Cass. com., 7 juillet 2020, n° 19-12.143
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Demandeur :
ABC Food (SARL)
Défendeur :
Speed Rabbit Pizza (SA), Domino's Pizza France (SAS), French Pizza Inc. (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Rapporteur :
Mme Sudre
Avocats :
SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Spinosi et Sureau
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 décembre 2018), la société Speed Rabbit pizza (la société SRP) et la société Domino's pizza France (la société DPF), toutes deux spécialisées dans la vente de pizzas livrées et à emporter, exercent leurs activités à travers un réseau de franchises.
2. La société ABC Food exploite un point de vente à Puteaux en qualité de franchisée sous l'enseigne de la société SRP tandis que la société French Pizza tient deux autres points de vente à La Garenne Colombes et à Puteaux en qualité de franchisée de la société DPF.
3. Reprochant aux sociétés DPF et French Pizza des actes de concurrence déloyale consistant en l'octroi de délais de paiement excessifs et de prêts contraires au monopole bancaire, la société ABC Food les a assignées en cessation de ces pratiques et en paiement de dommages-intérêts. La société SRP est intervenue volontairement à l'instance, au soutien des prétentions de la société ABC Food, et les sociétés DPF et French Pizza ont formé une demande reconventionnelle pour procédure abusive.
Examen des moyens
Sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en ses deuxième, quatrième, septième et huitième branches
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du Code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais, sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en sa sixième branche
Enoncé du moyen
5. La société ABC Food fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes de dommages-intérêts pour acte de concurrence déloyale alors « qu'en ne vérifiant pas si les extraits de comptes annuels de la société French Pizza produits par la société ABC Food ne permettaient pas de vérifier la vraisemblance du tableau démontrant que la société French Pizza avait dépassé les délais légaux de paiement de son franchiseur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382, devenu 1240, du Code civil. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 1382, devenu 1240, du Code civil :
6. Selon ce texte, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
7. Pour écarter l'existence d'un acte de concurrence déloyale résultant du dépassement par la société French Pizza des délais légaux de paiement de son franchiseur, l'arrêt retient que le tableau produit par la société ABC Food, récapitulant chaque année le ratio dette fournisseur-chiffre d'affaires supérieur à 6 %, n'est étayé par aucune pièce comptable.
8. En se déterminant ainsi, sans examiner les extraits de comptes annuels de la société French Pizza, versés aux débats au titre des année 2001 à 2004, afin de vérifier la vraisemblance de la méthode de calcul invoquée par la société ABC Food pour démontrer que la société French Pizza avait bénéficié, de la part de la société DPF, de délais de paiement illicites ayant pour effet de l'avantager déloyalement au détriment des franchisés de la société SRP, et ainsi de porter atteinte à l'attractivité et à la rentabilité et du réseau concurrent exploité par la société SRP, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision.
Portée et conséquences de la cassation
9. En application de l'article 624 du Code de procédure civile, la cassation prononcée sur le bien-fondé de l'action, objet du pourvoi principal, entraîne, par voie de conséquence, celle du chef de dispositif de l'arrêt relatif à la procédure abusive, objet du pourvoi incident, qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi principal, ni sur le pourvoi incident, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 décembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée.