CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 24 juin 2020, n° 17-00203
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Loomis France (Sasu)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Dallery
Conseillers :
Mme Bodard-Hermant, M. Gilles
Avocats :
SELARL Intervista, SELARL BDL Avocats
FAITS ET PROCÉDURE
M. Claude R. a apporté son fonds de commerce à la SARL Métallerie Claude R., qui exerce les activités de serrurerie, de métallerie, de conception, installation et maintenance de portes et châssis blindés, d'installation de serrures de haute sécurité.
La SAS Loomis France, anciennement dénommée Securitas Transport de fonds, exerce une activité réglementée de transport de fonds, de traitement de valeurs et de gestion d'automates bancaires.
M. Claude R. puis la SARL Métallerie Claude R. ont eu pour client la société Loomis France, jusque dans le courant de l'année 2013, pour la réalisation de structures métalliques spécifiques à l'activité de celle-ci, telles des cages de protection, des sas, des aménagements de stands de tirs et autres boxes de rangement.
Par acte extrajudiciaire du 19 octobre 2015, M. Claude R. et la société Métallerie Claude R. ont assigné en dommages-intérêts la société Loomis France devant le tribunal de commerce de Lyon, pour rupture brutale des relations commerciales établies.
C'est dans ces conditions que le tribunal de commerce de Lyon, par jugement du 5 décembre 2016, a :
- rejeté l'exception d'irrecevabilité soulevée par la société Loomis France contre M. Claude R., et a dit l'action de celui-ci recevable ;
- dit que la société Loomis France a rompu de manière brutale la relation commerciale établie avec M. Claude R., puis avec la société Métallerie Claude R., relation commerciale dont la durée est établie à 14 ans ;
- condamné la société Loomis France à payer à la société Métallerie Claude R. la somme de 173 520 euros en réparation du préjudice subi ;
- condamné la société Loomis France à payer à la SARL Métallerie Claude R. la somme de 5 732,08 euros au titre de factures impayées ;
- condamné la société Loomis France à payer à la SARL Métallerie Claude R. et à M. Claude R. la somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- ordonné l'exécution provisoire ;
- condamné la société Loomis France aux dépens.
Par dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 17 février 2020, la société Loomis France, appelante, demande à la Cour de :
vu les articles 9, 11, 31 et 122 du Code de procédure civile ;
vu l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
vu les principes de loyauté des débats et de loyauté dans l'administration de la preuve posés par la Cour de cassation :
vu l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce ;
- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
et, statuant à nouveau :
1) sur l'irrecevabilité de l'action de M. Claude R. :
- le déclarer irrecevable pour défaut d'intérêt et de qualité à agir ;
2) sur l'action en responsabilité pour rupture brutale des relations commerciales établies :
à titre principal :
- dire que la relation commerciale entre la concluante et M. R., puis entre la concluante et la société Métallerie Claude R., était dépourvue de tout caractère établi ;
en conséquence,
- débouter M. R. et la société Métallerie Claude R. de leur demande de condamnation à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce
à titre subsidiaire :
- dire que la société Métallerie Claude R. a commis des fautes d'une particulière gravité justifiant la rupture immédiate de la relation commerciale ;
en conséquence,
- débouter M. R. et la société Métallerie Claude R. de leur demande de condamnation à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce ;
à titre très subsidiaire :
- dire que la société Métallerie Claude R. n'établit pas la durée de la relation commerciale rompue ni son état de dépendance économique vis-à-vis de la concluante ;
- dire que dans l'hypothèse où elle aurait été en situation de dépendance économique vis-à-vis de la concluante, la société Métallerie Claude R. serait en partie responsable de cette situation ;
- dire qu'en choisissant d'organiser l'opacité sur sa situation juridique, économique, sociale, comptable et financière, incompatible avec la nature de l'action engagée, M. R. et la société Métallerie Claude R. ont méconnu les dispositions de l'article 9 du Code de procédure civile et de l'article 6§1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que les principes prétoriens de loyauté des débats et de loyauté dans l'administration de la preuve ;
- dire que les critères pris en compte par la société Métallerie Claude R. pour établir la durée du préavis et calculer l'indemnité sont donc erronés ;
en conséquence,
- fixer la durée du préavis qui aurait dû être respectée par la concluante Loomis ainsi que le montant des dommages et intérêts sans tenir compte du calcul réalisé par la société Métallerie Claude R. ;
3) sur l'action en paiement de factures :
- débouter la société Métallerie Claude R. de sa demande de condamnation de Loomis à lui verser 7 292 euros au titre de factures prétendument impayées ;
4) en tout état de cause :
- débouter M. R. et la société Métallerie Claude R. de leurs demandes ;
- condamner la société Métallerie Claude R. à lui verser la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, dépens en sus.
