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Décisions

CA Douai, 2e ch. sect. 2, 18 juin 2020, n° 19/01938

DOUAI

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

La Villa Carrée (Sarl)

Défendeur :

Image Jeune du Nettoyage (Sarl)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bedouet

Conseillers :

Mme Cordier, Mme Fallenot

T. com. Lille Métropole, du 20 mars 2019

20 mars 2019

 

Par contrat en date du 21 octobre 2014, la société Image jeune du nettoyage (la société IJN) s'est engagée à effectuer des prestations de nettoyage dans une maison d'hôtes située à [...], exploitée par la société La Villa Carrée.

En fin d'année 2017, la société La Villa Carrée a laissé impayées :

- une facture n° 17090470 en date du 30/09/2017 à hauteur de 536 euros ;

- une facture n° 17100500 en date du 21/10/2017 à hauteur de 3 629,40 euros ;

- une facture n° 17110590 en date du 30/11/2017 à hauteur de 3 008,40 euros ;

- une facture n° 17120645 en date du 31/12/2017 à hauteur de 1 032,41 euros ;

Représentant un total de 8 206,21 euros TTC.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 24 janvier 2018, le conseil de la société IJN a mis en demeure la société La Villa Carrée de procéder au paiement.

En réponse, cette dernière a indiqué qu'elle mettait fin au contrat du 21 octobre 2014.

La société IJN a en conséquence réclamé à la société La Villa Carrée, par l'intermédiaire de son conseil, la somme de 31 410,11 euros correspondant aux factures impayées et au restant dû jusqu'au terme du contrat.

Cette mise en demeure étant restée sans effet, la société IJN a saisi le tribunal de commerce de Lille Métropole afin d'obtenir une ordonnance portant injonction de payer à l'encontre de la société La Villa Carrée.

Par une ordonnance en date du 11 mai 2018, le tribunal de commerce de Lille Métropole a fait droit aux demandes de la société IJN et a enjoint la société La Villa Carrée de lui verser :

- 31 410,11 euros en principal ;

- 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- 40 euros au titre de l'indemnité forfaitaire ;

- les intérêts et les dépens.

Cette ordonnance a été signifiée à la société La Villa Carrée le 20 juin 2018, qui y a formé opposition par courrier en date du 27 juin 2018.

La société IJN a demandé au tribunal de commerce de :

- condamner la société La Villa Carrée à lui payer les sommes suivantes :

* 31 410,11 euros en principal, augmentée des intérêts conventionnels fixés au taux de refinancement de la BCE majoré de 7 points à compter du 24 janvier 2018 ;

* 160 euros pour frais de recouvrement ;

* 5 000,00 euros de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

* 3 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société La Villa Carrée au paiement des entiers frais et dépens ;

- débouter la société La Villa Carrée de l'ensemble de ses demandes ;

- ordonner l'exécution provisoire.

En réponse, la société La Villa Carrée a demandé au tribunal de commerce de :

- débouter la société IJN de l'ensemble de ses demandes ;

- condamner la société IJN à lui payer une somme 1 500 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

- condamner la société IJN à lui payer une somme de 1 000,00 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société IJN aux frais et dépens.

Par jugement rendu le 20 mars 2019, le tribunal de commerce de Lille Métropole a statué en ces termes :

Reçoit la SARL La Villa Carrée en son opposition ; au fond, l'en déboute

Met à néant l'ordonnance d'injonction de payer du 11/05/2018 : le présent jugement s'y substituant

Condamne la société La Villa Carrée à payer à la société IJN la somme de 8.204,31 euros au titre des factures impayées au 31/12/2017, augmentée des intérêts conventionnels fixés au taux de financement de la BCE majoré de 7 points à compter de la première mise en demeure

Condamne la société La Villa Carrée à payer à la société IJN la somme de 9.280 euros pour inexécution de la convention, consécutive à sa dénonciation prématurée

Dit n'y avoir lieu à communication de la comptabilité analytique par la société IJN

Déboute IJN de sa demande d'indemnité pour procédure abusive

Condamne la société La Villa Carrée à payer à la société IJN la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du CPC

