jours maximum à compter de la signature du présent bon de commande pour l'étude et l'acceptation du dossier de financement.

Par principe, la société s'efforcera de respecter une livraison et une installation de la commande dans le délai de 15 jours à compter de la signature du présent bon de commande ".

La cour constate donc que le bon de commande précise les caractéristiques essentielles du matériel vendu, son prix et le délai de livraison.

Enfin, il convient de souligner que l'acquéreur n'a émis à la réception de l'installation aucun grief ni réserve pouvant laisser penser qu'il aurait été trompé sur les caractéristiques du matériel, qu'il a signé, le 23 décembre 2015, le " certificat de livraison de bien ou de fourniture de services " et a reçu une facture conforme le 30 décembre 2015.

Ainsi, les consorts X et Y échouent à rapporter la preuve qui leur incombe de l'irrégularité alléguée du contrat litigieux.

Force est de constater que les acheteurs n'ont pas usé des possibilités qui leur étaient offertes de se rétracter, d'obtenir la résolution de la vente, d'actionner la garantie prévue en cas d'altération, de vice apparent ou caché déclaré pendant la période de garantie ou d'actionner la garantie légale des vices cachés.

Au final, les consorts X et Y ne rapportent pas la preuve des causes de nullité qu'ils invoquent.

Dès lors, aucune nullité n'étant encourue, le jugement sera en conséquence infirmé en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat de vente aux torts de la société AFE, condamnée à faire procéder à la dépose de l'installation, et constaté l'annulation de plein droit du contrat de crédit.

Sur la responsabilité de la banque

Les appelants soutiennent que la banque a commis des fautes qui ont un caractère autonome et réclament une dispense de restitution du capital emprunté et sa condamnation à rembourser les sommes déjà versées en exécution du contrat de crédit affecté.

Ils font valoir que la banque, professionnelle du crédit, a commis une faute en consentant un crédit sur la base d'un bon de commande affecté d'une cause de nullité, qu'elle aurait dû procéder aux vérifications nécessaires qui lui auraient permis de constater cette nullité, qu'elle aurait dû prendre contact avec les emprunteurs et vérifier leur consentement à un contrat nul, qu'elle a commis une faute en délivrant les fonds au vendeur sans s'assurer que celui-ci a exécuté son obligation, sur la base d'un certificat laconique dans lequel seul le vendeur atteste, sous sa responsabilité de la fin des travaux conformément à la commande, que l'emprunteur n'a attesté que de la livraison, soit une fraction des obligations, que les travaux n'étaient pas terminés à la date du déblocage des fonds et que la violation de l'article L. 311-31 du Code de la consommation a pour effet de priver le prêteur du remboursement du capital prêté.

L'appelante rétorque qu'aucun texte ne lui impose de vérifier la régularité du bon de commande, que la banque ne commet aucune faute en débloquant les fonds à réception d'une attestation de fin de travaux conforme aux stipulations contractuelles, que les règles applicables en matière de responsabilité doivent s'appliquer et que la demande des intimés ne peut s'analyser qu'en une demande de réparation d'un préjudice et que les emprunteurs ne justifient d'aucun préjudice que leur aurait causé le comportement fautif de la banque.

Le premier juge a considéré que la banque avait commis une faute mais a relevé que les acquéreurs n'établissaient pas le préjudice qui aurait résulté de la faute alléguée.

L'autonomie de la faute de la banque persiste indépendamment du prononcé de la résolution ou de l'annulation des contrats de vente et de crédit.

S'agissant d'un crédit inférieur à 75 000 euros, il est soumis à l'application des dispositions applicables au crédit à la consommation, dans leur version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 14 mars 2016.

Aux termes de l'article L. 311-31 du Code de la consommation relatif au crédit affecté, dans sa version applicable au contrat, les obligations de l'emprunteur ne prennent effet qu'à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation.

Cet article précise les obligations de l'emprunteur et illustre le principe d'interdépendance des contrats. Il oblige le prêteur à apporter la preuve de la livraison du bien ou de l'exécution de la prestation de service en cas de litige.

L'article L. 311-32 du Code de la consommation dispose que : " le contrat de crédit est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé ".

Il en résulte que les contrats de vente et de crédit forment une opération commerciale unique.

En l'espèce, la livraison et la mise en service ne sont absolument pas contestées.