Par dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 21 février 2020, M. Claude R. et la société Métallerie Claude R. prient la Cour de :
vu l'article L. 442-6, I, 5° du Code de Commerce ;
vu l'article 31 du Code de procédure civile ;
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
rejeté l'exception d'irrecevabilité soulevée par la société Loomis France à l'encontre de M. Claude R. ;
dit que la société Loomis France a rompu de manière brutale et abusive la relation commerciale établie avec la société concluante et
que sa responsabilité est pleinement engagée ;
condamné la société Loomis France à indemniser la société concluante, au titre du préjudice subi, sauf en ce qu'il a limité celui-ci à la somme de 173 520 euros ;
condamné la société Loomis France au titre des factures impayées, sauf en ce qu'il a limité le montant de la condamnation à 5 732,08 euros ;
condamné la société Loomis France à payer aux concluants la somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;
condamné la société Loomis France aux dépens ;
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
considéré que la relation commerciale n'était établie que depuis 14 ans ;
fixé le préavis qui aurait dû être respecté à 18 mois ;
et, statuant à nouveau :
- dire que la relation commerciale était établie depuis 30 ans, au moment de sa rupture brutale par la société Loomis France ;
- dire que la société Loomis France aurait dû respecter un préavis de 30 mois, eu égard à l'ancienneté des relations commerciales et à la dépendance économique de la société concluante ;
- condamner la société Loomis France à leur payer la somme de 289 200 euros HT à titre de dommages et intérêts ;
- condamner la société Loomis France à payer à la société concluante la somme de 7 292 euros TTC au titre des factures impayées ;
y ajoutant :
- condamner la société Loomis France à leur payer la somme de 15 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile, dépens en sus.
SUR CE, LA COUR
Sur la fin de non-recevoir opposée à M. R.
En droit, l'action en responsabilité délictuelle pour rupture brutale de relations commerciales établies appartient à toute personne qui invoque avoir subi un préjudice causé par un tel manquement, ce qui requiert, quand elle est un tiers à la relation commerciale rompue, qu'elle ait subi personnellement le dommage qu'elle invoque, sans quoi elle se trouve dépourvue d'intérêt à agir.
Or, tout comme en première instance, M. Claude R. réclame le paiement de la somme de 289 800 euros hors-taxes de dommages-intérêts au titre de la rupture brutale de relations commerciales établies, alors qu'il est constant que dès avant la rupture alléguée il avait cessé d'exploiter en nom personnel l'activité litigieuse, pour la faire exploiter par la SARL Métallerie Claude R. qui, aux termes des mêmes conclusions, prétend également être créancière des mêmes dommages-intérêts correspondant à la même perte de marge.
Or, les conséquences dommageables de la rupture brutale alléguée des relations commerciales établies, à savoir la perte de marge correspondant au préavis qui aurait dû être respecté, à supposer établis les faits articulés en demande, n'ont pas été personnellement subies par M. R., mais par la société Métallerie Claude R. qui, à la date de la rupture, exploitait seule l'activité affectée, peu important à cet égard que les relations rompues aient débuté avant l'exploitation sous forme sociale et, qu'à cette époque, M. R. y ait été partie.
M. Claude R., qui ne peut pas avoir personnellement subi, du fait du comportement incriminé, le préjudice correspondant aux dommages-intérêts qu'il sollicite pour son compte, doit être déclaré irrecevable en sa demande, faute d'intérêt à agir.
Le jugement sera donc réformé de ce chef.
Sur la responsabilité contractuelle des parties
Les moyens soutenus par la société Loomis France au soutien de son appel relatif aux motifs qu'elle invoque pour justifier la cessation des relations avec la société Métallerie Claude R. qu'elle a décidée, ne font que réitérer sous une forme nouvelle, mais sans justification complémentaire utile, ceux dont le premier juge a connu et auxquels il a répondu par des motifs exacts que la Cour adopte, sans qu'il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail d'une discussion se situant au niveau d'une simple argumentation.
