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Décisions

Cass. com., 24 juin 2020, n° 18-25.517

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

SBA (SAS), Berthelot (ès. qual.)

Défendeur :

AGCO Distribution (Sasu), Etablissements Peillet (SAS), SBB (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Rapporteur :

Mme Sudre

Avocat général :

Mme Beaudonnet

Avocats :

SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, SCP Piwnica et Molinié

T. com. Lyon, du 27 mars 2018

27 mars 2018

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 19 septembre 2018), la société Agco distribution, qui fabrique et commercialise des machines agricoles et forestières sous la marque Fendt, a, par un contrat à durée indéterminée du 2 mai 2006, concédé à la société SBA, présidée par la société SBB, la distribution exclusive de ces machines sur un territoire défini.

2. Le 8 mars 2010, la société SBA a conclu avec la société Agco finance un contrat de financement ayant pour objet de lui avancer le montant des commandes jusqu'à ce que celles-ci soient payées par le client final.

3. Le contrat de concession, qui contenait une clause d’exclusivité réciproque de territorialité et d’approvisionnement, prévoyait qu’en cas de résiliation, un préavis d’au moins un an devrait être accordé et qu’à l’expiration des six premiers mois de préavis, la clause d’exclusivité réciproque cesserait de s’appliquer.

4. Pour se conformer aux obligations découlant du règlement d'exemption (UE) n° 330/2010 du 20 avril 2010, la société Agco distribution a, le 25 juin 2010, demandé à la société SBA de lui signifier son accord exprès au renouvellement, pour une durée de cinq ans, à compter du 1er décembre 2010, de ses obligations de non-concurrence, ce que la société SBA a accepté.

5. Le 18 juin 2014, la société Agco distribution a notifié à la société SBA la résiliation du contrat de concession, sous réserve d'un préavis de 18 mois.

6. Reprochant à la société Agco distribution des manquements, durant ce préavis, à ses obligations contractuelles et des actes de concurrence déloyale commis avec la complicité de la société Etablissements Peillet, à qui elle avait, sur une partie du territoire concédé, confié, à compter du 1er janvier 2015 et jusqu'au 30 juin 2016, la distribution de machines agricoles en méconnaissance de la clause d’exclusivité dont elle bénéficiait, la société SBA a assigné la société Agco distribution et la société Etablissements Peillet en paiement de dommages-intérêts pour rupture brutale de la relation commerciale établie et concurrence déloyale.

7. La société SBA ayant été mise en sauvegarde, les sociétés AJ Partenaires et MJ Synergie, en leurs qualités respectives d’administrateur et de mandataire judiciaires, sont intervenues à la procédure, de même que la société SBB. A la suite de la mise en liquidation judiciaire de la société SBA, postérieurement à l’arrêt attaqué, la société Berthelot, liquidateur judiciaire, a été appelée en la cause.

Examen des moyens

Sur le premier moyen et le second moyen, pris en ses deuxième, troisième, quatrième, cinquième, sixième, septième et huitième branches, ci-après annexés

8. En application de l'article 1014, alinéa 2, du Code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Et sur le second moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

9. La société SBA fait grief à l'arrêt de dire que la rupture de la relation commerciale établie, intervenue à l’initiative de la société Agco distribution, n’est ni brutale ni abusive, de dire que celle-ci était en droit de ne pas donner suite aux commandes passées, sans engagement de sa responsabilité délictuelle, et de rejeter l’ensemble de ses demandes alors « que l'existence d'une stipulation contractuelle de préavis ne dispense pas le juge, s'il en est requis, de vérifier si le délai de préavis contractuel tient compte de la durée des relations commerciales ayant existé entre les parties et des autres circonstances ; que sauf circonstances particulières, l'octroi d'un préavis suppose le maintien de la relation commerciale aux conditions antérieures ; qu'en jugeant que « la perte, par le concessionnaire, de son exclusivité territoriale au bout de six mois de préavis, conforme à l'article 10 du contrat de concessionnaire agricole, ne constitue pas en soi une modification substantielle de l'exécution du préavis, puisque la contrepartie réside dans l'abandon réciproque et concomitant, par Agco, de l'obligation d'approvisionnement exclusif et de non-concurrence pesant sur la société SBA » et que « la mise en œuvre de cette clause n'est pas subordonnée à l'initiative du concessionnaire, contrairement à ce que suggère la société SBA, de sorte qu'aucun grief ne peut résulter de son déclenchement par la société Agco », sans vérifier si ce délai de préavis contractuel de six mois avant de priver le concessionnaire de son exclusivité territoriale tenait compte de la durée des relations commerciales ayant existé entre les parties ou des usages susceptibles de leur être applicables, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce. »

Réponse de la Cour

10. Après avoir estimé que, compte tenu de la durée de la relation commerciale, du volume d’affaires et des autres circonstances, le préavis de dix-huit mois consenti par la société Agco distribution à la société SBA était suffisant, l’arrêt retient que si, durant le préavis, la relation commerciale doit se poursuivre aux conditions antérieures, la perte par le concessionnaire de son exclusivité territoriale après six mois de préavis, ainsi que le prévoit le contrat, ne constitue pas une modification substantielle de l’exécution du préavis dès lors qu’elle a pour contrepartie l'abandon réciproque et concomitant, par la société Agco, de l'obligation d'approvisionnement exclusif et de non-concurrence pesant sur la société SBA. Il en déduit que le préavis a été effectif.

11. En l’état de ces appréciations, rendant inopérante la recherche invoquée par le moyen, la cour d'appel a légalement justifié sa décision.

Le moyen n’est donc pas fondé.

Par ces motifs, la Cour :

Rejette le pourvoi.