Condamne la SARL LA VILLA CARRE aux entiers frais et dépens de l'instance, taxés et liquidés à la somme de 93.79 euros en ce qui concerne les frais de Greffe, en ce compris les frais de l'ordonnance, de signification. D’opposition, du présent jugement et de ses suites

Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Par déclaration du 1er avril 2019, la société La Villa Carrée a relevé appel de cette décision, en ce qu'elle : 'Reçoit la SARL La Villa Carrée en son opposition au fond l'en déboute. Met à néant l'ordonnance d'injonction de payer du 11/05/2018 : le présent jugement s'y substituant Condamne la Société La Villa Carrée à payer à la Société IJN la somme de 8.204,31 euros au titre des factures impayées au 31/12/2017, augmentée des intérêts conventionnels fixés au taux de financement BCE majoré de 7 points à compter de la première mise en demeure Condamne la société La Villa Carrée à payer à la société IJN la somme de 9.280 euros pour inexécution de la convention consécutive à sa dénonciation prématurée Dit n'y avoir lieu à communication de la comptabilité analytique de la société IJN Condamne la société La Villa Carrée à payer à la société IJN la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du CPC'.

PRETENTIONS DES PARTIES

Par conclusions régularisées par le RPVA le 23 mai 2019, la société La Villa Carrée demande à la cour de :

'Dire bien appelé, mal jugé ;

Réformant le jugement dont appel,

Débouter la Société IJN de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

Faisant doit à la demande de la Société La Villa Carrée ;

Fixer l'indemnité due à la Société IJN à la somme de 500,00 euros ;

Condamner la Société IJN à payer au profit de la Société La Villa Carrée une somme de 1.500,00 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Condamner la Société IJN au paiement de la somme de 1.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.'

La société La Villa Carrée expose s'être plainte à plusieurs reprises de ce que les prestations de la société IJN étaient mal réalisées ou n'étaient pas contrôlées, de ce qu'aucun cahier de liaison n'avait été mis en place et de ce qu'aucune fiche de contrôle qualité n'avait été remise.

Elle ajoute que l'état de santé dégradé de sa gérante, Madame Véronique E., victime d'un AVC, ne lui permettait de vérifier la réalité des prestations exécutées. Elle a dû subir les doléances de ses clients, qui se sont plaints de ce que le ménage n'était pas fait.

Une lettre recommandée avec accusé de réception a été adressée en ce sens à la société IJN le 7 décembre 2017.

Il a été mis fin au contrat par La Villa Carrée le 24 janvier 2018. Depuis cette date, aucune prestation de nettoyage n'a été faite par la société IJN.

Dans ces conditions, la société La Villa Carrée est en droit d'opposer à la société IJN l'exception d'inexécution aux fins d'être dégagée de toute obligation de paiement de quelque nature que ce soit.

A titre subsidiaire, au cas où cette exception ne serait pas retenue, il convient d'évaluer à sa juste valeur la réalité du préjudice allégué par la société IJN. Il est donc nécessaire qu'elle verse aux débats sa comptabilité analytique afin de vérifier si au cours de l'année 2018 elle a réalisé une marge bénéficiaire et quelle a été la perte réelle subie.

En tout état de cause, la société La Villa Carrée s'estime en droit d'invoquer à son profit l'article 1152 alinéa 2 du code civil. Elle expose être en difficulté de trésorerie, affirmant que le désamour de sa clientèle est dû aux mauvaises prestations de la société IJN. Elle demande que le montant de la clause résolutoire soit fixé à une somme de 500 euros.

Elle sollicite en outre la condamnation de la société IJN à lui payer une somme de

1 500,00 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, cette dernière ayant refusé sa proposition transactionnelle pour engager une procédure judiciaire, l'obligeant à se défendre et à engager des frais.

Elle plaide qu'il est anormal, compte tenu de cette offre de paiement, que la facture soit augmentée des intérêts conventionnels, fixés au taux de financement de la BCE majoré de 7 points à compter de la première mise en demeure. Il s'agit d'un taux usuraire qui ne peut trouver à s'appliquer au cas d'espèce compte tenu de l'offre de paiement qui a été faite.

Par conclusions régularisées par le RPVA le 7 août 2019, la société Image Jeune du Nettoyage demande à la cour de :

'Vu les articles 1103 et 1231-1 du code civil (anciens 1134 et 1147),

Confirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Lille Métropole le 20 mars 2019 en ce qu'il a condamné la société La Villa Carrée à payer à la société IJN la somme de 8.204,31 euros au titre des factures impayées au 31/12/2017, augmentée des intérêts conventionnels fixés au taux de financement de la BCE majoré de 7 points à compter de la première mise en demeure

Confirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Lille Métropole le 20 mars 2019 en ce qu'il a dit qu'il n'y avait lieu à communication de la comptabilité analytique par la société IJN

L'infirmer pour le surplus

Statuant à nouveau,

Condamner la société La Villa Carrée à payer, en sus des sommes précitées, à la société IJN les sommes suivantes :

- 23.205,90 euros en principal, augmentée des intérêts conventionnels fixés au taux de refinancement de la BCE majoré de 7 points à compter du 24 janvier 2018

- 160 euros pour frais de recouvrement (articles L. 441-6 et D. 441-5 du code de commerce)

- 5 000 euros de dommages et intérêts pour résistance abusive et procédure abusive

- 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Débouter la société La Villa Carrée de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions

Condamner la société La Villa Carrée au paiement des entiers frais et dépens de l'instance avec faculté de recouvrement direct selon les dispositions de l'article 699 du code de procédure civile'

La société IJN argue que les éléments versés aux débats par la société La Villa Carrée ne démontrent absolument pas que la société IJN n'aurait pas ou aurait mal exécuté ses prestations de nettoyage. Les documents communiqués par la société La Villa Carrée à l'appui de ses prétentions sont des notes dont la société IJN n'a jamais eu connaissance.

La lettre du 7 décembre 2017 n'évoque pas la mauvaise exécution des prestations de nettoyage. Par ailleurs, rien ne prouve que cette lettre aurait bien été reçue par la société IJN dans la mesure où l'accusé de réception n'est pas produit.

Le fait que la société La Villa Carrée ait proposé un règlement amiable à hauteur de 8 204,31 euros le 18 avril 2018 ne saurait mettre en échec le fait que la société IJN a droit au paiement de pénalités. Les factures litigieuses n'ont toujours pas été réglées deux ans après leur émission.

Il convient également de faire droit à la demande de condamnation de la société La Villa Carrée au paiement de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement en application de l'article L.441-6 du code de commerce.

Le montant réclamé par la société IJN au titre de la rupture prématurée du contrat est parfaitement démontré et rien ne justifie sa réduction, cette somme ne constituant pas une clause pénale. La demande présentée de ce chef par la société La Villa Carrée ne saurait donc prospérer.

La société La Villa Carrée a essayé de s'opposer au paiement en inventant des motifs fallacieux et en contestant, sans aucune preuve, la qualité des prestations de la société IJN.

Elle a ensuite multiplié les procédures judiciaires pour retarder au maximum le paiement. Son attitude justifie sa condamnation à lui verser des dommages et intérêts pour résistance abusive et procédure abusive.

La cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et des prétentions et moyens des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 16 avril 2020.

SUR CE

I - Sur la demande en paiement

Aux termes des articles 1103 et 1104 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. Ils doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi. Cette disposition est d'ordre public.

Aux termes de l'article 1219 du code civil, une partie peut refuser d'exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l'autre n'exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave.

Aux termes de l'article 1226 du code civil, le créancier peut, à ses risques et périls, résoudre le contrat par voie de notification. Sauf urgence, il doit préalablement mettre en demeure le débiteur défaillant de satisfaire à son engagement dans un délai raisonnable. La mise en demeure mentionne expressément qu'à défaut pour le débiteur de satisfaire à son obligation, le créancier sera en droit de résoudre le contrat.

Lorsque l'inexécution persiste, le créancier notifie au débiteur la résolution du contrat et les raisons qui la motivent.