A cet égard, il sera seulement précisé que les prétendues fautes graves de la société Métallerie Claude R. alléguées par la société Loomis France ne sont pas davantage justifiées en appel qu'elles ne l'étaient en première instance.
En effet, ne caractérisent de manquement contractuel grave justifiant, ensemble ou séparément, la rupture sans préavis :
- ni les courriels de Mme V., responsable d'agence Loomis France à Chambéry, relatifs à des dysfonctionnements d'une porte en avril et mai 2012 ;
- ni les courriels relatifs aux incidents ayant affecté à la même période l'agence Lyon-Duvivier, n'étant nullement démontré le caractère inadapté des amortisseurs en cause, alors que l'usure prématurée d'un pivot, à la supposer établie, n'est pas suffisamment grave ;
- ni les incidents ayant affecté le stand de tir de Lyon-Massimi, alors que le prestataire indique, par courriel du 26 avril 2012, avoir expédié au client une lettre recommandée pour couvrir sa responsabilité au titre du devoir de conseil, puisque la réparation commandée de l'avarie n'avait été que partielle au regard de celle préconisée par le professionnel dans son devis et que celui-ci jugeait indispensable ;
- ni le courriel de l'agence Loomis France de Grenoble du 18 avril 2013, qui signale le blocage de la serrure de la porte d'une caisse et demande une intervention urgente, aucun manquement contractuel n'étant établi de ce chef.
Si la société Loomis France prétend en outre que la poursuite de la relation commerciale a été rendue impossible en raison des circonstances et de la gestion par le prestataire d'un incident ayant affecté le stand de tir de Bourg-en-Bresse, le tribunal doit être approuvé d'avoir retenu qu'il n'en était rien.
En effet, si le 31 juillet 2013 la société Loomis a fait réaliser un constat d'huissier ne mentionnant pas que la société Métallerie Claude R. y ait été présente ni appelée, et dans lequel l'officier ministériel a constaté que le rideau de protection anti-retour était endommagés, que le piège à balles situé en arrière n'allait pas assez haut, que des projectiles avaient traversé le mur du local à usage de stand de tir exploité par l'appelante et avaient également endommagé, voire pour certains tirs perforé, le bardage du mur de façade du bâtiment d'un voisin, ce document, impropre à prouver les circonstances de l'accident allégué - en particulier celles des tirs, celles tenant à la compatibilité des munitions employées avec les capacités de l'installation et celle tenant à la cause technique de l'incident - n'établit pas la responsabilité du prestataire qui avait conçu l'installation plusieurs années auparavant.
Si par lettre du 25 juillet 2013, la société Loomis France a reconnu qu'elle s'était aperçue dès le mois de mai 2013 que les plaques en fonte du piège à balles étaient décalées, \"probablement\" à cause de la rupture de soudures, et s'il est reproché au prestataire, requis d'intervenir le 14 mai 2013 aux fins de changement des plaques, d'avoir manqué à le faire à temps, malgré un rendez-vous et une relance du 4 juillet 2013, la société Loomis France indique également que l'incident impliquant le bâtiment voisin est survenu le 23 juillet 2013 lors d'une séance de tir, cette date étant acceptée par la société Métallerie Claude R..
Le fait qu'une demande d'intervention en urgence ait été adressée au prestataire en mai 2013 et lors de la relance alléguée de début juillet 2013 est contesté par la société Métallerie Claude R. et n'est pas démontré, celle-ci expliquant qu'une simple demande de visite sans caractère d'urgence a été formulée et a été traitée comme telle, avec report non fautif du rendez-vous pour des raisons propres à ses contraintes d'organisation et de rentabilité.
La Cour s'interroge également sur le fait que la société Loomis France, tout en sachant que le piège à balles était altéré, ait pu continuer d'exploiter le stand de tir.
Il demeure que la responsabilité de la société Métallerie Claude R. dans le cadre de la maintenance du stand de tir n'est démontrée par aucun élément probant.
Enfin, la lettre de M. R. du 29 juillet 2013 ne présente aucune des outrances alléguées par la société Loomis France et ne permet nullement de justifier la rupture immédiate de la relation commerciale.
S'agissant des factures impayées, réclamées pour un montant de 7 292 euros TTC, le courriel du 7 octobre 2013 du responsable de l'agence Loomis France de Seyssinet, adressé à la fois à M. R. et à M. Rui T., reconnaît le principe de la dette afférentes aux factures de stockage du sas caisse à raison de 200 euros par mois à compter du 15 octobre 2013. Il ne peut donc être soutenu valablement que ces frais de stockage auraient été facturés \"sans l'assentiment\" de la société Loomis France. Les factures produites à ce titre pour la période allant du 15 octobre 2013 au 31 août 2015 s'élèvent à 5 158 euros.