Au regard de l'interdépendance des contrats qui participent d'une même opération économique, la banque, en sa qualité d'établissement professionnel rompu à ce type de financement, a une obligation de vérifier la régularité formelle du contrat financé, mais le législateur n'a pas instauré une responsabilité de plein droit de la banque en raison des manquements de son partenaire commercial en charge de préparer le contrat de crédit. La responsabilité du banquier suppose l'existence d'une violation manifeste et caractérisée de la réglementation instaurée pour protéger le consommateur, et la démonstration d'un préjudice en lien avec ce manquement.

Cependant, la preuve de ce préjudice en lien avec celle d'une violation caractérisée de la réglementation, n'est pas rapportée en l'espèce.

Les consorts X et Y reprochent en effet à la banque de n'avoir pas vérifié la régularité du bon de commande et d'avoir délivré les fonds sans s'assurer de l'installation complète et opérationnelle de la centrale photovoltaïque, en sachant que l'installation n'était pas raccordée.

Toutefois, la banque n'avait pas à s'assurer de la conformité du bon de commande, auquel elle n'était pas partie, le contrat de crédit produit aux débats mentionnant quant à lui spécifiquement les biens et services concernés par le bon de commande, soit le financement de panneaux photovoltaïques pour un prix au comptant de 25 000 euros, et pour un montant total de l'emprunt de 36 627,24 euros.

En ce qui concerne le grief fait à la banque d'avoir débloqué prématurément les fonds au profit de la société AFE, alors que la mise en service de l'installation était d'autant moins effective qu'elle n'était pas encore raccordée, il est rappelé que M. X a signé sans réserve le certificat de livraison de biens qui mentionne expressément :

" Le client " emprunteur " (acheteur)

Nom : M. X

Prénom : xx

Adresse : <adresse>

Code postal : 27660

Ville : Bézu St Eloi

Je reconnais qu'en signant le présent certificat, j'atteste, sans réserve :

- que la livraison du ou des bien(s) et/ou la fourniture de la prestation de services ci-dessus désignée(s) a (ont) été pleinement effectuée(s) conformément au contrat principal de vente que j'ai préalablement conclu avec le Vendeur ;

- que cette livraison et/ou fourniture est intervenue le 23.12.2015.

Je reconnais que conformément à l'article L. 311-1 du Code de la consommation, mes obligations au titre du contrat de " crédit affecté " ci-dessus référencé prennent effet à compter de la livraison et/ou de la fourniture susvisée(s). En conséquence, je demande au Prêteur, par ma signature du présent certificat et en ma qualité d'emprunteur, de procéder à la mise à disposition des fonds au titre dudit contrat de " crédit affecté ".

Signature du client emprunteur Date : 23.12.2015

Fait à Bézu St Eloi ".

Il résulte par ailleurs du contrat de crédit produit aux débats, que les conditions de mise à disposition des fonds par virement au bénéficiaire mentionné dans l'attestation de fin de travaux, ont été précisées.

Les acheteurs étaient donc parfaitement informés du mécanisme de déblocage des fonds, et l'attestation de fin de travaux est sans ambiguïté puisqu'elle porte sur l'installation du kit aérovoltaïque et mentionne le numéro du dossier.

Le nom de l'entreprise, l'objet des travaux et l'adresse de leur réalisation sont indiqués sur le certificat, rendant celui-ci précis et non équivoque. Au demeurant, en cas de difficulté, il appartenait aux emprunteurs de ne pas signer ce document. D'autre part, il n'est pas contesté que l'installation est opérationnelle et productrice d'électricité.

En toute hypothèse, il n'incombait donc pas à la société Sygma Banque, qui n'est pas le prestataire chargé d'exécuter la vente, de s'assurer de la mise en service de l'installation alors que les consorts X et Y la déterminaient à verser les fonds au prestataire de services au vu de la signature de l'attestation de fin de travaux, de sorte qu'ils ne sont pas recevables à soutenir ensuite, au détriment de la banque, que la prestation de services n'a pas été exécutée ou mal exécutée.

De la même façon, aucune obligation légale n'impose à la banque de vérifier que les travaux financés ont bien été réalisés ou qu'ils l'ont été conformément aux règles de l'art ou encore que l'installation fonctionne. Aucune clause du contrat ne met une telle obligation à sa charge.

La banque n'avait pas non plus à vérifier la réalité des déclarations des consorts X et Y, ni à s'assurer personnellement de la conformité de la livraison, attestée par le vendeur.

Ainsi, ne pouvait-elle pas refuser de débloquer le prêt et s'opposer aux instructions données par ses clients pour y procéder, ces derniers étant libres de se prévaloir ou non des nullités édictées en leur faveur.