Le débiteur peut à tout moment saisir le juge pour contester la résolution. Le créancier doit alors prouver la gravité de l'inexécution.

Conformément aux dispositions des articles 6 et 9 du code de procédure civile, il appartient à celui qui se prévaut d'une exception d'inexécution d'alléguer les faits propres à fonder ses prétentions et de les prouver conformément à la loi.

1) Sur les factures impayées

Le contrat signé entre les parties, conclu pour une période de deux ans à compter de sa signature, prévoit que :

- il se renouvelle par tacite reconduction pour la même période, sauf dénonciation par l'une ou l'autre des parties par lettre recommandée, quatre mois avant sa date d'anniversaire ;

- les factures sont adressées le 15 de chaque mois et payables le 30 du même mois ;

- à défaut de règlement d'une ou plusieurs factures, il pourra être résilié par la société IJN à l'expiration d'un délai de 8 jours suivant mise en demeure infructueuse, le solde du contrat restant acquis à la société ;

- un contrôle qualité est effectué une fois par mois par le directeur technique de la société IJN en présence d'un représentant de la société La Villa Carrée, ce contrôle donnant lieu à l'établissement d'une fiche de contrôle qualité ;

- un cahier de liaison, visé par le chef de site dès son arrivée, est établi afin que la communication entre les deux contractants soit permanente et que les remarques et corrections soient apportées au personnel intéressé.

La société La Ville Carrée reconnaît ne pas avoir réglé à la société IJN :

- la facture n° 17090470 en date du 30/09/2017 à hauteur de 536 euros ;

- la facture n° 17100500 en date du 31/10/2017 à hauteur de 3 629,40 euros ;

- la facture n° 17110590 en date du 30/11/2017 à hauteur de 3 008,40 euros ;

- la facture n° 17120645 en date du 31/12/2017 à hauteur de 1 032,41 euros.

Elle se dit en droit de lui opposer l'exception d'inexécution, en faisant valoir que les prestations de nettoyage étaient mal réalisées ou n'étaient pas contrôlées, qu'aucun cahier de liaison n'avait été mis en place et qu'aucune fiche de contrôle qualité ne lui avait été remise.

Elle n'en justifie cependant par aucun élément probant, aucune valeur ne pouvant être donnée au document intitulé 'bloc-notes' qu'elle produit, s'agissant d'une preuve qu'elle s'est constituée à elle-même.

Elle ne verse à la procédure aucun courrier de réclamation et aucune mise en demeure.

Elle produit uniquement une lettre du 7 décembre 2017 adressée à la société IJN par laquelle elle se contente de lui demander le détail, mois par mois, des heures travaillées par chacun des salariés intervenant chez elle, en joignant un acompte de 2 500,00 euros sur les factures en attente, précisant : 'nous espérons que vous comprendrez la situation tant pour votre société que pour La Villa Carrée'.

Elle ne communique pas la lettre par laquelle elle a résilié le contrat conclu, ne permettant pas à la cour de connaître les motifs invoqués.

Il ne peut donc qu'être considéré qu'elle ne pouvait résoudre le contrat, ce que lui a légitimement rappelé la société IJN dans sa mise en demeure du 6 avril 2018. Ce courrier, par lequel l'intimée réclame le paiement des factures impayées ainsi que le montant des prestations à réaliser jusqu'à l'échéance du contrat, doit s'analyser en une résolution du contrat aux torts de la société La Villa Carrée pour non-paiement des factures dues, après la mise en demeure restée infructueuse en date du 24 janvier 2018.

La décision entreprise sera donc confirmée en ce qu'elle a condamné la société La Villa Carrée à payer à la société IJN la somme de 8 204,31 euros au titre des factures impayées au 31 décembre 2017.

2) Sur la clause pénale

Aux termes de l'article 1231-5 du code civil, lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l'exécuter payera une certaine somme à titre de dommages-intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte, ni moindre.

Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire.

Lorsque l'engagement a été exécuté en partie, la pénalité convenue peut être diminuée par le juge, même d'office, à proportion de l'intérêt que l'exécution partielle a procuré au créancier, sans préjudice de l'application de l'alinéa précédent.