En outre, pour faire valoir que les relations commerciales ont continué après mai 2013, la société Loomis France se prévaut expressément (page 13 de ses conclusions) des factures de 2013 produites par la société Métallerie Claude R., et en particulier de celle de 574,08 euros pour le site de Nangy, correspondant à une intervention du 29 juin 2013 pour une remise en service des commandes dans l'armoire de gestion, avec test de l'activation depuis la centrale d'alarme.
La société Loomis France, qui est donc mal fondée à soutenir qu'elle n'avait pas valablement commandé les prestations correspondantes à cette facture, ne démontre pas l'avoir payée et reste donc la devoir.
Par conséquent la dette de la société Loomis France au titre des factures impayées est justifiée à hauteur de 5 732,08 euros.
Pour le surplus de la demande, les factures ne sont pas produites et le récapitulatif établi par la société Métallerie Claude R. n'est pas probant.
Pour ces raisons, le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné la société Loomis France à payer la somme de 5 732,08 euros et en ce qu'il a rejeté le surplus de la demande.
Sur la responsabilité délictuelle de la société Loomis France pour rupture brutale des relations commerciales établies
S'agissant de la durée de la relation commerciale, la société Métallerie Claude R. et M. Claude R. soutiennent que celle-ci a pris fin en mai 2013, mais qu'elle durait depuis 1984 avec les prédécesseurs de la société Loomis France ; la société Loomis France soutient pour sa part que la relation commerciale a pris fin en juillet 2013, à la suite de l'incident de Bourg-en-Bresse déjà relaté, et qu'elle n'avait pas commencé avant le début de l'année 2005, au moyen qu'il n'y a pas lieu de reprendre au titre de l'ancienneté des relations commerciales établies ce qui est antérieur au jugement du tribunal de commerce du 30 septembre 2004 ayant arrêté le plan de cession de la société Valiance Fiduciaire au bénéfice de la société Securitas Transport de fonds, aux droits de laquelle elle se trouve désormais.
Sur ce point, il résulte du jugement arrêtant le plan de cession que celui-ci n'a pas de plein droit substitué le cessionnaire au cédant dans les relations contractuelles et commerciales que celui-ci entretenait avec M. Claude R..
Il est également établi que les facturations entre celui-ci et le cédant s'étaient interrompues en juillet 2004 pour ne reprendre avec le cessionnaire qu'en janvier 2005.
La société Métallerie Claude R. et M. Claude R., qui fait valoir à juste titre que l'existence d'un contrat cadre n'est pas nécessaire à l'existence de relations commerciales établies, n'allèguent pour autant aucun fait propre à caractériser l'intention de la société cessionnaire Securitas Transports de fonds de poursuivre les relations commerciales initialement nouées avec la société Valiance Fiduciaire.
La circonstance prise de l'existence de factures avant et après le plan de cession arrêté dans le cadre de la procédure collective ne permet pas de retenir que les relations commerciales établies en cause datent d'avant celui-ci, et le fait que le cessionnaire ait été, comme le cédant, le principal client du prestataire ne prouve rien quant à l'intention du partenaire client de poursuivre la relation commerciale.
Le jugement entrepris sera donc réformé sur ce point.
S'agissant de la rupture des relations commerciales établies, en l'espèce, depuis janvier 2005, il est constant que celle-ci a eu lieu dans le courant de l'année 2013.
Cependant, la Cour relève que cette même année a donné lieu à plusieurs facturations pour des interventions de travaux de même nature qu'à l'habitude, postérieures à mai 2013, qui est la date de rupture alléguée par le prestataire, ce qui conduit à écarter cette dernière date comme étant celle de la rupture des relations commerciales établies, et même à une facturation pour une intervention à Seyssinet en octobre 2013, soit postérieurement à juillet 2013, qui est la date de rupture alléguée par le client.
Nul ne voit pourquoi cette intervention d'octobre 2013, relative à la remise en état en atelier du sas de Valence serait ponctuelle et isolée, sans rapport avec les relations commerciales établies.
Il sera donc retenu que la rupture de relations commerciales établies est intervenue en octobre 2013, à l'issue de la dernière intervention facturée pour des travaux, étant rappelé que des facturations ont eu lieu après cette date, mais pour des frais de stockage.