Il est également constaté que l'attestation coïncide avec le bon de commande qui prévoit des démarches administratives, mais qui ne pouvait pas prévoir la prise en charge de la réalisation du raccordement, nécessairement effectué par ERDF, mais uniquement une partie de son financement.

Il s'ensuit que la société BNPPPF ne peut voir sa responsabilité engagée.

Au final, les emprunteurs vont conserver l'installation et ne justifient d'aucun préjudice que leur aurait causé le comportement prétendument fautif de l'établissement de crédit. Les préjudices allégués n'ont aucun rapport avec les griefs formés. Il n'est pas rapporté la preuve d'un lien de causalité. Les intimés ne se sont jamais plaints de ce que l'installation serait défectueuse. Leurs obligations ont bien pris effet à la livraison effective de l'installation et rien ne justifie qu'ils soient dispensés de cette obligation.

Le jugement sera en conséquence infirmé.

Sur la demande reconventionnelle en paiement

L'intimée a fait valoir que les emprunteurs ont en cours de procédure cessé tout règlement et qu'elle a été contrainte de prononcer la déchéance du terme. Elle réclame leur condamnation au paiement d'une somme de 29 337,03 euros, outre les intérêts contractuels à compter du 22 juin 2018.

Les appelants ont sollicité le débouté des demandes adverses mais n'ont formulé aucun moyen sur ce point.

Il ressort des pièces que la société Sygma Banque a accordé un financement de 25 000 euros et délivré l'intégralité des fonds à la société AFE le 29 décembre 2015, à l'appui du certificat de livraison et d'une demande de déblocage des fonds signées par M. X et par le vendeur le 23 décembre 2015, attestant de la parfaite exécution du contrat, sans qu'il soit fait mention de l'absence de raccordement, dont la preuve n'est pas rapportée.

En application de l'article L. 311-31 du Code de la consommation, l'obligation de rembourser les échéances du contrat de crédit a pris effet à compter de la livraison et de la mise en service de l'installation.

Ayant affirmé sans être contestée, avoir prononcé la déchéance du terme le 22 juin 2018, la banque a formulé sa demande en paiement par conclusions signifiées par RPVA le 10 janvier 2019, soit dans les deux ans du premier incident de paiement non régularisé du 10 janvier 2017. Sa demande en paiement est donc recevable, en application de l'article L. 311-52 du Code de la consommation, dans sa version applicable au contrat.

La banque produit à l'appui de sa demande, le contrat de crédit signé par les parties, le justificatif de consultation du FICP, la fiche d'informations précontractuelles, la fiche explicative et de mise en garde, la fiche dialogue, les conditions d'adhésion, le formulaire d'adhésion au contrat d'assurance emprunteur, le tableau d'amortissement et le décompte de créance.

Au vu des pièces produites, après déductions des sommes non justifiées, les appelants seront solidairement condamnés au paiement de la somme de 27 255,66 euros, outre les intérêts au taux contractuel de 5,75 %. Néanmoins, en l'absence de production d'une mise en demeure, les intérêts seront dus à compter du 10 janvier 2019.

Ils seront également solidairement condamnés au paiement d'une somme de 2 000 euros au titre de la clause pénale contractuelle de 8 %, outre les intérêts au taux légal à compter du 10 janvier 2019.

Sur les dépens et l'article 700 du Code de procédure civile

Les appelants, succombant en appel, supporteront la charge des entiers dépens.

Il convient en outre de les condamner in solidum à payer à la société BNP Paribas Personal Finance une somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par ces motifs : LA COUR, Statuant publiquement, par arrêt contradictoire rendu en dernier ressort, par mise à disposition au greffe, Infirme le jugement en toutes ses dispositions, Statuant de nouveau, Dit n'y avoir lieu à annulation des contrats, Dit que la responsabilité de la société BNP Paribas Personal Finance n'est pas engagée, Condamne solidairement M. D. X et Mme A. Y à payer à la société BNP Paribas Personal Finance : - la somme de 27 255,66 euros au titre du contrat de crédit affecté, outre les intérêts au taux de 5,75 % à compter du 10 janvier 2019, - la somme de 2 000 euros au titre de la clause pénale, outre les intérêts au taux légal à compter du 10 janvier 2019, Y ajoutant, Condamne in solidum M. D. X et Mme A. Y à payer à la société BNP Paribas Personal Finance une somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel, ces derniers pouvant être recouvrés directement par la Selarl Cloix & Mendes-Gil, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.