Toute stipulation contraire aux deux alinéas précédents est réputée non écrite.

Sauf inexécution définitive, la pénalité n'est encourue que lorsque le débiteur est mis en demeure.

Constitue une clause pénale, susceptible de modification en application de ce texte, la clause d'un contrat par laquelle les parties évaluent forfaitairement et d'avance l'indemnité à laquelle donnera lieu l'inexécution de l'obligation contractée.

En revanche, n'a pas le caractère d'une clause pénale l'indemnité contractuelle de résiliation d'un contrat à durée déterminée qui ne représente que le prix de la faculté de résiliation unilatérale offerte à tout moment au mandant, en-dehors de toute notion d'inexécution.

En l'espèce, le libellé de la clause résolutoire prévue par le contrat démontre que le paiement du solde du contrat par la société La Villa Carrée en cas de résolution à l'initiative de la société IJN pour non-paiement des factures constitue une évaluation forfaitaire du préjudice subi par cette dernière. Il s'agit donc bien d'une clause pénale.

La société La Villa Carrée, qui en sollicite la réduction, ne démontre nullement son caractère manifestement excessif, étant rappelé que la charge de la preuve lui en incombe. Il sera rappelé que cette somme a été librement convenue entre les parties lors de la signature du contrat et n'a pas vocation à compenser la seule perte de marge brute, mais également tous les autres préjudices subis par l'entreprise de nettoyage, du fait de la résiliation du contrat aux torts de la société La Villa Carrée.

En conséquence, celle-ci sera condamnée à verser à la société IJN la somme de 23 205,90 euros à titre de clause pénale. La décision entreprise sera réformée de ce chef.

3) Sur les intérêts et pénalités de retard

Aux termes des dispositions d'ordre public de l'article L 441-6 du code de commerce, les conditions de règlement doivent obligatoirement préciser les conditions d'application et le taux d'intérêt de pénalités de retard exigibles le jour suivant la date de règlement figurant sur la facture ainsi que le montant de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement due au créancier dans le cas où les sommes due sont réglées après cette date. Sauf disposition contraire qui ne peut toutefois fixer un taux inférieur à trois fois le taux d'intérêt légal, ce taux est égal au taux d'intérêt appliqué par la banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage. Dans ce cas, le taux applicable pendant le premier semestre de l'année concernée est le taux en vigueur au 1er janvier de l'année en question. Pour le second semestre de l'année concernée, il est le taux en vigueur au 1er juillet de l'année en question. Les pénalités de retard sont exigibles sans qu'un rappel soit nécessaire.

Les pénalités de retard ainsi que les intérêts de retard pour non-paiement des factures prévues par l'article L. 441-6 du code de commerce sont dues de plein droit, sans rappel et sans avoir à être indiquées dans les conditions générales des contrats.

Les dispositions de l'article L 441-6 du code de commerce étant des dispositions légales supplétives, le juge ne peut minorer le taux d'intérêt et les pénalités dues par application de ce texte.

L'intimée était en droit de demander l'application du taux d'intérêt appliqué par la banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 7 points de pourcentage à compter de l'exigibilité de chaque facture.

Cependant, la société IJN, qui n'a sollicité devant les premiers juges que les intérêts fixés au taux de refinancement de la BCE majoré de 7 points à compter du 24 janvier 2018, ne demande en appel que la confirmation de la décision rendue conformément à sa demande et la cour ne peut statuer ultra petita.

La décision entreprise sera donc confirmée en ce qu'elle a dit que la condamnation de la société La Villa Carrée à payer à la société IJN la somme de 8 204,31 euros au titre des factures impayées au 31 décembre 2017 sera augmentée des intérêts fixés au taux de financement de la BCE majoré de 7 points à compter de la première mise en demeure.

La société IJN sera en revanche déboutée de sa demande tendant à voir assortir des mêmes intérêts de retard le montant alloué au titre de la clause pénale, lequel n'entre pas dans le champ des dispositions précitées de l'article L441-6 du code de commerce puisque la créance n'est pas le prix d'une facture de prestation de service dont le retard en paiement serait sanctionné. Cette somme portera donc intérêts au taux légal à compter du 6 avril 2018, date de la mise en demeure.