En toute hypothèse, la dépendance économique alléguée n'est nullement caractérisée en l'espèce, d'une part en considération du fait que rien n'a contraint la société Métallerie Claude R. à consacrer à la société Loomis France la part importante de chiffre d'affaires alléguée et, d'autre part, au regard de la fluidité du marché en cause, dont témoigne le rattrapage rapide de chiffre d'affaires de la société Métallerie Claude R. après la rupture, puisque celui-ci est passé de 138 871 euros en 2012 dont 87 046 euros avec la société Loomis France à 55 463 euros en 2013, dont 27 564 euros avec la société Loomis France à 187 482 euros en 2014 et 293 087 euros en 2015.
La durée des relations commerciales établies et les autres circonstances, au moment de la rupture sans préavis fautivement mise en oeuvre par la société Loomis France, conduisent la Cour à retenir que celle-ci aurait dû octroyer un préavis de 8 mois à la société Métallerie Claude R..
S'agissant du préjudice découlant de la brutalité de la rupture, celui-ci peut être appréhendé selon les tableaux de chiffres d'affaires et de marge brute certifiés par l'expert comptable de la société Métallerie Claude R..
Or, la faute de la société Loomis France est sans rapport établi avec la forte baisse de chiffre d'affaires enregistrée en 2012 par rapport à 2011 :
- 447 264 euros de chiffre d'affaires total et 140 861 euros avec la société Loomis France pour l'entreprise C. R. en 2011 ;
- 138 871 euros de chiffre d'affaires total et 87 043 euros avec la société Loomis France pour l'entreprise C. R. en 2012.
Dès lors, la méthode de la moyenne incluant les années antérieures à 2011, présentant des valeurs plus élevées, n'apparaît pas propre à refléter avec certitude la situation qui se serait produite si le préavis de 8 mois avait été respecté à compter du mois d'octobre 2013.
Sur la base de 2012, le chiffre d'affaires mensuel moyen avec la société Loomis France est de 7 253 euros par mois (87 043 : 12 = 7 253,58).
De début 2011 à décembre 2013, incluant les dernières factures de stockage déjà mentionnées, le chiffre d'affaires mensuel moyen avec la société Loomis France est de 7 096 euros (255 468 : 36 = 7 096,33).
Tout en se plaignant de l'insuffisance des justificatifs comptables produits, la société Loomis France évalue pour sa part la moyenne mensuelle de chiffre d'affaires entre janvier 2011 et juillet 2013 à 8 240,90 euros HT et, appliquant le taux annuel moyen de marge brute sur la période, soit 83,7 %, tel qu'indiqué par l'expert-comptable du prestataire, estime à 6 897,60 euros la moyenne mensuelle de marge brute réalisée avec elle par le prestataire.
La Cour estime en définitive, sur la base des éléments certifiés par l'expert-comptable, contre lesquels aucune critique sérieuse n'est formulée, qu'en réalité le préjudice certain ne peut être supérieur à 47 514 euros [ (7096 * 83,7 %) x 8 = 47 514,82 ].
Cette somme sera allouée, par infirmation du jugement entrepris.
Sur les autres prétentions et les frais
Pour le surplus, le jugement, qui a exactement statué, sera confirmé.
Chacune des parties, qui succombe partiellement en appel, conservera la charge de ses dépens d'appel.
En équité, il ne sera pas alloué d'indemnité complémentaire au titre de l'article 700 en appel.
Par ces motifs : LA COUR, Réforme le jugement entrepris en ce qu'il dit que M. Claude R. était recevable en sa demande de dommages-intérêts, et en ce qu'il a condamné la société Loomis France à payer à la société Métallerie Claude R. la somme de 173 520 euros en réparation du préjudice subi, Statuant à nouveau sur ces chefs, Dit que M. Claude R. est irrecevable en sa demande de dommages-intérêts à hauteur de 289 200 euros, Condamne la société Loomis France à payer à la société Métallerie Claude R. la somme de 47 514 euros en réparation du préjudice subi pour rupture brutale des relations commerciales établies, et déboute celle-ci du surplus de sa demande, Pour le surplus, Confirme le jugement entrepris, Y ajoutant, Dit que les parties conserveront la charge de leurs dépens d'appel, Dit n'y avoir lieu à indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile en appel, Rejette toute autre demande.