4) Sur l'indemnité forfaitaire

Aux termes des dispositions d'ordre public de l'article L 441-6 du code de commerce, tout professionnel en situation de retard de paiement est de plein droit débiteur, à l'égard du créancier, d'une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement, dont le montant est fixé par décret. Lorsque les frais de recouvrement exposés sont supérieurs au montant de cette indemnité forfaitaire, le créancier peut demander une indemnisation complémentaire sur justification.

L'article D441-5 du même code prévoit que le montant de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement prévue au 12ème alinéa du I de l'article L 441-6 est fixé à 40 euros.

L'indemnité forfaitaire est due quand bien même elle ne figurerait que sur la facturation, s'agissant de l'application automatique d'une disposition légale et réglementaire ne nécessitant ni rappel sur la facturation, ni mise en demeure.

Il convient en conséquence de condamner la société La Villa Carrée à payer à la société IJN la somme de 160 euros (4 x 40 euros) au titre de l'indemnité forfaitaire légale.

La décision entreprise, qui a omis de statuer sur cette demande, sera complétée en ce sens.

II - Sur les dommages et intérêts

Aux termes de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

1) Sur la demande de la société La Villa Carrée

La société IJN n'ayant fait qu'exercer une action en justice pour faire valoir ses droits qui ont d'ailleurs été accueillis, il convient de débouter la société La Villa Carrée de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.

La décision entreprise, qui a omis de statuer sur cette demande, sera complétée en ce sens.

2) Sur la demande de la société IJN

Faute pour la société IJN d'articuler les éléments de fait nécessaires au soutien de sa prétention, pour caractériser la faute de la société La Villa Carrée ayant fait dégénérer en abus sa résistance au paiement et de produire des pièces venant étayer sa demande, l'intimée ne caractérisant même pas son préjudice, elle ne peut qu'être déboutée de sa demande.

La décision entreprise sera confirmée de ce chef.

III - Sur les demandes accessoires

1) Sur les dépens

Aux termes des articles 696 et 699 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. Les avocats peuvent, dans les matières où leur ministère est obligatoire, demander que la condamnation aux dépens soit assortie à leur profit du droit de recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont ils ont fait l'avance sans avoir reçu provision.

L'issue du litige justifie de condamner la société La Villa Carrée aux dépens d'appel et de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle l'a condamnée aux dépens de première instance

En conséquence, il convient d'accorder à Maître Laurence d'H. le droit de recouvrer directement ceux des dépens dont elle aurait fait l'avance sans avoir reçu provision.

2) Sur les frais irrépétibles

Aux termes de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

La décision entreprise sera confirmée en ce qu'elle a condamné la société La Villa Carrée à payer à la société IJN la somme de 1 500,00 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société La Villa Carrée, tenue aux dépens d'appel, sera en outre condamnée à verser à la société IJN la somme de 4 500,00 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel, et déboutée de sa propre demande de ce chef.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement rendu le 20 mars 2019 par le tribunal de commerce de Lille Métropole, sauf en ce qu'il a condamné la société La Villa Carrée à payer à la société IJN la somme de 9 280,00 euros pour inexécution de la convention, consécutive à sa dénonciation prématurée ;

Statuant à nouveau de ce seul chef, et y ajoutant,

Condamne la société La Villa Carrée à verser à la société IJN la somme de

23 205,90 euros à titre de clause pénale, avec intérêts au taux légal à compter du 6 avril 2018 ;

Condamne la société La Villa Carrée à verser à la société IJN la somme de 160 euros à titre d'indemnité forfaitaire de recouvrement ;

Déboute la société La Villa Carrée de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Condamne la société La Villa Carrée à payer à la société IJN la somme de

4 500,00 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel ;

Déboute la société La Villa Carrée de sa propre demande de ce chef ;

Condamne la société La Villa Carrée aux dépens d'appel ;

Accorde à Maître Laurence d'H. le droit de recouvrer directement ceux des dépens dont elle aurait fait l'avance sans avoir reçu provision.